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Date : 20230208


Dossier : T‐349‐21

Référence : 2023 CF 190

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 8 février 2023

En présence de madame la juge Fuhrer

ENTRE :

CHEUNG’S BAKERY PRODUCTS LTD.

demanderesse

et

EASYWIN LTD.

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La demanderesse demande la radiation de l’enregistrement de deux marques de commerce établies au nom de la défenderesse, à savoir les marques portant les numéros d’enregistrement LMC1044058 et LMC1044062, tous deux datés du 23 juillet 2019, pour Chinese Characters & Dessin.

[2] Pour les motifs qui suivent, j’accueille la demande de la demanderesse.

II. Les parties et leurs marques de commerce

[3] Les parties sont en concurrence directe dans le domaine des produits de boulangerie et des services connexes.

[4] La demanderesse, Cheung’s Bakery Products Ltd. [CBP], a lancé son entreprise familiale de boulangerie à Vancouver (Colombie‐Britannique) en 1974. En collaboration avec son licencié, Cheung’s Bakery et Coffee Shop Ltd. [le licencié], CBP exploite actuellement quatre magasins dans la région du Grand Vancouver en liaison avec les marques de commerce déposées indiquées ci‐dessous (les numéros et les dates d’enregistrement pertinents sont indiqués) :

Marque de commerce de CBP

Numéro d’enregistrement et date

LMC354194

31 mars 1989

LMC480506

14 août 1997

LMC667403

12 juillet 2006

[5] CBP a également demandé l’enregistrement de la marque de commerce figurant ci‐dessous (le numéro de demande et la date de production pertinents sont indiqués) :

Marque de commerce de CBP

Numéro de demande et date de production

2026952

6 mai 2020

[6] La boulangerie principale de CBP, qui est également la première boulangerie ouverte par CBP en juin 1974, s’occupe de toute la fabrication des produits de boulangerie pour cet emplacement et pour les trois autres emplacements exploités par son licencié. Le chiffre d’affaires annuel des produits de boulangerie vendus en liaison avec les marques de commerce déposées de CBP a dépassé 1,8 million de dollars depuis 2000, et a dépassé 2,5 millions de dollars depuis 2011.

[7] La défenderesse, Easywin Ltd. [Easywin], et Saint Honore Cake Shop Limited [Saint Honore] sont des filiales en propriété exclusive de Saint Honore Holdings Limited [collectivement, le Groupe Saint Honore]. Easywin est une société de portefeuille, tandis que Saint Honore est la société exploitante. Le Groupe Saint Honore se consacre à la fabrication, à la distribution et à la vente de produits de boulangerie et d’autres produits à Hong Kong, à Macao, en Chine, et dans les marchés étrangers, y compris le Canada. Créée en 1972, Saint Honore est aujourd’hui l’une des plus grandes chaînes de boulangeries de Hong Kong, avec un chiffre d’affaires annuel supérieur à un milliard de dollars de Hong Kong (environ 160 millions de dollars canadiens) de 2017 à 2020.

[8] En plus d’exploiter une chaîne de boulangeries, Saint Honore propose des produits alimentaires emballés distribués à Hong Kong par l’intermédiaire de ses magasins et points de vente tiers situés à Hong Kong, à Macao et dans le sud de la Chine. Le chiffre d’affaires annuel des produits alimentaires emballés vendus hors de Chine, y compris au Canada, était d’environ 3 millions de dollars de Hong Kong en 2020 (environ 500 000 dollars canadiens).

[9] Easywin a obtenu le 23 juillet 2019, sous les numéros indiqués, les enregistrements des marques de commerce suivantes au Canada :

La marque de commerce d’Easywin

Numéro d’enregistrement

LMC1044058

LMC1044062

[10] Easywin affirme que ses marques de commerce déposées sont employées au Canada en liaison avec les produits et services indiqués dans ses enregistrements depuis au moins août 2020. Les produits d’Easywin (principalement des produits alimentaires emballés) sont vendus et mis en vente en Ontario et en Colombie‐Britannique par l’intermédiaire de son distributeur, Canada Six Fortune Enterprise Co. Ltd. [Canada Six Fortune], depuis août 2020. D’après les renseignements fournis par Canada Six Fortune, la valeur des ventes au détail de produits arborant les marques de commerce d’Easywin au Canada devrait dépasser 592 000 $ en 2020.

[11] Les deux parties utilisent leurs marques de commerce respectives sur les emballages de leurs produits (c’est‐à‐dire principalement des produits et services liés à la boulangerie) vendus au Canada, tandis que les éléments de preuve de CBP démontrent également l’emploi de ses marques de commerce déposées sur l’affichage de magasins, sur la papeterie et dans le matériel d’annonce et promotionnel relatifs aux produits de CBP.

III. La preuve des parties

A. Témoins experts

(1) Témoin expert de CBP : Monsieur Wenhui Zhong

[12] Monsieur Wenhui Zhong est un interprète judiciaire agréé en cantonais et en mandarin et un traducteur agréé en chinois de la Society of Translators and Interpreters de la Colombie‐Britannique. Il parle couramment l’anglais, le mandarin, le cantonais et sait lire et comprend les caractères chinois.

[13] M. Zhong a examiné les caractères chinois qui figurent dans les marques de commerce déposées de CBP, y compris la marque de commerce visée par la demande, et dans les marques de commerce d’Easywin. Selon M. Zhong, les deux derniers caractères chinois qui figurent dans chacune des marques de commerce d’Easywin sont les mêmes que les deux premiers caractères qui figurent dans deux des marques de commerce déposées de CBP, lesquelles sont composées de caractères chinois et des deux mêmes caractères qui figurent dans la marque de commerce visée par la demande, avec des styles d’écriture différents apparentés à différentes polices. La prononciation de ces mêmes caractères en mandarin est « an na » et en cantonais est « on naa », ce qui signifie « Anna » en anglais. M. Zhong estime en outre qu’en anglais, les marques de commerce de CBP contenant des caractères chinois se traduisent par « Anna’s Cake House », et les marques de commerce d’Easywin se traduisent par « Hong Kong Saint Anna » ou « Saint Anna of Hong Kong ».

[14] M. Zhong n’a pas été contre‐interrogé.

(2) Témoins experts d’Easywin

i. Monsieur Michael Mulvey

[15] Monsieur Mulvey est membre permanent du corps professoral et directeur de la section de Marketing‐Gestion des ressources humaines et comportements organisationnels à l’École de gestion Telfer de l’Université d’Ottawa. Il a obtenu un doctorat en administration des affaires et en marketing de la Penn State University en 1997. Son domaine d’expertise concerne le comportement des consommateurs, l’image de marque et la stratégie de marketing de détail.

[16] Selon M. Mulvey, un consommateur canadien moyen considérerait en général les marques composées de caractères non latins comme des dessins et non comme des marques verbales ou des marques de commerce composées de mots. De plus, le consommateur n’aurait pas la capacité de déduire la signification des caractères non latins. M. Mulvey a confirmé en contre‐interrogatoire qu’il fondait l’intégralité de son opinion sur la définition de consommateur canadien qui lui avait été donnée par les avocats d’Easywin, soit qu’il s’agissait d’un consommateur canadien moyen qui ne peut pas lire et comprendre les caractères chinois.

