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Date :  20060906

Dossier :  IMM-7808-05

Référence :  2006 CF 1059

OTTAWA (Ontario), le 6 septembre 2006

En présence de L'honorable Paul U.C. Rouleau

 

ENTRE :

ROBERTO VASQUEZ ROJAS

Partie demanderesse

et

 

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

Partie défenderesse

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire de la décision de la Section de la protection des réfugiés rendue le 5 décembre 2005 et statuant que la partie demanderesse n’est pas un réfugié au sens de la Convention selon les articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (« LIPR »).

 

[2]               Le demandeur Roberto Vasquez Rojas est âgé de 36 ans et citoyen mexicain.

 

[3]               Son agent persécuteur est un dénommé Francisco Garduno, Secrétaire du transport public du District fédéral. Le demandeur aurait dénoncé la vente illégale, par Garduno et ses subalternes, de permis de concessions de transport public à leurs amis et alliés politiques. D’après la loi, tous les transporteurs ont le droit d’obtenir des permis gratuitement.

 

[4]               Le demandeur travaillait depuis 2002 pour une entreprise de transport en tant que camionneur pour le transport d’ordinateurs au niveau local. Il a tenté de faire ses démarches pour l’obtention d’un permis fédéral afin qu’il puisse transiter partout au pays. C’est alors qu’il a constaté personnellement la corruption qui existe dans l’octroi des permis fédéraux puisqu’on a exigé qu’il verse de l’argent aux employés du Secrétariat afin d’obtenir son permis.

 

[5]               En 2003, le demandeur a alors décidé de former un syndicat des transporteurs publics afin de réclamer le respect des lois du travail et de dénoncer les procédures illégales au secrétariat.

 

[6]               Entre le 5 avril 2005 et le 7 juin 2005, lorsque les démarches de l’inscription du syndicat ont commencé à se concrétiser, le demandeur allègue avoir subi des problèmes l’ayant obligé de quitter son pays.

 

[7]               Le demandeur allègue que les persécutions qu’il a subies étaient sous la forme de menaces, d’une séquestration, d’une tentative d’assassinat, de tortures, d’agressions physiques, de surveillance et d’appels téléphoniques d’agents judiciaires au service de Garduno.

 

[8]               Le 7 juin 2005 il est arrivé au Canada. Il a demandé asile le 10 juin 2005.

 

[9]               Le tribunal a conclu que le demandeur ne s’est pas déchargé de son fardeau de démontrer qu’il a une crainte bien fondée de persécution au Mexique et /ou qu’il pourrait être personnellement soumis à une menace à sa vie ou à un risque de traitement ou peines cruels et inusités.

 

[10]           Premièrement, le tribunal a déterminé que le demandeur n’a pas apporté une preuve claire et convaincante de l’incapacité de l’État du Mexique d’assurer sa protection. Au contraire, la preuve documentaire a convaincu le tribunal qu’il existe un cadre juridique et légal susceptible de protéger les ressortissants du Mexique. Le tribunal conclut alors que le demandeur n’a pas épuisé les recours existants avant de demander la protection internationale.

 

[11]           Interrogé à ce sujet, le demandeur a témoigné qu’il a consulté un avocat qui lui aurait proposé de l’accompagner au Ministère de la Délégation des Plaintes contre les Travailleurs Publics et qu’ils y seraient effectivement allés déposer des plaintes à trois ou quatre reprises entre janvier et avril 2004.

 

[12]           Pourtant le demandeur n’a pas pu expliquer pourquoi il avait omis d’indiquer ce fait dans son formulaire de renseignements personnels (« FRP »). En fait, il a déclaré qu’il a déposé les plaintes lorsqu’il faisait les démarches pour obtenir sa licence et qu’il n’avait pas encore fondé son syndicat. Il a expliqué qu’il n’avait pas de copies des plaintes déposées puisqu’il fallait payer pour en obtenir.

 

[13]           Le tribunal a rejeté ces explications car, selon la preuve, le demandeur est arrivé au Canada le 7 juin 2005 et a signé son FRP le 20 juillet 2005. Il avait donc amplement le temps de faire les ajouts nécessaires à son FRP. De plus, il avait une deuxième occasion lors de l’audience d’apporter les corrections et amendements qu’il jugeait pertinents, ce qu’il n’a pas fait.

