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Date : 20250113


Dossier : T-1835-21

Référence : 2025 CF 62

[TRADUCTION FRANÇAISE NON RÉVISÉE PAR LA JUGE]

Ottawa (Ontario), le 13 janvier 2025

En présence de madame la juge Furlanetto

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

demandeur

et

RAGOORTHAN MAHENDRAN

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Dans la présente action, le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration [le ministre] sollicite une déclaration de la Cour, conformément au paragraphe 10.1(1) de la Loi sur la citoyenneté, LRC 1985, c C-29 [la Loi], portant que le défendeur, M. Ragoorthan Mahendran, a obtenu sa citoyenneté canadienne par fraude ou au moyen d’une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels. Un tel jugement déclaratoire emporterait la révocation de la citoyenneté du défendeur.

[2] Au moment où le défendeur a prêté le serment de citoyenneté, il était sous le coup d’une ordonnance de probation et avait été accusé et déclaré coupable d’actes criminels en vertu du Code criminel, LRC 1985, c C-46 [le Code criminel]. Nul ne conteste que, s’il avait communiqué ces renseignements à Citoyenneté et Immigration Canada [CIC] (maintenant Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada), il lui aurait été interdit par la Loi de recevoir la citoyenneté ou de prêter le serment de citoyenneté (sous-alinéa 22(1)a)(i) et alinéa 22(1)b) de la Loi). Cependant, il n’a pas informé CIC de l’ordonnance de probation, des accusations ou des déclarations de culpabilité et a indiqué sur ses formulaires de citoyenneté que l’interdiction ne lui était pas applicable.

[3] Selon le ministre, tout au long du processus, le défendeur avait l’intention d’induire les agents de citoyenneté en erreur en omettant de communiquer les renseignements nécessaires, a fait preuve d’aveuglement volontaire quant aux déclarations qu’il a faites et aux conséquences de ces déclarations ou a fait preuve d’insouciance en choisissant de ne pas comprendre l’effet de ses actions.

[4] Le défendeur affirme qu’il n’a pas omis intentionnellement de communiquer les renseignements. Au contraire, au moment où il a présenté sa demande de citoyenneté, il était jeune, sans instruction et ne maîtrisait pas l’anglais. Sa mère et son frère aîné, avec l’aide d’un conseiller, menaient les démarches pour lui. Selon le défendeur, il n’aurait pas lu les formulaires de citoyenneté qu’il a signés et ne savait pas que son casier judiciaire l’empêchait d’obtenir la citoyenneté. De plus, aucun agent de citoyenneté ne l’a informé verbalement de la nécessité de communiquer ces renseignements au cours des démarches.

[5] Selon le défendeur, il incombe au ministre d’établir, pour chacun des éléments du paragraphe 10.1(1) de la Loi, une intention de tromper CIC et il ne s’est pas acquitté de ce fardeau. Je ne suis toutefois pas de cet avis.

[6] Pour les motifs exposés ci-après, je suis d’avis que la preuve établit, selon la prépondérance des probabilités, que le défendeur a fait preuve d’aveuglement délibéré et d’insouciance. Premièrement, il ne s’est pas renseigné et n’a pas demandé les clarifications qu’il savait nécessaires. Deuxièmement, ses déclarations ont trompé les fonctionnaires de la citoyenneté canadienne et lui ont permis d’obtenir la citoyenneté canadienne alors qu’il n’y était pas admissible. À mon avis, ces actions suffisent à établir que le défendeur a obtenu sa citoyenneté canadienne au moyen d’une fausse déclaration ou par fraude, de sorte que le paragraphe 10.1(1) de la Loi s’applique. Par conséquent, l’action sera accueillie.

II. Contexte

A. Dispositions législatives

[7] L’interdiction de recevoir la citoyenneté en raison d’activités criminelles au Canada est énoncée au sous-alinéa 22(1)a)(i) et à l’alinéa 22(1)b) de la Loi, qui sont ainsi libellés :

Interdiction

Prohibition

22 (1) Malgré les autres dispositions de la présente loi, nul ne peut recevoir la citoyenneté au titre des paragraphes 5(1), (2) ou (4) ou 11(1) ni prêter le serment de citoyenneté :

22 (1) Despite anything in this Act, a person shall not be granted citizenship under subsection 5(1), (2) or (4) or 11(1) or take the oath of citizenship

a) pendant la période où, en application d’une disposition législative en vigueur au Canada :

(a) while the person, under any enactment in force in Canada,

(i) il est sous le coup d’une ordonnance de probation,

(i) is under a probation order

[…]

[…]

b) tant qu’il est inculpé pour une infraction prévue aux paragraphes 21.1(1) ou 29.2(1) ou (2) ou pour un acte criminel prévu par les paragraphes 29(2) ou (3) ou par une autre loi fédérale, autre qu’une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions, et ce, jusqu’à la date d’épuisement des voies de recours;

(b) while the person is charged with, on trial for, subject to or a party to an appeal relating to an offence under subsection 21.1(1) or 29.2(1) or (2), or an indictable offence under subsection 29(2) or (3) or any other Act of Parliament, other than an offence that is designated as a contravention under the Contraventions Act;

[8] Lorsqu’une personne obtient la citoyenneté en contravention de ces interdictions, la Loi prévoit que le ministre peut prendre les mesures suivantes, aux conditions énoncées, pour la révoquer :

Révocation par le ministre — fraude, fausse déclaration, etc

Revocation by Minister — fraud, false representation, etc.

10 (1) Sous réserve du paragraphe 10.1(1), le ministre peut révoquer la citoyenneté d’une personne ou sa répudiation lorsqu’il est convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que l’acquisition, la conservation ou la répudiation de la citoyenneté de la personne ou sa réintégration dans celle-ci est intervenue par fraude ou au moyen d’une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

10 (1) Subject to subsection 10.1(1), the Minister may revoke a person’s citizenship or renunciation of citizenship if the Minister is satisfied on a balance of probabilities that the person has obtained, retained, renounced or resumed his or her citizenship by false representation or fraud or by knowingly concealing material circumstances.

(2) [Abrogé, 2017, ch. 14, art. 3]

(2) [Repealed, 2017, c. 14, s. 3]

Avis

Notice

(3) Avant que la citoyenneté d’une personne ou sa répudiation ne puisse être révoquée, le ministre lui envoie un avis écrit dans lequel :

(3) Before a person’s citizenship or renunciation of citizenship may be revoked, the Minister shall provide the person with a written notice that

a) il l’informe qu’elle peut présenter des observations écrites;

(a) advises the person of his or her right to make written representations;

b) il précise les modalités de présentation des observations;

(b) specifies the form and manner in which the representations must be made;

c) il expose les motifs et les justifications, notamment les éléments de preuve, sur lesquels il fonde sa décision;

(c) sets out the specific grounds and reasons, including reference to materials, on which the Minister is relying to make his or her decision; and

d) il l’informe que, sauf si elle lui demande de trancher l’affaire, celle-ci sera renvoyée à la Cour.

(d) advises the person that the case will be referred to the Court unless the person requests that the case be decided by the Minister.

