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Date : 20230622


Dossier : IMM‑3136-22

Référence : 2023 CF 881

Ottawa (Ontario), le 22 juin 2023

En présence de monsieur le juge Régimbald

ENTRE :

SARA CECILIA OBANDO SIERRA

demanderesse

et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La demanderesse, Mme Sierra, est citoyenne de la Colombie. Elle allègue craindre un dénommé Luis Alberto Ortega Medina, son ex-conjoint, qui l’aurait sévèrement violentée de 2016 à 2018 alors qu’elle vivait avec lui à Bogota en Colombie.

[2] La demanderesse demande le contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés [SPR] rendue le 9 mars 2022 [la Décision], statuant qu’elle n’a pas la qualité de réfugiée, ni de personne à protéger, au sens des articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [LIPR].

[3] La SPR a conclu que la question déterminante en l’espèce était celle du risque prospectif. La SPR a déterminé que la demanderesse n’avait pas démontré qu’il existe une possibilité sérieuse de persécution advenant un retour en Colombie en raison de son appartenance au groupe social des femmes qui craignent la violence basée sur le genre. Elle n’a pas établi non plus que les problèmes auxquels elle pourrait faire face en tant que femme seule atteignent le seuil de la persécution.

[4] De plus, la SPR a conclu que la demanderesse ne rencontrait pas le critère la qualifiant de personne à protéger au sens de l’article 97 de la LIPR, puisque rien au dossier ne laisse croire que l’agent de persécution aurait les moyens et la volonté de la retracer advenant un retour en Colombie aujourd’hui.

[5] Pour les motifs qui suivent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Compte tenu des conclusions de la SPR, de la preuve qui lui a été présentée et du droit applicable, je ne vois aucune raison d’infirmer la Décision. Les motifs de la SPR possèdent les qualités qui rendent son raisonnement logique et cohérent eu égard aux contraintes juridiques et factuelles pertinentes. Il n’existe donc aucun motif justifiant l’intervention de la Cour.

II. Les faits

[6] La demanderesse est citoyenne de la Colombie. Elle a vécu en Allemagne de 1990 à 2015 avec un premier époux et a eu pendant quelques années sa résidence permanente dans ce pays.

[7] Lorsque son premier époux est décédé, elle a vécu seule en Allemagne de 2004 à 2015 et a par la suite décidé de revenir vivre en Colombie. Elle y a habité seule entre 2015 et 2016.

[8] En 2016, la demanderesse a rencontré Luis Alberto Ortega Medina [l’agent de persécution] en Colombie. Celui-ci est un ex-militaire. La demanderesse a vécu avec lui de 2016 à 2018 à Bogota et pendant cette période, celui-ci l’a sévèrement violentée. Elle allègue avoir été harcelée, battue, menacée avec une arme et violée à plusieurs reprises par celui-ci.

[9] La demanderesse s’est plainte aux autorités et des mesures judiciaires ont été imposées à l’agent de persécution pour l’empêcher de s’approcher d’elle. Cependant, l’ordonnance de la cour ne fut pas respectée. Le 28 août 2018, alors qu’elle était dans l’appartement où elle résidait (mais dont l’agent de persécution était le locataire), celui-ci est arrivé en lui demandant de le laisser entrer puisqu’il voulait lui parler. Après avoir insisté, la demanderesse a accepté. L’agent de persécution a agressé la demanderesse, tout en lui mettant un pistolet sur la tête.

[10] La demanderesse allègue dans son narratif que le 5 septembre 2018, l’agent de persécution aurait tenté d’entrer en communication avec elle par texto et par téléphone et aurait visité l’appartement alors qu’elle était absente. Cette même journée, elle déposa une plainte pénale au Bureau du Procureur général de la Nation contre l’agent de persécution, car celui-ci n’avait pas respecté l’ordonnance de la cour.

[11] Craignant pour sa vie et avec le support de son fils, la demanderesse quitta la Colombie le 9 septembre 2018, avant même que les autorités n’aient pu statuer quant à l’agression dont elle fut victime et au non-respect par l’agent de persécution de l’ordonnance de la cour. Elle est arrivée au Canada le 11 septembre 2018.

A. Décision de la SPR

[12] Après avoir examiné l’ensemble des éléments de preuve, y compris le témoignage de la demanderesse, la SPR a conclu le 9 mars 2022 que la demanderesse n’avait pas la qualité de réfugiée ni de personne à protéger en vertu des articles 96 et 97(1) de la LIPR.

[13] Le tribunal note que les allégations de violence conjugale vécues sont crédibles et que la crainte subjective de la demanderesse est réelle. Par contre, la SPR conclut que la crainte subjective de la demanderesse n’est pas prospective.

[14] Pour déterminer si la demanderesse se qualifiait à titre de réfugiée au sens de l’article 96 ou comme personne à protéger au sens de l’article 97 de la LIPR, la SPR a analysé les faits soumis par la demanderesse dans l’optique du risque auquel celle-ci ferait face advenant un retour en Colombie. Notamment, la SPR a pris en considération le fait que depuis 2018, l’agent de persécution n’a jamais tenté de communiquer avec elle, ni avec des personnes de sa famille, ni avec ses ami(e)s en Colombie, afin de tenter de la retrouver.

[15] La SPR a aussi rejeté l’allégation de la demanderesse indiquant que l’agent de persécution bénéficiait d’une certaine immunité du fait qu’il était ex-militaire. La SPR précise qu’il est plus probable que si l’agent de persécution bénéficiait d’un statut particulier lui permettant de fuir la justice, on ne lui aurait pas ordonné de se présenter devant les autorités après une agression précédente et il n’aurait pas reçu des conditions à respecter.

[16] De plus, la SPR a jugé que la situation de la demanderesse ne serait plus la même aujourd’hui advenant un retour en Colombie puisque le contexte de violence conjugale qu’elle a subie n’est plus d’actualité. La SPR justifie cette conclusion en précisant que la demanderesse ne serait pas contrainte de retourner vivre au même endroit (elle n’a pas déménagé d’un logement loué par l’agent de persécution), n’aurait pas à conserver le même numéro de téléphone (elle n’a pas changé ses coordonnées), n’est pas mariée avec l’agent de persécution, n’a aucun enfant ni aucune possession commune, et que la relation amoureuse n’a pas eu une durée significative pour établir la motivation de l’agent de persécution de manière prospective.

