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Date : 20230622


Dossier : IMM-8464-21

Référence : 2023 CF 883

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 22 juin 2023

En présence de madame la juge McDonald

ENTRE :

IGOR BENEDETTO ASCIUTTO

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de la décision datée du 10 novembre 2021 [la décision], par laquelle un agent des visas [l’agent] a refusé sa demande de permis de travail dispensé de l’étude d’impact sur le marché du travail [EIMT] ou de permis de séjour temporaire [PST]. Pour les motifs qui suivent, la présente demande de contrôle judiciaire sera accueillie.

I. Contexte

[2] Le demandeur est initialement venu au Canada en 2019 pour ouvrir un restaurant italien. Le restaurant a ouvert ses portes en février 2020, mais a fermé en mars 2020 en raison de la pandémie de COVID-19. Pendant la pandémie, le restaurant a commencé à fournir des repas à des organisations caritatives et bénévoles. Le demandeur est resté au Canada jusqu’à la fin de 2020 et est parti avant la date d’échéance de son visa, qui expirait en janvier 2021.

[3] En janvier 2021, le demandeur a présenté une demande de permis de travail dispensé de l’EIMT au titre de l’alinéa 205a) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [le RIPR]. Le premier agent des visas chargé d’examiner la demande a soulevé des doutes selon lesquels le demandeur avait travaillé sans autorisation alors qu’il était au Canada en 2020, à titre de gérant ou de propriétaire exploitant du restaurant. Le demandeur a reçu une lettre d’équité procédurale le 4 mars 2021 l’informant des doutes du premier agent.

[4] Le demandeur a répondu à la lettre d’équité procédurale le 23 mars 2021, déclarant qu’il était présent lors de l’ouverture du restaurant pour observer les opérations, ce qui, selon lui, n’équivalait pas à entrer dans la population active canadienne.

[5] Le demandeur est revenu au Canada le 27 mars 2021 muni d’une autorisation de voyage électronique [AVE] et a été interrogé par l’Agence des services frontaliers du Canada [ASFC] à l’aéroport international Pearson. Lorsqu’il a été interrogé pour savoir s’il avait travaillé au Canada en 2020, le demandeur a expliqué qu’il avait fait du marketing et supervisé les ventes et les opérations du restaurant. L’ASFC a conclu que le demandeur avait travaillé au Canada et qu’il avait également l’intention de travailler au Canada dans le cadre de ce voyage, car ses bagages contenaient du matériel de cuisson et des échantillons de nourriture. L’AVE du demandeur a été annulée le 29 mars 2021, et il a quitté le Canada.

[6] Le demandeur a présenté d’autres observations en réponse à la lettre d’équité procédurale le 31 mars 2021 concernant sa tentative d’entrer au Canada le 27 mars 2021.

[7] Le 7 avril 2021, la demande de permis de travail du demandeur a été refusée, au motif qu’il avait travaillé au Canada sans autorisation en 2020. Lorsque le demandeur a sollicité le contrôle judiciaire de cette décision, les parties ont convenu qu’elle serait réexaminée par un autre agent, et le demandeur a déposé d’autres observations le 22 septembre 2021.

[8] Le demandeur a reçu une seconde lettre d’équité procédurale le 1er octobre 2021, lui demandant de fournir des renseignements supplémentaires sur les avantages économiques du travail qu’il envisage d’effectuer au Canada, ainsi que sur ses compétences et son expérience professionnelle. Le demandeur a répondu à la seconde lettre d’équité procédurale le 28 octobre 2021.

A. La décision faisant l’objet du contrôle

[9] La décision mentionne que l’agent n’était pas convaincu que le demandeur satisfaisait aux critères d’admissibilité pour une demande de permis de travail dispensé de l’EIMT.

II. Question en litige

[10] Bien que le demandeur ait soulevé un certain nombre de questions au sujet de la décision, le fait que l’agent n’a pas répondu à la demande de PST est déterminant dans le cadre du présent contrôle judiciaire. Par conséquent, je refuse d’aborder les autres questions soulevées par le demandeur.

III. Analyse

A. L’agent a-t-il commis une erreur en ne répondant pas à la demande de PST?

[11] Le demandeur soutient que l’agent a commis une erreur en n’ayant pas examiné de sa demande de PST. Il n’y a aucune référence à la demande de PST ni dans la décision elle-même ni dans les notes pertinentes inscrites au Système mondial de gestion des cas.

[12] Le demandeur a sollicité que son cas soit examiné aux fins d’obtention d’un PST dans ses observations du 23 mars, du 31 mars et du 28 octobre 2021. Les observations du 23 mars, d’une longueur d’environ quatre pages, font mention des facteurs auxquels tenir compte dans le cadre d’une demande de PST.

[13] La délivrance d’un PST est hautement discrétionnaire (Martin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 422 au para 25). Le critère à remplir pour déposer une demande de PST est peu exigeant. Il suffit d’envoyer une lettre pour lancer la demande (Dhandal c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 865 au para 15).

[14] D’après la preuve au dossier, je suis convaincue que le demandeur a fait une demande de PST. Cela m’amène à la question de savoir si l’agent a tenu compte de la demande, étant donné que la décision elle-même ne fait aucune référence au PST.

[15] Dans ses observations, le défendeur associe la demande de PST du demandeur à l’interdiction prévue au sous-alinéa 200(3)e)(i) du RIPR. Ce sous-alinéa énonce qu’un permis de travail ne peut être délivré à l’étranger qui a exercé un emploi au Canada sans autorisation au Canada, sauf si une période de six mois s’est écoulée depuis la cessation du travail fait sans autorisation. Le défendeur soutient que, puisque l’agent n’a pas conclu que le demandeur avait travaillé au Canada sans autorisation, il n’était pas tenu d’examiner la demande de PST.

[16] Le défendeur ne renvoie à aucune jurisprudence permettant de justifier cette interprétation, et l’agent n’a pas établi ce lien. De plus, le RIPR ne prévoit pas que le refus d’accorder un permis de travail au titre de l’alinéa 205a) rend un demandeur inadmissible à un PST. Au contraire, le paragraphe 24(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 prévoit spécifiquement une demande de PST lorsqu’une personne ne répond pas aux exigences de la Loi :

Devient résident temporaire l’étranger, dont l’agent estime qu’il est interdit de territoire ou ne se conforme pas à la présente loi, à qui il délivre, s’il estime que les circonstances le justifient, un permis de séjour temporaire — titre révocable en tout temps.

[17] À mon avis, le fait que l’agent n’a pas répondu à la demande de PST constitue une erreur susceptible de contrôle (Do c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1065).

IV. Conclusion

[18] La demande de contrôle judiciaire sera accueillie. Il n’y a aucune question à certifier.

JUGEMENT dans le dossier IMM-8464-21

LA COUR STATUE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire est renvoyée à un autre décideur pour une nouvelle décision.

  2. Il n’y a aucune question à certifier.

« Ann Marie McDonald »

Juge


 

COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :

IMM-8464-21

INTITULÉ :

IGOR BENEDETTO ASCIUTTO c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 19 juIn 2023

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE MCDONALD

 

DATE DES MOTIFS :

lE 22 JUIN 2023

COMPARUTIONS :

Clare Yacyshyn

POUR LE DEMANDEUR

Ian Hicks

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lee & Company

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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