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Date : 20240918


Dossier : T‑1184‑21

Référence : 2024 CF 1470

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 18 septembre 2024

En présence de madame la juge Fuhrer

ENTRE :

ADEIA GUIDES INC. et

ADEIA MEDIA HOLDINGS LLC

demanderesses

et

BCE INC., BELL CANADA,

BELL MÉDIA INC.,

BELL EXPRESSVU SOCIÉTÉ EN COMMANDITE,

NORTHERNTEL, SOCIÉTÉ EN COMMANDITE,

TELEFONAKTIEBOLAGET L M

ERICSSON,

ERICSSON CANADA INC.,

MK SYSTEMS USA INC.,

et MK MEDIATECH CANADA INC

défenderesses

ORDONNANCE ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Dans leur action en contrefaçon de brevet, les demanderesses ont présenté une requête en modification de leur deuxième déclaration modifiée. Les défenderesses, qui nient la contrefaçon et la validité des quatre brevets en litige, s’y sont opposées. Les demanderesses ont eu partiellement gain de cause en faisant ajouter des [traduction] « fournisseurs supplémentaires » en tant que participants à la contrefaçon alléguée dans leur projet de troisième déclaration modifiée : Adeia Guides, Inc c BCE Inc, 2024 CF 942 aux para 6 et 11 [l’ordonnance de modification].

[2] Cependant, les demanderesses n’ont pas eu gain de cause dans le cas des modifications proposées concernant des [traduction] « systèmes supplémentaires » (au sens où ce terme est défini dans l’ordonnance de modification, de pair avec le terme [traduction] « fournisseurs supplémentaires »). Selon le juge adjoint Crinson, les modifications manquaient de faits substantiels à l’appui de la conclusion que les systèmes supplémentaires contrefont les revendications de brevet invoquées et, partant, elles n’avaient aucune chance raisonnable de succès : ordonnance de modification au para 7.

[3] Dans leur appel restreint à l’encontre de l’ordonnance de modification, les demanderesses contestent la notion des [traduction] « systèmes additionnels », soutenant que ceux-ci sont plutôt des composants des systèmes déjà en litige : Télé Fibe, Télé Satellite et Crave TV. Cela étant, disent-elles, le juge adjoint a commis une erreur en concluant qu’il n’y avait pas assez de faits substantiels à l’appui des modifications relatives aux composants. Elles soulignent la conclusion qu’a tirée le juge responsable de la gestion de l’instance précédent, une conclusion confirmée en appel, à savoir que les demanderesses avaient plaidé un nombre suffisant de faits substantiels à l’appui de leurs allégations de contrefaçon concernant les systèmes en litige : Rovi Guides, Inc c BCE Inc, 2022 CF 979 [Rovi Guides] aux para 43‑46.

[4] Les défenderesses ne sont pas d’accord avec les allégations des demanderesses selon lesquelles le juge adjoint n’a pas examiné l’acte de procédure dans son ensemble et n’a pas jugé que les faits plaidés étaient véridiques.

[5] Après avoir examiné les documents liés à la requête des parties et entendu leurs observations de vive voix, je ne suis pas convaincue que le juge adjoint a appliqué un critère juridique erroné ou qu’il a commis une erreur manifeste et dominante en rejetant les modifications liées à ce que l’on appelle les [traduction] « systèmes additionnels » dans l’ordonnance de modification, ou les [traduction] « modifications relatives aux composants », la notion que préfèrent les demanderesses. Pour les motifs qui suivent, la requête par laquelle les demanderesses interjettent appel de l’ordonnance de modification sera rejetée.

[6] Dans les présents motifs je vais continuer de parler des systèmes supplémentaires, plutôt que des modifications relatives aux composants, pour éviter de semer davantage la confusion à ce stade. Comme je vais l’expliquer, rien ne dépend de l’emploi de l’un ou l’autre de ces deux termes.

II. Contexte supplémentaire

[7] L’action des demanderesses a été engagée au nom de Rovi Guides Inc., et TiVO LLC a été ajoutée à titre de seconde demanderesse dans la déclaration modifiée. Les noms des demanderesses ont été changés pour Adeia Guides, Inc. et Adeia Media Holdings LLC, respectivement, dans la deuxième déclaration modifiée.

