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Date : 20230629

Dossier : T-531-21

Référence : 2023 CF 894

ENTRE :

STEVE LARRIVÉE

demandeur

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

MOTIFS DE LA TAXATION

Stéphanie St-Pierre Babin, Officière taxatrice

I. Aperçu

[1] Le 10 novembre 2022, le demandeur, M. Steve Larrivée, a déposé par le biais de son procureur un avis de désistement amendé de sa demande de contrôle judiciaire mettant fin au présent dossier [Avis de désistement]. Le défendeur, le procureur général du Canada, a déposé un mémoire de frais le 6 mars 2023 amorçant par le fait même un processus de la taxation des dépens suivant le paragraphe 406(1) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 [Règles].

[2] À la suite de la réception du mémoire de frais, j’ai transmis une directive aux parties le 8 mars 2023 les informant que la taxation du mémoire de frais procèderait sur la base de prétentions écrites et fixant les délais impartis pour déposer leurs prétentions respectives [Directive]. Pour donner suite à la Directive, le demandeur a, tout comme le défendeur, déposé un mémoire de frais intitulé « mémoire de frais dû au Demandeur, Steve Larrivée, suite au désistement du demandeur », le 4 avril 2023. Le défendeur a déposé une réplique à ce mémoire de frais le 17 avril 2023 [Réplique].

[3] Les délais fixés dans ma Directive étant maintenant échus, j’ai pris connaissance du dossier de la Cour et de toute la documentation relative à la taxation. Avant d’adresser les services à taxer et les débours réclamés, je dois disposer à présent de deux questions préliminaires nécessitant certaines clarifications.

II. Questions préliminaires

A. Quelle est l’incidence de l’absence de prétentions écrites de la part du demandeur?

[4] Bien que le dépôt d’un mémoire de frais par le demandeur le 4 avril 2023 fait office de contestation, ce dernier n’a toutefois pas déposé de prétentions écrites ni de jurisprudence qui auraient pu m’assister dans l’analyse de certains points litigieux. Dans ces circonstances, je devrai, tout en conservant ma position de neutralité, évaluer toutes les réclamations présentées par les parties pour m’assurer qu’elles sont conformes aux étapes procédurales suivies dans le dossier, à la jurisprudence en matière de dépens et aux dispositions applicables des Règles. Si certains des éléments réclamés vont au-delà de ces paramètres, je devrai intervenir afin que la taxation des dépens s’y conforme (Dahl c Canada, 2007 CF 192 au para 2).

B. Quels dépens le défendeur peut-il réclamer dans son mémoire de frais?

(1) Les dépens suivant le désistement du demandeur

[5] Premièrement, le défendeur a droit aux dépens afférents à l’instance principale, car le dépôt de l’Avis de désistement a occasionné l’octroi de dépens en vertu des mécanismes prévus aux règles 402 et 412. Plus précisément, la règle 402 prévoit que sauf ordonnance contraire de la Cour ou entente entre les parties, lorsqu’une demande fait l’objet d’un désistement, la partie contre laquelle la demande a été intentée a droit aux dépens. En d’autres mots, comme le demandeur s’est désisté de sa demande de contrôle judiciaire déposée le 25 mars 2021, c’est le défendeur qui a droit aux dépens.

[6] D’autre part, la Cour n’a émis aucune ordonnance en ce qui concerne les dépens et aucune entente n’est intervenue entre les parties à cet effet. Dans mes fonctions d’officière taxatrice, je ne suis pas « la Cour » mais bien une fonctionnaire du greffe. Je ne possède donc pas la juridiction réservée à la Cour de rendre une ordonnance et de modifier l’octroi des dépens obtenu suivant la règle 402 afin d’allouer des dépens au demandeur, tel que réclamé à son mémoire de frais (Chiu c (Canada) Office National Des Libérations Conditionnelles, 2007 CF 1353 au para 7). Je suis plutôt tenue de respecter le libellé de la règle 402 et de taxer uniquement le mémoire de frais de la partie contre laquelle la demande de contrôle judiciaire a fait l’objet d’un désistement, soit celui du défendeur déposé le 6 mars 2023.