 

[14]           Le 5 avril 2005, le demandeur a déposé en P-3 une plainte au Ministère Public de Benito Juarez. Le tribunal n’était pas satisfait du contenu de ce document puisqu’il révélait peu d’information sur les persécuteurs allégués, les agents de la police judiciaire et aucun mot sur le vol d’ordinateurs ou les sévices physiques que le demandeur aurait subis.

 

[15]           Le demandeur a témoigné que le Ministère aurait enregistré sa plainte et lui aurait donné un numéro pour qu’il se présente au bureau de la Délégation pour les plaintes contre « les serviteurs publics » d’Istacalco dans le district fédéral.

 

[16]           Le demandeur a témoigné qu’il ne s’est pas présenté au bureau de la Délégation puisqu’on lui aurait dit qu’on ne l’écouterait pas parce que c’est impossible de déposer une plainte contre Fransisco Garduno. Un peu plus loin dans son témoignage il a ajouté qu’il n’y s’est pas présenté car il avait déjà ses billets d’avion pour le Canada, qu’il savait qu’il partait et que donc la plainte n’aurait pas de suite.

 

[17]           Le demandeur a témoigné que ces informations n’étaient pas inscrites dans son FRP puisqu’il avait peur pour ses enfants et qu’il voulait quitter la ville. Le tribunal n’était pas satisfait des explications du demandeur.

 

[18]           Le demandeur n’était pas non plus capable d’expliquer pourquoi les documents P-3 et P-2 (qui est un rapport circonstancié de la Commission des droits de la personne) comportaient de nombreuses erreurs de dates ou d’absence de sceaux officiels.

 

[19]           Le tribunal est d’avis que le demandeur n’a pas fait assez d’efforts pour rechercher la protection de la police, surtout que l’agent persécuteur n’est pas l’État. Même si le demandeur ne s’est pas présenté à la police par crainte qu’elle soit corrompue, il aurait pu porté plainte dans d’autres bureaux, auprès d’autres instances.

 

[20]           Le demandeur a expliqué qu’il n’a pas demandé la protection dès son arrivée au Canada puisqu’il n’était pas au courant qu’il pouvait demander asile, qu’il avait peur d’être retourné et qu’il attendait des informations de son oncle avant de commencer les démarches. Selon le tribunal, ce comportement ne témoigne pas d’une crainte subjective de la part du demandeur.

 

[21]           Cette demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée en raison du fait qu’il existe une protection étatique adéquate au Mexique dont le demandeur aurait pu se prévaloir.

 

[22]           Premièrement, le tribunal a conclu que le demandeur manque de crédibilité en raison de plusieurs omissions dans son FRP par rapport à son témoignage lors de l’audience.

 

[23]           Deuxièmement, le demandeur n’a pas démontré que la protection étatique est inadéquate au Mexique.

 

[24]           Quant au premier point, soit l’absence de crédibilité, je ne suis pas convaincu, suite à la lecture du FRP, des notes au point d’entrée ainsi que du procès-verbal de l’audience du 27 octobre 2005, qu’il y a effectivement une absence de crédibilité. Je n’ai pu relever de contradictions manifestes ou d’omissions graves entre les récits de ces trois documents. Cependant, quoiqu’il en soit, je rejetterai cette demande de contrôle judiciaire sur la base de la protection étatique adéquate au Mexique.

 

[25]           Dans le procès-verbal de l’audience du 27 octobre, à la page 125 du dossier du tribunal, le tribunal pose la question au demandeur à savoir s’il a déposé de nouvelles plaintes auprès d’autres autorités. Le demandeur a répondu par la négative pour la raison qu’il avait déjà décidé d’abandonner le syndicat et de quitter la ville.

 

[26]           Dans sa décision, le tribunal note que le demandeur aurait pu faire appel au bureau d’enquêtes de la police préventive ou aller chercher de l’aide à d’autres instances au niveau fédéral. De plus, le demandeur n’a pas apporté de preuve convaincante pour supporter le fait qu’il ne pourrait être en sécurité dans une autre ville au Mexique.

 

[27]           Pour toutes ces raisons, cette demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

 


 

JUGEMENT

 

            La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question n’a été soumise pour certification.

 

 

 

« Paul U.C. Rouleau »

Juge suppléant


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-7808-05

 

INTITULÉ :                                       Roberto Vasquez Rojas v. M.C.I.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal, Qc

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 29 août 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT :            ROULEAU J.S.

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 6 septembre 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Lenya Kalepdjian

 

POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Me Alexandre Tavadian

 

POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Lenya Kalepdjian

Avocate

Montréal, Qc

 

POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

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