[…]

[…]

Renvoi à la Cour

Referral to Court

(4.1) Le ministre renvoie l’affaire à la Cour au titre du paragraphe 10.1(1) sauf si, selon le cas :

(4.1) The Minister shall refer the case to the Court under subsection 10.1(1) unless

a) la personne a présenté des observations écrites en vertu de l’alinéa (3.1)a) et le ministre est convaincu que :

(a) the person has made written representations under paragraph (3.1)(a) and the Minister is satisfied

(i) soit, selon la prépondérance des probabilités, l’acquisition, la conservation ou la répudiation de la citoyenneté de la personne ou sa réintégration dans celle-ci n’est pas intervenue par fraude ou au moyen d’une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels,

(i) on a balance of probabilities that the person has not obtained, retained, renounced or resumed his or her citizenship by false representation or fraud or by knowingly concealing material circumstances, or

ii) soit des considérations liées à sa situation personnelle justifient, vu les autres circonstances de l’affaire, la prise de mesures spéciales;

(ii) that considerations respecting the person’s personal circumstances warrant special relief in light of all the circumstances of the case; or

b) la personne a fait une demande en vertu de l’alinéa (3.1)b).

(b) the person has made a request under paragraph (3.1)(b).

[…]

[…]

Révocation pour fraude — déclaration de la Cour

Revocation for fraud — declaration of Court

10.1 (1) Sauf si une personne fait une demande en vertu de l’alinéa 10(3.1)b), la citoyenneté de la personne ou sa répudiation ne peuvent être révoquées que si, à la demande du ministre, la Cour déclare, dans une action intentée par celui-ci, que l’acquisition, la conservation ou la répudiation de la citoyenneté de la personne ou sa réintégration dans celle-ci est intervenue par fraude ou au moyen d’une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

10.1 (1) Unless a person makes a request under paragraph 10(3.1)(b), the person’s citizenship or renunciation of citizenship may be revoked only if the Minister seeks a declaration, in an action that the Minister commences, that the person has obtained, retained, renounced or resumed his or her citizenship by false representation or fraud or by knowingly concealing material circumstances and the Court makes such a declaration.

[…]

[…]

Effet de la déclaration

Effect of declaration

(3) La déclaration visée au paragraphe (1) a pour effet de révoquer la citoyenneté de la personne ou la répudiation de la citoyenneté de celle-ci.

(3) A declaration made under subsection (1) has the effect of revoking a person’s citizenship or renunciation of citizenship.

B. Genèse de l’instance

[9] Le défendeur est né au Sri Lanka en 1987. Il est arrivé au Canada en tant que résident permanent en juillet 2003 avec sa mère, sa sœur et ses deux frères.

[10] Le 25 novembre 2007, le défendeur a demandé la citoyenneté canadienne avec sa mère, son frère aîné et sa sœur, et a signé un formulaire de demande de citoyenneté qui a été envoyé à CIC. Il y figurait une attestation indiquant que le défendeur avait lu et compris les interdictions l’empêchant d’obtenir la citoyenneté et qu’elles ne lui étaient pas applicables; qu’il aviserait CIC, avant de prêter le serment de citoyenneté, en cas de changements aux renseignements fournis dans le formulaire, y compris ceux relatifs aux interdictions; et qu’il reconnaissait que, s’il faisait une fausse déclaration ou omettait de communiquer tous les renseignements pertinents pour la demande, il pourrait perdre sa citoyenneté et être accusé sous le régime de la Loi. Le défendeur devait affirmer, dans son formulaire, qu’il n’avait pas été en probation au cours des quatre années précédant la demande, qu’il n’avait pas été déclaré coupable d’un acte criminel au cours des trois années précédant la demande et qu’il n’avait jamais été accusé d’un crime.

[11] Le 15 janvier 2008, le défendeur a été accusé de deux chefs de vol d’une valeur ne dépassant pas 5000 $, une infraction prévue au sous-alinéa 334b)(ii) du Code criminel, et de deux chefs de possession, d’utilisation ou de trafic d’une carte de crédit – authentique, fausse ou falsifiée –, une infraction prévue aux alinéas 342(1)c) et f) du Code criminel. Les accusations concernaient des infractions commises en septembre 2007.

[12] Le 7 mars 2008, le défendeur a été déclaré coupable des accusations portées contre lui. Il a été condamné à 75 heures de service communautaire à rendre dans les quatre mois, à deux ans de probation et à une amende de 400 $.

[13] Le 25 novembre 2008, le défendeur a passé l’examen de citoyenneté, et sa demande de citoyenneté a été approuvée.

[14] Le 16 décembre 2008, le défendeur a été accusé de trois chefs de possession, d’utilisation ou de trafic d’une carte de crédit – authentique, fausse ou falsifiée –, une infraction prévue aux alinéas 342(1)c) et e) du Code criminel, et d’un chef de fraude, une infraction prévue au sous-alinéa 380(1)b)(i) du Code criminel.

[15] Au début de février 2009, le défendeur a reçu par la poste un avis de comparution pour prêter le serment de citoyenneté. L’avis comprenait la date et le lieu de la cérémonie de citoyenneté, une liste des renseignements que le défendeur devait apporter à la cérémonie et un avertissement selon lequel la citoyenneté ne pouvait être obtenue si le défendeur était, entre autres, « sous le coup d’une ordonnance de probation » ou « inculpé […] pour une infraction [au] Code criminel ou une infraction punissable par mise en accusation en vertu d’une loi fédérale ».

[16] Le 19 février 2009, le défendeur a assisté à une cérémonie de citoyenneté, a signé le formulaire Serment ou affirmation solennelle de citoyenneté et a prêté le serment de citoyenneté pour devenir citoyen canadien. Le défendeur n’a pas informé CIC au cours de ces étapes ni au cours des étapes antérieures à la cérémonie, qu’il était sous le coup d’une ordonnance de probation, qu’il était accusé d’une infraction prévue au Code criminel ou qu’il avait fait l’objet de poursuites criminelles. Sur le formulaire Serment de citoyenneté, le défendeur a affirmé qu’il « n’[avait] pas fait l’objet de procédures criminelles ou d’une enquête de l’immigration » depuis qu’il avait fait sa demande de citoyenneté canadienne.

[17] Le 17 décembre 2015, CIC a envoyé au défendeur un avis d’intention de révoquer sa citoyenneté, auquel il a répondu. Le 25 avril 2016, la citoyenneté du défendeur a été révoquée. Toutefois, à la suite de la décision Hassouna c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 472, rendue par notre Cour, la décision de révoquer la citoyenneté a été annulée.

[18] Le 24 janvier 2018, après l’entrée en vigueur de nouvelles dispositions en matière de révocation et de citoyenneté, le ministre a indiqué au défendeur par voie de lettres qu’il avait des motifs de croire que le défendeur avait obtenu la citoyenneté en contravention à la Loi. Le 11 juillet 2018, l’avocat du défendeur a demandé que la procédure de révocation ne soit pas amorcée en raison des conséquences en matière d’immigration pour l’intéressé.

[19] Le 9 octobre 2019, CIC a informé le défendeur que la procédure de révocation prévue au paragraphe 10(3) de la Loi était amorcée. Le 1er décembre 2021, la présente action a été lancée par le dépôt d’une déclaration.