[17] La SPR précise également que le fait que la demanderesse ait quitté le pays trois jours après avoir porté plainte à nouveau aux autorités a nui à sa demande. Comme elle n’a pas attendu les résultats de cette nouvelle plainte, la preuve que l’agent de persécution a tenté de communiquer avec elle au numéro de téléphone qu’il connaissait déjà et qu’il s’est présenté à son domicile (dont il est le locataire) n’est pas suffisante pour établir qu’il est plus probable que le contraire que l’agent de persécution la poursuivrait à l’extérieur de son domicile et qu’il l’appellerait sur un numéro de téléphone différent de celui qu’il connaissait, pour la rejoindre et la persécuter à nouveau.

[18] Finalement, la SPR a tenu compte du profil de la demanderesse en tant que femme âgée de 71 ans qui vivrait seule en Colombie, advenant son retour. Il a noté que la demanderesse avait quitté l’Allemagne à 66 ans pour se rapprocher de sa famille, qu’elle vivait alors seule en Colombie avant de rencontrer l’agent de persécution et que son revenu de pension de veuvage était suffisant pour couvrir ses dépenses en Colombie. Le fait qu’elle soit une femme seule n’a jamais été un élément de persécution indépendant dans son cas, surtout que la demanderesse n’a pas mentionné avoir subi un quelconque problème à titre de femme seule en Colombie avant de faire vie commune avec l’agent de persécution.

III. Questions en litige et norme de contrôle

[19] La présente demande de contrôle judiciaire soulève la question à savoir si la décision de la SPR selon laquelle la demanderesse n’a pas la qualité de réfugiée ni de personne à protéger est raisonnable, puisqu’elle n’a ni établi une « possibilité réelle » ou une « possibilité raisonnable » de persécution au sens de l’article 96, ni un risque de préjudice personnalisé sur un élément décrit à l’article 97.

[20] Au soutien de sa demande de contrôle judiciaire, la demanderesse soumet trois questions principales, à savoir si la SPR a erré :

  • a)en appliquant un mauvais critère en évaluant la demande fondée sur l’article 96 de la LIPR;

  • b)en tirant des conclusions sur la base de stéréotypes; et

  • c)en omettant d’évaluer sa demande sous l’angle de la femme seule qui risque la persécution advenant un retour en Colombie.

[21] La norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Huruglica, 2016 CAF 93 au para 35; Ali c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 688 au para 5; Acikgoz c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 149; Durojaye c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 700 au para 6). Ainsi, selon cette norme, il incombe à la partie qui conteste la décision d’en démontrer le caractère déraisonnable (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] au para 100). Comme précisé aux paragraphes 127 et 128 de Vavilov, les principes de la justification et de la transparence exigent que les motifs du décideur administratif tiennent valablement compte des questions et des préoccupations centrales soulevées par les parties.

[22] Afin de déterminer si une décision est raisonnable, la cour de révision doit s’assurer de bien comprendre le raisonnement suivi et vérifier si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci (Vavilov au para 99).

[23] Comme l’a affirmé la Cour suprême dans Vavilov en reprenant l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62 [Newfoundland Nurses], il faut accorder une attention particulière aux motifs écrits du décideur et les interpréter de façon globale et contextuelle puisque l’objectif est justement de comprendre le fondement sur lequel repose la décision (Vavilov au para 97). Les cours de révision ne doivent pas procéder à « une chasse au trésor, phrase par phrase, à la recherche d’une erreur » (Vavilov au para 284). La Cour doit plutôt examiner le résultat de la décision et sa justification afin de s’assurer que la décision dans son ensemble est transparente, intelligible et justifiée (Vavilov aux para 15, 95 et 136; voir aussi Ehigiator v Canada (Citizenship and Immigration), 2023 FC 308 au para 49).

[24] Bien que les motifs de la SPR auraient pu être plus limpides et l’analyse des critères des articles 96 et 97 plus claire et structurée, il est important de concevoir que les tribunaux administratifs ne sont pas tenus au même standard de justification que les cours de justice.

[25] En effet, les cours de révision ne peuvent s’attendre à ce que les décideurs administratifs « répondent à tous les arguments ou modes possibles d’analyse » ou « tire[nt] une conclusion explicite sur chaque élément constitutif du raisonnement, si subordonné soit-il, qui a mené à [leur] conclusion finale » (Newfoundland Nurses au para 16 cité dans Vavilov au para 128). Le décideur n’a pas à répondre à chaque argument ni à se référer à toutes les preuves – en fait, il est présumé avoir examiné toutes les preuves et tous les arguments figurant dans le dossier (Vavilov aux para 127-128).

[26] Tel que le précise la Cour suprême dans Vavilov, la « justice administrative » et la « justice judiciaire » ne se ressemblent pas toujours et les cours de révision doivent en être conscientes (Vavilov au para 92).

IV. Analyse

A. Le critère applicable pour satisfaire à la définition de « réfugié » au sens de l’article 96 de la LIPR

[27] L’article 96 énonce :

Définition de réfugié

Convention refugee

96 A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

96 A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut, ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

[28] Afin de rencontrer son fardeau et de démontrer qu’elle satisfait à la définition du terme « réfugié » au sens de l’article 96 de la LIPR et de la Convention, la personne revendiquant ce statut doit satisfaire le critère juridique applicable, à savoir qu’il y a une « possibilité sérieuse » ou une « possibilité raisonnable » de persécution advenant un retour (Alam c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 4 [Alam] au para 8).

[29] La personne revendiquant le statut de réfugié doit satisfaire le critère juridique applicable en démontrant, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle « craint subjectivement et avec raison d’être persécutée et que cette crainte subjective est objectivement justifiée » [je souligne] (Canada (Procureur général) c Ward, [1993] 2 RCS 689 [Ward]; Alvarez Contreras c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 398 [Alvarez Contreras] au para 16).

[30] La personne revendiquant le statut de réfugié doit donc établir une crainte subjective, d’une part, et démontrer que cette crainte subjective a un fondement objectif, d’autre part, afin de rencontrer le critère juridique de l’article 96 de la LIPR.

[31] Quant à la norme de preuve applicable aux faits pour satisfaire au critère juridique du statut de réfugié, son application peut porter à confusion puisqu’elle s’applique à des questions distinctes.

[32] D’abord, la norme de la prépondérance des probabilités s’applique aux faits sous-jacents que la personne qui revendique le statut de réfugié doit prouver afin de démontrer sa crainte subjective, et aux faits sous-jacents que la personne doit prouver afin de démontrer le fondement objectif de cette crainte. La personne doit donc démontrer l’existence d’une crainte subjective et le fondement objectif de cette crainte subjective; et ces deux éléments sont établis à l’aide d’une preuve de faits qui elle, est évaluée selon la prépondérance des probabilités (Chan c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1995] 3 RCS 593 au para 120 citant Adjei c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1989] 2 CF 680, 1989 CanLII 9466 (CAF) [Adjei]).

