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Date : 20230713


Dossier : T-585-22

Référence : 2023 CF 961

[TRADUCTION FRANÇAISE]
Ottawa (Ontario), le 13 juillet 2023

En présence de monsieur le juge Manson

ENTRE :

ROBERT SAMERY

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Introduction

[1] Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue le 17 février 2022, par laquelle l’Agence du Revenu du Canada (l’« ARC ») a rejeté la demande de prestation canadienne de relance économique (la « PCRE ») présentée par le demandeur (la « décision »). L’ARC a conclu que le demandeur était inadmissible à la PCRE, parce qu’il n’avait pas gagné des revenus d’au moins 5 000 $ en 2019, en 2020, ou au cours des douze mois précédant la date de sa première demande.

II. Le contexte

[2] Le demandeur, Robert Samery, a demandé la PCRE pour les périodes de deux semaines suivantes (collectivement, les « périodes visées ») :

  1. Du 6 décembre 2020 au 13 février 2021;

  2. Du 28 mars 2021 au 24 avril 2021;

  3. Du 9 mai 2021 au 22 mai 2021.

[3] Un agent de l’ARC a parlé avec le demandeur les 16 et 17 août 2021. Cet agent lui a demandé d’autres documents permettant de démontrer qu’il avait gagné 5 000 $ avant la première période de prestations, pour les périodes visées.

[4] En réponse, le 17 août 2021, le demandeur a fourni un chèque de 5 085 $, daté du 26 mai 2020. Il affirme avoir gagné ce revenu dans le cadre d’une transaction immobilière. Il n’a pas fourni de relevé bancaire correspondant faisant état d’un dépôt d’argent.

[5] Dans sa décision initiale, l’ARC a informé le demandeur qu’il n’était pas admissible à la PCRE, car il n’avait pas gagné des revenus bruts provenant d’un emploi ou des revenus nets tirés d’un travail exécuté pour son compte, en 2019, en 2020 ou au cours des douze mois précédant la date de sa première demande, d’au moins 5 000 $.

[6] Le 24 août 2021, le demandeur a sollicité une deuxième révision de la décision de l’ARC. Le présent contrôle judiciaire porte sur la décision rendue à l’issue de la deuxième révision.

III. La décision faisant l’objet du contrôle

[7] Un agent de l’ARC qui n’avait pas contribué à la première décision a effectué la deuxième révision.

[8] L’ARC a examiné les éléments de preuve suivants :

  1. Le revenu du demandeur et les déductions sur son revenu pour les années d’imposition 2019 et 2020, selon ce qui est inscrit dans le système informatique de l’ARC.

  2. Un relevé de compte bancaire de la TD Canada Trust pour la période du 29 mai 2020 au 30 juin 2020, fourni par le demandeur. Le demandeur a caviardé le numéro de compte, le nom du titulaire du compte et la description de la transaction avant de présenter ce document à l’ARC.

  3. Une copie du chèque de 5 085 $, daté de 26 mai 2020, à l’ordre du demandeur. Le demandeur a caviardé le numéro de succursale et les renseignements financiers avant de fournir la copie à l’ARC.

[9] L’ARC a réitéré que le demandeur n’était pas admissible à la PCRE. L’agent de l’ARC a tiré les conclusions suivantes :
[traduction]

  1. Les documents fiscaux de 2019 du demandeur indiquent un revenu de commission net de -10 176 $. Les documents fiscaux de 2020 du demandeur montrent un revenu de commission net de -15 496 $.

  2. Le relevé bancaire du demandeur ne permet pas de savoir avec certitude s’il s’agit de son compte, car il est lourdement caviardé, au point de masquer son nom et son numéro de compte.

[10] L’ARC a communiqué la décision au demandeur dans une lettre datée du 17 février 2022. Par cette lettre, l’ARC informait le demandeur qu’il n’avait pas rempli les critères d’admissibilité, parce qu’il n’avait pas gagné des revenus provenant d’un emploi ou des revenus nets tirés d’un travail exécuté pour son compte en 2019, en 2020 ou au cours des douze mois précédant la date de sa première demande, d’au moins 5 000 $.

IV. La question en litige

[11] L’ARC a-t-elle commis une erreur en rejetant la demande de PCRE du demandeur?

V. La norme de contrôle

[12] La norme de contrôle qui s’applique est la décision raisonnable (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 au para 25).