[20] Le ministre a ensuite présenté une requête en jugement sommaire, en faisant notamment valoir que le défendeur avait admis des faits qui, en droit, établissaient qu’il avait obtenu la citoyenneté canadienne au moyen d’une fraude ou d’une fausse déclaration. Dans une décision datée du 9 janvier 2024, publiée sous l’intitulé Canada (Citoyenneté et Immigration) c Mahendra, 2024 CF 30 [Mahendran SJ], la Cour a rejeté la requête du ministre au motif qu’elle ne pouvait conclure qu’en droit, le fait que le défendeur avait signé des documents liés au processus de demande de citoyenneté sans les lire ou en connaître la teneur établit d’office l’aveuglement délibéré ou l’insouciance aux fins de l’application de l’article 10.1 de la Loi. La Cour a conclu que, pour établir l’aveuglement délibéré, le ministre doit aussi établir que « le défendeur avait des soupçons quant au contenu [des] documents (particulièrement le serment [de citoyenneté] écrit comprenant la fausse déclaration) et a par conséquent délibérément choisi de ne pas se renseigner sur son contenu ». De même, en ce qui a trait à l’insouciance, le ministre doit également établir « que le défendeur était conscient du danger ou du risque ». Comme la preuve ne suffisait pas à établir ces éléments, la Cour a conclu que la requête ne pouvait être accueillie et que l’action devait être instruite pour qu’elle ait la possibilité d’entendre de vive voix les témoins du ministre et du défendeur.

III. Question en litige

[21] La seule question en litige dont la Cour est saisie dans la présente action est celle de savoir si le demandeur a démontré, selon la prépondérance des probabilités, que le défendeur a obtenu sa citoyenneté canadienne par fraude ou au moyen d’une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

IV. Témoins au procès

[22] Deux témoins des faits ont témoigné au procès.

A. Témoin du ministre – Mme Neeta Bucktowsing

[23] Le témoin du ministre, Mme Neeta Bucktowsing, est une employée d’IRCC qui compte 19 années d’expérience, dont 15 à titre d’agente de citoyenneté de la région métropolitaine de Montréal.

[24] Dans son rôle d’agente de citoyenneté, Mme Bucktowsing était notamment responsable de l’analyse des demandes de citoyenneté et des documents à l’appui, de la consultation auprès des partenaires, de l’entrevue avec les demandeurs et, depuis 2014, de la décision finale. Elle a indiqué qu’elle avait planifié et organisé environ 800 cérémonies de citoyenneté, et avait notamment procédé à l’identification des demandeurs de citoyenneté, fait signer le formulaire Serment ou affirmation de citoyenneté et agi à titre de modératrice pendant les cérémonies.

[25] Mme Bucktowsing a fourni des renseignements généraux sur le rôle de l’agent de citoyenneté dans les étapes obligatoires préalables à l’obtention de la citoyenneté, notamment : le formulaire de demande de citoyenneté et son approbation; les vérifications en matière de sécurité, d’antécédents criminels et d’immigration; les renseignements transmis au demandeur avant et après l’examen de citoyenneté; et les procédures générales avant et pendant les cérémonies de citoyenneté, y compris en ce qui concerne le serment de citoyenneté.

[26] Mme Bucktowsing a déclaré que les vérifications d’un demandeur ne sont valides que pour un an et que la vérification des antécédents criminels est effectuée par la GRC. Elle a reconnu que la GRC avait procédé à la vérification, dans le cas du défendeur, le 11 avril 2009. Aucune infraction criminelle n’avait été signalée, malgré le fait que le défendeur avait préalablement été déclaré coupable d’infractions prévues au Code criminel. Mme Bucktowsing a souligné les lacunes reconnues dans le processus de vérification qui nécessitaient que le demandeur confirme lui-même ses antécédents criminels.

[27] Mme Bucktowsing a affirmé qu’elle avait l’habitude, d’une part, de rappeler verbalement à tous les demandeurs qui se présentaient à l’examen de citoyenneté de mentionner à l’agent de citoyenneté [traduction] « tout problème avec la police » et, d’autre part, de poser les mêmes questions au sujet des antécédents criminels au cours de l’entrevue individuelle qui a lieu après l’examen. À propos du formulaire Étude de demande de citoyenneté (le FEDC), que l’agent de citoyenneté doit remplir après l’entrevue, elle a confirmé qu’un demandeur doit [traduction] « lire, signer et confirmer qu’il a compris les interdictions figurant sur le formulaire et indiquer qu’elles ne s’appliquent pas à lui ». Elle a également reconnu qu’elle n’avait pas rempli le FEDC du défendeur et n’était pas présente à titre d’agent de citoyenneté lors de l’examen du défendeur. Le défendeur avait probablement eu une entrevue après l’examen, mais elle n’était pas en mesure d’attester ce fait.

[28] Mme Bucktowsing a témoigné au sujet du formulaire Avis de convocation pour prêter le serment de citoyenneté, envoyé aux demandeurs avant la cérémonie de citoyenneté. L’Avis fournit un avertissement supplémentaire pour rappeler aux demandeurs que la citoyenneté canadienne ne peut pas être accordée, ou le serment de citoyenneté ne peut être prêté, si la personne est notamment sous le coup d’une ordonnance de probation, ou est accusée d’un acte criminel prévu par une loi fédérale, et que la citoyenneté peut être révoquée si elle a été obtenue par fraude, fausse déclaration ou dissimulation intentionnelle de faits essentiels. Elle a témoigné au sujet des mesures générales prises lors d’une cérémonie de citoyenneté et de l’obligation pour un agent de citoyenneté de confirmer l’identité des demandeurs, de vérifier les documents et de répéter les questions relatives aux interdictions de citoyenneté avant de permettre aux demandeurs de signer le formulaire Serment de citoyenneté. Sur ce formulaire, les demandeurs doivent apposer une signature distincte pour confirmer qu’ils n’ont pas fait l’objet de poursuites criminelles ou d’une enquête de l’immigration depuis le dépôt de leur demande de citoyenneté.

[29] Mme Bucktowsing a admis qu’elle n’était pas l’agente de citoyenneté responsable de la demande du défendeur et qu’elle n’avait pas assisté à l’examen ou à la cérémonie de citoyenneté du défendeur. Selon elle, la cérémonie dans le cas du défendeur était une [traduction] « cérémonie spéciale » qui avait eu lieu dans une école primaire locale et regroupait un grand nombre de demandeurs ayant prêté le serment de citoyenneté en même temps.

[30] Elle a reconnu la signature du juge ou de l’agent de citoyenneté qui a signé le formulaire Serment de citoyenneté du défendeur. Cependant, aucune explication n’a été donnée quant à savoir pourquoi cet agent n’avait pas témoigné au sujet du déroulement de la cérémonie.

[31] Mme Bucktowsing a reconnu que certains agents de la région de Montréal s’écartaient des procédures énoncées dans les documents de formation quant à la façon de transmettre l’information à l’examen de citoyenneté et à l’entrevue, et quant aux procédures à suivre à la cérémonie de citoyenneté. Toutefois, elle a soutenu que ces changements étaient sans conséquence et que l’esprit des procédures était toujours respecté. Elle a déclaré que l’agent de citoyenneté avait une obligation continue de s’assurer que tous les demandeurs demeuraient admissibles à la citoyenneté tout au long du processus de citoyenneté, en veillant à ce qu’ils soient au courant des interdictions et de l’obligation de communiquer tout changement à leur situation. Mme Bucktowsing a affirmé qu’en raison de cette obligation continue, il n’aurait pas été possible pour quelqu’un d’obtenir la citoyenneté canadienne sans qu’on lui demande verbalement tout au long du processus si les interdictions lui étaient applicables.