[8] Les demanderesses affirment qu’il y a eu contrefaçon de quatre brevets canadiens, tous liés à la fourniture d’un accès à des enregistrements et à la présentation de programmes vidéo, ainsi qu’à la réception, au transcodage, à la fragmentation et à la diffusion de contenu. Plus précisément, elles allèguent que les défenderesses Bell ont contrefait les brevets par le truchement de Télé Fibe, Télé Satellite et Crave TV. De plus, disent-elles, les défenderesses Ericsson ont contrefait les brevets par le truchement de la plateforme Mediaroom (aujourd’hui appelée Mediakind).

[9] Les demanderesses font état d’une contrefaçon directe, ainsi que d’une contrefaçon par intention commune, mandat, attribution et incitation à la contrefaçon. La déclaration a survécu à la requête en radiation des défenderesses dans l’affaire Rovi Guides.

[10] Conformément à l’ordonnance non publiée et sous‑jacente du 22 mars 2022 du juge Aalto, responsable à l’époque de la gestion de l’instance [l’ordonnance de 2022], et qui a été l’objet d’un appel fondé sur l’article 51 des Règles dans l’affaire Rovi Guides, les parties ont fourni à la Cour un plan détaillé de communication préalable. Ce plan comportait plusieurs points litigieux, qui allaient être [TRADUCTION] « examinés au cours du processus d’interrogatoire préalable de la manière habituelle ».

III. La norme de contrôle applicable

[11] Pour ce qui est d’un appel d’une ordonnance d’un juge adjoint interjeté en vertu de l’article 51 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, la norme de contrôle applicable est celle qu’a décrite la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Housen c Nikolaisen, 2002 CSC 33 [Housen] aux paragraphes 7‑36. Voir l’arrêt Corporation de soins de la santé Hospira c Kennedy Institute of Rheumatology, 2016 CAF 215 aux paragraphes 63‑65, 79 et 83.

[12] La Cour d’appel fédérale a résumé en ces termes la norme de contrôle applicable en appel qui a été énoncée dans l’arrêt Housen : « les questions de fait et les questions mixtes de droit et de fait sont contrôlées selon la norme de l’erreur manifeste et dominante, tandis que les questions de droit et les questions mixtes de droit et de fait contenant une question de droit isolable sont assujetties à la norme de la décision correcte » : Worldspan Marine Inc c Sargeant III, 2021 CAF 130 au para 48; voir aussi Canada (Procureur général) c Iris Technologies Inc, 2021 CAF 244 au para 33.

[13] Contrairement à la norme de la décision correcte, la norme de contrôle de l’« erreur manifeste et dominante » comporte un degré élevé de retenue. Une erreur manifeste est une erreur évidente, tandis qu’une erreur prépondérante est celle qui a une incidence sur la conclusion du décideur : Mahjoub c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CAF 157 [Mahjoub] aux para 61‑64; voir aussi NCS Multistage Inc c Kobold Corporation, 2021 CF 1395 aux para 32‑33.

IV. Analyse

A. Aucune question de droit

[14] Les demanderesses affirment que le présent appel fait intervenir des questions de droit relativement au fait de savoir si le juge adjoint, en rejetant les modifications relatives aux systèmes supplémentaires, a commis une erreur qui justifie l’infirmation de la décision. Je ne suis pas d’accord. Selon moi, les demanderesses n’ont pas établi que la question soumise à la Cour n’est rien d’autre qu’une question mixte de fait et de droit, assujettie à la norme de l’erreur manifeste et dominante.

[15] Comme l’indique l’arrêt Housen (au paragraphe 36), il peut être difficile de départager les questions de droit et les questions de fait; si le principe juridique n’est pas facilement isolable, il s’agit alors d’une question mixte de fait et de droit, assujettie à un degré élevé de retenue.

[16] À l’audition de la présente requête, les demanderesses ont admis que le juge adjoint avait renvoyé au droit applicable, mais elles font valoir qu’il l’avait incorrectement appliqué. Se reportant à une décision antérieure qu’il avait rendue dans une action parallèle mettant en cause les mêmes demanderesses, le juge adjoint a formulé le critère sous la forme de deux questions : premièrement, les modifications proposées ont‑elles une chance raisonnable de succès? Si ce n’est pas le cas, cela met fin à l’analyse. Si la réponse est oui, la deuxième question est de savoir s’il est plus conforme à l’intérêt de la justice d’autoriser les modifications ou de les rejeter. Voir la décision Adeia Guides, Inc c Vidéotron Ltée, 2024 CF 762 aux para 7‑12.

