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Date : 20221201


Dossier : IMM-11366-22

Référence : 2022 CF 1664

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 1er décembre 2022

En présence de madame la juge Sadrehashemi

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

demandeur

et

EKO TJHANG

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Le défendeur, Eko Tjhang, est actuellement détenu dans un établissement correctionnel provincial. Depuis le 7 novembre 2022, il est détenu par les autorités de l’immigration parce qu’il présente un risque de fuite. Du 8 novembre au 14 novembre 2022, M. Tjhang a été gardé en isolement. Le 15 novembre 2022, un commissaire de la Section de l’immigration (le commissaire) a ordonné la mise en liberté, assortie de conditions, de M. Tjhang (l’ordonnance de mise en liberté). M. Tjhang n’a pas été mis en liberté à ce moment-là parce que le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile (le ministre) a obtenu de la Cour un sursis provisoire à l’exécution de l’ordonnance de mise en liberté.

[2] La Cour est saisie de la demande de contrôle judiciaire visant l’ordonnance de mise en liberté. Le ministre conteste l’ordonnance de mise en liberté pour deux motifs. Premièrement, il soutient que le commissaire n’a pas expliqué pourquoi il s’est écarté de la décision qu’il avait rendue précédemment à l’issue du contrôle des motifs de détention après 48 heures. Deuxièmement, le ministre fait valoir que la décision du commissaire est dépourvue d’une analyse significative du caractère convenable de la caution.

[3] Le ministre ne m’a pas convaincue qu’il y a une raison de modifier la décision par laquelle le commissaire a ordonné la mise en liberté de M. Tjhang. Il n’a démontré aucune lacune grave dans l’analyse du commissaire qui justifierait l’annulation de la décision. Pour les motifs qui suivent, je rejetterai donc la présente demande de contrôle judiciaire.

II. Contexte et historique de l’instance

[4] M. Tjhang est un citoyen de l’Indonésie. Il est âgé de trente ans. Il est arrivé au Canada il y a un peu plus de quatre ans, en juillet 2018, muni d’un permis d’études et d’un permis de travail. La durée de validité de ses permis a été prolongée alors qu’il se trouvait au Canada. Il y a quelques mois, en juin 2022, les permis d’études et de travail de M. Tjhang ont expiré. Il n’a pas demandé de nouvelles prolongations ni présenté d’autres demandes d’immigration. Il est au Canada sans statut depuis environ quatre mois.

[5] L’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC) a été mise au courant du cas de M. Tjhang le 25 octobre 2022. M. Tjhang s’est rendu au détachement de la Gendarmerie royale du Canada (la GRC) de Burnaby, en Colombie-Britannique, deux jours auparavant pour demander de l’aide. La police a remarqué qu’il avait l’air [traduction] « désemparé », qu’il avait [traduction] « mentionné que son téléphone avait été piraté », puis qu’il [traduction] « semblait être sous l’effet de drogues et avait déclaré avoir consommé de la méthamphétamine ». M. Tjhang a été arrêté en vertu de l’article 28 de la Mental Health Act, RSBC 1996, c 288, et transporté à l’hôpital général de Burnaby. Il ne s’est pas montré coopératif à l’hôpital et a reçu des soins contre son gré après que l’urgentologue ait rempli un certificat médical à son égard conformément à la Mental Health Act. Deux jours plus tard, l’un des policiers ayant procédé à son arrestation a envoyé un courriel à un agent de l’ASFC pour l’informer que M. Tjhang leur avait mentionné à l’hôpital qu’il avait des difficultés à s’inscrire à l’école et que son visa était expiré.

[6] Le 7 novembre 2022, deux agents de l’ASFC se sont présentés à la dernière adresse connue de M. Tjhang et ont interrogé ce dernier. M. Tjhang leur a dit que son visa avait expiré en juin 2022 et qu’il n’avait aucun statut au Canada. Il a également indiqué que son passeport se trouvait chez son ami (la même personne que M. Tjhang a présentée comme caution lors du deuxième contrôle des motifs de détention). Les agents de l’ASFC ont arrêté M. Tjhang et l’ont amené au Centre de surveillance de l’Immigration.