[17] M. Mulvey estime qu’un consommateur canadien percevrait probablement les marques de commerce d’Easywin et de CBP comme des marques composées d’éléments graphiques, et qu’il est peu probable qu’un consommateur canadien moyen compare les caractères non latins avec les caractères d’une autre marque de commerce. Il est également d’avis qu’un consommateur canadien serait attiré par l’élément graphique stylisé placé devant les caractères non latins des marques de commerce d’Easywin et qu’il établirait probablement des similitudes avec d’autres marques de commerce ou distinguerait ces dernières des marques de commerce d’Easywin en fonction de la présence ou de l’absence de cet élément graphique stylisé.

ii. Monsieur Sonny Wong

[18] Monsieur Sonny Wong est co‐fondateur d’une agence de marketing‐communications multiculturelle axée sur la communication en langue chinoise et il détient un baccalauréat en sciences commerciales spécialisé en marketing. Il possède plus de 30 ans d’expérience en marketing et en communications et a développé une expertise en marketing multiculturel, notamment en matière de campagnes de marketing comportant des communications en langue chinoise.

[19] Selon M. Wong, il existe de multiples segments de marché au sein du marché sino‐canadien, lesquels comportent différents degrés de compréhension des langues chinoises. M. Wong estime que les consommateurs dans le marché sino‐canadien ont tendance à faire la distinction entre les marques de commerce en fonction de petites différences, particulièrement en ce qui concerne les noms de marque originaires de Chine ou d’Asie en général. M. Wong explique ce comportement de ces consommateurs par, entre autres, leur tendance à voyager entre le Canada et la Chine dans une plus grande mesure que le Canadien moyen, l’exploitation du « Bamboo Network » (c’est‐à‐dire un réseau constitué de liens au sein de la communauté chinoise dans le monde) et leur exposition aux produits contrefaits.

[20] Pour évaluer l’impression générale d’une marque de commerce composée de caractères chinois dans l’esprit du consommateur dans le marché sino‐canadien, M. Wong estime qu’il est nécessaire de prendre en compte : (i) la perception de ceux qui peuvent lire et comprendre les caractères chinois; (ii) la perception de ceux qui ne peuvent pas lire ou comprendre les caractères chinois.

[21] M. Wong estime que le consommateur dans le marché sino‐canadien qui ne peut pas lire et comprendre les caractères chinois est susceptible d’accorder plus d’attention aux éléments graphiques des marques de commerce d’Easywin et de remarquer la différence dans le nombre de caractères entre les marques de commerce d’Easywin et celles de CBP. Un consommateur dans le marché sino‐canadien qui peut lire et comprendre les caractères chinois remarquera cependant l’élément graphique dans les marques de commerce d’Easywin, mais ce consommateur lira et comprendra également les cinq caractères chinois des marques de commerce d’Easywin et verra la différence d’avec les caractères des marques de commerce de CBP.

[22] M. Wong a révélé lors du contre‐interrogatoire qu’il n’avait recueilli aucune donnée ni effectué aucun test statistique et qu’il n’avait fait référence à aucun article scientifique évalué par des pairs pour étayer ses hypothèses. M. Wong a expliqué que son opinion est fondée sur ses observations et sur ses années d’expérience en marketing, particulièrement auprès des consommateurs sino‐canadiens.

B. Témoins des faits

(1) Témoins des faits de CBP

i. Monsieur Ron Cheung Jr.

[23] Monsieur Cheung Jr. est le directeur des opérations de CBP. Dans son affidavit, il fournit des renseignements sur le contexte et l’historique de CBP, les opérations de CBP et de son licencié, l’emploi de la marque de commerce de CBP en liaison avec ses produits et services, ainsi que les activités de publicité et de vente de CBP.

[24] M. Cheung Jr. a été contre‐interrogé sur son estimation selon laquelle environ 80 à 85 % des clients de CBP sont d’origine chinoise, et sur sa référence à un sondage réalisé en magasin par CBP. Il a été révélé que CBP avait créé les questions du sondage, que la société de marketing utilisée n’avait travaillé que sur la configuration du sondage, que CBP avait recueilli et analysé les données, que le questionnaire était donné aux clients lorsqu’ils effectuaient un achat, et que le sondage ne prenait en compte que les clients qui sont venus une seconde fois entre juin et juillet 2010 pour remettre leur questionnaire en échange d’un rabais de dix pour cent sur leur prochain achat.

ii. Mme Candy Ka Ning Tong

[25] Mme Tong est associée principale dans un cabinet d’avocats de Hong Kong qui a effectué des recherches dans le registre des sociétés et le registre des marques de commerce de Hong Kong. Mme Tong déclare qu’Easywin et Saint Honore ont la même adresse de siège social à Hong Kong et ont les trois mêmes administrateurs, et que Saint Honore a fourni les documents produits par Easywin. Mme Tong conclut qu’Easywin et Saint Honore sont liées et exploitées par les mêmes personnes.

[26] Mme Tong n’a pas été contre‐interrogée.

(2) Témoins des faits d’Easywin

i. Mme Carrina Man Li Wong

[27] Mme Wong est directrice générale de Saint Honore et directrice d’Easywin. Elle fournit des renseignements sur le contexte et l’historique de Saint Honore, ses opérations, ses ventes, ses publicités et ses concurrents, ainsi que sur son emploi des marques de commerce déposées en cause en liaison avec des produits et services.

ii. Mme Kathy Paterson

[28] Mme Paterson est auxiliaire juridique auprès des avocats d’Easywin. Elle joint à son affidavit des copies certifiées conformes de divers enregistrements de marques de commerce et de définitions tirées de dictionnaires.

IV. Les questions en litige et les dates pertinentes

[29] Il existe une question préliminaire concernant la qualité pour agir de CBP au titre de l’article 57 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‐13 [LMC] pour présenter la présente demande de radiation. Voir l’annexe A pour connaître les dispositions législatives applicables.

[30] Il existe également des questions préliminaires au sujet des témoins experts des parties que j’aborde dans la section Analyse ci‐dessous.

[31] Par ailleurs, CBP soulève les motifs de radiation suivants au titre de l’article 18 de la LMC :

  • (1)Alinéa 18(1)a) – Les marques d’Easywin ne sont pas enregistrables en vertu de l’alinéa 12(1)d) de la LMC en raison d’une confusion avec les marques de commerce déposées de CBP sous les numéros LMC480506 en date du 14 août 1997 pour Chinese Characters Dessin et LMC667403 en date du 12 juillet 2006 pour ANNA’S CAKE HOUSE + Chinese Characters Dessin; la date pertinente pour évaluer ce motif est le 23 juillet 2019, soit la date d’enregistrement des marques de commerce d’Easywin.

  • (2)Alinéa 18(1)b) – Les marques de commerce d’Easywin ne sont pas distinctives au 22 février 2021, date à laquelle CBP a entamé la présente procédure.

  • (3)Alinéa 18(1)d) – Easywin n’est pas la personne ayant droit d’obtenir l’enregistrement des marques de commerce contestées; la date pertinente pour évaluer ce motif est la date de production des demandes de marque de commerce sous‐jacentes, soit le 26 septembre 2017 (car les demandes de marque de commerce étaient fondées sur l’emploi projeté des marques de commerce au Canada).