[17] Aux dires des demanderesses, le juge adjoint n’a pas lu l’acte de procédure dans son ensemble et n’a pas tenu pour avérés les faits allégués. Elles demandent à la Cour d’examiner si le fait d’autoriser ces modifications proposées mènerait à une injustice non indemnisable par une adjudication de dépens et s’il serait conforme à l’intérêt de la justice qu’on les autorise. À mon avis, ces dernières considérations ne surviennent que si l’on répond par l’affirmative à la première question posée, ce qui n’est pas le cas ici.

[18] Je conclus que le présent appel s’articule autour de la manière dont le juge adjoint a interprété les modifications relatives aux systèmes supplémentaires qui sont proposées, et ce, dans le contexte non seulement de la troisième déclaration modifiée, mais aussi de la connaissance qu’il a de l’instance en général à titre de juge responsable de sa gestion : Apotex Inc c Wellcome Foundation Limited, 2003 CF 1229 au para 7. Autrement dit, le juge adjoint a‑t‑il commis une erreur manifeste et dominante en rejetant les modifications relatives aux systèmes supplémentaires qui sont proposées? Comme je vais l’expliquer, je suis d’avis que non.

B. Le juge adjoint a pris en considération l’acte de procédure dans son ensemble

[19] Les demanderesses ne m’ont pas convaincue que le juge adjoint n’a pas pris en considération l’ensemble du projet de troisième déclaration modifiée, et ce, pour trois raisons au moins.

[20] Premièrement, il lui incombe, pendant toute la durée de la gestion de l’instance, de considérer les actes de procédure comme un tout afin de s’assurer qu’ils « cernent les questions en litige avec une précision suffisante pour assurer la saine gestion et l’équité de l’instruction et des phases préparatoires à l’instruction » : Mancuso c Canada (Santé nationale et Bien‑être social), 2015 CAF 227 au para 18.

[21] Deuxièmement, il est présumé que le juge adjoint a pris en considération les dossiers de requête des parties, y compris le projet de troisième déclaration modifiée, à défaut d’une preuve contraire évidente : Housen, précité au para 46; Hennessey c Canada, 2016 CAF 180 au para 9; Millennium Pharmaceuticals Inc c Teva Canada Limitée, 2019 CAF 273 [Millennium] au para 11. L’analyse du juge adjoint (au paragraphe 6) commence comme suit : [TRADUCTION] « [l]e projet d’acte de procédure modifié, considéré dans son ensemble », et les demanderesses ne m’ont pas convaincue qu’il n’a pas pris en considération la totalité de la troisième déclaration modifiée.

[22] Troisièmement, et en accord avec le deuxième point qui précède, le juge adjoint a autorisé certaines des modifications proposées, c’est‑à‑dire celles concernant les fournisseurs supplémentaires.

C. Le juge adjoint a considéré les faits tels qu’ils ont été plaidés

[23] Je ne suis pas non plus convaincue que le juge adjoint n’a pas considéré comme véridiques les faits plaidés dans la troisième déclaration modifiée.

[24] Les demanderesses soutiennent à cet égard que le juge adjoint a commis une erreur dans la manière de caractériser les systèmes supplémentaires lorsqu’ils sont des composants des systèmes en litige.

[25] Pendant l’interrogatoire préalable, les demanderesses ont été informées de l’existence des composants Mediaroom Reach [MRR], Video Storage and Processing Platform [VSPP] et Scotty, qu’elles souhaitent maintenant ajouter à la troisième déclaration modifiée. Lorsqu’elles ont tenté de poser des questions sur ces trois composants, elles se sont heurtées à des refus.

[26] Pour ce qui est de la requête des demanderesses en vue d’obliger à répondre aux questions rejetées, le juge adjoint a décrété qu’il fallait qu’elles plaident les composants avant de pouvoir poser plus de questions, d’où les modifications relatives aux systèmes supplémentaires qui sont proposées. Je signale qu’à l’audition de la présente requête, les demanderesses ont confirmé qu’elles n’ont pas encore conclu une série de questions de suivi.