[32] Le défendeur n’a pas contesté la crédibilité de Mme Bucktowsing, mais a soutenu que son témoignage n’était pas utile à la Cour, car elle n’a participé personnellement à aucun aspect de son processus de demande de citoyenneté et ne pouvait donc pas témoigner au sujet de l’examen ou de la cérémonie de citoyenneté en question.

[33] Certes, l’absence de preuve directe a une incidence sur ma capacité de discerner ce qui s’est précisément passé lors de l’examen et de la cérémonie de citoyenneté du défendeur, mais le témoignage de Mme Bucktowsing fournit néanmoins des éléments de preuve fiables quant aux procédures habituelles de CIC et aux étapes habituelles du processus de citoyenneté. Par conséquent, j’accorde un certain poids au témoignage de Mme Bucktowsing dans mon analyse, tout particulièrement en ce qui concerne des étapes cruciales du processus de citoyenneté que le défendeur avait oubliées ou dont il avait un souvenir incomplet ou incohérent.

B. Témoin du défendeur – Ragoorthan Mahendran

[34] Le défendeur a témoigné pour son propre compte et a relaté les faits entourant sa demande de citoyenneté, son examen, la cérémonie et le serment de citoyenneté. Dans l’ensemble, son témoignage était souvent vague et il avait du mal à se souvenir de détails concernant le processus de citoyenneté, ses accusations criminelles et le respect de son ordonnance de probation.

[35] Le défendeur a affirmé qu’il n’avait pas lu, compris ou reçu d’instructions concernant le formulaire de demande de citoyenneté. Bien qu’il ait admis avoir signé l’attestation sur le formulaire, il a affirmé qu’il n’avait pas rempli le reste du formulaire, y compris la section du formulaire indiquant que les interdictions prévues par la Loi ne s’appliquaient pas à lui. Cette section a plutôt été remplie par un certain « Visuvalingam », qui avait été embauché par sa famille pour l’aider à remplir les formulaires. Le défendeur a déclaré qu’il n’avait pas communiqué avec M. Visuvalingam pour remplir le formulaire. Sa mère s’en était occupée. Il ne savait pas pourquoi M. Visuvalingam n’avait pas mentionné sa participation dans la section du formulaire qui demandait l’identification des personnes, des entreprises ou des organisations qui avaient aidé à remplir la demande, mais a supposé que M. Visuvalingam ne voulait peut-être pas indiquer qu’il avait été payé pour son aide.

[36] Contrairement au témoignage de Mme Bucktowsing, le défendeur ne se souvenait pas qu’un agent de citoyenneté lui ait rappelé les interdictions, ni avant ni après l’examen. Il ne se souvenait pas non plus que sa famille avait participé à une entrevue avec un agent de citoyenneté après l’examen. Il ne se souvenait pas des détails relatifs à la journée de son examen et a déclaré qu’il était possible qu’il ait passé une entrevue, mais, étant donné qu’une soixantaine de personnes faisaient aussi l’examen, il aurait probablement attendu son tour pendant longtemps et se serait donc souvenu d’avoir passé une entrevue.

[37] Le défendeur a reconnu qu’un avis de convocation avait été envoyé à la résidence familiale avec les détails de la cérémonie de citoyenneté et que l’avis comprenait un avertissement selon lequel la citoyenneté ne pouvait être obtenue si le demandeur était sous le coup d’une ordonnance de probation ou poursuivi pour un acte criminel. Le défendeur a déclaré qu’il ne se rappelait pas avoir lu ce message, et qu’il avait probablement été ouvert et lu par sa mère. Toutefois, ce témoignage était quelque peu incompatible avec une autre affirmation du défendeur selon laquelle il vérifiait le courrier de sa mère à la recherche de tout document gouvernemental se rapportant à ses infractions criminelles.

[38] Bien que le défendeur ait déclaré que sa mère n’était pas au courant de ses premières condamnations au criminel, je conclus que ce témoignage est difficilement conciliable avec d’autres faits liés à l’obligation du défendeur de terminer 75 heures de service communautaire dans les quatre mois suivant son ordonnance de probation. Il est difficile d’imaginer que ses absences prolongées pendant cette période seraient passées inaperçues à la maison et n’auraient pas suscité des questions. Il a également reconnu qu’il était représenté par un avocat pour ses affaires criminelles. On ne sait pas comment et par quels moyens il a retenu les services d’un avocat alors qu’il avait peu de ressources financières et que sa connaissance de l’anglais était limitée.

[39] Le témoignage du défendeur au sujet de la cérémonie de citoyenneté était également incompatible avec les pratiques courantes décrites par Mme Bucktowsing. Le défendeur a déclaré qu’aucun enregistrement officiel ni aucune vérification des pièces d’identité n’avaient été effectués lors de la cérémonie, et que tous les demandeurs avaient prêté le serment de citoyenneté ensemble, sans aucun contrôle quant à savoir qui avait prêté le serment. Le défendeur ne se souvenait pas qu’un fonctionnaire lui ait rappelé les interdictions relatives à l’obtention de la citoyenneté le jour de la cérémonie. Il ne se souvenait pas non plus avoir lu ou signé son formulaire Serment de citoyenneté, même si ses signatures figuraient sur le document portant la même date que sa cérémonie. Il a reconnu qu’il a seulement lu son certificat de citoyenneté et qu’il a remarqué une erreur dans sa date de naissance, erreur qu’il a soulevée auprès d’un agent de citoyenneté pour qu’elle soit corrigée.

[40] Compte tenu des pratiques courantes en vigueur, je conclus qu’il est hautement improbable que le défendeur n’ait reçu aucune instruction verbale lors de la cérémonie de citoyenneté. Le formulaire Serment de citoyenneté d’une seule page comprend trois signatures, toutes datées du jour de la cérémonie : deux affirmations du défendeur (l’une sous la rubrique « IMPORTANT : INTERDICTIONS » par laquelle le défendeur confirme qu’il n’a « pas fait l’objet de procédures criminelles ou d’une enquête de l’immigration depuis [qu’il a] fait [sa] demande de citoyenneté canadienne » et l’autre pour confirmer le serment de citoyenneté), ainsi que la signature de l’agent de citoyenneté qui a été témoin des affirmations. Compte tenu du document, je suis d’avis que le défendeur a signé le formulaire à la date de sa cérémonie devant un agent de citoyenneté.

[41] Dans l’ensemble, je retiens également de la preuve que le défendeur avait des difficultés avec l’anglais lorsqu’il a présenté sa demande de citoyenneté et passé l’examen de citoyenneté. Or, compte tenu des pratiques courantes en place et des obligations continues que l’agent de citoyenneté est tenu de respecter, je suis d’avis qu’il est raisonnable d’inférer qu’à un moment ou un autre au cours du processus de citoyenneté, le défendeur a été informé du fait qu’avoir commis des infractions criminelles pouvait être problématique pour l’obtention de la citoyenneté, même si la teneur de l’interdiction n’a peut-être pas été pleinement comprise.