  • (4)Alinéa 18(1)e) – Les demandes de marque de commerce sous‐jacentes ont été produites de mauvaise foi; la date pertinente pour évaluer ce motif est également le 26 septembre 2017, date de production des demandes de marque de commerce.

[32] Les dates pertinentes peuvent être trouvées directement dans les motifs d’invalidité allégués, à l’exception des motifs énoncés à l’alinéa 18(1)d) qui nous renvoie à l’article 16 de la LMC qui, lui, traite du droit à l’enregistrement. Qu’il s’agisse du paragraphe 16(3) tel qu’il existait avant le 17 juin 2019, date à laquelle des modifications importantes à la LMC sont entrées en vigueur, ou du paragraphe 16(1) actuel, la date pertinente applicable au motif d’absence de droit à l’enregistrement invoqué en l’espèce serait la même dans les circonstances, soit la date de production des demandes. Il en est ainsi parce que selon la preuve d’Easywin, ses marques de commerce n’ont été employées au Canada qu’après la production des demandes d’enregistrement.

[33] Les parties conviennent, tout comme moi, que les motifs d’invalidité invoqués reposent sur la probabilité de confusion entre leurs marques de commerce respectives. Par conséquent, après avoir abordé les questions préliminaires, les motifs énoncés ci‐dessous portent sur l’analyse relative à la confusion. L’examen du motif de mauvaise foi complétera les motifs.

V. Analyse

A. Questions préliminaires

(1) La qualité pour agir de CBP

[34] Je suis convaincue que CBP a satisfait au critère peu exigeant permettant d’établir qu’elle est une « personne intéressée », au sens de l’article 2 de la LMC, comme l’exige l’article 57 de la LMC.

[35] Tout d’abord, je constate qu’Easywin ne prend pas position sur cette question.

[36] Deuxièmement, il suffit que la personne sollicitant la radiation ait utilisé la ou les marques de commerce revendiquées qu’elle invoque dans la procédure avant l’enregistrement de la ou des marques de commerce contestées : CIBC World Markets Inc. c Stenner, 2010 CF 397 aux para 19, 20; Beijing Jingdong 360 du E‐commerce Ltd. c Zhang, 2019 CF 1293 au para 11; Blue Seal Inc. c Poorter, 2020 CF 178 au para 10.

[37] Je conclus que la preuve de CBP dans la présente procédure, notamment l’affidavit de Ron Cheung Jr. daté du 13 mai 2021, établit que CBP a employé ses marques de commerce déposées au Canada avant que les marques de commerce contestées d’Easywin ne soient enregistrées.

(2) Chaque partie s’oppose au témoignage d’expert de l’autre partie

[38] Je souligne qu’aucune des parties n’a cherché, en vertu de l’article 52.5 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‐106, à empêcher son ou ses experts respectifs de témoigner. J’examine donc leurs objections dans le contexte du poids à attribuer à leur témoignage d’expert respectif.

[39] En ce qui concerne l’expert de CBP, M. Wenhui Zhong, il n’a pas été contre‐interrogé et, par conséquent, je suis d’accord avec CBP pour dire que son témoignage n’est pas contesté. Easywin conteste par écrit et oralement les qualifications de cet expert de façon tardive dans la présente procédure. Cela dit, à mon avis, son témoignage doit être considéré dans le contexte de ses qualifications en tant que traducteur.

[40] Pour ce qui est de l’expert d’Easywin, M. Sonny Wong, j’accorde peu de poids à son témoignage. Je ne suis pas nécessairement en désaccord avec Easywin qui soutient que l’expérience et l’observation sont une forme de collecte de données. Je suis cependant d’accord avec CBP pour dire que les hypothèses de M. Wong ne sont étayées par aucun test statistique, aucun article évalué par des pairs ou aucun sondage officiel. Dans une certaine mesure, elles concernent également des conclusions juridiques qu’il appartient à la Cour de tirer.

[41] Par exemple, M. Wong a été interrogé en contre‐interrogatoire sur ses hypothèses selon lesquelles les Canadiens d’origine chinoise sont plus capables que les Canadiens qui ne sont pas d’origine chinoise de distinguer de petites différences entre différentes marques de commerce pour des raisons culturelles ou autres, ce qui occasionne un degré [traduction] « d’hypersensibilité » dans le marché en cause. À mon avis, la mesure dans laquelle une ou plusieurs différences entre des marques de commerce peuvent servir à les distinguer est une conclusion juridique que la Cour doit tirer dans une analyse relative à la confusion où, comme en l’espèce, celle‐ci est une question à trancher.

[42] De plus, lorsqu’on lui a demandé s’il avait réalisé un sondage officiel, M. Wong a répondu que ses opinions sont fondées sur l’observation et des années d’expérience en marketing. Il a également confirmé qu’il n’avait soumis ses hypothèses à aucune analyse statistique formelle.

[43] En outre, je considère que les opinions de M. Wong concernant les différents degrés de maîtrise de la langue chinoise pour ce qui est de l’expression orale, de la lecture et de la compréhension, et l’incidence possible qui en résulte sur la perception des marques de commerce composées de caractères chinois, relèvent du bon sens.

[44] En ce qui concerne l’expert d’Easywin, M. Mulvey, l’objection de CBP porte sur l’hypothèse que les avocats d’Easywin ont demandé à M. Mulvey de formuler, à savoir que le consommateur canadien moyen concerné ne peut pas lire et comprendre les caractères chinois. Je suis d’accord avec Easywin pour dire qu’un expert est autorisé à fournir une opinion qui repose sur une hypothèse fournie par des avocats. Cela dit, l’acceptation par la Cour de son opinion en totalité ou en partie dépend de la question de savoir si la Cour accepte cette hypothèse, ce que je ne fais pas, comme je l’explique plus loin dans les présents motifs.

B. Probabilité de confusion

[45] Pour les raisons expliquées ci‐après, je conclus que CBP a établi qu’il existe une probabilité de confusion entre ses marques de commerce déposées et les enregistrements contestés d’Easywin, ce qui donne à CBP le droit à la radiation des numéros d’enregistrement des marques de commerce LMC1044058 et LMC1044062 en vertu des alinéas 18(1)a), 18(1)b) et 18(1)d) de la LMC.

[46] Je conclus en outre que, dans les circonstances, les dates pertinentes applicables font peu de différence dans l’analyse, sauf pour ce qui est de noter que les marques de commerce d’Easywin n’étaient pas encore employées au Canada à la date de production des demandes de marque de commerce sous‐jacentes (ce qui a trait à l’alinéa 18(1)d)), soit le 23 juillet 2019, ni à la date d’enregistrement (ce qui a trait à l’alinéa 18(1)a)), soit le 26 septembre 2017. Cela dit, je constate qu’il n’existe aucune preuve d’une quelconque restriction quant à la manière dont les marques de commerce d’Easywin sont employées sur les emballages, par exemple en ce qui concerne leur emplacement ou les couleurs dans lesquelles elles sont présentées ou avec quel autre élément elles peuvent être affichées, comme d’autres caractères chinois.

