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Date : 20031008

Dossier : T-754-01

Référence : 2003 CF 1174

Montréal (Québec), le 8 octobre 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE PROTONOTAIRE RICHARD MORNEAU

ENTRE:

                                                    BAUER NIKE HOCKEY INC.

                                                                                                                                   demanderesse/

                                                                                                       défenderesse reconventionnelle

                                                                             et

                                                                 PAUL REGAN

                                                                                                                                          défendeur/

                                                                                                              demandeur reconventionnel

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                La Cour est saisie de deux requêtes portant sur des questions demeurées en suspens lors de l'interrogatoire préalable des représentants des parties. L'une est présentée par la demanderesse et défenderesse reconventionnelle (la demanderesse) et l'autre, par le défendeur et demandeur reconventionnel.


CONTEXTE

[2]                Le litige concerne le brevet canadien no 2,219,072 (le brevet 072), propriété du défendeur, lequel porte sur un maillot muni d'un protège-cou intégré destiné aux joueurs de hockey.

[3]                La demanderesse prétend que le brevet 072 est invalide pour divers motifs.

[4]                Le défendeur rejette cette prétention, et il allègue dans une demande reconventionnelle que trois des produits de la demanderesse contrefont le brevet.

Le droit en matière de questions posées dans le cadre d'un interrogatoire préalable

[5]                Comme le juge MacKay l'a déclaré dans la décision Sydney Steel Corp. c. Omisalj (Le), [1992] 2 C.F. 193, à la page 197 :

   (...) [L]e critère relatif au bien-fondé d'une question posée dans le cadre d'un interrogatoire préalable (...) est de savoir si les renseignements sollicités par une question peuvent être pertinents aux points qui, au stade de l'interrogatoire préalable, sont litigieux dans les actes de procédure déposés par les parties.


[6]                En dépit de ce large énoncé de principe, toutefois, il est des limites à la portée d'un interrogatoire préalable, notamment celle selon laquelle il n'y a pas lieu de permettre des questions de grande portée tenant de la nature d'un interrogatoire à l'aveuglette (voir la décision Reading & Bates Construction Co. c. Baker Energy Resources Corp. (1988), 24 C.P.R. (3d) 66 (C.F. 1re inst.), à la page 72).

[7]                J'évaluerai donc le bien-fondé des questions posées et des documents exigés en tenant compte de ce principe.

Analyse

I.           Requête du défendeur

[8]                Je vais d'abord me prononcer sur la requête du défendeur.

[9]                Relativement à cette requête, seule la question 226 demeure en suspens; elle porte sur des montants versés par la demanderesse Bauer à un tiers, DuPont Canada Inc. (DuPont).


[10]            Bauer a déposé la licence qui la lie à DuPont quant à la demande de brevet présentée par DuPont concernant un maillot de hockey muni d'un protège-cou. Le maillot de hockey de DuPont décrit dans la demande de brevet possède des caractéristiques semblables à celles que M. Regan a communiquées à Bauer. Le contrat de licence entre Bauer et DuPont prévoit que Bauer verse à DuPont une redevance de cinquante cents par article vendu. M. Regan aimerait savoir si Bauer a effectivement payé des redevances à ce jour, et le cas échéant, quel en est le montant.

[11]            Puisqu'elle allègue que l'invention du brevet en litige était évidente, la demanderesse soulève du fait même la question du succès commercial (voir James River Corp. of Virginia c. Hallmark Cards, Inc. (1997), 72 C.P.R. (3d) 157, aux p. 163 - 164). Comme la question 226 a trait au succès commercial, il faut y répondre.

[12]            Les dépens de cette requête suivront l'issue de la cause.

II.         Requête de la demanderesse

[13]            Dans cette requête, les questions sur lesquelles la Cour doit se prononcer sont regroupées en quatre catégories que j'examinerai à tour de rôle.

Catégorie 1

[14]            La question 1177-1180, la seule de cette catégorie, porte sur les nom et adresse des personnes qui ont joué au hockey avec le défendeur en 1997 et 1998.

[15]            Au cours de l'interrogatoire préalable, le défendeur a avoué qu'il portait un échantillon de son maillot lors d'une de ses parties de hockey. Il a toutefois été incapable de se rappeler la date exacte de cette partie.

[16]            Si M. Regan a divulgué son maillot de protection plus d'un an avant le dépôt de la demande du brevet 072, le 27 octobre 1997, ce fait peut constituer un motif d'invalidité du brevet.