V. Analyse

[42] Par application du paragraphe 10.1(1) de la Loi, le ministre peut obtenir une déclaration de la Cour si cette dernière est convaincue que le défendeur a obtenu sa citoyenneté par fraude ou au moyen d’une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

[43] Le but général du paragraphe 10.1(1) est de veiller à ce que les personnes qui ont obtenu la citoyenneté en fournissant de faux renseignements ou en dissimulant des renseignements essentiels à l’évaluation de leur admissibilité ne puissent continuer à tirer profit de ce statut : (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Savic, 2014 CF 523 au para 68 [Savic]). Cet objectif est fondé sur l’obligation primordiale qui incombe à l’étranger qui cherche à obtenir la citoyenneté canadienne de communiquer en toute franchise tous les faits essentiels et de répondre véridiquement à toutes les questions au cours du processus de demande de citoyenneté : article 15 de la Loi; voir aussi Canada (Citoyenneté et Immigration) c Modaresi, 2016 CF 185 au para 19 [Modaresi]; Savic, au para 51.

[44] Une omission accidentelle de faits non essentiels n’est pas visée par le paragraphe 10.1(1), pas plus qu’une transgression anodine ou une fausse déclaration faite innocemment qui ne résulte pas d’un aveuglement délibéré : Canada (Ministre de la citoyenneté et de l’immigration) c Schneeberger, 2003 CF 970 au para 26; Savic, au para 57; Modaresi, au para 17. Tant le caractère essentiel du renseignement qu’une certaine forme d’intention sont nécessaires.

[45] En l’espèce, même si le ministre affirme que la preuve établit les trois éléments énoncés au paragraphe 10.1(1) de la Loi, la Cour n’a qu’à conclure à la présence d’un seul de ces éléments pour justifier l’octroi de la déclaration demandée. Comme il est énoncé au paragraphe 11 de l’arrêt Wynter c Canada, 2017 CAF 195 [Wynter], « [l]orsque le législateur utilise d’autres termes, il est présumé avoir eu l’intention de prêter des sens différents à ces termes ». Par conséquent, si la dissimulation intentionnelle de faits essentiels, les fausses déclarations et la fraude exigent chacune un certain degré d’intention, elles ont un sens légèrement différent. J’examine donc chacune d’elles séparément.

A. Dissimulation intentionnelle de faits essentiels

[46] La dissimulation intentionnelle de faits essentiels suppose l’intention d’omettre des faits qui sont essentiels à la détermination de la question fondamentale. S’il n’est pas nécessaire de démontrer que la personne savait ou non que les faits dissimulés étaient essentiels, la Cour doit toutefois être en mesure de conclure, sur le fondement de la preuve ou par déduction raisonnable à partir de celle-ci, que la personne a dissimulé des faits essentiels avec l’intention d’induire en erreur le décideur : Savic, au para 65, citant Canada (Citoyenneté et Immigration) c Rogan, 2011 CF 1007 au para 32 [Rogan].

[47] En l’espèce, nul ne conteste qu’au cours du processus de demande de citoyenneté, le défendeur n’a pas déclaré les faits relatifs à sa criminalité, lesquels sont déterminants lorsqu’il s’agit d’évaluer sa capacité d’obtenir la citoyenneté. Au moment où le défendeur a présenté sa demande de citoyenneté, il avait déjà commis les infractions qui ont mené aux accusations criminelles portées contre lui. Lorsqu’il a passé l’examen de citoyenneté, il avait été déclaré coupable et était sous le coup d’une ordonnance de probation et, au moment de prêter le serment de citoyenneté, il faisait l’objet d’autres accusations criminelles. À chacune des étapes du processus, le défendeur était tenu de déclarer les détails de ses infractions criminelles, qui lui auraient certes empêché d’obtenir la citoyenneté et étaient donc essentielles à la détermination de sa demande. La question qu’il me reste à trancher est donc de savoir si la preuve établit qu’il a dissimulé ces faits essentiels sciemment ou dans l’intention d’induire CIC en erreur.

[48] Le ministre soutient que l’affirmation du défendeur selon laquelle il ignorait qu’il devait déclarer ses infractions criminelles ou que celles-ci l’empêchaient d’obtenir la citoyenneté n’est tout simplement pas crédible. Le ministre souligne l’incohérence entre le témoignage du défendeur - sur ce qui s’est produit le jour de son examen et de la cérémonie de citoyenneté - et celui de Mme Bucktowsing. Il fait également remarquer que, dans l’affidavit du défendeur qui accompagnait la réponse initiale à l’avis de révocation du ministre, le défendeur a fait de fausses déclarations sur l’absence d’accusations criminelles le visant au moment où il a fait son examen de citoyenneté et sur la date de cet examen. Le ministre signale également l’absence d’une explication concernant la réponse initiale. Le ministre affirme que, si le défendeur avait réellement fait une fausse déclaration innocente sur ses formulaires de citoyenneté, il aurait soulevé cet argument tout au long du processus et non pour la première fois dans la modification de sa défense.

[49] Soit, les erreurs contenues dans l’affidavit original du défendeur sèment le doute sur l’exactitude des détails qui y sont exposés, mais à mon avis, il ne s’agit pas là d’une preuve que le défendeur a délibérément dissimulé ses infractions criminelles aux agents et dans ses documents au cours du processus de citoyenneté.

[50] Pour que la Cour soit convaincue de l’intention délibérée du défendeur, il faudrait que la preuve démontre, selon la prépondérance des probabilités, que le défendeur savait et comprenait qu’il était tenu de révéler ses infractions criminelles et, en toute connaissance de cause, qu’il a délibérément omis de les mentionner dans le but de tromper CIC. Je ne suis pas d’accord pour dire que la preuve atteint ce degré.

[51] Comme l’a souligné le défendeur, la preuve en l’espèce est différente de celle présentée dans l’affaire Canada (Citoyenneté et Immigration) c Kljajic, 2020 CF 570 [Kljajic], où des aveux déterminants témoignaient d’une intention directe de dissimuler des renseignements essentiels. Dans la décision Kljajic, la Cour a conclu que le défendeur avait sciemment dissimulé des circonstances importantes pour l’évaluation de sa demande de résidence permanente. Il avait omis des renseignements concernant ses antécédents professionnels, ses lieux de travail et ses adresses de résidence qui auraient mené au rejet de sa demande ou à la tenue d’enquêtes supplémentaires en lien avec sa participation soupçonnée aux activités du ministère de l’Intérieur de la République serbe de Bosnie [le RS MUP]. Contrairement à la situation dans la présente affaire, l’avocat de M. Kljajic avait lui-même déclaré qu’il ne voulait pas que les autorités canadiennes de l’immigration soient au courant du lien entre son client et le MUP RS. En l’espèce, ni le ministre ni le défendeur n’ont présenté de preuve directe permettant de dégager une intention manifeste.

[52] On ne peut pas non plus déduire une telle intention. Je suis d’accord pour dire que le défendeur a été avisé de l’interdiction de recevoir la citoyenneté par les attestations sur les formulaires qu’il a remplis et qu’il s’est fort probablement fait rappeler l’interdiction à l’examen ou à la cérémonie de citoyenneté, conformément aux pratiques habituelles et aux obligations continues des agents de citoyenneté. Or, il ne s’ensuit pas qu’il avait une compréhension suffisamment effective de l’interdiction, de sorte qu’il a dissimulé sciemment ses infractions criminelles. À mon avis, la preuve démontre plutôt que le défendeur ne saisissait probablement pas bien l’interdiction. Il ne maîtrisait pas l’anglais et faisait preuve d’un mépris général pour le processus en n’accordant intentionnellement aucune attention aux détails dans les documents qu’il signait, et ce même s’il était au courant de l’importance des documents pour le processus de citoyenneté dans son ensemble.