(1) Critères applicables

[47] Le point de départ de l’analyse relative à la confusion est le paragraphe 6(2) de la LMC. Cette disposition nous informe qu’une confusion survient si l’emploi des marques de commerce en cause dans le même domaine serait susceptible d’amener un consommateur potentiel à déduire « que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice » [non souligné dans l’original]. Je constate que le libellé souligné a été ajouté à cette disposition avec les modifications apportées à la LMC qui sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. Bien que deux des motifs de radiation concernent une date pertinente antérieure à ce changement, je ne suis pas convaincue que le libellé ajouté fasse une différence substantielle dans l’analyse relative à la confusion en raison des mots préliminaires « que ces produits ou services [...] ».

[48] En outre, la jurisprudence enseigne que le « critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue [de la marque] [...] alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce [antérieures], et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques » : Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23 [Veuve Clicquot] au para 20; voir également Masterpiece Inc. c Alavida Lifestyles Inc., 2011 CSC 27 [Masterpiece] au para 40.

[49] Le critère ne comprend pas « un examen minutieux des marques concurrentes ou une comparaison côte à côte » : Masterpiece, précité, au para 40. Ni l’expert ni le tribunal ne doit considérer « chaque partie de [l’analyse] séparément des autres éléments[; il] convient plutôt d’examiner la marque telle que le consommateur la voit, à savoir comme un tout, et sur la base d’une première impression » : Masterpiece, précité, au para 83 [non souligné dans l’original].

[50] Pour paraphraser l’ancien juge Rothstein dans l’arrêt Masterpiece (aux para 40, 41, 83), la question dans l’affaire dont je suis saisie est de savoir si, en ce qui concerne la première impression, le « consommateur ordinaire plutôt pressé » qui voit les marques de commerce d’Easywin, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de l’une des marques de commerce déposées de CBP, serait susceptible d’être confus; c’est‐à‐dire qu’il s’agit de savoir si ce consommateur potentiel serait susceptible de penser, sans procéder à un examen minutieux ou à une comparaison côte à côte, en regardant les marques dans leur ensemble, qu’Easywin est la même source de produits de boulangerie que CBP.

[51] Comme l’explique plus en détail le juge Rothstein, même si les recherches subséquentes effectuées par le consommateur et la vigilance manifestée ultérieurement par celui‐ci peuvent dissiper la confusion dans l’esprit de ce dernier, ce qui est pertinent pour l’analyse relative à la confusion est ce qui se produit lorsque le consommateur voit pour la première fois les marques de commerce sur le marché. En d’autres termes, que les produits ou les services soient coûteux ou non, le premier propriétaire ou propriétaire antérieur de la marque de commerce a droit au bénéfice de ce qui peut se produire lorsque le consommateur voit pour la première fois la marque de commerce ultérieure sur le marché : Masterpiece, précité, aux para 66‐74, 87.

[52] Comme l’a mentionné le juge Rothstein (en référence aux « marques de commerce sur le marché »), mais l’a indiqué plus clairement dans d’autres décisions, ce n’est pas n’importe quel consommateur occasionnel hypothétique qui doit être pris en compte dans l’analyse relative à la confusion, mais plutôt la personne susceptible d’acheter le produit ou les services liés aux marques de commerce sur le marché particulier dans lequel ces produits ou services sont offerts : Cheung Kong (Holdings) Ltd. c Living Realty Inc., 1999 CanLII 9394 (CF), [2000] 2 CF 501 [Cheung Kong] aux para 63, 64, citant Canadian Schenley Distilleries Ltd. v. Canada’s Manitoba Distillery Ltd. (1975), 25 CPR (2d) 1 (CFPI) à la p 5; Baylor University c Hudson’S Bay Co., 2000 CanLII 15626 (CAF) au para 27, citant Cheung Kong aux para 63, 64. Voir également Carbon Trust c Pacific Carbon Trust, 2013 CF 946 au para 104, citant BBM Canada c Research In Motion Ltd., 2012 CF 666 [BBM] au para 34; Eclectic Edge Inc c Gildan Apparel (Canada) LP, 2015 CF 1332 au para 100; Loblaws Inc. c Columbia Insurance Company, 2019 CF 961 au para 142, citant également BBM au para 34.

(2) Profil du consommateur canadien moyen

[53] Compte tenu des principes qui précèdent, je suis convaincue que la question de confusion dans l’affaire dont je suis saisie doit être évaluée du point de vue d’un consommateur canadien moyen et occasionnel qui peut lire et comprendre les caractères chinois, bien qu’avec des degrés divers de maîtrise. Comme je l’explique, il s’agit des personnes qui sont davantage susceptibles d’acheter les produits ou services sur le marché sino‐canadien dans lequel les parties offrent leurs produits et services de boulangerie.

[54] Je conclus que le témoignage de M. Mulvey est infirmé par l’hypothèse que lui ont fournie les avocats d’Easywin, à savoir que le consommateur canadien moyen est celui qui ne peut pas lire et comprendre les caractères chinois. J’ai trois raisons pour tirer cette conclusion.

[55] Premièrement, l’hypothèse ne tient pas compte du marché cible des produits et services des parties – le marché sino‐canadien.

[56] Deuxièmement, elle contredit le témoignage de M. Wong ou indique une redondance dans son témoignage en ce qui concerne les différents degrés de compétence en langue chinoise pour ce qui est de la maîtrise de l’expression orale, de la lecture et de la compréhension du marché sino‐canadien, malgré une certaine perte de maîtrise de la langue chinoise chez les Canadiens d’origine chinoise (comme l’indique l’article du printemps 2005 de Statistique Canada intitulé « Les Chinois au Canada : un enrichissement de la mosaïque culturelle » [article sur la mosaïque culturelle] qu’Easywin a présenté lors du contre‐interrogatoire de M. Cheung).

[57] Troisièmement, Easywin n’a pas fourni d’éléments de preuve convaincants pour contredire la conclusion antérieure de la Cour selon laquelle un « pourcentage important de clients de [CBP] était en mesure de lire et de comprendre les caractères chinois » et, en outre, « [l]e fait que [CBP] utilise les caractères chinois de façon aussi constante et répandue sur son matériel indique qu’elle considère que beaucoup de ses clients sont en mesure de les lire et de les comprendre » : Saint Honore Cake Shop Limited c Cheung’s Bakery Products ltd., 2013 CF 935 [Saint Honore] au para 47 (conf par 2015 CAF 12), citant Cheung Kong, précitée, au para 77. J’ajoute que le même raisonnement s’applique à Easywin et à ses marques de commerce, contrairement à l’hypothèse fournie par Easywin à M. Mulvey.

[58] Je suis d’accord avec Easywin pour dire que le principe de courtoisie judiciaire ne joue pas en ce qui concerne les conclusions de fait : Bauer Hockey Ltd. c Sport Maska Inc. (CCM Hockey), 2021 CAF 166 au para 31. Cela dit, et même si les parties dans l’affaire dont je suis saisie ne sont pas exactement les mêmes que dans l’affaire Saint Honore, Easywin est néanmoins une société sœur de Saint Honore, qui font toutes deux parties du Groupe Saint Honore et exercent essentiellement les mêmes activités que CBP.

