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Date : 20250115

Dossier : IMM-14913-23

Référence : 2025 CF 79

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 15 janvier 2025

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

KELLY GROBLER

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS ET JUGEMENT

[1] Mme Kelly Grobler (la demanderesse) sollicite le contrôle judiciaire de la décision par laquelle un gestionnaire du programme d’immigration (le GPI) a rejeté sa demande de permis d’études après avoir conclu qu’elle avait fait une présentation erronée sur des faits importants.

[2] La demanderesse est une citoyenne de l’Afrique du Sud. En 2019, elle a obtenu un visa de visiteur temporaire pour entrées multiples valide jusqu’en 2029.

[3] En mars 2023, la demanderesse a présenté une demande de permis d’études au Canada.

[4] En septembre 2023, la demanderesse a reçu une lettre d’équité procédurale l’informant que, après examen de sa demande, il avait été conclu qu’il existait des raisons de croire qu’elle n’avait pas répondu véridiquement à toutes les questions du formulaire, plus particulièrement qu’elle n’avait pas divulgué qu’une déclaration de culpabilité avait été prononcée contre elle en 2014 et que le visa d’entrée aux États-Unis qu’elle avait demandé en 2019 lui avait été refusé.

[5] La demanderesse a répondu à la lettre. Dans sa réponse, elle explique les circonstances entourant la « déclaration de culpabilité » alléguée, qui, dans les faits, a été effacée par la Haute Cour d’Afrique du Sud, division du Cap-Occidental, district du Cap. Par l’effet de la décision de cette cour, la déclaration de culpabilité n’existe plus.

[6] La demanderesse explique également pourquoi on lui a « refusé » un visa d’entrée aux États-Unis. Elle indique que, selon sa compréhension, sa demande a été « annulée » parce qu’elle n’avait pas été en mesure de fournir certains renseignements au début de la pandémie de COVID‑19.

[7] La demanderesse précise que, jusqu’à ce qu’elle reçoive la lettre d’équité procédurale dans le cadre de sa demande de permis d’études, elle ne savait pas que sa demande de visa pour les États-Unis avait été rejetée.

[8] Le GPI a rejeté la demande de la demanderesse au motif qu’elle avait fait une présentation erronée sur des faits importants pour la demande et, conséquemment, il a conclu qu’elle devait être déclarée interdite de territoire.

[9] Devant notre Cour, la demanderesse fait valoir que le GPI a fait abstraction des éléments de preuve qu’elle avait produits en réponse à la lettre d’équité procédurale. Elle soutient que ce dernier a commis une erreur de fait lorsqu’il a conclu qu’elle avait été arrêtée et inculpée en Afrique du Sud et que sa déclaration de culpabilité n’avait pas été effacée.

[10] Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le défendeur) affirme que le GPI a rendu une décision raisonnable à la lumière de la preuve qui lui avait été présentée et que rien ne justifie l’intervention de la Cour.

[11] À la suite d’une directive donnée le 6 novembre 2024, les parties ont eu la possibilité de se faire entendre au sujet de la décision Bhatia c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2024 CF 698, sur laquelle la demanderesse s’est appuyée dans son argumentation orale.

[12] Le défendeur a soutenu qu’il existait une distinction entre les faits de l’affaire Bhatia, précitée, et ceux de l’espèce, et que, de toute façon, cette décision n’était d’aucune utilité pour la demanderesse. En réponse, la demanderesse a avancé que le défendeur tentait d’invoquer un nouveau motif pour justifier le rejet de sa demande.

[13] La décision sur le fond est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, conformément aux directives formulées dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, [2019] 4 RCS 653.

[14] Dans l’examen du caractère raisonnable, la Cour doit se demander si la décision faisant l’objet du contrôle « possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle-ci »; voir Vavilov, précité, au para 99.

[15] Je suis d’accord avec la demanderesse pour dire que la décision ne répond pas à la norme de la décision raisonnable.

[16] La demanderesse a expliqué pourquoi elle avait donné une réponse erronée dans sa demande et a produit les pièces justificatives à sa disposition.

[17] Le GPI a tiré des conclusions de fait qui n’étaient pas étayées par la preuve présentée par la demanderesse en réponse à la lettre d’équité procédurale. Il semble que le GPI n’ait pas tenu compte de cette preuve ou qu’il l’ait mal interprétée.

[18] Le GPI a conclu que la demanderesse avait été arrêtée et inculpée en Afrique du Sud et que la déclaration de culpabilité prononcée contre elle n’avait pas été effacée, deux conclusions qui allaient à l’encontre de la preuve qui lui avait été présentée.

[19] En outre, le GPI n’a pas donné de justification suffisante pour avoir écarté l’explication de la demanderesse selon laquelle elle avait commis une « erreur de bonne foi ».

[20] Je suis d’avis que la conclusion de présentation erronée est déraisonnable, et il s’ensuit que la décision de rejeter la demande de permis d’études de la demanderesse est tout aussi déraisonnable.

[21] Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire sera accueillie, la décision sera annulée et l’affaire sera renvoyée à un autre agent pour nouvelle décision. L’affaire ne soulève aucune question à certifier.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-14913-23

LA COUR accueille la demande de contrôle judiciaire, annule la décision et renvoie l’affaire à un autre agent pour qu’il rende une nouvelle décision. Il n’y a aucune question à certifier.

« E. Heneghan »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-14913-23

INTITULÉ :

KELLY GROBLER c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

CALGARY (ALBERTA)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 5 NOVEMBRE 2024

MOTIFS ET JUGEMENT :

LA JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS :

LE 15 janvier 2025

COMPARUTIONS :

Michael Greene

Navi Dhaliwal

POUR LA DEMANDERESSE

Meenu Ahluwalia

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Sherritt Greene

Avocats

Calgary (Alberta)

POUR LA DEMANDERESSE

Procureur général du Canada

Calgary (Alberta)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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