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Date : 20 221 205


Dossier : T-1168-21

Référence : 2022 CF 1672

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 5 décembre 2022

En présence de monsieur le juge Southcott

ENTRE :

DR. REDDY’S LABORATORIES LTD. et DR. REDDY’S LABORATORIES, INC.

demanderesses

et

JANSSEN INC., JANSSEN ONCOLOGY, INC. et BTG INTERNATIONAL LTD.

défenderesses

ORDONNANCE ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La présente décision concerne une requête présentée par Dr. Reddy’s Laboratories Ltd. et Dr. Reddy’s Laboratories, Inc. [collectivement, Dr. Reddy’s], les demanderesses dans l’action principale intentée en vertu de l’article 8 du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133 [le Règlement]. Dans cette action, Dr. Reddy’s réclame des dommages-intérêts aux défenderesses, Janssen Inc., Janssen Oncology, Inc. et BTG International Ltd. [collectivement, Janssen], pour les ventes d’acétate d’abiratérone qu’elle ont perdues.

[2] Dans le cadre de la présente requête, Dr. Reddy’s demande à la Cour de statuer sur ce qu’elle qualifie de point de droit avant l’instruction conformément à l’alinéa 220(1)a) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 [les Règles]. Le point de droit porte sur un moyen de défense que Janssen a soulevé dans l’action sous-jacente fondée sur l’article 8 du Règlement. Dr. Reddy’s a formulé la question comme suit :

[traduction]

Au titre du [Règlement], lorsque le titulaire d’un brevet a exercé son droit au sursis prévu à l’article 7 par suite de l’entrée de produits génériques sur le marché, et n’a jamais renoncé à ce droit en ce qui concerne certains produits génériques dans le monde réel, ou n’est pas autrement privé de ce droit à l’égard de ces produits, ce même obstacle à l’entrée de ces produits génériques prévaut-il dans le monde hypothétique pour l’application de l’article 8 (outre la partie qui invoque l’article 8)?

[3] Comme je l’expliquerai plus en détail ci-après, la requête sera rejetée, puisque les circonstances de l’affaire ne permettent pas à la Cour d’exercer son pouvoir discrétionnaire de statuer, à titre préliminaire, sur la question proposée avant l’instruction.

II. Contexte

[4] Janssen commercialise au Canada, sous le nom de ZYTIGA, l’acétate d’abiratérone, un médicament contre le cancer de la prostate qui fait l’objet du brevet canadien n° 2 661 422 [le brevet 422]. Dr. Reddy’s ainsi que deux autres sociétés pharmaceutiques fabriquant des produits génériques (Apotex Inc. [Apotex] et Pharmascience Inc. [PMS]) ont cherché à commercialiser un produit générique à base d’acétate d’abiratérone, et chacune a contesté la validité du brevet 422.

[5] Sous le régime de la version antérieure du Règlement, Janssen a déposé une demande contre Apotex fondée sur le brevet 422, dans laquelle elle demandait à la Cour de rendre une ordonnance interdisant la délivrance d’un avis de conformité à Apotex pour son produit à base d’acétate d’abiratérone sous forme de comprimés de 250 mg. Janssen a obtenu l’ordonnance demandée le 29 octobre 2019 (voir la décision Janssen Inc c Apotex Inc, 2019 CF 1355 aux para 9-11, 260, conf 2021 CAF 45).

[6] Sous le régime de la version actuelle du Règlement, Janssen a également intenté des actions fondées sur l’article 6 du Règlement contre Dr. Reddy’s, Apotex et PMS, en vue d’obtenir une déclaration de contrefaçon à l’égard du brevet 422 dans chaque cas. Ces actions fondées sur l’article 6 ont été intentées aux dates suivantes :

  1. contre Apotex : le 10 janvier 2019 pour ses produits à base d’acétate d’abiratérone de 250 mg et de 500 mg;

  2. contre PMS : le 25 janvier 2019 pour son produit à base d’acétate d’abiratérone de 250 mg et le 22 novembre 2019 pour son produit à base d’acétate d’abiratérone de 500 mg;

  3. contre Dr. Reddy’s : le 14 juin 2019 pour son produit à base d’acétate d’abiratérone de 250 mg.