[59] De plus, je ne suis pas convaincue que la composition des consommateurs réels des produits des parties dans le marché cible, c’est‐à‐dire le marché sino‐canadien, ait changé dans une mesure qui écarterait la conclusion susmentionnée qui a été tirée dans l’arrêt Saint Honore.

[60] Devant la Cour, CBP s’appuie à peu près sur la même preuve que celle décrite aux paragraphes 47 et 48 de l’arrêt Saint Honore pour ce qui est de l’emploi, de la commercialisation et de la promotion par CBP de ses marques de commerce et de son sondage informel auprès de ses clients (84 % des répondants au sondage pouvaient lire et comprendre le chinois écrit). Malgré le sondage et le caractère informel, M. Cheung estime dans son affidavit et en contre‐interrogatoire que 80 à 85 % des clients de CBP sont d’origine chinoise et qu’une majorité significative de ces clients lisent et comprennent la langue chinoise dans une certaine mesure.

[61] Selon M. Cheung, l’estimation susmentionnée est fondée sur son expérience personnelle de travail dans les boulangeries de CBP depuis 1989 (soit plus de 30 ans déjà au moment où il a été assermenté), et pas seulement sur le sondage informel réalisé en 2010. En outre, il estime que la démographie des consommateurs de CBP n’a pas beaucoup changé depuis l’époque où le sondage a été réalisé; c’est la raison pour laquelle on embauche du personnel parlant chinois, qui signale que les clients parlent chinois, passent des commandes en chinois écrit et demandent des inscriptions de messages en chinois, sur les gâteaux d’anniversaire par exemple. C’est également la raison pour laquelle CBP n’a pas réalisé d’autres sondages.

[62] De plus, le témoignage de M. Cheung indique que CBP a employé ses marques de commerce sur les affiches intérieures et extérieures des magasins et sur les emballages (boîtes, sacs et gobelets en papier pour pâtisseries) pour ses produits de boulangerie. Des photos d’échantillons d’affiches et d’emballages sont jointes à son affidavit en tant que pièces. CBP a également utilisé des annonces publicitaires et du matériel promotionnel composés de caractères chinois ciblant la communauté sino‐canadienne qui lit et comprend les langues basées sur les caractères chinois.

[63] Je note également que les échantillons d’emballages des produits d’Easywin qui constituent la pièce F de l’affidavit de Carrina Man Li Wong comportent principalement des caractères chinois, soit sous la forme de marques de commerce déposées d’Easywin, soit sous cette même forme, mais avec des caractères chinois supplémentaires. Un échantillon représentatif d’un tel emballage est illustré ci‐dessous. On peut voir la marque de commerce qui fait l’objet du numéro d’enregistrement d’Easywin LMC1044062 ainsi que d’autres éléments comportant ce qui semble être des caractères chinois.

[64] Je suis prête à déduire dans les circonstances que même Easywin s’attend à ce qu’au moins un certain nombre, sinon un pourcentage important, de ses clients, y compris ceux du Canada, puissent lire et comprendre les caractères chinois.

[65] Enfin, bien qu’Easywin conteste l’admissibilité des données du recensement de Statistique Canada sur lesquelles CBP s’appuie pour conclure qu’il y a d’importantes communautés chinoises à Vancouver et à Toronto, l’article sur la mosaïque culturelle invoqué par Easywin pour contre‐interroger M. Cheung souligne l’établissement et la croissance de communautés chinoises dans diverses villes de la Colombie‐Britannique et de l’Ontario.

(3) Facteurs énoncés au paragraphe 6(5) de la LMC

[66] En gardant à l’esprit le critère et le profil susmentionnés, je me penche maintenant sur la question des facteurs à prendre en compte pour évaluer la probabilité de confusion, y compris toutes les circonstances de l’espèce, à commencer par le degré de ressemblance.

[67] La Cour suprême du Canada indique que le facteur de ressemblance est le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion : Masterpiece, précité, au para 49. Comme l’indique l’expression « degré de ressemblance », une probabilité de confusion peut survenir avec des marques de commerce présentant certaines différences, pas seulement des marques identiques, ce qui nécessite la prise en compte de tous les facteurs énoncés au paragraphe 6(5), y compris toutes les circonstances de l’espèce : Masterpiece, précité, au para 63. La probabilité de confusion est déterminée selon la prépondérance des probabilités, en fonction du contexte factuel applicable et du poids éventuellement différent attribué aux facteurs énoncés au paragraphe 6(5) de la LMC : Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22 [Mattel] au para 54; Veuve Clicquot, précité, au para 21.

i. Degré de ressemblance : LMC, alinéa 6(5)e)

[68] Je conclus que les marques de commerce des parties sont similaires dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[69] Il ne fait aucun doute que les deux derniers caractères des marques de commerce déposées d’Easywin sont pratiquement identiques (elles comportent un style de police de caractères quelque peu différent) aux deux premiers caractères des marques de commerce déposées de CBP composées de caractères chinois, ainsi qu’aux deux caractères qui composent la marque de commerce en attente de CBP. Easywin accepte qu’un consommateur sachant lire les caractères chinois lise les trois derniers caractères de ses marques de commerce déposées comme signifiant Saint Honore ou Saint Anna (tandis que les deux premiers caractères seraient lus comme signifiant Hong Kong). Cette concession est étayée à mon avis par les enregistrements de marques de commerce d’Easywin qui mentionnent que la translittération des caractères chinois contenus dans les marques de commerce est Xiang Gang Sheng An Na [caractères gras ajoutés].

[70] Je conclus que la preuve par affidavit de M. Zhong s’oriente de manière inacceptable vers la dissection et la comparaison côte à côte des marques de commerce des parties. Toutefois, étant donné que le témoignage de M. Zhong n’est pas contesté, j’estime en outre qu’il étaye la conclusion selon laquelle les marques des parties – en particulier les deux premiers caractères des marques de commerce de CBP composées de caractères chinois et les quatrième et cinquième caractères chinois des marques de commerce déposées d’Easywin – comportent globalement des similitudes dans la translittération (son) et la traduction vers l’anglais (idées suggérées, notamment le chevauchement entre les éléments dominants ANNA’S et SAINT ANNA), en plus de leur apparence.

[71] Bien que les similitudes dans l’apparence soient quelque peu atténuées par l’élément graphique au début des marques de commerce d’Easywin, il ne s’agit que d’un élément important parmi d’autres de ces marques, en plus d’ANNA (c’est‐à‐dire An Na) ou SAINT ANNA (ou les caractères chinois correspondants), ce qui, à mon avis, est similaire à l’élément dominant ANNA (ou aux caractères chinois correspondants) dans les marques de CBP.