[33] Ainsi, la personne devra démontrer sa crainte subjective en présentant des faits qui, évalués selon la norme de la prépondérance des probabilités, vont établir cette crainte. Les réponses aux questions suivantes peuvent servir d’exemple de faits liés à la crainte subjective : quels sont les événements survenus dans le pays d’origine qui suscitent cette crainte subjective? Quels actes ont été posés par la personne pour se protéger : a-t-elle déménagé (dans la même ou une autre ville), changé ses coordonnées, changé son emploi, ou avisé les autorités afin d’obtenir la protection de son État d’origine? En d’autres mots, la personne qui revendique le statut de réfugié doit démontrer qu’elle a réellement peur et qu’elle a pris des démarches claires pour se protéger. Il s’agit essentiellement d’analyser la crédibilité de la personne lors de son témoignage, et la vraisemblance des informations contenues dans les différents formulaires accompagnant le formulaire Fondement de la demande d’asile (Alvarez Contreras; Sanchez Molano c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1253 au para 16; Perez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1100 au para 22; Cobian Flores c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 503 au para 4).

[34] Le fondement objectif de la crainte subjective, quant à lui, doit aussi être évalué selon les faits présentés par la personne qui demande l’asile. Ces faits permettront à la personne revendiquant le statut de réfugié de démontrer qu’elle craint « avec raisons d’être persécutée » (« well-founded fear of persecution » dans la version anglaise de la LIPR) aux termes de l’article 96 de la LIPR (Ward à la page 712; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Kaaib, 2006 CF 870 au para 25 citant Williams c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2005 CAF 126 aux para 19-22). Ces faits sous-jacents doivent aussi être prouvés selon la prépondérance des probabilités.

[35] Le fondement objectif de la crainte subjective sera établi à la suite de l’examen d’une preuve objective relative à la situation dans le pays tel que le Cartable national de documentation [CND] (Alvarez Contreras au para 16). Notamment, la complicité de l’État ou son incapacité d’assurer la protection de ses citoyens est pertinente (Ward aux pp 722-726; Narvaez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1re inst), [1995] 2 CF 55, 1995 CanLII 3575 (CF) [Narvaez] aux pp 66-67; Aguilar Soto c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 1183). Ainsi, tel que l’indique la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Ward à la page 712 « si un État est capable de protéger le demandeur, alors, objectivement, ce dernier ne craint pas avec raison d’être persécuté » [je souligne]. La capacité et la motivation de l’agent de persécution de poursuivre la personne localement ou dans l’ensemble du pays, dans la mesure où l’état n’est pas lui-même l’agent de persécution, sont intrinsèquement liées à la capacité de l’État de protéger ses citoyens (Perez Mendoza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 119 [Perez Mendoza] aux para 28-33; Vigueras Avila c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2006 CF 359 [Vigueras Avila] aux para 4, 22, 28). Ce facteur devient surtout important dans les cas où une possibilité de refuge interne est alléguée, critère lié à la capacité de l’état de protéger ses citoyens partout sur le territoire, et qui peut aussi démontrer le fondement objectif de la crainte (Sasha Baglay & Martin Jones, Refugee Law, 2nd ed (Toronto : Irwin Law, 2017) [Baglay & Jones] aux pp 156-160; Lorne Waldman, Canadian Immigration & Refugee Law Practice (Toronto : LexisNexis Canada, 2023) [Waldman] à la page 924).

[36] Ceci dit, une confusion existe puisque la norme de preuve s’applique à deux niveaux dans le cadre de la détermination du statut de réfugié. D’une part, les faits, si établis selon la norme de la prépondérance des probabilités, permettront au demandeur de tenter de se décharger de son fardeau d’établir sa crainte subjective et le fondement objectif de sa crainte. D’autre part, ces éléments factuels, si établis, permettront à la personne de se décharger de son fardeau et de démontrer qu’il existe une « possibilité sérieuse » ou une « possibilité raisonnable » de persécution en cas de retour, qui est le critère juridique afin d’obtenir le statut de réfugié en vertu de l’article 96 (Adjei; Alam aux para 8-11; Ramanathy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 511 [Ramanathy] aux para 15-17; Paz Ospina c Canada, 2011 CF 681). Une norme de preuve s’applique donc à deux niveaux à l’intérieur du critère applicable au statut de réfugié.

[37] Ainsi, une fois les faits sous-jacents démontrés selon la norme de la prépondérance des probabilités, il faut appliquer ces conclusions de faits au critère juridique lui-même, et déterminer si les faits tels que prouvés démontrent une « possibilité sérieuse » ou une « possibilité raisonnable » de persécution advenant un retour. La question qui se pose à cet égard n’est pas de déterminer si la personne sera effectivement persécutée en cas de retour, mais bien à savoir si elle s’est déchargée de son fardeau de démontrer qu’il y a une « possibilité sérieuse » ou une « possibilité raisonnable » de persécution advenant un retour (Adjei à la page 681; Alam au para 8; Ndjizera c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 601 aux para 25-26).

[38] L’application du critère juridique de la crainte de persécution ne requiert donc pas que la personne démontre qu’il est « plus probable que le contraire » qu’elle soit persécutée si elle est renvoyée. En d’autres mots, elle ne doit pas démontrer à plus de 50% que le risque de persécution va se réaliser (Alam au para 5). Cette norme de preuve, normalement assimilée à la prépondérance des probabilités, est trop élevée.

[39] Ainsi, une personne pourra se décharger de son fardeau et démontrer qu’il y a une « possibilité raisonnable » ou une « possibilité sérieuse » de persécution même si, dans les faits, cette « probabilité » de persécution réelle peut être bien inférieure à 50%. Le statut de réfugié pourrait donc être accordé même si, théoriquement, les probabilités de persécution réelles sont basses, mais tout de même « sérieuses » ou « raisonnables ».

[40] Il s’agit donc d’un « seuil spécial » afin de satisfaire au critère juridique (Alam au para 8, Ramanathy au para 15). Plutôt que de devoir démontrer selon la norme de la prépondérance des probabilités que la persécution est probable, une personne revendiquant le statut de réfugié doit plutôt démontrer, selon la norme de la prépondérance des probabilités, qu’il y a une « possibilité raisonnable » ou une « possibilité sérieuse » de persécution. Le critère juridique à rencontrer à cette étape est donc moins onéreux.