[7] L’alinéa 7(1)d) du Règlement prévoit ce qui est souvent décrit comme un sursis prévu par la loi. Il interdit au ministre de délivrer un avis de conformité à une seconde personne (au sens du Règlement) avant le lendemain du dernier jour de la période de vingt-quatre mois qui commence à la date à laquelle une action a été intentée en vertu du paragraphe 6(1) du Règlement, à moins que l’action ne fasse l’objet d’un désistement ou ne soit rejetée. Le paragraphe 7(5) prévoit en outre que l’alinéa 7(1)d) ne s’applique pas si l’action en cause fait l’objet d’un désistement ou a été rejetée ou si chacune des parties qui intentent une action en vertu du paragraphe 6(1), au moment où elles intentent l’action, renonce à l’application de l’alinéa 7(1)d).

[8] Au moment où Janssen a intenté une action contre Dr. Reddy’s, Janssen n’avait pas renoncé à l’application de l’alinéa 7(1)d) du Règlement. Janssen ne s’est pas non plus désistée de ses actions contre Dr. Reddy’s, Apotex ou PMS. Par conséquent, Dr. Reddy’s (ainsi qu’Apotex et PMS) n’a pas pu recevoir un avis de conformité en attendant l’issue de l’action fondée sur le paragraphe 6(1) intentée par Janssen.

[9] Sur consentement, les actions ont été instruites conjointement dans le cadre d’un procès commun. En fin de compte, la Cour, dans des motifs datés du 6 janvier 2021 (le juge Phelan), a rejeté les actions de Janssen et a conclu que le brevet 422 était invalide (voir la décision Janssen Inc c Apotex Inc, 2021 CF 7). Cette décision a été récemment confirmée en appel (voir l’arrêt Janssen Inc c Apotex Inc, 2022 CAF 184).

[10] La décision du juge Phelan de rejeter les actions fondées sur l’article 6 a cristallisé les causes d’action de Dr. Reddy’s, d’Apotex et de PMS contre Janssen au titre de l’article 8 du Règlement. Le 23 juillet 2021, Dr. Reddy’s a intenté une action en dommages‐intérêts en vertu de l’article 8. (Séparément, dans d’autres dossiers de la Cour, Apotex et PMS réclament également des dommages-intérêts à Janssen en vertu de l’article 8.)

[11] En défense, Janssen se fonde sur les paragraphes 8(5) et 8(6) du Règlement pour faire valoir que certains facteurs devraient être pris en compte dans l’évaluation du montant de l’indemnité, le cas échéant, qui devrait être accordée à Dr. Reddy’s. Plus précisément, Janssen affirme qu’une telle indemnité devrait être réduite parce que, si Dr. Reddy’s était entrée sur le marché au Canada avant le 1er février 2021 (date à laquelle Dr. Reddy’s a reçu son avis de conformité), plusieurs autres sociétés pharmaceutiques fabriquant des produits génériques seraient également entrées sur le marché avant Dr. Reddy’s ou à peu près au même moment que cette dernière. Au cours de l’interrogatoire préalable, Janssen a désigné Apotex et PMS comme deux des fabricants de produits génériques qui seraient visés au titre des paragraphes 8(5) et 8(6) du Règlement.

[12] Compte tenu de cette position adoptée par Janssen en défense, Dr. Reddy’s a déposé la présente requête en vertu de l’alinéa 220(1)a) des Règles, dans laquelle elle sollicite une ordonnance pour que la Cour statue, avant l’instruction, sur la question énoncée précédemment dans les présents motifs. Janssen s’oppose à la requête.

III. Question en litige

[13] En vertu de l’alinéa 220(1)a) des Règles, une partie peut, par voie de requête présentée avant l’instruction, demander à la Cour de statuer sur tout point de droit qui peut être pertinent dans l’action. Une requête fondée sur l’article 220 des Règles est généralement présentée en deux étapes. La Cour doit d’abord déterminer s’il y a lieu, dans les circonstances particulières de l’affaire, que la question proposée fasse l’objet d’une requête préliminaire avant l’instruction. Ce n’est que lorsque la Cour répond à cette question par l’affirmative que la requête passe à la deuxième étape pour statuer sur la question de droit telle qu’elle a été énoncée et approuvée par la Cour à la première étape (voir l’arrêt Google Canada Corporation c Paid Search Engine Tools, LLC, 2021 CAF 63 [Google] au para 6).