[7] Dans sa Réplique, le défendeur a d’ailleurs fait remarquer à juste titre que tout mémoire de frais, même s’il est produit pour obtenir compensation, doit être déposé de manière formelle en respectant les exigences prévues au paragraphe 406(1) des Règles, et non pas par l’entremise d’une réponse à un mémoire de frais (Simpson Strong-Tie Co v Peak Innovation Inc, 2012 FC 63 au para 18). Quoi qu’il en soit, je ne serais pas non plus autorisée à procéder à un réajustement par compensation prévu au paragraphe 408(2) des Règles, car comme il sera davantage détaillé dans les paragraphes suivants, il ne s’agit pas d’une affaire dans laquelle les parties sont tenues de se payer des dépens l’une à l’autre, seul le défendeur y a droit.

(2) Les dépens afférents à la requête en radiation partielle

[8] Deuxièmement, le défendeur a droit aux dépens liés à la requête en radiation partielle de l’avis de demande déposée le 15 avril 2021. En effet, à la suite des auditions tenues les 27 avril et 1er juin 2021, la juge adjointe Steele a rendu une ordonnance dont le dispositif est le suivant : « LE TOUT frais à suivre le sort de l’instance principale » (Ordonnance du 14 juin 2021).

[9] Le fait qu’une cour adjuge des dépens « à suivre » le sort de l’instance principale signifie que la partie qui a gain de cause à la fin d’une instance principale aura droit aux frais de la requête interlocutoire (Savard c Canada, 2001 CFPI 1348 au para 10). Autrement dit, en utilisant cette mention dans son dispositif, la Cour s’en est remise au dénouement de l’instance principale pour que l’identité de la partie ayant droit de réclamer des dépens pour la préparation de la requête en radiation partielle soit connue. De ce fait, comme le défendeur a eu droit aux dépens de l’instance principale par l’entremise des règles 402 et 412, il a également droit aux dépens afférents à la requête en radiation partielle. Il s’agit encore là d’une situation dans laquelle il m’est impossible d’opérer une compensation puisqu’en fin de compte, seul le défendeur a droit aux dépens sur toute la ligne.

III. Taxation du mémoire de frais

[10] Il convient d’entrée de jeu de souligner que le mémoire de frais du défendeur sera taxé en conformité avec la colonne III du tableau du tarif B en l’absence d’instructions explicites de la Cour et en l’absence d’une entente entre les parties quant aux dépens (Règles 402 et 407). J’aborderai désormais chacun des services à taxer réclamés en vertu des articles du tableau du tarif B.

A. Les services à taxer réclamés

(1) Article 5

[11] Dans son mémoire de frais, le défendeur présente une réclamation de 5 unités pour la préparation et le dépôt de la requête en radiation partielle le 15 avril 2021, ainsi que pour les documents s’y rapportant. Ce dernier soutient qu’il est en droit d’obtenir les dépens découlant de cette requête puisque les dépens ont été adjugés suivant le sort de l’instance principale (Réplique du défendeur à la p 2). Comme précédemment expliqué aux paragraphes 8 et 9 des présents motifs, le sort de l’instance principale étant un désistement pour lequel le défendeur a droit aux dépens, il s’ensuit que ce dernier est bien fondé de réclamer les dépens reliés à la requête en radiation partielle. Il reste simplement à en déterminer le quantum.

[12] En ce qui a trait au nombre d’unités à allouer, j’ai noté lors de mon examen du dossier que les prétentions écrites au soutien de cette requête étaient peu complexes. Néanmoins, je constate que la préparation du dossier de requête a tout de même nécessité une certaine charge de travail pour produire l’affidavit, les pièces à son soutien ainsi qu’une liste d’autorités contenant une quinzaine de références. Pour toutes ces raisons, 4 unités sont allouées (article 409 et les alinéas 400(3) c) et g) des Règles).

(2) Article 6

[13] Le défendeur réclame 2 unités pour la comparution du procureur lors des audiences de la requête en radiation partielle tenues respectivement les 27 avril et 1er juin 2021. L’article 6 du tableau du tarif B a une fourchette de 1 à 3 unités. Après avoir examiné le dossier en conjonction avec des facteurs tels que le résultat de l’instance principale en faveur du défendeur et la faible complexité des questions en litige abordées lors de l’audience, j’estime qu’il est raisonnable d’allouer 2 unités dans les circonstances du présent dossier (article 409 et les alinéas 400(3) a) et c) des Règles).