[41] Donc, tel que le précise le juge Mosley dans l’arrêt Ramanathy, le fondement de la crainte est établi lorsque la demanderesse démontre qu’il existe une « possibilité sérieuse » ou « raisonnable » qu’elle soit persécutée [je souligne]. Ceci dit, les faits sous-jacents présentés par la personne revendiquant le statut de réfugié seront, eux, évalués selon la norme civile normale en fonction de la prépondérance des probabilités (donc plus de 50%):

[15] Il est bien établi que le demandeur n’a pas à prouver, pour satisfaire à l’élément objectif du critère établi à l’article 96, qu’il est plus probable qu’il sera persécuté que le contraire. Il doit cependant établir qu’il existe plus qu’une « simple possibilité » qu’il soit persécuté. Le critère applicable a été décrit comme l’existence d’une « possibilité raisonnable » ou d’une « possibilité sérieuse » : Adjei c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), 1989 CanLII 9466 (CAF), [1989] 2 CF 680, [1989] ACF no 67 (CAF).

[16] Ce critère est moins exigeant que la norme de preuve en fonction de la prépondérance des probabilités. Son application peut porter à confusion étant donné que tant l’existence d’une crainte subjective que le fondement objectif de cette crainte doivent être établis selon la prépondérance des probabilités : Chan c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1995] 3 RCS 59, au paragraphe 120 citant Adjei, précitée. Comme l’a souligné le juge O’Reilly dans Alam c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 4, au paragraphe 5, bien que le critère soit « bien connu et largement accepté, il est très difficile de l’exprimer en termes simples ».” [sic] Ayant examiné la jurisprudence sur l’application de la norme, le juge O’Reilly a conclu ce qui suit aux paragraphes 8 à 11 :

8 Ce qu’il faut retenir de l’arrêt Adjei, c’est que la norme de preuve applicable réunit la norme civile habituelle et un seuil spécial qui s’applique uniquement dans le contexte des demandes d’asile. Bien entendu, les demandeurs doivent prouver les faits sur lesquels ils se fondent et la norme de preuve civile constitue la bonne façon d’apprécier la preuve qu’ils présentent à l’appui de leurs assertions de fait. Dans la même veine, les demandeurs doivent convaincre la Commission en bout de ligne qu’ils risquent d’être persécutés. Il s’agit encore là d’une norme de preuve civile. Cependant, étant donné qu’ils doivent démontrer uniquement l’existence d’un risque de persécution, il ne convient pas d’exiger d’eux qu’ils prouvent que la persécution est probable. En conséquence, ils doivent simplement prouver qu’il existe « une possibilité raisonnable », « davantage qu’une possibilité minime » ou « de bonnes raisons de croire » qu’ils seront persécutés.

[…]

[Je souligne.]

[42] Ainsi, ce n’est qu’après que la personne ait présenté sa preuve des faits (tant pour l’élément de la crainte subjective que pour le fondement objectif de cette crainte subjective), et que les faits ont été établis selon la norme de la prépondérance des probabilités, que la personne peut satisfaire le critère juridique applicable à l’article 96 de la LIPR. Elle se sera alors, compte tenu de la preuve présentée et globalement, déchargée de son fardeau et aura prouvé qu’il existe une « possibilité sérieuse » ou « possibilité raisonnable » de persécution si elle est renvoyée, méritant ainsi la protection. Dans la décision Gebremedhin c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 497 [Gebremedhin] aux paragraphes 27 à 29, la juge McVeigh explique bien la distinction (voir aussi Aslan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 1165 [Aslan] aux para 20-26) :

[28] […] Pour démontrer une crainte de persécution bien fondée conformément à l’article 96 de la Loi, le demandeur doit établir qu’il existe une « possibilité raisonnable » ou une « possibilité sérieuse » de persécution (Adjei c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), 1989 CanLII 9466 (CAF), [1989] 2 CF 680 (CAF), aux paragraphes 5 à 8; Sebastiao c. Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2016 CF 803, aux paragraphes 13 et 14 [Sebastiao]). La norme de preuve qui s’applique aux faits présentés par le demandeur est celle de la prépondérance des probabilités. Lorsque cela a été établi, il suffit de démontrer l’existence d’une « possibilité sérieuse » pour satisfaire au critère juridique.

[Je souligne.]

[43] Une fois la crainte de persécution établie, la personne revendiquant le statut de réfugié doit établir un lien entre la persécution et un motif prévu par la Convention (Baglay & Jones aux pp 156 et 175; Waldman aux pp 808, 866 et 895). La persécution alléguée doit être dirigée contre elle, soit « personnellement », soit en tant que « membre d’une collectivité » (Rizkallah c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] ACF no 412 (CA) (QL); Fi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2006 CF 1125 [Fi]).

[44] La demanderesse soumet qu’en l’espèce, malgré le fait que la SPR a appliqué la bonne norme de preuve pour l’article 96, soit celle de « la possibilité sérieuse » de persécution, elle l’a toutefois mal appliqué dans son analyse du risque prospectif de persécution. Selon la demanderesse, la SPR a plutôt appliqué à tort un fardeau plus élevé, soit qu’il « est plus probable que le contraire » (la norme de la prépondérance des probabilités) qu’elle sera effectivement persécutée advenant un retour. Elle s’appuie sur certaines parties de l’analyse faite par la SPR, notamment aux paragraphes 38 à 40, où la SPR utilise les termes « plus probable que le contraire » afin de qualifier sa conclusion sur certains faits. Nous y reviendrons.

B. Critère applicable à la définition de « personne à protéger » sous l’article 97 de la LIPR

[45] L’article 97 de la LIPR vise à protéger des demandeurs d’asile légitimes qui ne peuvent se qualifier à titre de réfugié sous le critère de l’article 96 de la LIPR, que ce soit en raison de l’impossibilité de démontrer une crainte subjective et le fondement objectif de cette crainte, ou parce que la crainte de persécution n’est pas liée à un motif énuméré à la Convention. L’article 96 ne peut donc pas leur venir en aide. L’article 97 de la LIPR se lit comme suit :

Personne à protéger

Person in need of protection

97 (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

97 (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

Personne à protéger

Person in need of protection

(2) A également qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et fait partie d’une catégorie de personnes auxquelles est reconnu par règlement le besoin de protection.

(2) A person in Canada who is a member of a class of persons prescribed by the regulations as being in need of protection is also a person in need of protection.