[72] En outre, je conclus que le style des caractères chinois dans les marques de commerce d’Easywin en litige devant moi est encore plus proche du style des caractères dans les marques de commerce de CBP, contrairement aux caractères chinois plus ornementaux qui faisaient partie des marques de commerce en cause dans l’arrêt Saint Honore. À mon avis, dans l’ensemble, la stylisation des caractères chinois des marques respectives des parties a pour effet de renforcer leurs aspects similaires globaux.

ii. Caractère distinctif inhérent et mesure dans laquelle les marques sont devenues connues, et période pendant laquelle elles ont été en usage : LMC, alinéas 6(5)a) et 6(5)b)

[73] Je conclus que les marques de commerce des deux parties ont un caractère distinctif inhérent, même si elles comportent toutes deux des mots descriptifs ou des connotations – CAKE HOUSE – en liaison avec les marques de commerce déposées de CBP, et HONG KONG en liaison avec la traduction des marques de commerce déposées d’Easywin selon le témoignage non contesté de M. Zhong.

[74] À mon avis, cependant, la mesure dans laquelle elles sont connues et la durée de leur emploi au Canada favorisent CBP.

[75] Les éléments de preuve montrent que CBP commercialise et vend ses produits de boulangerie en liaison avec ses marques de commerce unilingues (c’est‐à‐dire les numéros d’enregistrement LMC354194 et LMC480506) au Canada depuis 1974 et la marque de commerce combinée (c’est‐à‐dire le numéro d’enregistrement LMC667403) depuis 1997.

[76] Depuis 2000, le nombre de transactions annuelles de ventes individuelles de produits de boulangerie de CBP en liaison avec les marques de commerce de CBP (à l’exclusion de la marque de commerce en litige en l’instance) a dépassé les 150 000 et, depuis 2010, ce nombre est passé à 200 000. Le chiffre d’affaires annuel des produits de boulangerie vendus en liaison avec les marques de commerce de CBP a dépassé 1,8 million de dollars depuis 2000 et a dépassé 2,5 millions de dollars depuis 2011. CBP a dépensé entre 14 000 $ et 41 000 $ par an en publicité depuis 2000.

[77] Les marques de commerce d’Easywin sont employées au Canada seulement depuis 2020 et ont généré cette année‐là environ 592 000 $ de recettes pour la vente de 10 000 unités, ce qui équivaudrait à environ 296 000 $ en valeur en gros. Rien dans la preuve n’indique que les marques de commerce d’Easywin soient devenues connues à un degré appréciable au Canada, même à la dernière date pertinente du 22 février 2021, date à laquelle CBP a entamé la présente procédure (relativement à l’alinéa 18(1)b)).

[78] Bien que cela n’ait pas été soulevé par CBP dans le contexte de la mesure dans laquelle les marques de commerce d’Easywin sont devenues connues au Canada ni, j’ajoute, dans le cadre du motif d’absence de caractère distinctif, je souligne simplement qu’il y a un manque de preuve quant à savoir si Easywin a autorisé Saint Honore à utiliser les marques de commerce d’Easywin au Canada, ainsi que les étiquettes ou les renseignements transmis aux consommateurs sur les emballages concernant le propriétaire des marques de commerce d’Easywin et la personne qui les utilise sous licence, compte tenu de la preuve d’Easywin selon laquelle elle est une société de portefeuille, tandis que Saint Honore est la société exploitante. L’affidavit de Mme Wong est silencieux sur cette question. Une relation d’affaires en soi n’est pas suffisante pour démontrer l’existence d’une licence appropriée permettant d’employer une marque de commerce au titre de l’article 50 de la LMC. En outre, le contre‐interrogatoire de Mme Wong avait pour but de savoir si le distributeur, Canada Six Fortune, entretenait une relation d’affaires au sein du Groupe Saint Honore (ce qui n’est pas le cas), plutôt que de savoir si Easywin avait autorisé Saint Honore ou toute autre entité à employer les marques de commerce déposées d’Easywin au Canada.

iii. Genres de produits, services ou entreprises et nature du commerce : LMC, alinéas 6(5)c) et 6(5)d)

[79] Ces facteurs favorisent également CBP à mon avis. Les produits et services des parties se chevauchent considérablement et les enregistrements de marques de commerce des deux parties sont limités pour ce qui est des voies de commercialisation. En d’autres termes, bien que les produits et services de CBP soient fournis par l’intermédiaire de magasins exploités sous le nom d’ANNA’S CAKE HOUSE, ils ne sont pas limités à ces voies et, par conséquent, il existe un risque de chevauchement entre les voies de commercialisation, sachant que le critère est celui de la probabilité, par opposition à une véritable confusion.

iv. Toutes les circonstances de l’espèce

[80] Je ne suis pas convaincue que les circonstances de l’espèce sur lesquelles Easywin tente de s’appuyer l’aident.

[81] Par exemple, Easywin soutient que CBP n’a démontré aucune preuve de confusion réelle depuis la vente de ses produits au Canada en liaison avec ses marques de commerce déposées qui a commencé aussi tôt qu’août 2020. Toutefois, comme je l’ai mentionné, le critère est celui d’une probabilité de confusion et non d’une confusion réelle. La raison figure dans le paragraphe 6(2) de la LMC, qui contient les mots « serait susceptible de faire conclure » [caractères gras ajoutés]. En outre, la durée pendant laquelle ses marques de commerce étaient employées au Canada avant la production par CBP de sa demande de radiation des enregistrements d’Easywin n’était que d’environ six mois, et il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve pour démontrer que les marques de commerce d’Easywin étaient devenues connues au Canada à un degré appréciable à ce moment‐là : Mattel, précité, au para 55.

[82] Comme autre exemple, l’affidavit de Kathy Paterson, l’un des témoins des faits d’Easywin, montre la coexistence d’enregistrements appartenant à des propriétaires différents pour les marques de commerce suivantes, dont certaines seulement concernent des produits alimentaires :

SINNER (LMC570113) et SAINT & SINNER (LMC1027920)

ANDRE (LMC954993) et SAINT ANDRE (LMC612005)

EDEN (LMC454510) et SAINT EDEN SPA (LMC711797)

HONG KONG MX (LMC972419 et LMC972393) et MAXIM’S CAKE SHOP & Dessin (LMC535609)

[83] Les éléments de preuve extraits de l’état du registre peuvent être pertinents dans la mesure où ils permettent de tirer des inférences concernant l’état du marché, habituellement dans le cas où l’existence d’un grand nombre d’enregistrements pertinents a été démontrée : McDowell c Laverana GmbH et Co KG, 2017 CF 327 [McDowell] au para 42. Selon la théorie, un élément commun dans le registre, et par inférence dans le marché, peut avoir peu de caractère distinctif, ce qui incite les consommateurs à porter davantage attention à de petites différences (c.‐à‐d. d’autres caractéristiques) entre les marques de commerce composées de cet élément : McDowell, précitée, au para 42; Alticor Inc. c Nutravite Pharmaceuticals Inc., 2004 CF 235 [Alticor] au para 59, citant Kellogg Salada Canada Inc. c. Canada (registraire des marques de commerce) (C.A.) [1992] 3 CF 442 [Kellogg].

[84] Dans l’affaire Alticor, la preuve de l’état du registre a permis d’établir l’existence de plus de 100 enregistrements pertinents de marques de commerce composées du préfixe NUTR, tandis que dans l’affaire Kellogg, il y avait plus de 50 enregistrements de marques de commerce pertinentes et plus de 40 noms commerciaux concernant NUTRI. Dans l’affaire McDowell, en revanche, la preuve de l’état du registre ne concernait que sept propriétaires de dix marques de commerce déposées composées de l’élément HONEY comme élément dominant. Dans cette affaire, la Cour a jugé qu’il était insuffisant de conclure que l’élément HONEY était employé de façon courante dans le commerce (et donc non distinctif), en l’absence de preuve d’un emploi courant dans le marché par des tiers : McDowell, précitée, aux para 44, 45.