[14] La requête en l’espèce ne porte que sur la première étape. Par conséquent, la seule question que doit trancher la Cour est celle de savoir s’il y a lieu que la question proposée fasse l’objet d’une requête avant l’instruction.

IV. Analyse

A. Principes généraux

[15] Au titre de l’alinéa 220(1)a) des Règles, la question proposée à la Cour doit satisfaire aux trois exigences suivantes : a) aucun fait essentiel à la question de droit à être tranchée n’est contesté; b) ce qui doit être tranché est une pure question de droit; et c) la décision disposera de manière définitive d’un point en litige de sorte que soit éliminée la nécessité d’un procès, ou s’il y a procès, il sera tout au moins abrégé ou plus rapide (voir les arrêts Google au para 7 et Rogers Communications Partnership c Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN), 2016 CAF 28 au para 43). La dernière de ces trois exigences vise à s’assurer que la question proposée n’est pas purement théorique et qu’elle est susceptible de régler, en tout ou en partie, le litige (voir l’arrêt Google au para 7).

[16] La décision sur une question de droit avant le procès constitue une dérogation à la règle générale selon laquelle l’ensemble de l’affaire doit être entendu et tranché en une seule fois (voir l’arrêt Google au para 8 et la décision Wolf c Canada, 2002 CFPI 434 [Wolf] au para 2). En conséquence, la partie requérante, en l’espèce Dr. Reddy’s, a le fardeau de convaincre la Cour qu’il est justifié de s’écarter de la règle générale (voir la décision Wolf au para 2).

[17] Même si la partie requérante satisfait aux trois exigences susmentionnées, la Cour conserve toujours son pouvoir discrétionnaire de ne pas accueillir une requête aux termes de l’alinéa 220(1)a) des Règles, en tenant compte de tous les faits de l’espèce qui sont favorables ou défavorables à la décision d’accueillir la requête (voir l’arrêt Google au para 8, citant l’arrêt Perera c Canada, [1998] 3 CF 381, 1998 CanLII 9051 (CAF) [Perera] au para 15).

[18] Je ne crois pas que ces principes généraux soient contestés par les parties.

B. Les questions de savoir si 1) aucun fait essentiel à la question de droit à être tranchée n’est contesté et 2) ce qui doit être tranché est une pure question de droit

[19] En l’espèce, il est efficace et logique d’analyser ensemble les deux premières exigences, puisque les parties soulèvent, relativement à ces deux exigences, des arguments qui se rejoignent.

[20] Les observations des deux parties permettent à la Cour de comprendre de manière très détaillée les arguments qu’elles présenteraient à l’appui de leurs positions respectives sur la question proposée, à la deuxième étape de l’instruction de la requête fondée sur l’article 220 des Règles, dans l’éventualité où l’autorisation serait accordée à la première étape. Je suis conscient du fait que, à la première étape de la requête dont la Cour est actuellement saisie, il n’est pas du ressort de la Cour de répondre à la question proposée (voir l’arrêt Google, aux para 11 et 12), point sur lequel je reviendrai plus tard dans la présente analyse. Toutefois, il est utile d’examiner les positions des parties sur la question proposée, car elles permettent de comprendre la nature de la question.

[21] Dans le cadre de la présente requête, les demanderesses demande à la Cour de statuer sur une question, telle qu’elle est formulée ou (à titre subsidiaire) telle qu’elle peut être reformulée par la Cour. Bien qu’elle soit énoncée précédemment dans les présents motifs, je reprends la question telle qu’elle a été formulée par Dr. Reddy’s par souci de commodité :

[traduction]

Au titre du [Règlement], lorsque le titulaire d’un brevet a exercé son droit au sursis prévu à l’article 7 par suite de l’entrée de produits génériques sur le marché, et n’a jamais renoncé à ce droit en ce qui concerne certains produits génériques dans le monde réel, ou n’est pas autrement privé de ce droit à l’égard de ces produits, ce même obstacle à l’entrée de ces produits génériques prévaut-il dans le monde hypothétique pour l’application de l’article 8 (outre la partie qui invoque l’article 8)?