[7] M. Tjhang a été transféré du Centre de surveillance de l’Immigration vers le centre correctionnel régional du Fraser (le FRCC), un établissement correctionnel provincial. Le transfert de M. Tjhang a été précipité parce que, lors d’une entrevue d’admission, M. Tjhang [traduction] « a tenté à plusieurs reprises de maintenir ouverte la porte de la salle de transit [au Centre de surveillance de l’immigration] » même si les gardes de sécurité contractuels lui avaient ordonné de lâcher la porte. À son arrivée au FRCC, M. Tjhang a été placé en isolement pendant sept jours en raison de la [traduction] « période de quarantaine de sept jours prévue par la politique du FRCC sur la COVID ». M. Tjhang a ensuite été transféré à « l’aile de l’immigration » du FRCC.

[8] Le 9 novembre 2022, M. Tjhang a fait l’objet d’une enquête et d’un premier contrôle des motifs de détention (le contrôle des motifs de détention après 48 heures) devant la Section de l’immigration. Il était représenté par un avocat de service, et un représentant désigné a également été nommé en son nom en vertu du paragraphe 167(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR) parce que le commissaire a conclu que M. Tjhang n’était pas en mesure de comprendre la nature de la procédure.

[9] Lors de l’enquête, M. Tjhang a admis qu’il avait indûment prolongé son séjour au-delà de ce que son visa prévoyait. Le commissaire a conclu que M. Tjhang n’avait pas quitté le Canada à la fin de la période de séjour autorisée, en contravention du paragraphe 29(2) de la LIPR, et a donc pris une mesure d’exclusion en application de l’alinéa 45d) de la LIPR.

[10] Lors de l’audience du contrôle des motifs de détention après 48 heures, ni le ministre ni l’avocat de service n’ont présenté de solution de rechange à la détention. Le représentant désigné de M. Tjhang a exprimé des préoccupations au sujet des conditions de détention de ce dernier. Le commissaire a conclu que M. Tjhang présentait un risque de fuite au sens de l’alinéa 244a) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS 2002-227 (le RIPR) parce que sa consommation de drogues et ses problèmes de santé mentale nuisaient à sa fiabilité. Le commissaire s’est dit préoccupé par les conditions de détention de M. Tjhang, affirmant être [traduction] « choqué » d’entendre que M. Tjhang était détenu à l’établissement correctionnel provincial plutôt qu’au Centre de surveillance de l’Immigration. Le commissaire a donc indiqué qu’il demeurerait le commissaire à la prochaine audience de contrôle des motifs de détention, et a prévu la tenue du contrôle avant le délai prescrit de sept jours.

[11] Le 15 novembre 2022, la Section de l’immigration a tenu l’audience relative au deuxième contrôle des motifs de détention de M. Tjhang. Le présent contrôle judiciaire porte sur la décision rendue par le commissaire au terme de cette audience. L’avocat de M. Tjhang a présenté une caution à l’audience. M. Tjhang et la caution ont tous deux témoigné. Le commissaire a conclu que M. Tjhang présentait un risque de fuite au sens de l’alinéa 244a) du RIPR, mais a conclu qu’il existait une solution de rechange à la détention aux termes de l’alinéa 248e) du RIPR et a libéré M. Tjhang sous conditions, notamment qu’il se présente en personne chaque semaine au bureau de l’ASFC et conformément aux directives de l’ASFC, qu’il réside à l’adresse de sa caution, que cette dernière verse un dépôt de 5 000 $, et qu’il s’abstienne de consommer ou de posséder des substances désignées par la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, à moins qu’elles ne soient prescrites par un médecin.

[12] Le 15 novembre 2022, le ministre a présenté une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire pour contester l’ordonnance de mise en liberté rendue par le commissaire. Il a également écrit à la Cour pour demander un sursis provisoire à l’exécution de l’ordonnance de mise en liberté. Le 15 novembre 2022, le juge Bell a accordé le sursis provisoire jusqu’au 30 novembre 2022. Le 24 novembre 2022, le ministre a déposé et signifié une requête en sursis de l’ordonnance de mise en liberté dans l’attente de la décision concernant la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire visant l’ordonnance de mise en liberté. Le 25 novembre 2022, le ministre a informé la Cour que M. Tjhang avait un nouvel avocat et que les documents de la requête lui avaient été signifiés ce jour-là. Les parties ont demandé que le nouvel avocat de M. Tjhang soit en mesure de déposer ses documents d’ici le 29 novembre 2022 et que la Cour entende la requête en sursis complète au plus tôt le 30 novembre 2022, à 14 h. J’ai ordonné que l’audience sur la requête en sursis ait lieu le 30 novembre 2022, à 14 h.