[27] Les demanderesses affirment que les modifications relatives aux systèmes supplémentaires qui ont été refusées n’ajoutent pas de causes d’action, de revendications de brevet, de systèmes ou de parties qui seraient nouveaux; elles comportent plutôt des faits supplémentaires qui visent à étayer les causes d’action. Il est illogique, disent-elles, de conclure qu’il n’y a pas assez de faits substantiels concernant les systèmes supplémentaires parce que ceux‑ci sont des composants de systèmes déjà en litige, et que la Cour a conclu, à deux reprises, que les causes d’action reposent sur des faits substantiels suffisants (soit l’ordonnance de 2002 et l’affaire Rovi Guides). En bref, soutiennent-elles, des faits supplémentaires ne peuvent pas faire en sorte que des faits substantiels suffisants deviennent insuffisants.

[28] Les demanderesses soutiennent en outre qu’étant donné que la deuxième déclaration modifiée faisait déjà référence à Mediaroom et à MediaFirst en tant que composants de Télé Fibe (avec les présumées contrefaçons détaillées dans les annexes jointes à la déclaration), les composants supplémentaires de Télé Fibe, soit MRR et VSPP, sont incorporés dans les faits substantiels que la Cour a jugé suffisants. Dans le même ordre d’idées, Scotty est un composant de Crave TV.

[29] Les défenderesses soutiennent qu’aucun fait substantiel ne lie les modifications relatives aux systèmes supplémentaires qui sont proposées aux présumées contrefaçons et que, de ce fait, le juge adjoint n’a commis aucune erreur manifeste et dominante. Il ne suffit pas, disent‑elles, de souligner la mention existante des composants Mediaroom et MediaFirst comme un motif suffisant pour ajouter MRR et VSPP, parce que MediaFirst n’a jamais été commercialisé et, de ce fait, les présumées activités contrefaisantes, jusqu’à présent, se rapportent toutes à Mediaroom (pour ce qui est du moins de Télé Fibe).

[30] Je conviens avec les défenderesses que le juge adjoint n’a commis aucune erreur manifeste et dominante, et ce, pour trois raisons au moins.

[31] Premièrement, le juge adjoint a expressément tenu compte (au paragraphe 6) de [TRADUCTION] « la présomption selon laquelle les faits plaidés susceptibles d’être prouvés sont véridiques ».

[32] Deuxièmement, il a reconnu (au paragraphe 4) que la requête des demanderesses en vue de faire modifier la deuxième déclaration modifiée avait pour but d’ajouter les systèmes supplémentaires MRR, VSPP et Scotty, [TRADUCTION] « en tant que composants de présumés systèmes contrefaisants ». À mon avis, la notion des [TRADUCTION] « systèmes supplémentaires » n’est pas incompatible avec les modifications applicables, telles qu’elles sont actuellement libellées dans le projet de troisième déclaration modifiée. Par exemple, ce n’est que dans un cas seulement que l’un des trois composants – Scotty – est expressément mentionné comme un [TRADUCTION] « composant de Crave TV » (c.‑à‑d. à l’alinéa 43A.a qui a été rejeté). Dans d’autres paragraphes rejetés, MRR et VSPP sont décrits comme des plateformes et des produits. De plus, les paragraphes 45A, 45B et 45C, qui ont été autorisés et qui sont introduits par la rubrique [TRADUCTION] « D. Composants de Télé Fibe, Télé Satellite et Crave TV », ne font aucune mention de MRR, de VSPP ou de Scotty.

[33] Troisièmement, le juge adjoint a conclu ce qui suit (au paragraphe 7) : [TRADUCTION] « aucune précision n’est fournie à part l’acte de procédure concernant ces systèmes supplémentaires que les défenderesses ou la Cour pourraient examiner pour vérifier tout fait substantiel ». [Non souligné dans l’original.] Je conclus que cet énoncé n’est pas compatible avec le sentiment qu’a exprimé le juge Aalto, responsable à l’époque de la gestion de l’instance, dans l’ordonnance de 2022 (à la page 6) : [traduction] « [i]l serait toutefois avantageux pour Rovi de préciser quelles autres fonctionnalités constituent de la contrefaçon sans ajouter des centaines de pages de précisions supplémentaires ».

[34] Je comprends fort bien l’agacement que ressentent les demanderesses face à la situation sans issue dans laquelle elles croient se trouver en tentant de se conformer aux directives de juges responsables de la gestion de l’instance qui sont affectés à leur action.

[35] Cela dit, les défenderesses sont en droit de connaître la preuve qu’elles doivent réfuter. À leur avis, et conformément à la décision du juge adjoint dans l’ordonnance de modification, décision qui, à mon avis, ne comporte pas d’erreur susceptible d’infirmation, aucune précision ne leur permet de lier les modifications relatives aux systèmes supplémentaires aux faits substantiels sur lesquels se fondent les demanderesses.