[46] Dans le cadre de l’article 97, une personne ne doit pas établir qu’elle craint d’être persécutée comme elle doit le faire sous le cadre de l’article 96. La personne doit plutôt établir, encore selon la norme de la prépondérance des probabilités, qu’il y a « des motifs sérieux de croire » ou qu’il est « plus probable que le contraire » (soit la norme de la prépondérance des probabilités) qu’elle sera exposée à un risque de torture, à un « risque de traitements ou peines cruels et inusités » [je souligne], ou encore à une menace de mort, advenant un retour (Li c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CAF 1 [Li] aux para 9, 14, 29, 33, 36-39; Paramananthalingam c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 236 [Paramananthalingam] aux para 13, 17; Odetoyinbo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 501 aux para 7-8). Elle devra par la suite établir que ce risque est personnalisé et différent de celui auquel sont exposés les habitants de son pays d’origine.

[47] Ainsi, en vertu de l’article 96 et tel que discuté plus haut, la personne doit établir, selon la prépondérance des probabilités, une crainte subjective et le fondement objectif de cette crainte, permettant ensuite de rencontrer le critère juridique de « la possibilité sérieuse » ou « possibilité raisonnable » de persécution. Encore une fois, la persécution alléguée doit être dirigée contre elle, soit « personnellement », soit en tant que « membre d’une collectivité », et être en lien avec un motif prévu par la Convention. Cependant, en vertu de cette norme, il est possible de satisfaire au critère de l’article 96 même si, en réalité, les chances que la persécution aura bel et bien lieu sont inférieures à 50%.

[48] Le seuil du critère est donc moins élevé pour l’article 96 que pour l’article 97, puisque l’article 97 requiert qu’il soit « plus probable que le contraire » (donc plus de 50%) que la personne soit exposée à un risque de préjudice identifié à l’article 97 advenant un retour. De plus, l’article 97 requiert que ce risque soit personnalisé et différent de celui des autres citoyens du pays (et contrairement à l’article 96, le fait d’appartenir à un groupe qui est persécuté est insuffisant). Comme l’explique la juge McVeigh dans la décision Paramananthalingam :

[16] L’objectif de l’article 97 est de protéger les demandeurs d’asile légitimes qui pourraient ne pas satisfaire aux critères stricts de la crainte bien fondée d’être persécutée. Malgré le seuil de preuve moins élevé prévu par l’article 96, il est très difficile de prouver à la fois une peur objective et subjective. Le législateur a créé l’article 97 afin qu’il agisse comme un filet de sécurité pour protéger les personnes qui, malgré une conclusion d’absence de crédibilité, font face à un risque de préjudice personnalisé. Il est important de rappeler ici que l’analyse de la crainte d’être persécutée et celle du risque de préjudice personnalisé se doivent d’être différentes.

[49] L’article 97 est donc un recours additionnel pour une personne qui ne peut démontrer une persécution sur la base d’un motif énuméré à l’article 96 ou, par exemple, qui ne pourrait se décharger de son fardeau de démontrer une crainte subjective ou son fondement objectif afin de satisfaire au critère de l’article 96 de la LIPR (Li au para 33). Il est donc possible pour une personne de rencontrer son fardeau de preuve en vertu de l’article 97, tout en étant incapable de le faire en vertu de l’article 96. Par conséquent, il serait erroné de conclure automatiquement qu’une personne étant incapable de satisfaire au critère de l’article 96 (que ce soit en raison de son fardeau de démontrer une crainte subjective et le fondement objectif de la crainte, ou puisque la crainte ne relève pas d’un motif énuméré à l’article 96) ne pourrait satisfaire à l’élément identifié à l’article 97 (Paramananthalingam au para 17).

C. Application aux faits : la SPR n’a pas erré en imposant un fardeau de preuve trop onéreux en déterminant que la demanderesse n’a pas été en mesure de se décharger de son fardeau de preuve en vertu des articles 96 et 97

[50] La demanderesse ne conteste plus la décision de la SPR quant à sa demande en vertu de l’article 97 de la LIPR. La demanderesse concède donc que la SPR a bien appliqué le fardeau de preuve en statuant qu’elle ne s’était pas déchargée de son fardeau de démontrer un risque prospectif de préjudice personnalisé sur la base d’un élément identifié à l’article 97.

[51] Cependant, la demanderesse conteste le fardeau de preuve que la SPR a appliqué à sa demande en vertu de l’article 96 puisque la SPR a utilisé les termes « plus probable que le contraire » dans ses conclusions de faits.

[52] La SPR aurait donc erré, selon la demanderesse, puisque le fardeau de preuve applicable n’est pas à savoir s’il est « plus probable que le contraire » qu’elle soit sujette à un risque de préjudice advenant un retour (fardeau applicable à l’article 97), mais bien de déterminer si la demanderesse a une « possibilité sérieuse » ou une « possibilité raisonnable » de persécution (fardeau applicable à l’article 96), mais dont elle n’a pas à démontrer que les chances véritables qu’elle soit en effet persécutée soient supérieures à 50%.

[53] Il est vrai que la SPR aurait pu être plus limpide dans ses motifs. Cependant, la norme de contrôle judiciaire ne requiert pas des motifs parfaits. Tel que l’explique la Cour suprême dans Vavilov aux paragraphes 92 et 128, l’on ne peut s’attendre à ce que les décideurs administratifs expliquent leurs décisions de la même façon qu’un juge pourrait le faire. Les décideurs administratifs n’ont pas à répondre à tous les arguments, ou tirer une conclusion sur chaque élément de preuve ou élément constitutif du raisonnement. Ils ne doivent que s’attaquer aux arguments principaux formulés par les parties afin de démontrer que ces arguments ont été pris en considération.

[54] Bien qu’il soit vrai que la SPR utilise les termes « plus probable que le contraire », ces termes sont utilisés dans l’évaluation de la preuve et non sur le critère juridique applicable en vertu des articles 96 ou 97. En d’autres mots, la SPR n’a pas erré en requérant que la demanderesse prouve, selon la prépondérance des probabilités, les faits sous-jacents sur lesquels elle s’appuie afin de démontrer une « possibilité sérieuse » ou une « possibilité raisonnable » de persécution (critère de l’article 96); tout comme elle n’a pas erré en appliquant la même norme de preuve, en utilisant les termes « plus probable que le contraire », afin de tirer des conclusions de faits au risque prospectif de préjudice personnalisé (critère de l’article 97).

[55] Par exemple, au paragraphe 38 de la Décision, la SPR explique à deux reprises qu’il est « plus probable » que si l’agent de persécution bénéficiait d’un statut particulier en raison du fait qu’il est un ex-militaire, il n’aurait pas eu à se présenter devant le tribunal afin de faire face à la justice. Par ces termes, la SPR rejette un élément factuel présenté par la demanderesse à savoir qu’elle ne pouvait réclamer la protection de l’État et que les militaires avaient un statut particulier. Il s’agit là de l’application de la norme de la prépondérance des probabilités à un élément factuel.