[13] Au début de l’audience, j’ai informé les parties que je serais disposée à me prononcer sur le bien-fondé de la demande de contrôle judiciaire sous-jacente plutôt que de la requête en sursis. Les parties se sont dites d’accord. J’ai souligné que le dossier dont je disposais comprenait les transcriptions des deux audiences relatives au contrôle des motifs de détention et les éléments de preuve qui y avaient été présentés. Le ministre a confirmé qu’aucun autre élément de preuve ne serait déposé pour l’audience relative au contrôle judiciaire. Dans ces circonstances, compte tenu du droit à la liberté en jeu et du désir de préserver les ressources de la Cour et des parties, j’ai décidé de statuer directement sur le contrôle judiciaire sur le fond.

III. Questions en litige et norme de contrôle

[14] Les deux parties et moi convenons que la décision du commissaire est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable. Dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], la Cour suprême du Canada a confirmé que la norme de la décision raisonnable est présumée s’appliquer au contrôle des décisions administratives sur le fond. La présente affaire ne soulève aucune question qui justifierait de s’écarter de cette présomption.

[15] Dans l’arrêt Vavilov, la Cour suprême du Canada a décrit la norme de la décision raisonnable comme une forme de contrôle empreinte de déférence, mais néanmoins « rigoureuse », et dont l’analyse a pour point de départ les motifs du décideur (Vavilov, aux para 13, 84). Les motifs écrits du décideur sont interprétés « eu égard au dossier et en tenant dûment compte du régime administratif dans lequel ils sont donnés » (Vavilov, au para 103).

[16] Selon la description de la Cour suprême, une décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, au para 85). Le décideur administratif doit s’assurer que l’exercice de son pouvoir public est « justifié, intelligible et transparent non pas dans l’abstrait, mais pour l’individu qui en fait l’objet » (Vavilov, au para 95).

IV. Analyse

A. Omission du commissaire d’expliquer pourquoi il s’est écarté de la décision précédente concernant la détention

[17] L’affirmation du ministre selon laquelle le commissaire n’a pas expliqué pourquoi il s’était écarté de sa décision précédente concernant la détention n’est pas fondée. Le raisonnement du commissaire entre le moment du contrôle des motifs de détention après 48 heures et celui du second contrôle ayant eu lieu avant le délai prescrit de sept jours est facile à suivre et est bien expliqué.

[18] L’un des principaux points à retenir de la décision du commissaire lors du contrôle des motifs de détention après 48 heures était sa préoccupation quant au fait que M. Tjhang était détenu au FRCC plutôt qu’au Centre de surveillance de l’Immigration. Bien que le commissaire ait conclu qu’il y avait des motifs justifiant le maintien en détention et qu’il n’existait pas de solution de rechange à la détention à ce moment-là, il a déclaré ce qui suit : [TRADUCTION] « les circonstances de votre détention ou la situation dans laquelle vous vous trouvez actuellement tendent à faire pencher la balance en faveur de votre mise en liberté ». Il a cependant ajouté que [TRADUCTION] « nous n’en sommes pas là aujourd’hui […] ».