VI. Analyse

[13] Les critères d’admissibilité à la PCRE sont prévus à l’article 3 de la Loi sur les prestations canadiennes de relance économique, LC 2020, c 12, art 2 (la « Loi »). Les alinéas 3(1)d) et e) de la Loi disposent qu’un demandeur doit avoir gagné des revenus d’au moins 5 000 $ provenant de catégories prescrites, au cours de périodes prescrites. Pour une période de deux semaines débutant en 2020, il devait avoir gagné des revenus d’au moins 5 000 $ en 2019 ou au cours des douze mois précédant la date à laquelle il avait présenté sa demande de PCRE. Pour une période de deux semaines débutant en 2021, il devait avoir gagné des revenus d’au moins 5 000 $ en 2020 ou au cours des douze mois précédant la date à laquelle il avait présenté sa demande de PCRE.

[14] De plus, le paragraphe 3(2) dispose que, pour le revenu gagné au cours des périodes définies aux alinéas 3(1)d) et e), « [l]e revenu [...] de la personne qui exécute un travail pour son compte est son revenu moins les dépenses engagées pour le gagner ».

[15] Le document de l’ARC intitulé « Confirmation de l’admissibilité à la Prestation canadienne de la relance économique (PCRE), et à la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants (PCREPA), et à la Prestation canadienne de maladie pour la relance économique (PCMRE) » (le « document sur l’admissibilité à la PCRE ») énonce les éléments de preuve acceptables permettant de démontrer un revenu de 5 000 $. Il s’agit notamment de factures pour les services rendus, de documents attestant la réception des paiements, d’une liste des dépenses justifiant le résultat net des revenus et de tout autre document permettant de confirmer les revenus de 5 000 $ tirés d’un travail indépendant.

[16] Le demandeur fait valoir que l’ARC a commis une erreur en exigeant strictement qu’il fournisse ses relevés bancaires, et en rejetant sa demande de PCRE, alors qu’il avait fourni un relevé bancaire. Le demandeur invoque la décision Sjogren c Canada (Procureur général), 2022 CF 951 [Sjogren], où la Cour a conclu que l’exigence expresse de fournir des relevés bancaires ne figurait pas dans la Loi ni dans le document sur l’admissibilité à la PCRE.

[17] Je ne suis pas d’accord avec le demandeur. La décision Sjogren se distingue de la présente affaire pour trois raisons :

  1. Dans la décision Sjogren, la demanderesse affirmait avoir été payée en espèces. Il s’agit là d’un élément distinctif, car, dans la présente affaire, le demandeur reconnaît avoir été payé par un chèque qui a été déposé ensuite sur son compte bancaire.

  2. Dans la décision Sjogren, l’agente de l’ARC a expressément affirmé qu’un relevé bancaire était requis [traduction] « [c]onformément aux instructions » (au para 28). En l’espèce, l’agent de l’ARC n’a pas fait de déclaration de cette nature.

  3. L’agent de l’ARC n’a pas fondé sa décision uniquement sur l’absence de relevés bancaires. En l’espèce, l’agent de l’ARC a eu directement accès aux documents fiscaux du demandeur pour l’année 2020, qui se rapportaient à la période au cours de laquelle il aurait reçu le chèque de 5 085 $. Ces renseignements fiscaux indiquaient un revenu de commission négatif pour l’année 2020.

[18] Même si le demandeur soutient que le revenu de 5 085 $ avait été gagné dans une période déterminée en 2020, la loi applicable dispose que le revenu net pertinent doit avoir été gagné dans les années d’imposition 2019, 2020 ou au cours des douze mois précédant la demande de PCRE. Vu le chèque sur lequel le numéro de compte du demandeur avait été caviardé, le relevé bancaire où étaient supprimés le nom du demandeur, son numéro de compte et, essentiellement, tous les autres renseignements, par l’effet d’un lourd caviardage, sauf ceux permettant de montrer un [traduction] « dépôt mobile » de 5 085 $, effectué le 2 juin 2020, ainsi que les documents fiscaux de 2019 et 2020 du demandeur, indiquant un revenu net de commission négatif, il était raisonnable pour l’ARC de rejeter la demande de PCRE.

VII. Conclusion

[19] La demande sera rejetée.


JUGEMENT dans le dossier T-585-22

LA COUR STATUE :

  1. La demande est rejetée;

  2. Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Michael D. Manson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Lyne Paquette, traductrice

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-585-22

 

INTITULÉ :

ROBERT SAMERY c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 29 JUIN 2023

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MANSON

 

DATE DU JUGEMENT
ET DES MOTIFS :


LE 13 JUILLET 2023

 

COMPARUTIONS :

Robert Samery

 

POUR LE DEMANDEUR

(POUR SON PROPRE COMPTE)

Jacky Cheung

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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