[85] En l’espèce, Easywin fournit des éléments de preuve quant à la présence sur le marché des marques de commerce employées par Maxim’s Caterers Limited et par Maxim’s Bakeries Ltd. Je conclus que, en soi, ces éléments de preuve sont insuffisants pour tirer des conclusions sur les marques respectives des parties et leur capacité à coexister. Je n’estime pas non plus que le nombre des autres marques de commerce de tiers soit suffisant pour tirer des conclusions quant à leur emploi sur le marché : McDowell, précitée, au para 46, citant Hawke & Company Outfitters LLC c. Retail Royalty Company, 2012 CF 1539 au para 40.

v. Évaluation globale concernant la probabilité de confusion

[86] En résumé, j’estime que, dans l’ensemble, les éléments de preuve des parties démontrent que, à première vue, le consommateur ordinaire plutôt pressé qui voit les marques de commerce d’Easywin, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de l’une des marques de commerce de CBP, serait probablement confus. C’est‐à‐dire que ce consommateur potentiel, membre du marché sino‐canadien qui peut lire et comprendre les caractères chinois à des degrés divers et qui est susceptible d’acheter les produits ou services liés aux marques de commerce sur le marché particulier dans lequel ces produits ou services sont offerts, serait susceptible de penser, sans procéder à un examen minutieux ou à une comparaison côte à côte et sans examiner les marques comme un tout, qu’Easywin est la même source des produits de boulangerie que CBP.

[87] De plus, je conclus que le témoignage de M. Wong ne tient pas compte du critère de « la première impression [...] dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé ». Son témoignage donne plutôt des raisons pour lesquelles les consommateurs sino‐canadiens pourraient examiner de plus près les marques de commerce des parties. À mon avis, ce degré de soin et d’attention, ou d’hypersensibilité décrite par M. Wong, peut dissiper la confusion chez le consommateur, mais ne devrait changer « rien à la confusion – pertinente pour l’application de la Loi sur les marques de commerce – qui a existé dans l’esprit du consommateur lorsqu’il a vu la marque de commerce pour la première fois » : Masterpiece, précité, au para 87.

C. Mauvaise foi

[88] Je suis convaincue par la preuve dans la présente affaire qu’Easywin a déposé de mauvaise foi les demandes sous‐jacentes pour enregistrer ses marques de commerce maintenant enregistrées et, par conséquent, CBP a également le droit de faire radier les enregistrements de marques d’Easywin en vertu de l’alinéa 18(1)e) de la LMC.

[89] Il ne s’agit pas en l’espèce d’un cas où Easywin ignorait l’existence de CBP et de ses marques de commerce et où Easywin n’a pas non plus « fait montre d’aveuglement volontaire quant à la question de savoir si elle avait le droit de produire une demande compte tenu de sa concurrente » dans le sens de ne pas faire « [l]es recherches qui s’imposent » : Norsteel Building Systems Ltd c Toti Holdings Inc., 2021 CF 927 au para 75.

[90] Dans la présente affaire, aucune recherche n’était nécessaire. Au contraire, je conclus qu’Easywin n’a simplement pas tenu compte des faits mêmes qui auraient dû la faire réfléchir avant de produire les demandes de marque de commerce. Au moment de la production, Easywin connaissait CBP et savait qu’elles ciblaient les mêmes consommateurs et vendaient les mêmes types de produits et services liés à la boulangerie. Les deux parties reconnaissent l’existence de la relation d’affaires entre Easywin et Saint Honore. De plus, Easywin était au courant du différend antérieur entre Saint Honore et CBP concernant des questions similaires (différend qui a été réglé devant la Cour d’appel fédérale seulement deux ans avant la production des demandes de marque de commerce) et, par conséquent, à mon avis, Easywin n’aurait pas pu être convaincue qu’elle avait le droit de demander les marques de commerce qui ont donné lieu aux enregistrements portant les numéros LMC1044058 et LMC1044062.

VI. Conclusion

[91] Pour les motifs qui précèdent, je conclus que les enregistrements de marques de commerce d’Easywin portant les numéros LMC1044058 et LMC1044062 sont invalides et seront radiés en vertu des alinéas 18(1)a), 18(1)b), 18(1)d) et 18(1)e) de la LMC.

VII. Dépens

[92] Puisque CBP a obtenu gain de cause, j’estime qu’elle a droit au remboursement des dépens liés à la présente demande de radiation.

[93] À la demande de la Cour, les deux parties ont produit leurs mémoires de frais à la suite de l’audition de la présente affaire. Les parties conviennent que le milieu de la colonne III du Tarif B constitue la référence appropriée pour calculer leurs frais juridiques. Je souligne que les dépens sont en fin de compte à la discrétion de la Cour et j’estime que le mémoire de frais de CBP est raisonnable, et donc, j’accorde à CBP des dépens au montant forfaitaire de 15 122,76 $, frais et débours compris, payables par Easywin.


JUGEMENT dans le dossier T‐349‐21

LA COUR ORDONNE ce qui suit :

  1. La demande est accueillie.

  2. Les enregistrements de marques de commerce au nom de la défenderesse, Easywin Ltd., portant les numéros LMC1044058 et LMC1044062, tous deux datés du 23 juillet 2019, pour Chinese Characters& Dessin, sont déclarés invalides en vertu des alinéas 18(1)a), 18(1)b), 18(1)d) et 18(1)e) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‐13.

  3. Il est ordonné au registraire des marques de commerce de retirer du registre les numéros d’enregistrement de la défenderesse LMC1044058 et LMC1044062, tous deux datés du 23 juillet 2019, pour Chinese Characters& Dessin.

  4. La demanderesse, Cheung’s Bakery Products Ltd., se voit accorder un montant forfaitaire de 15 122,76 $, honoraires et débours compris, payable par la défenderesse, Easywin Ltd.

« Janet M. Fuhrer »

Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc

Annexe A : Dispositions pertinentes

Loi sur la concurrence (L.R.C. (1985), ch. T‐13)

Trademarks Act (R.S.C., 1985, c. T‐13)

Définitions

Definitions

2 Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

2 In this Act,

personne intéressée Sont assimilés à une personne intéressée le procureur général du Canada et quiconque est atteint ou a des motifs valables d’appréhender qu’il sera atteint par une inscription dans le registre, ou par tout acte ou omission, ou tout acte ou omission projeté, sous le régime ou à l’encontre de la présente loi. (person interested)

person interested includes any person who is affected or reasonably apprehends that he may be affected by any entry in the register, or by any act or omission or contemplated act or omission under or contrary to this Act, and includes the Attorney General of Canada; (personne intéressée)

Marque de commerce créant de la confusion avec une autre

Confusion — trademark with other trademark

6 (2) L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

6 (2) The use of a trademark causes confusion with another trademark if the use of both trademarks in the same area would be likely to lead to the inference that the goods or services associated with those trademarks are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the goods or services are of the same general class or appear in the same class of the Nice Classification.