[53] À mon avis, il est plus raisonnable de déduire de la preuve que le défendeur, au lieu d’avoir omis intentionnellement des renseignements précis qui étaient déterminants pour ses démarches en vue d’obtenir la citoyenneté dans le but de tromper les agents de citoyenneté, a simplement choisi de ne pas s’informer au sujet des interdictions et des avertissements signalés. S’il l’avait fait, il aurait mieux compris de quoi il retournait et la nécessité de la déclaration.

[54] À mon avis, cette preuve, bien qu’elle soit suffisante pour satisfaire aux autres éléments du paragraphe 10.1(1) de la Loi, n’établit pas que le défendeur avait l’intention de dissimuler des renseignements essentiels.

B. Fausses déclarations

[55] Faire une fausse déclaration suppose une intention d’induire en erreur ou de tromper en présentant des renseignements que l’on sait être faux : Canada (Citoyenneté et Immigration) c Thiara, 2014 CF 220 au para 49; Savic, au para 74. Bien que, de façon générale, d’innocentes faussetés ne font pas entrer en jeu le paragraphe 10.1(1) de la Loi, les fausses déclarations que l’on dit « innocentes » doivent être examinées attentivement, car, comme l’a souligné la Cour, l’aveuglement délibéré ne doit pas être toléré : Modaresi, aux para 16-17, citant Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Phan, 2003 CF 1194 au para 33.

[56] Comme il a été énoncé au paragraphe 50 de la décision Mahendran SJ (voir aussi R c Briscoe, 2010 CSC 13 au para 21; Sansregret c La Reine, [1985] 1 RCS 570 [Sansregret]; R c Jorgensen, [1995] 4 RCS 55) « la doctrine de l’aveuglement délibéré impute une connaissance à une personne qui a des doutes au point de vouloir se renseigner davantage, mais qui choisit délibérément de ne pas le faire ». Au paragraphe 13 de l’arrêt Wynter, la CAF a caractérisé cette notion d’« ignorance délibérée ». En l’espèce, c’est au ministre qu’il incombe d’établir que le défendeur avait des soupçons quant à la teneur des documents qu’il signait, mais qu’il a choisi de ne pas se renseigner.

[57] À mon avis, ces conditions ont été remplies en l’espèce. Même si j’écarte la question de savoir si le défendeur s’est fait rappeler verbalement qu’il devait déclarer ses infractions criminelles, car elles pouvaient constituer un obstacle à l’obtention de la citoyenneté, je ne peux ignorer le fait que le défendeur, qui était un adulte à l’époque, a signé au moins deux formulaires (sa demande de citoyenneté et son serment de citoyenneté) sans se renseigner sur la teneur des affirmations qu’il signait.

[58] En particulier, l’affirmation concernant l’interdiction sur son formulaire Serment de citoyenneté était séparée de son serment de citoyenneté et était visiblement mise en relief sous une rubrique intitulée « IMPORTANT : INTERDICTIONS », comme une confirmation donnée séparément avant que la citoyenneté puisse être conférée.

[59] Bien que le défendeur ait déclaré dans son témoignage ne pas avoir lu le formulaire ni compris ce qui était écrit dans cette section, il a reconnu avoir compris le sens du mot « IMPORTANT » dans l’en-tête de la section sur les interdictions. Ainsi, il aurait dû s’assurer de comprendre ce qui était écrit dans cette section du formulaire avant de le signer (transcription, p 185, ligne 21 - p 185, ligne 3). En effet, lorsqu’on regarde le formulaire d’une page, même d’un coup d’œil rapide, l’en-tête, qui est en majuscules, en caractères plus gros et figure juste au-dessus de la première signature, saute aux yeux.

[60] Comme l’a admis le défendeur, il aurait pu lire et comprendre certains des mots de cette section et demander de l’aide pour comprendre le reste. En omettant de se renseigner, il a fait preuve d’insouciance et a agi contrairement à ce qui est attendu des demandeurs de citoyenneté (transcription, p 189, ligne 30 - p 191, ligne 21; pièce 8, p 89-90) :

[traduction]

Q. Revenons à la transcription de l’interrogatoire préalable, si vous le permettez, M. Spykerman.

[…]

M. Spykerman poursuit :

Q. Bien sûr, oui. Vous n’avez donc pas déclaré vos accusations criminelles, vos déclarations de culpabilité et vos ordonnances de probation parce que vous n’avez pas lu le formulaire, n’est-ce pas?

R. Oui.

Q. Même si vous saviez que vous ne compreniez pas le formulaire?

R. Je n’ai pas compris le formulaire?

Q. Oui.

Et votre réponse est,

R. Ce n’est pas que je n’avais pas compris le formulaire. J’aurais pu, j’aurais pu lire, ou j’aurais pu – certains des mots. Ils n’ont pas – disons – disons que si je ne comprenais pas certains mots, j’aurais pu demander la traduction à quelqu’un ou j’aurais pu demander à quelqu’un de le lire pour moi, mais je ne l’ai pas fait.

Q. D’accord. Et donc vous n’avez pas tout à fait compris le formulaire?

R. Oui.

Q. Et vous saviez que vous ne compreniez pas complètement le formulaire?

R. Oui.

M. KNAPP : Q. Est-ce – maintenez-vous ces réponses, Monsieur?

R. Oui.

[61] Comme l’a décrit le défendeur, il était un adulte agissant comme un enfant qui n’était pas sérieux dans ses actes et qui ne s’inquiétait pas des conséquences (transcription, p 154, lignes 11 à 16). Lorsqu’on lui a posé la même question au sujet de l’« AVERTISSEMENT » qui figurait sur l’avis de convocation envoyé à la résidence familiale, il a admis que, s’il l’avait lu à l’époque, il aurait compris que l’avis visait à transmettre des renseignements importants sur le processus de citoyenneté. Toutefois, il aurait quand même ignoré les renseignements figurant sous l’« AVERTISSEMENT » et n’aurait pas cherché à comprendre la teneur du document, ni fait d’effort pour le faire (transcription, p. 176, lignes 1 à 22).

[62] Je suis d’accord avec le ministre. Le défendeur a fait preuve d’ignorance délibérée en ne s’informant pas davantage au sujet des interdictions et de la teneur de l’affirmation qu’il a faite dans son serment de citoyenneté, alors qu’il pouvait manifestement voir que c’était important et qu’il n’avait pas bien compris. Ce fait suffit pour établir l’aveuglement délibéré et la notion d’intention qu’exige la fausse déclaration au sens du paragraphe 10.1(1) de la Loi.

[63] Cette conclusion suffit à la Cour pour accueillir la présente action. Or, j’examine néanmoins les critères de fraude qui, à mon avis, ont également été établis sur la base de ces faits.