[56] Comme noté aux paragraphes 38 et 39 de la Décision, la demanderesse a porté plainte aux autorités qui ont imposé des conditions à respecter à l’agent de persécution. Ensuite, après les événements menant à la dernière plainte aux autorités, la demanderesse n’a attendu que trois jours avant de quitter le pays, sans attendre les résultats de sa plainte. Par conséquent, la demanderesse n’a pu démontrer que l’État était incapable de la protéger (voir, à contrario, Narvaez). Puisqu’il existe une présomption selon laquelle l’État est en mesure de protéger ses ressortissants, il faut une preuve « claire et convaincante » de son incapacité de le faire (Ward aux pp 724-726). Comme la demanderesse n’a pu se décharger de son fardeau, elle n’a pas été en mesure de démontrer le fondement objectif de sa crainte, celle-ci n’étant pas « avec raison » au sens de l’article 96 de la LIPR (Ward à la p726).

[57] Au paragraphe 39 de la Décision, la SPR indique que les événements allégués par la demanderesse ne peuvent établir qu’il est « plus probable que le contraire » que l’agent de persécution va continuer de la poursuivre et de l’appeler sur un numéro de téléphone différent. La SPR tire donc la conclusion que la demanderesse ne s’est pas déchargée de son fardeau de prouver qu’elle a pris les mesures nécessaires pour se protéger (comme déménager et changer de numéro de téléphone), mais que ces mesures se sont avérées inefficaces – de là la nécessité de demander l’asile dans un autre pays. Là encore, la SPR applique la norme de la prépondérance des probabilités aux éléments factuels dont la demanderesse doit établir afin de se décharger de son fardeau de démontrer une « possibilité sérieuse » ou une « possibilité raisonnable » de persécution advenant un retour. La SPR, par ces termes, ne fait que conclure que les faits sous-jacents sur lesquels la demanderesse fonde sa demande ne sont pas établis selon la norme de la prépondérance des probabilités.

[58] Enfin, au paragraphe 40 de la Décision, la SPR tire une conclusion de faits que la demanderesse n’a pu établir qu’il est « plus probable que le contraire » que l’agent de persécution soit encore motivé à la retrouver, à la persécuter et à lui causer préjudice. Encore là, cette conclusion s’appuie sur la preuve dans son ensemble, puisque l’agent de persécution n’a pas tenté de communiquer avec elle, ni avec des membres de sa famille, ni avec ses ami(e)s en Colombie (au paragraphe 37), la demanderesse n’a pas déménagé dans un autre logement ou dans une autre ville (l’appartement où elle demeurait était loué par son agent de persécution), et elle n’a pas changé son numéro de téléphone (paragraphe 39). En outre, en quittant le pays que trois jours après la dernière plainte, la demanderesse n’a pu démontrer que l’État n’était pas en mesure de la protéger et ainsi réfuter la présomption de protection de l’État.

[59] De plus, la demanderesse a suffisamment de moyens financiers (une pension de veuvage) lui permettant de vivre indépendamment en Colombie, avec une autre adresse et un numéro de téléphone différent, et l’agent de persécution n’a pas de raison évidente de recroiser la demanderesse puisque, par exemple, ils n’ont pas d’enfant ensemble ou des biens matériels en commun (voir la Décision aux para 37-41). Ce sont toutes des conclusions de faits tirées selon la norme de la prépondérance des probabilités.

[60] Les motifs globaux de la SPR étayent sa conclusion exprimée au paragraphe 36 de la Décision, où la SPR accepte que la demanderesse a peur, mais rejette que cette crainte soit prospective. Ainsi, selon la SPR, la crainte de la demanderesse ne peut établir une « possibilité sérieuse » ou une « possibilité raisonnable » de persécution advenant un retour en Colombie, conclusion aussi motivée aux paragraphes 5 et 41 de la Décision.

[61] Par conséquent, et contrairement à ce que la demanderesse plaide, la SPR n’a pas erré dans son application de la norme de preuve. Les conclusions de la SPR sur ces faits ont été tirées selon la norme de la prépondérance des probabilités; et aucune de ces conclusions de faits n’est déterminante individuellement.

[62] Collectivement, les conclusions de faits justifient la décision de la SPR à l’effet que la demanderesse ne s’est pas déchargée de son fardeau de preuve quant au critère juridique applicable. Faute d’avoir pu prouver les éléments factuels nécessaires au fondement de sa demande, la demanderesse n’a pas été en mesure de démontrer, selon la norme de la prépondérance des probabilités, une « possibilité sérieuse » ou une « possibilité raisonnable » de persécution en vertu de l’article 96, ni un risque prospectif de préjudice personnalisé sur la base d’un élément identifié à l’article 97.

[63] Par conséquent, les motifs de la décision de la SPR doivent être lus dans leur ensemble. Lorsque le critère juridique de la « possibilité sérieuse » ou de la « possibilité raisonnable » a bien été appliqué, l’on ne peut critiquer le décideur d’avoir tiré ses conclusions de faits selon la prépondérance des probabilités. Comme la juge McVeigh l’explique dans Gebremedhin au paragraphe 29 :

[29] La SAR a fait une évaluation pour déterminer si les activités menées par la demanderesse au Canada seraient portées à l’attention des autorités éthiopiennes. La SAR a tiré cette conclusion de fait en se basant sur la prépondérance des probabilités. Ce n’est pas la même chose que substituer la norme juridique servant à établir l’existence d’une « possibilité sérieuse » de persécution (Sebastiao, précité, aux paragraphes 14 et 15). Après avoir formulé ses conclusions de fait selon la prépondérance des probabilités, la SAR a examiné l’ensemble de la preuve et conclu que la demanderesse n’était pas exposée à une possibilité sérieuse de persécution. Lorsqu’on évalue la décision dans son ensemble, on constate que la SAR n’a pas imposé à la demanderesse un fardeau de preuve plus élevé que nécessaire. La SAR a conclu qu’aucun fondement n’appuyait la demande d’asile sur place de la demanderesse.

[Je souligne.]