[14] Quant au nombre d’heures, le défendeur réclame un total de 1,32 heure dans son mémoire de frais. Ma revue des inscriptions enregistrées au Système de gestion des instances par l’agent de greffe ayant assisté à l’audience du 27 avril 2021 révèle que la durée répertoriée de celle-ci fut de 9 minutes et que la Cour a ajourné cette audience au 1er juin 2021. La durée répertoriée de cette deuxième audience fut de 1 heure 10 minutes. Mes calculs du cumul de la durée de ces deux audiences ainsi que de leur conversion en heures confirment effectivement que le demandeur était en droit de réclamer 1,32 heure dans son mémoire de frais.

[15] En considération de ce tout ce qui précède, un total de 2,64 unités sont accordées en vertu de l’article 6. Ce montant a été calculé en multipliant les 2 unités allouées sous la colonne III par 1,32 heure.

(3) Article 26

[16] Dans son mémoire de frais, le défendeur réclame 2 unités pour les services rendus en lien avec la taxation des frais. Pour les fins de la présente taxation, le défendeur a déposé un mémoire de frais, un affidavit, une pièce à son soutien, une lettre et une réplique. Comme le présent dossier de taxation était relativement simple en ce que le nombre de services à taxer réclamés était peu élevé, les prétentions écrites étaient brèves, et étant donné que la gamme d’unités disponible de la colonne III du Tarif B est de 2 à 6 unités pour l’article 26, j’estime qu’il est raisonnable d’allouer les 2 unités réclamées.

[17] Au total, 8,64 unités sont allouées pour les services à taxer du défendeur, ce qui donne la somme de 1 382,40 $.

B. Les débours réclamés

(1) Signification électronique

[18] Dans son mémoire de frais, le défendeur a réclamé la somme de 4 $ pour la signification électronique de son dossier de requête en radiation partielle au demandeur le 15 avril 2021. À cet effet, l’affidavit de Jade Angers affirmé solennellement le 16 février 2023 atteste que le dossier de requête a été signifié via Todoc, une plateforme web permettant notamment la signification électronique sécurisée de procédures, moyennant des frais de 4 $ par transaction. Comme la preuve de ce débours a été présentée par un affidavit, qu’une facture a été produite comme pièce ANG-1 à son soutien et que le montant réclamé est raisonnable, la somme de 4$ est allouée (paragraphe 1(4) du tarif B).

(2) Impressions

[19] Le défendeur réclame la somme de 100,50 $ pour les « impressions des autorités au soutien de la requête du défendeur en radiation partielle, à la demande du demandeur » (Mémoire de frais, p 2). J’ai examiné attentivement le dossier de requête et je conclus que les impressions effectuées étaient une dépense nécessaire à la conduite du litige puisqu’elles ont été produites à la demande du demandeur. Quant au montant demandé de 0,25 $ par page, je considère ce montant raisonnable eu égard à la jurisprudence constante de la Cour (Clorox Company of Canada, Ltd v Chloretec SEC, 2023 FC 174 aux para 19‒20). Finalement, je constate que la portion du dossier de requête comportant des autorités est bien au nombre de 402 pages, soit le nombre de pages réclamé au mémoire de frais du défendeur. Pour toutes ces raisons, j’accorde la somme de 100,50$ pour les impressions du défendeur.

[20] Au total, 104,50 $ est alloué à titre de débours.

IV. Somme due au défendeur

[21] Le mémoire de frais du défendeur est taxé et alloué pour la somme de 1 486,90 $, payable par le demandeur, M. Steve Larrivée, au défendeur, le procureur général du Canada.

[22] Un certificat de taxation sera émis pour ce montant.

« Stéphanie St-Pierre Babin »

Officière taxatrice

Ottawa (Ontario)

Le 29 juin 2023


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Dossier :

T-531-21

INTITULÉ :

STEVE LARRIVÉE c PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

TAXATION DES DÉPENS SUR DOSSIER EXAMINÉ À OTTAWA (ONTARIO) SANS COMPARUTION DES PARTIES.

MOTIFS DE LA TAXATION par :

Stéphanie St-Pierre Babin, Officière taxatrice

DATE DES MOTIFS :

LE 29 juin 2023

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Cynthia Chénier

Pour LE DEMANDEUR

Maude Normand

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Cynthia Chénier

Avocate

Repentigny (Québec)

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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