[19] Lors du contrôle des motifs de détention ayant eu lieu avant le délai prescrit de sept jours, le commissaire disposait de beaucoup plus de renseignements. Premièrement, il en a appris davantage de M. Tjhang et l’a jugé crédible; il a appris que la caution proposée avait remis le passeport de M. Tjhang à l’ASFC; il a su que la caution proposait maintenant de déposer un cautionnement en espèces de 5 000 $; et il a pris connaissance d’une solution de rechange à la détention, c’est-à-dire que M. Tjhang pouvait désormais vivre au domicile de la caution proposée. M. Tjhang était alors détenu depuis plus longtemps et avait indiqué qu’il déposerait une demande d’examen des risques avant renvoi, de sorte que la durée de sa détention pouvait être de six à huit semaines. À la lumière de ces nouveaux renseignements, le commissaire a expliqué qu’il avait soupesé les facteurs énoncés à l’article 248 du RIPR et conclu que, même si M. Tjhang continuait de présenter un risque de fuite, comme lors du contrôle des motifs de détention après 48 heures, il existait maintenant une solution de rechange convenable à la détention. Je ne vois aucune raison de conclure que le commissaire a omis d’expliquer pourquoi il s’était écarté de sa décision antérieure. Il n’y a aucune ambiguïté dans le raisonnement que le commissaire a suivi pour arriver à cette décision lors du second contrôle des motifs de détention, par rapport à la conclusion qu’il avait tirée à l’audience du contrôle des motifs de détention après 48 heures.

B. Caractère convenable de la caution

[20] Dans l’arrêt Vavilov, il a été établi que « [l]a cour de révision doit également interpréter les motifs du décideur en fonction de l’historique et du contexte de l’instance dans laquelle ils ont été rendus » (Vavilov, au para 94; Canada (Sécurité publique et Protection civile) c Shen, 2020 CF 405 au para 46). Les commissaires qui statuent sur les contrôles des motifs de détention à la Section de l’immigration doivent pondérer divers facteurs lorsqu’ils élaborent un plan de mise en liberté. Comme l’a fait remarquer le juge Grammond, il s’agit d’un exercice complexe :

[L]es conditions de mise en liberté sont composées de nombreuses composantes interreliées et doivent être évaluées dans leur ensemble. À cet égard, le législateur a confié à la SI [Section de l’immigration], et non à notre Cour, la tâche de pondérer les facteurs de risque et l’efficacité des conditions de mise en liberté pour atténuer le risque. Cet exercice comporte un élément inhérent de subjectivité, car il n’y a pas de formule mathématique pour déterminer le résultat (Canada (Sécurité publique et Protection civile) c Thavagnanathiruchelvam, 2021 CF 592 au para 32).

[21] En l’espèce, le commissaire a pondéré divers facteurs dans l’élaboration d’un plan de mise en liberté, notamment ses préoccupations quant au bien-être de M. Tjhang qui était en détention dans un établissement correctionnel provincial, et le risque de non-conformité. Selon les directives numéro 2 en matière de détention du président de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, lorsque la vulnérabilité d’un détenu a été établie, « le commissaire a une obligation accrue d’examiner les solutions de rechange à la détention et d’imposer des conditions réalisables qui portent sur les circonstances propres à l’intéressé vulnérable ». Les motifs du commissaire doivent être interprétés à la lumière de ce contexte.

[22] À la suite du témoignage de la caution, le commissaire a conclu que celle-ci n’était pas crédible en raison d’incohérences dans son témoignage. Plus précisément, le commissaire a souligné avec inquiétude que la caution avait tenté de minimiser son rôle dans la consommation de drogues de M. Tjhang. M. Tjhang avait déjà déclaré à l’audience qu’il avait consommé de la méthamphétamine pendant environ deux ans et qu’il en avait parfois consommé avec la caution, et que celle-ci avait parfois payé la méthamphétamine. La caution a nié avoir acheté des drogues sans ordonnance pour M. Tjhang ou avoir consommé des drogues avec lui. Par contre, le commissaire a conclu que le témoignage de M. Tjhang était véridique et crédible, contrairement à celui de la caution.

[23] Dans la présente affaire, le commissaire n’a pas fait abstraction des incohérences du témoignage pour conclure que la caution pouvait jouer un rôle de supervision auprès du détenu malgré des problèmes de crédibilité évidents, ce qui n’avait pas été le cas dans certaines affaires instruites par notre Cour, où celle-ci avait jugé que l’examen du caractère convenable de la caution était déraisonnable (voir p. ex., Canada (Sécurité publique et Protection civile) c Erhire, 2021 CF 908 aux para 29-31; Canada (Minister of Public Safety and Emergency Preparedness) v Rodriguez Martinez, 2021 FC 1477 aux para 32-35). Le commissaire a indiqué en toute transparence qu’il ne trouvait pas la caution crédible. La décision du commissaire n’est pas le résultat d’une omission de tenir compte des lacunes de la caution. Le commissaire a fait preuve de transparence à l’égard de ces lacunes et, pour cette raison, a élaboré une solution de rechange à la détention qui ne s’appuyait pas sur le rôle de supervision de la caution. Comme il avait jugé M. Tjhang crédible, le commissaire a conclu que le cautionnement en espèces déposé par la caution l’« inciterait » à être une personne fiable et à respecter les conditions de sa mise en liberté.