C. Fraude

[64] La fraude est une notion que l’on trouve dans le contexte tant criminel que civil et est généralement définie comme étant « la fausse déclaration intentionnelle ou insouciante, par des paroles ou des agissements, au sujet de faits dont l’effet est d’induire en erreur une autre personne et de lui faire subir une perte » : Savic au para 70. Elle peut prendre la forme d’une fausse déclaration et d’une omission, ou d’un silence dans les cas où il existe une obligation de communiquer des renseignements : Savic au para 70.

[65] La fraude comporte les quatre éléments suivants (Hryniak c Mauldin, 2014 CSC 7 au para 87; Bruno Appliance and Furniture, Inc c Hryniak, 2014 CSC 8 au para 21 [Bruno]) : 1) une fausse déclaration ou une omission faite par le défendeur; 2) une certaine connaissance de la fausseté de la déclaration de la part du défendeur; 3) le fait que la fausse déclaration ou l’omission a amené le demandeur à agir; et 4) le fait que les actes du demandeur ont entraîné une perte. Comme il est énoncé au paragraphe 71 de la décision Savic, l’intention frauduleuse est établie dès lors que l’on conclut à l’insouciance.

[66] Dans le contexte criminel, l’insouciance a été décrite comme « la connaissance d’un danger ou d’un risque et la persistance dans une conduite qui engendre le risque que le résultat prohibé se produise [...] » : Sansregret, au para 22. Alors que l’aveuglement délibéré est fondé sur une omission intentionnelle de se renseigner, la culpabilité dans le cas de l’insouciance se justifie par la prise de conscience du risque et par le fait d’agir malgré celui‑ci : Sansregret, au para 22.

[67] Dans le contexte civil, la Cour d’appel fédérale a décrit l’insouciance comme un « [acte] qui témoigne d’un mépris ou d’une indifférence quant aux conséquences et d’une manière d’agir téméraire ou insouciante » (Canada (Procureur général) c Douglas, 2021 CAF 89 au para 8). La Cour canadienne de l’impôt, quant à elle, la définit comme un énoncé fait par quelqu’un « sans se soucier qu’il soit véridique ou faux » (Garber c La Reine, 2014 CCI 1 au para 328 [Garber], citant Motkoski Holdings Ltd v Yellowhead (County), 2010 ABCA 72 au para 58 [Motkoski]).

[68] En l’espèce, le défendeur connaissait l’importance du processus de citoyenneté et de la franchise dans ses réponses aux formulaires. Il savait qu’en prêtant le serment de citoyenneté, il faisait une déclaration solennelle au pays. En contre-interrogatoire, le défendeur a admis que le fait de signer les formulaires de citoyenneté sans en comprendre la teneur constituait une conduite insouciante (transcription, p 19, ligne 22 – p 192, ligne 11) :

[traduction]

Q. D’accord. Essentiellement, si je peux me permettre, si je peux résumer ce témoignage. Ce que vous dites, c’est que vous avez une fois de plus signé un document sans le comprendre complètement, n’est-ce pas?

R. Oui.

Q. D’accord. Et encore une fois, êtes-vous d’accord avec moi pour dire que le fait de signer quelque chose sans le comprendre constitue un comportement insouciant?

R. Oui.

Q. Particulièrement un formulaire comme le serment ou l’affirmation, qui constitue une affirmation solennelle faite au pays […]

R. Oui.

Q. […] duquel vous devenez maintenant la citoyenneté – un citoyen? Puisqu’obtenir la citoyenneté canadienne est un droit et un privilège extraordinaire, êtes-vous d’accord?

R. Oui.

Q. Et une personne qui demande la citoyenneté se doit de dire la vérité dans sa demande de citoyenneté, n’est-ce pas?

R. Oui.

[69] Le défendeur affirme qu’il a agi de façon négligente. Selon lui, la négligence est différente de l’insouciance et ne suffit pas à satisfaire aux critères d’application du paragraphe 10.1(1) de la Loi. Il invoque le paragraphe 328 de la décision Garber, où la Cour de l’impôt, citant le paragraphe 58 de l’arrêt Motkoski, explique la relation entre l’insouciance et la négligence :

Selon le second volet, il suffit que le demandeur ne savait pas réellement que l’énoncé était faux, pour autant que cet énoncé ait été fait avec insouciance. « Avec insouciance » dans ce contexte signifie que l’énoncé a été fait « sans se soucier qu’il soit véridique ou faux ». « Avec insouciance » ne veut pas seulement dire que l’énoncé a été fait avec « très grande négligence », pas plus qu’il n’a été fait dans un contexte hautement risqué, de façon à améliorer les chances qu’une personne se fie à cet énoncé à son détriment. Comme l’a fait remarquer lord Herschell à l’occasion de l’affaire Derry c. Peek, à la p. 375 : « faire une fausse déclaration par manque de diligence n’équivaut pas à une fraude et en est même très différent, et l’on peut en dire autant d’une fausse déclaration à laquelle on a ajouté foi honnêtement mais pour des motifs insuffisants ». Selon ni l’un ni l’autre de ces deux volets du critère est-il suffisant que le défendeur « aurait dû connaître » la vérité, ou aurait dû être plus prudent et se renseigner davantage; il est nécessaire d’avoir une connaissance réelle de la vérité ou de faire preuve d’une réelle indifférence à l’égard de cette dernière.

[70] Il ressort de ce passage que la négligence s’entend d’un manque de diligence dans l’accomplissement d’un acte. Toutefois, en l’espèce, j’estime que les actes du défendeur ne peuvent être décrits comme un simple manque de diligence.

[71] Comme je le mentionne plus haut, le défendeur a admis ne pas s’être soucié des conséquences. En l’espèce, il n’a pas simplement manqué de diligence dans ses actions, mais il a choisi d’agir sans égards aux conséquences et sans se soucier de savoir si les attestations qu’il faisait étaient vraies ou fausses.

[72] Le défendeur nie avoir agi par choix, mais cet argument ne me convainc pas. À mon avis, on peut raisonnablement déduire de la preuve que le défendeur, qui cherchait à cacher ses accusations criminelles et infractions aux membres de sa famille, avec qui il demandait la citoyenneté, a choisi de ne pas se renseigner au sujet des avertissements et des interdictions dont il était avisé. S’il l’avait fait, il aurait mieux compris la nécessité de communiquer ces renseignements.

[73] De même, à ma connaissance, aucune jurisprudence n’appuie les affirmations du défendeur selon lesquelles il ne peut avoir été indifférent aux conséquences parce qu’il ne les connaissait pas, ou sa conduite ne pouvait être qualifiée de frauduleuse parce qu’il n’était apparemment pas au courant de son obligation de communiquer les renseignements. Je suis d’accord avec le ministre pour dire que le défendeur ne pouvait se protéger en se maintenant dans l’ignorance.

[74] Le défendeur était conscient qu’il ne comprenait pas les détails des documents qu’il signait, mais il comprenait leur importance dans le processus. Ce comportement constitue à mon avis de l’insouciance.

VI. Conclusion

[75] Pour les motifs qui précèdent, je suis d’avis que le paragraphe 10.1(1) de la Loi s’applique et que l’action devrait être accueillie. Un jugement déclaratoire sera rendu au titre du paragraphe 10.1(1) de la Loi.