[17]            Le brevet en litige ne serait certainement pas invalide du fait d'une divulgation du maillot survenue en 1997 ou 1998. Toutefois, comme les coéquipiers du défendeur semblent être demeurés essentiellement les mêmes au cours des ans, il est raisonnable de croire que l'un ou plusieurs d'entre eux pourraient se rappeler avoir vu le maillot plus d'un an avant la date du dépôt de la demande du brevet en litige.

[18]            En conséquence, le défendeur doit répondre à la question 1177-1180 .

Catégorie 2

[19]            Les deux questions de cette catégorie, les questions 884-887 et 888, ont trait aux factures et chèques se rapportant à la préparation et la présentation de la demande de brevet ainsi qu'au dossier complet de l'agent de brevet.


[20]            Que les renseignements susmentionnés soient ou non visés par le privilège du secret professionnel de l'avocat, je n'ai pas l'intention de permettre cette question puisque je partage l'opinion du défendeur énoncée aux paragraphes 16 à 19 des prétentions écrites qu'il a produites en opposition à la présente requête.

Catégorie 3

[21]            Cette catégorie comprend huit questions concernant des inventions antérieures.

[22]            Dans chacune des questions, M. Regan est prié d'examiner un produit particulier, illustré dans une série de catalogues déposés en preuve par Bauer (les produits sont fabriqués par des tiers concurrents), et d'indiquer les « différences techniques » entre ce produit et celui de Bauer qui contrefont, selon lui, le brevet 072.

[23]            Il appert, toutefois, que le défendeur ne connaît aucun des produits présentés dans les catalogues.


[24]            De plus, requérir du défendeur qu'il relève les « différences techniques » entre deux produits, [TRADUCTION] « dans le contexte du libellé des revendications 6 à 17 du brevet 072 » , c'est essentiellement lui demander d'interpréter le brevet. Bien qu'il soit l'inventeur du produit breveté en litige, le défendeur n'a toutefois pas été cité comme témoin expert.

[25]            Je partage l'opinion du défendeur quand il allègue qu'il ne lui appartient pas de faire la description technique d'un produit fabriqué par un tiers concurrent.

[26]            Pour les motifs susmentionnés, je considère que les huit questions de cette catégorie ne sont pas pertinentes; le défendeur n'a pas à y répondre.

Catégorie 4

[27]            Les deux questions de la catégorie 4, les questions 1229 et 1230, concernent certains aspects techniques du produit même du défendeur; on peut donc considérer qu'elles se rapportent aux questions de la validité et la contrefaçon du brevet. De plus, contrairement à celles de la catégorie 3, ces questions portent sur des faits techniques dont le défendeur peut traiter puisqu'il est l'inventeur du brevet et qu'il possède plusieurs années d'expérience dans le domaine de l'équipement de hockey. Ainsi, le défendeur doit répondre aux deux questions de cette catégorie.

[28]            Comme chacune des parties obtient en partie gain de cause dans cette requête, je n'adjuge pas de dépens.

[29]            Dans les dix (10) jours des présentes, les parties doivent, conjointement, transmettre à la Cour un projet d'ordonnance établissant un échéancier de mise en oeuvre des diverses décisions rendues sur les présentes requêtes, y compris les échéances indiquées aux paragraphes 9 à 12 de l'ordonnance de cette Cour rendue le 17 décembre 2002.

                    Richard Morneau                   

Protonotaire

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L.


                                                                                                            COUR FÉDÉRALE

Date : 20031008

Dossier : T-754-01

ENTRE :

BAUER NIKE HOCKEY INC.

                                                                                                                                                       demanderesse/

                                                                                                                       défenderesse reconventionnelle

et

PAUL REGAN

                                                                                                                                                                défendeur/

                                                                                                                              demandeur reconventionnel

                                                                                                                                                                      

                                                                                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

                                                                                                                                                                      


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                             AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

INTITULÉ:


T-754-01

BAUER NIKE HOCKEY INC.

                                                         demanderesse/

                              défenderesse reconventionnelle

et

PAUL REGAN

                                                                  défendeur/

                                    demandeur reconventionnel


LIEU DE L'AUDIENCE :Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :le 29 septembre 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU PROTONOTAIRE RICHARD MORNEAU

DATE DES MOTIFS :                                              le 8 octobre 2003

COMPARUTIONS :


M. Steven B. Garland

pour la demanderesse/défenderesse reconventionnelle

M. Gregory A. Piasetzki

pour le défendeur/demandeur reconventionnel


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :


Smart & Biggar

Ottawa (Ontario)

pour la demanderesse/défenderesse reconventionnelle

Piasetzki & Nenniger

Toronto (Ontario)

pour le défendeur/demandeur reconventionnel

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