[24] L’approche adoptée par le commissaire à l’égard de la caution est peut-être non conventionnelle, mais, compte tenu des circonstances auxquelles il était confronté, je ne la trouve pas déraisonnable. Le commissaire s’inquiétait des conditions de détention à l’établissement correctionnel provincial. Il disposait d’éléments de preuve indiquant que M. Tjhang avait vécu de la détresse en détention; il avait notamment eu diverses crises de larmes, avait donné des coups sur son lit et avait uriné pendant une audience. Il était déjà en détention depuis huit jours, dont sept jours passés en isolement dans un établissement correctionnel provincial. Aucune autre solution de rechange à la détention n’a été présentée au commissaire.

[25] Le ministre invoque la vulnérabilité de M. Tjhang pour soutenir que le commissaire devait être plus prudent dans le cadre du plan de mise en liberté. Le problème de cette observation est que M. Tjhang était manifestement bouleversé par sa détention et que le commissaire ne disposait d’aucune autre véritable possibilité de libérer M. Tjhang à court terme. Comme je l’ai mentionné, selon les directives en matière de détention, les commissaires ont une obligation accrue d’examiner les solutions de rechange à la détention lorsqu’une vulnérabilité a été établie. Aucune solution de rechange n’a été proposée ni même aucun plan de proposition de mise en liberté n’a été présenté. Le commissaire a reconnu ces contraintes pratiques lorsqu’il a rendu sa décision, et a souligné que, même s’il avait des réserves au sujet de la caution, il ne savait tout simplement pas si M. Tjhang pouvait avoir une meilleure personne pour le soutenir.

[26] Le ministre soutient également que le commissaire n’a pas évalué le caractère convenable du montant du cautionnement. La caution a témoigné au sujet de sa rémunération annuelle et de son salaire net mensuel. Il y a eu des va-et-vient en ce qui concerne le montant du cautionnement, et la somme de 1 500 $ proposée initialement a ensuite été portée à 5 000 $. La position du ministre est la suivante : ayant conclu que la caution n’était pas crédible, le commissaire n’avait aucun fondement pour juger cette somme convenable. Je peux comprendre dans une certaine mesure l’argument du ministre, mais, encore une fois, compte tenu du contexte de l’espèce et du fait que la décision du commissaire résulte de la pondération des divers facteurs énoncés à l’article 248 du RIPR, je juge qu’il ne s’agit pas d’une lacune suffisamment grave justifiant l’annulation de la décision de libérer M. Tjhang.

V. Dispositif

[27] En conclusion, dans les circonstances de la présente affaire, compte tenu des divers facteurs soupesés par le commissaire, je ne vois aucune raison de conclure que l’ordonnance de mise en liberté est déraisonnable. Le commissaire était au fait des facteurs pertinents et il les a examinés et soupesés. La demande de contrôle judiciaire sera donc rejetée. Aucune des parties n’a proposé de question aux fins de certification, et je conviens que l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM-11366-22

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande d’autorisation est rejetée.

  2. Le sursis provisoire à l’exécution de l’ordonnance de mise en liberté de M. Tjhang est levé.

  3. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  4. Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

« Lobat Sadrehashemi »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-11366-22

INTITULÉ :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION c EKO TJHANG

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 30 NOVEMBRE 2022

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE SADREHASHEMI

DATE DES MOTIFS :

Le 1ER DÉCEMBRE 2022

COMPARUTIONS :

Matt Huculak

POUR LE DEMANDEUR

Leo Chan

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

POUR LE DEMANDEUR

Titan Law Corporation

Vancouver (Colombie-Britannique)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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