Éléments d’appréciation

What to be considered

6 (5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris :

6 (5) In determining whether trademarks or trade names are confusing, the court or the Registrar, as the case may be, shall have regard to all the surrounding circumstances including

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

(a) the inherent distinctiveness of the trademarks or trade names and the extent to which they have become known;

b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

(b) the length of time the trademarks or trade names have been in use;

c) le genre de produits, services ou entreprises;

(c) the nature of the goods, services or business;

d) la nature du commerce;

(d) the nature of the trade; and

e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux, notamment dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent.

(e) the degree of resemblance between the trademarks or trade names, including in appearance or sound or in the ideas suggested by them.

Droit à l’enregistrement

Entitlement to registration

16 (1) Tout requérant qui a produit une demande conforme au paragraphe 30(2) en vue de l’enregistrement d’une marque de commerce enregistrable a droit, sous réserve de l’article 38, d’obtenir cet enregistrement à l’égard des produits ou services spécifiés dans la demande, à moins que, à la date de production de la demande ou à la date à laquelle la marque a été employée pour la première fois au Canada, la première éventualité étant à retenir, la marque n’ait créé de la confusion :

16 (1) Any applicant who has filed an application in accordance with subsection 30(2) for the registration of a registrable trademark is entitled, subject to section 38, to secure its registration in respect of the goods or services specified in the application, unless at the filing date of the application or the date of first use of the trademark in Canada, whichever is earlier, it was confusing with

a) soit avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par une autre personne;

(a) a trademark that had been previously used in Canada or made known in Canada by any other person;

b) soit avec une marque de commerce à l’égard de laquelle une demande d’enregistrement avait été antérieurement produite au Canada par une autre personne;

(b) a trademark in respect of which an application for registration had been previously filed in Canada by any other person; or

c) soit avec un nom commercial qui avait été antérieurement employé au Canada par une autre personne.

(c) a trade name that had been previously used in Canada by any other person.

Quand l’enregistrement est invalide

When registration invalid

18 (1) L’enregistrement d’une marque de commerce est invalide dans les cas suivants :

18 (1) The registration of a trademark is invalid if

a) la marque de commerce n’était pas enregistrable à la date de l’enregistrement;

(a) the trademark was not registrable at the date of registration;

b) la marque de commerce n’est pas distinctive à l’époque où sont entamées les procédures contestant la validité de l’enregistrement;

(b) the trademark is not distinctive at the time proceedings bringing the validity of the registration into question are commenced;

...

...

d) sous réserve de l’article 17, l’auteur de la demande n’était pas la personne ayant droit d’obtenir l’enregistrement;

(d) subject to section 17, the applicant for registration was not the person entitled to secure the registration; or

e) la demande d’enregistrement a été produite de mauvaise foi.

(e) the application for registration was filed in bad faith.

Compétence exclusive de la Cour fédérale

Exclusive jurisdiction of Federal Court

57 (1) La Cour fédérale a une compétence initiale exclusive, sur demande du registraire ou de toute personne intéressée, pour ordonner qu’une inscription dans le registre soit biffée ou modifiée, parce que, à la date de cette demande, l’inscription figurant au registre n’exprime ou ne définit pas exactement les droits existants de la personne paraissant être le propriétaire inscrit de la marque de commerce.

57 (1) The Federal Court has exclusive original jurisdiction, on the application of the Registrar or of any person interested, to order that any entry in the register be struck out or amended on the ground that at the date of the application the entry as it appears on the register does not accurately express or define the existing rights of the person appearing to be the registered owner of the trademark.

Restriction

Restriction

(2) Personne n’a le droit d’intenter, en vertu du présent article, des procédures mettant en question une décision rendue par le registraire, de laquelle cette personne avait reçu un avis formel et dont elle avait le droit d’interjeter appel.

(2) No person is entitled to institute under this section any proceeding calling into question any decision given by the Registrar of which that person had express notice and from which he had a right to appeal.

Version antérieure : en vigueur entre le 30 déc. 2018 et le 17 juin 2019
Past version: in force between Dec 30, 2018 and Jun 17, 2019

Marques projetées

Proposed marks

16 (3) Tout requérant qui a produit une demande selon l’article 30 en vue de l’enregistrement d’une marque de commerce projetée et enregistrable, a droit, sous réserve des articles 38 et 40, d’en obtenir l’enregistrement à l’égard des produits ou services spécifiés dans la demande, à moins que, à la date de production de la demande, elle n’ait créé de la confusion :

16 (3) Any applicant who has filed an application in accordance with section 30 for registration of a proposed trade‐mark that is registrable is entitled, subject to sections 38 and 40, to secure its registration in respect of the goods or services specified in the application, unless at the date of filing of the application it was confusing with

a) soit avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par une autre personne;

(a) a trade‐mark that had been previously used in Canada or made known in Canada by any other person;

b) soit avec une marque de commerce à l’égard de laquelle une demande d’enregistrement a été antérieurement produite au Canada par une autre personne;

(b) a trade‐mark in respect of which an application for registration had been previously filed in Canada by any other person; or

c) soit avec un nom commercial antérieurement employé au Canada par une autre personne.

(c) a trade‐name that had been previously used in Canada by any other person.

Règles des Cours fédérales (DORS/98‐106)
Federal Courts Rules (SOR/98‐106)

Objection au témoin expert

Objection to expert

52.5 (1) La partie à une instance soulève, le plus tôt possible en cour d’instance, toute objection quant à l’habilité à témoigner du témoin expert de la partie adverse.

52.5 (1) A party to a proceeding shall, as early as possible in the proceeding, raise any objection to an opposing party’s proposed expert witness that could disqualify the witness from testifying.

Façon de soulever une objection

Manner of raising objection

(2) L’objection peut être soulevée, selon le cas :

(2) An objection may be raised

a) par la signification et le dépôt d’un document contenant les détails et le fondement de l’objection ;

(a) by serving and filing a document containing the particulars of and basis for the objection; or

b) conformément au paragraphe 262(2) ou au sous‐alinéa 263c)(i), si, à l’instruction d’une action, elle était connue avant la conférence préparatoire.

(b) in accordance with subsection 262(2) or subparagraph 263(c)(i) if, in the case of an action, the objection is known prior to the pre‐trial conference.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‐349‐21

 

INTITULÉ :

CHEUNG’S BAKERY PRODUCTS LTD. c EASYWIN LTD.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 8 AOÛT 2022

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE FUHRER

 

DATE DES MOTIFS :

LE 8 février 2023

 

COMPARUTIONS :

Evan Nuttall

Kwan T. Loh

Matthieu Burt

 

Pour la demanderesse

 

Chantal Saunders

Jacky Wong

 

Pour la défenderesse

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Evan Nuttall

Kwan T. Loh

Matthieu Burt

Smart & Biggar LLP

Vancouver

(Colombie‐Britannique)

 

Pour la demanderesse

 

Chantal Saunders

Jacky Wong

Borden Ladner Gervais LLP

Ottawa (Ontario)

 

Pour lA défendeRESSE

 

 

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