[36] Les demanderesses répliquent qu’étant donné que les annexes jointes à la déclaration décrivent la contrefaçon sans faire référence à des composants précis (et elles ont été admises comme étant suffisamment détaillées dans l’ordonnance de 2022), elles ne devraient pas être tenues de les modifier juste pour établir les modifications refusées (ou, d’ailleurs, toute autre modification semblable); autrement dit, les annexes sont déjà conformes à un caractère substantiel accepté. Toutefois, ce caractère substantiel accepté s’appliquait dans le contexte de Mediaroom, MediaFirst n’ayant pas été commercialisé, comme il est indiqué dans la déclaration (et la deuxième déclaration modifiée).

[37] En fin de compte, je ne suis pas convaincue que le juge adjoint a commis dans ce cas‑ci une erreur manifeste et dominante quelconque. J’ajoute que la brièveté de l’ordonnance de modification en soi fait en sorte qu’on ne peut y rattacher cette thèse.

[38] La Cour d’appel fédérale indique que, en appel, l’examen minutieux et la synthèse de données complexes en motifs brefs et compréhensibles ne seront pas automatiquement interprétés comme une mauvaise compréhension de principes juridiques ou comme une application erronée du droit aux faits : Millennium, précité au para 9, citant South Yukon Forest Corp c Canada, 2012 CAF 165 au para 49; Mahjoub, précité au para 69. Autrement dit, « [l’]examen de l'erreur manifeste et dominante ne tient pas compte des questions de forme et va au cœur de ce que le tribunal de première instance a fait » : Millennium, au para 10.

[39] De plus, « une non‑mention dans les motifs ne mène pas nécessairement à une conclusion d’erreur manifeste et dominante » : Mahjoub, précité au para 66. Il peut être indûment réducteur de mettre l’accent sur ce qu’une décision ne dit pas, aurait pu dire ou aurait dû dire différemment (c.‑à‑d. les systèmes par opposition aux composants), suivant les circonstances. L’un des objectifs visés par les cours d’appel est d’effectuer un examen global, dynamique et équitable de la décision rendue en première instance : Apotex Inc c Eli Lilly and Company, 2018 CAF 217 au para 97, citant Pfizer Canada Inc c Teva Canada Limited, 2016 CAF 161 aux para 68‑69.

V. Conclusion

[40] Pour les motifs qui précèdent, l’appel des demanderesses à l’encontre de l’ordonnance de modification sera rejeté.

[41] Maigre consolation peut‑être, je signale que l’ordonnance de modification n’a pas été rendue sous réserve de tout droit que ce soit, ce qui veut dire que, dans les circonstances où les refus sont fondés sur un manque de précisions, rien n’empêche les demanderesses de tenter de nouveau leur chance avec des modifications reformulées.

[42] Pour ce qui est des dépens, les parties ont exprimé leur accord avec l’adjudication d’une somme forfaitaire de 2 000 $ à la partie gagnante, indépendamment de l’issue de la cause et payable de la manière habituelle (c’est-à-dire pas sur-le-champ). J’exerce donc mon pouvoir discrétionnaire et j’adjuge aux défenderesses des dépens d’un montant de 2 000 $, indépendamment de l’issue de la cause et payables par les défenderesses de la manière habituelle.



COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑1184‑21

 

INTITULÉ :

ADEIA GUIDES INC. et ADEIA MEDIA HOLDINGS LLC c BCE INC., BELL CANADA, BELL MÉDIA INC., BELL EXPRESSVU SOCIÉTÉ EN COMMANDITE, NORTHERNTEL, SOCIÉTÉ EN COMMANDITE, TELEFONAKTIEBOLAGET L M ERICSSON, ERICSSON CANADA INC., MK SYSTEMS USA INC., et MK MEDIATECH CANADA INC

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 26 JUILLET 2024

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LA JUGE FUHRER

 

DATE DES MOTIFS :

LE 18 SEPTEMBRE 2024

 

COMPARUTIONS :

Sana Halwani

Jim Lepore

Dan Malone

Amber Blair

 

POUR Les demanderesses

 

Steven Tanner

Edwin Mok

Hannah Mirsky

 

POUR Les défenderesses

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lenczner Slaght LLP Barristers

Toronto (Ontario)

 

POUR Les demanderesses

 

McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Toronto (Ontario)

POUR Les défenderesses

 

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