[64] En l’espèce, les faits s’apparentent à ceux de la décision Aslan, où le juge Brown explique que le décideur a appliqué le bon critère juridique et a évalué la demande globalement, tout en concluant que la preuve ne permettait pas de conclure que la personne serait exposée à un risque. Ce faisant, le décideur n’a pas imposé à la demanderesse un fardeau de preuve plus élevé que nécessaire :

[24] Cela dit, je suis d’avis que dans son ensemble, la décision démontre que l’agent n’a pas mal compris les allégations du demandeur au sujet de l’incident du navire ni appliqué le mauvais critère pour cette partie de la demande. L’agent a évalué la demande en tenant compte de la situation globale du demandeur ainsi que de ses opinions politiques, et a conclu qu’il n’avait pas le profil d’une personne qui serait exposée à un risque à cause de celles-ci. Finalement, les conclusions tirées par l’agent relativement aux commentaires faits à bord du navire reposaient sur le fait que la preuve produite ne démontrait pas que les autres membres de l’équipage avaient bel et bien rapporté les commentaires du demandeur.

[65] Lorsque la SPR mentionne les termes « plus probable que le contraire », elle ne confond pas la norme de preuve de la prépondérance des probabilités applicable aux conclusions de faits, et le critère juridique de la « possibilité sérieuse » ou de la « possibilité raisonnable ». La SPR fait clairement allusion à la norme de preuve qu’elle applique aux faits, et non au critère juridique (comme l’explique aussi le juge Russell dans la décision Jeyaratnam c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 1244 au para 45).

[66] Enfin, s’appuyant sur Gomez Dominguez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 1098 [Gomez Dominguez], la demanderesse soumet qu’au lieu de se demander si la motivation et la capacité de son agent de persécution avaient été prouvées par prépondérance des probabilités (« plus probable que le contraire »), la SPR aurait dû procéder à une évaluation globale du risque et déterminer si celui-ci présentait une « possibilité sérieuse » ou une « possibilité raisonnable » de persécution à l’avenir, tel que le commande la décision Adjei au paragraphe 31.

[67] Or, dans la décision Bolivar Cuellar c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 641 aux paragraphes 14 à 20, rendue en 2022 après la décision Gomez Dominguez, la juge Walker distingue Gomez Dominguez pour expliquer l’analyse du risque (ou de la « possibilité sérieuse ») et son fardeau de preuve. La juge Walker explique que dans Gomez Dominguez, la demanderesse a prouvé selon la prépondérance des probabilités que les Forces armées révolutionnaires de Colombie avaient une motivation hors du commun et la capacité de s’en prendre à elle. La juge Walker précise ensuite que la norme de la prépondérance des probabilités est la bonne norme à appliquer aux faits qu’un demandeur d’asile doit établir dans l’évaluation du risque prospectif de persécution, à savoir s’il y a une « possibilité sérieuse » de persécution advenant un retour (voir aussi Anyira c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 882 aux para 41-42).

[68] En l’espèce, c’est justement ce que la SPR a fait. Elle a fait une évaluation globale du risque, a considéré la preuve dans son ensemble selon la norme de la prépondérance des probabilités, et a déterminé qu’il n’y avait pas en l’espèce une « possibilité sérieuse » ou une « possibilité raisonnable » de persécution. S’agissant du fardeau applicable aux faits, la SPR n’a pas erré en utilisant les termes « plus probable que le contraire » pour expliquer ses conclusions. La SPR n’a pas, par conséquent, appliqué une norme de preuve trop onéreuse au critère juridique. La décision Gomez Dominguez doit donc être lue et comprise dans son contexte entier et n’est pas pertinente en l’espèce.

D. Les conclusions de la SPR ne sont pas fondées sur des stéréotypes

[69] La demanderesse plaide que les conclusions de faits de la SPR sont teintées de stéréotypes. Notamment, elle soumet que l’analyse de la SPR suggère implicitement que la violence conjugale qu’elle a connue n’était pas sérieuse. Elle reproche par exemple à la SPR d’avoir pris en compte la courte durée de sa relation avec l’agent de persécution, le fait que le couple n’était pas marié, n’avait pas d’enfants et ne possédait pas de biens matériels en commun – insinuant donc que l’agent de persécution n’aurait pas la motivation de la persécuter à son retour. Selon la demanderesse, ce genre d’insinuations, notamment démontrées au paragraphe 39 de la Décision, est fondé sur des stéréotypes, ce qui fut préalablement condamné par la Cour dans la décision Sebok c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1107 [Sebok], au paragraphe 15.

[70] Je ne peux souscrire à l’argument de la demanderesse selon lequel la SPR s’est fondée sur des stéréotypes pour en venir à sa conclusion. La SPR a raisonnablement tenu compte des circonstances particulières au cas de la demanderesse tel que l’indique la décision Sebok. Affirmer que l’agent de persécution aurait plus de difficulté à retrouver la demanderesse puisqu’ils n’ont aucun bien en commun ou puisqu’elle n’aura pas la même adresse ou numéro de téléphone n’est pas de la conjecture. Il s’agit plutôt d’une conclusion logique et cohérente qui tient en compte de la réalité de la demanderesse aujourd’hui en 2023, selon les éléments de preuve déposés au dossier.

[71] Contrairement aux allégations de la demanderesse, la SPR ne remet pas en question la violence vécue par celle-ci. Plutôt, elle examine les faits présentés devant elle afin de déterminer si, selon la prépondérance des probabilités, la demanderesse s’est déchargée de son fardeau qu’il y a une « possibilité réelle » ou « raisonnable » de persécution au sens de l’article 96, ou qu’il est plus probable que le contraire qu’elle soit sujette à un risque prospectif de préjudice personnalisé sur la base d’un élément identifié à l’article 97, advenant un retour.

[72] La SPR a statué que la demanderesse ne s’était pas déchargée de son fardeau. En s’appuyant sur les faits présentés, et sur la norme applicable de la prépondérance des probabilités, la SPR tire la conclusion que la demanderesse n’a ni établi une possibilité réelle de persécution, ni un risque prospectif. La SPR a tiré cette conclusion en raison de la preuve présentée, comme discuté plus haut (Lopes Gomez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 1160 aux para 14, 18, 20, 27, 29, 31).

[73] Ce faisant, selon moi, la SPR n’a pas appliqué une norme de preuve erronée ni pris sa décision sur la base de stéréotypes. Elle a plutôt bien expliqué les raisons motivant ses conclusions, et sa décision est raisonnable, cohérente, intelligible et transparente à cet égard.

E. La SPR a suffisamment tenu en compte le profil de femme seule de la demanderesse dans son analyse

[74] La demanderesse soumet que la SPR n’a pas été sensible à son état psychologique et au fait qu’elle est une femme seule âgée de 71 ans. Elle soumet que l’abus grave et les séquelles laissées par les évènements de violence vécus l’ont poussée à quitter le pays définitivement et qu’elle ne pourrait donc pas y retourner surtout à un âge avancé.