VII. Demande de certification

[76] Si la Cour ne conclut pas que le défendeur a délibérément dissimulé des faits essentiels au cours du processus de citoyenneté, les parties proposent la question suivante pour certification en application de l’article 10.7 de la Loi :

[traduction]

Lorsqu’il évalue s’il y a lieu de révoquer la citoyenneté d’une personne au titre du paragraphe 10(1) ou du paragraphe 10.1(1) de la Loi sur la citoyenneté, le décideur peut-il conclure que l’insouciance, la négligence ou l’aveuglement délibéré suffit pour établir que l’acquisition ou la conservation de la citoyenneté de la personne ou sa réintégration dans celle-ci est intervenue au moyen d’une fausse déclaration ou par fraude?

[77] Au paragraphe 21 de l’arrêt Nguesso c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CAF 145, la Cour d’appel fédérale a énoncé les exigences relatives à la certification de questions :

[...] une question ne peut être certifiée que si elle est déterminante quant à l’issue de l’appel et transcende les intérêts des parties au litige, de telle sorte qu’elle est de portée générale : Canada (Citizenship and Immigration) v. Liyanagamage (1994), 176 N.R. 4 au para. 4, [1994] A.C.F. no 1637 (QL) (C.A.F.); Varela c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CAF 145 au para. 28, [2010] 1 F.C.R. 129 [Varela]; Lunyamila c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2018 CAF 22 au para. 3, 419 D.L.R. (4e) 566; Sran v. Canada (Citizenship and Immigration), 2018 FCA 16 au para. 3. Par voie de conséquence, la question doit à tout le moins avoir été soulevée et examinée par le juge de première instance. En effet, il sera difficile de prétendre qu’une question est déterminante ou importante si elle n’a pas été débattue en Cour fédérale ou si le juge de cette Cour n’a pas jugé nécessaire de l’examiner : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Zazai, 2004 CAF 89 aux paras 11-12, 318 N.R. 365 [Zazai]; Lai c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2015 CAF 21 au para 4, 467 N.R. 198 [Lai].

[78] La question doit être déterminante, doit avoir été examinée par la Cour fédérale et doit nécessairement découler de l’affaire elle-même (et non découler de la façon dont la Cour fédérale a tranché l’affaire) : Sran c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CAF 16 aux para 3 et 5.

[79] En l’espèce, la question de savoir si la conduite insouciante ou l’aveuglement délibéré au cours du processus de citoyenneté est suffisant pour permettre d’établir que l’acquisition ou la conservation de la citoyenneté de la personne ou sa réintégration dans celle-ci est intervenue au moyen d’une « fausse déclaration » ou par « fraude » est déterminante quant à l’issue de l’appel. Elle transcende les intérêts des parties au litige et est de portée générale pour tous ceux dont la citoyenneté peut être contestée. C’est la question qui était au cœur de la présente action.

[80] Certes, la Cour a déjà conclu que l’aveuglement délibéré peut donner lieu à la révocation de la citoyenneté (Savic, au para 57; Kljajic, au par 95; Rogan, au para 35; Phan, au para 33; Modaresi, au para 17) et que l’insouciance peut emporter une conclusion de fraude (Savic, au para 70-71; Bruno, au para 18). Or, la question de savoir si l’aveuglement délibéré ou l’insouciance est suffisant pour satisfaire aux critères d’application du paragraphe 10.1(1) de la Loi n’a pas été examinée par la Cour d’appel fédérale. Par conséquent, je conclus qu’il s’agit là d’une question certifiable.

[81] La Cour d’appel fédérale n’a pas non plus examiné si une conduite négligente peut relever des éléments constitutifs de la fraude. Toutefois, puisque je n’ai pas conclu que cette question était déterminante quant à l’issue de l’action, je n'ai pas répondu à cette question dans mes motifs. Par conséquent, j’estime qu’elle ne peut faire partie d’aucune question à certifier.

[82] Comme il est énoncé au paragraphe 10 de l’arrêt Lai c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2015 CAF 21 et aux paragraphes 12-13 de l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c Zazai, 2004 CAF 89, un point qui n’a pas à être tranché ou qui n'a pas été déterminé en première instance ne saurait fonder une question dûment certifiée.

[83] En l’espèce, lorsque j’ai examiné la question de la fraude, j’ai conclu que la conduite du défendeur n’équivalait pas à une simple négligence, mais qu’elle répondait plutôt à la définition de l’insouciance. Par conséquent, la question de savoir si la négligence équivaut à de la fraude n’était pas déterminante quant à l’issue de l’action.

[84] Je suis donc d’avis que la question suivante, telle qu’elle est modifiée, devrait être présentée en vue d’être certifiée :

Lorsqu’il évalue s’il y a lieu de révoquer la citoyenneté d’une personne au titre du paragraphe 10(1) ou du paragraphe 10.1(1) de la Loi sur la citoyenneté, le décideur peut-il conclure que l’insouciance ou l’aveuglement délibéré suffit à établir que l’acquisition ou la conservation de la citoyenneté de la personne ou sa réintégration dans celle-ci est intervenue par « fraude » ou au moyen d’une « fausse déclaration »?

VIII. Dépens

[85] Ayant eu gain de cause dans la présente action, le demandeur a droit aux dépens. Si les parties ne parviennent pas à s’entendre sur le montant des dépens, elles disposeront d’un délai de quinze jours à compter de la date du présent jugement pour présenter leurs observations, qui seront limitées à cinq pages chacune.

 


JUGEMENT dans le dossier T-1835-21

LA COUR REND LE JUGEMENT qui suit :

  1. L’action est accueillie.

  2. Par application du paragraphe 10.1(1) de la Loi sur la citoyenneté, la Cour déclare que M. Ragoorthan Mahendran a obtenu la citoyenneté au moyen d’une fausse déclaration ou par fraude.

  3. La question suivante est certifiée :

Lorsqu’il évalue s’il y a lieu de révoquer la citoyenneté d’une personne au titre du paragraphe 10(1) ou du paragraphe 10.1(1) de la Loi sur la citoyenneté, le décideur peut-il conclure que l’insouciance ou l’aveuglement délibéré suffit à établir que l’acquisition ou la conservation de la citoyenneté de la personne ou sa réintégration dans celle-ci est intervenue par « fraude » ou au moyen d’une « fausse déclaration »?

  1. Les dépens sont adjugés au demandeur. Si les parties ne parviennent pas à s’entendre sur le montant des dépens, elles disposeront d’un délai de quinze (15) jours à compter de la date du présent jugement pour présenter leurs observations, qui seront limitées à cinq (5) pages chacune.

« Angela Furlanetto »

Juge

 

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1835-21

 

INTITULÉ :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION c RAGOORTHAN MAHENDRAN

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

MONTRÉAL (QUÉBEC) ET PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 18 JUILLET 2024 (EN PERSONNE), LE 25 JUILLET 2024 (PAR VIDÉOCONFÉRENCE)

 

OBSERVATIONS SUPPLÉMENTAIRES déposéEs :

LE 7 AOÛT 2024 (DEMANDEUR)

LE 16 AOÛT 2024 (DÉFENDEUR)

LE 23 AOÛT 2024 (DEMANDEUR)

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE FURLANETTO

 

DATE DES MOTIFS :

LE 13 JANVIER 2025

 

COMPARUTIONS :

David Knapp

Kevin Spykerman

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Annabel E. Busbridge

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Bertrand Deslauriers Avocats

Avocats

Montréal (Québec)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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