[75] La demanderesse ajoute que la SPR a erré au paragraphe 41 de la Décision lorsqu’elle conclut que « rien dans la situation particulière de la demanderesse ne la mettrait en position d’une possibilité sérieuse de persécution du seul fait d’être une femme qui vivrait seule en Colombie ». Plutôt, la demanderesse soumet que le CND et la preuve soumise démontrent que la violence envers les femmes existe en Colombie et que l’État n’a pas l’intention de prendre des mesures véritables pour endiguer le phénomène.

[76] Selon moi, en examinant la preuve dans son ensemble, la SPR a raisonnablement conclu que, à la lumière de la preuve présentée, la demanderesse n’était pas plus susceptible d’être victime de persécution parce qu’elle est une femme vivant seule. Cette preuve incluait l’absence d’un risque précis, le fait qu’elle vivait seule en Colombie pendant presque deux ans sans avoir été persécutée avant d’emménager avec son agent de persécution, son indépendance financière, sa capacité démontrée à vivre seule et le fait qu’elle avait des amis et de la famille en Colombie. La SPR tire cette conclusion de fait en précisant avoir accordé un certain poids à la preuve objective relative au phénomène de la violence envers les femmes en Colombie (Décision au para 42). Par conséquent, sa décision est raisonnable, cohérente, intelligible et transparente à cet égard.

[77] La demanderesse soumet aussi que les femmes seules en Colombie sont davantage vulnérables à être victimes de violence en Colombie. Par conséquent, elle allègue ne pas avoir à démontrer spécifiquement qu’elle sera victime de persécution dans l’avenir. Il est vrai que les décisions Salibian c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (CA), [1990] 3 CF 250, 1990 CanLII 7978 (CAF) à la page 259, Fi au paragraphe 16 et Arocha c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 468 au paragraphe 12, sur lesquelles s’appuie la demanderesse, indiquent que dans la mesure où des actes répréhensibles ont été commis, ou étaient susceptibles d’être commis à l’égard des membres d’un groupe auquel appartient un demandeur d’asile, la personne revendiquant le statut de réfugié n’est pas tenue de démontrer avoir été elle-même persécutée, ou qu’elle le serait à l’avenir. Il s’agit là du principe fondamental sur lequel repose la protection des réfugiés.

[78] Cependant, s’il est vrai que la demanderesse n’est pas tenue sous l’article 96 de la LIPR de démontrer que sa crainte de persécution est « personnalisée » puisqu’elle fait déjà partie du groupe des femmes seules ou victimes de violence conjugale, elle doit tout de même démontrer que ce groupe est sujet à une persécution généralisée. Tel que le précise le juge Martineau au paragraphe 16 de la décision Fi sur lequel la demanderesse s’appuie, ce même paragraphe précise également qu’une « demande d’asile présentée dans un contexte de violence généralisée dans un pays donné doit satisfaire aux mêmes exigences que toute autre demande » [je souligne].

[79] Par conséquent, pour réussir selon cet argument, encore faut-il que la demanderesse se décharge de son fardeau, selon la prépondérance des probabilités, de démontrer qu’elle fait partie d’un groupe qui subit une persécution généralisée. Or, la demanderesse n’a pas été en mesure de le faire. La SPR a conclu que la preuve n’établissait pas que la demanderesse était en position sérieuse de persécution du seul fait qu’elle est une femme seule (et victime de violence conjugale) pour les raisons discutées plus haut (voir Camacho v Canada (Citizenship and Immigration), 2022 FC 1507 aux para 11, 14, 28; Sebok aux para 7, 24, 25).

[80] En d’autres mots, comme le requiert la décision Fi sur laquelle s’appuie la demanderesse, elle n’a pas été en mesure de « satisfaire aux exigences » d’une demande de statut de réfugié. La conclusion de la SPR est à l’effet que la demanderesse n’a pas été en mesure de démontrer en quoi il y avait une « possibilité sérieuse » ou une « possibilité raisonnable » de persécution si elle était renvoyée en Colombie, sur la base de son appartenance au groupe des femmes victimes de violence conjugale ni selon le groupe des femmes habitant seules (puisqu’elle a habité seule préalablement sans être victime et qu’il n’y avait aucune preuve spécifique faisant état d’un risque particulier de persécution pour les femmes colombiennes pour la simple raison qu’elles vivent seules) (Décision aux para 37-42).

[81] Pour ce qui est de l’incapacité de la Colombie à protéger les femmes contre la violence, là encore, la SPR a tiré une conclusion de faits contraire. Tel que la Cour l’explique dans la décision Vigueras Avila aux paragraphes 28 à 29 (voir aussi Perez Mendoza au para 33), lorsque l’agent de persécution n’est pas l’État, un demandeur doit démontrer que son gouvernement n’a pas été en mesure de le protéger. Il s’agit là d’une question de faits.

[82] En l’espèce, bien qu’il y ait une preuve objective au sujet de la violence envers les femmes en Colombie, la preuve en l’espèce est qu’avant de rencontrer son agent de persécution, la demanderesse ne faisait pas l’objet de violence. De plus, la preuve démontre que lorsque la demanderesse s’est plainte aux autorités, celles-ci ont imposé des mesures contre l’agent de persécution afin de la protéger. Le fait que l’agent de persécution a récidivé ne saurait être associé directement à une incapacité de l’État d’imposer des mesures additionnelles, surtout que la demanderesse n’a jamais permis à l’État de le démontrer, ayant plutôt rapidement quitté pour le Canada.

V. Conclusion

[83] Selon moi, la Décision de la SPR est suffisamment cohérente, intelligible et transparente. La SPR n’a pas commis d’erreur justifiant l’intervention de la Cour.

[84] Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[85] Aucune question de portée générale n’a été soumise aux fins de certification et la Cour est d’avis que cette cause n’en soulève aucune.

JUGEMENT au dossier IMM‑3136-22

LA COUR STATUE:

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Aucune question d’importance générale n’est certifiée.

« Guy Régimbald »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑3136-22

 

INTITULÉ :

SARA CECILIA OBANDO SIERRA c MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

MONTRÉAL, QUÉBEC

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 19 JANVIER 2023

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE Régimbald

 

DATE DES MOTIFS :

LE 22 JUIN 2023

 

COMPARUTIONS :

Me Nancy Cristina Munoz Ramirez

POUR LA DEMANDERESSE

Me Mathieu Laliberté

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Roa Services Juridiques

Montréal, Québec

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Procureur général du Canada

Montréal, Québec

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

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