[22] À la deuxième étape, Dr. Reddy’s soutient qu’il faudrait répondre par l’affirmative à cette question. Elle fonde sa position sur les jugements antérieurs portant sur l’interprétation de l’article 8 du Règlement et ses versions précédentes, particulièrement sur l’analyse effectuée dans l’arrêt Apotex Inc c Sanofi-Aventis, 2014 CAF 68 [Apotex Ramipril], conf par 2015 CSC 20 :

161. Puisque le Règlement AC porte que l’on ne doit pas tenir compte du Règlement AC à une fin précise, il me semble que le fait de ne pas en tenir compte à quelque autre fin équivaudrait à modifier l’article 8 par voie judiciaire. J’arrive donc à la conclusion que chaque demande d’indemnité au titre de l’article 8 doit être évaluée en tenant pour acquis que le monde hypothétique est un monde dans lequel le Règlement AC existe.

162. Il s’ensuit que, dans le marché hypothétique, le comportement de fabricants concurrents de médicaments génériques doit être déterminé en tenant pour acquis que le Règlement AC existe et que chaque fabricant de médicaments génériques agira en conséquence.

[...]

186. Comme je l’expliquais plus haut, je ne crois pas qu’il soit juste de présumer qu’il n’y a pas de Règlement AC dans le monde hypothétique, ni que le Règlement AC ne s’applique pas à celui qui cherche à être indemnisé au titre de l’article 8 (sauf s’il s’agit de déterminer le début de la période de responsabilité selon l’article 8). Il me semble donc que, dans le monde hypothétique, les demandes d’interdiction déposées contre Apotex auraient été rejetées, tout comme elles l’ont été dans le monde réel. Chacun de ces rejets donnait à Apotex le droit de demander une indemnité au titre de l’article 8 du Règlement AC. Toutefois, chaque rejet fondé sur une allégation d’invalidité mettait en péril les autres demandes d’interdiction déposées par Sanofi se rapportant à la même allégation, y compris celles se rapportant aux allégations d’invalidité faites par Teva et Riva.

187. Cela étant, il me semble que Riva et Teva se seraient comportées dans le monde hypothétique de la même façon qu’elles se sont comportées dans le monde réel, dans lequel elles ont tenté d’obtenir un rejet sommaire dès lors qu’elles ont estimé qu’elles avaient de bonnes chances d’y parvenir. De plus, dans le monde réel, la dernière des demandes d’interdiction déposées contre Riva et Teva portant sur des allégations d’invalidité n’a été rejetée qu’après le 16 décembre 2006. Je ne vois aucune raison de conclure que Riva ou Teva aurait pu obtenir ce résultat, ou aurait obtenu ce résultat dans le monde hypothétique, plus tôt qu’elles ne l’ont obtenu dans le monde réel.

[23] En bref, selon Dr. Reddy’s, la jurisprudence confirme que, si un titulaire de brevet exerce son droit au sursis prévu à l’article 7 contre l’entrée d’un produit générique, et ne renonce pas à ce droit ou que ce droit demeure applicable relativement à certains produits génériques dans le monde réel, il n’est pas, en droit, loisible au titulaire de brevet, lorsqu’il se défend par la suite contre une réclamation en dommages-intérêts fondée sur l’article 8, de soutenir que de tels produits génériques (outre les produits de la partie qui invoque l’article 8) auraient été mis sur le marché dans le monde hypothétique en l’absence de cet obstacle à l’entrée.

[24] À l’instruction de la deuxième étape, Janssen soutient qu’il faudrait répondre à cette question par la négative. À l’instar de Dr. Reddy’s, Janssen s’appuie sur la jurisprudence traitant de l’article 8, dont l’arrêt Apotex Ramipril :

158. La juge de première instance a rejeté la méthode du libre accès, principalement parce qu’elle est incompatible avec la règle voulant que chaque demande d’indemnité au titre de l’article 8 soit examinée individuellement, en tenant compte des éléments de preuve produits. La juge a présumé que, dans le monde hypothétique, les concurrents de celui qui sollicite une indemnité au titre de l’article 8 sont assujettis au Règlement AC et qu’ils surmonteraient les obstacles réglementaires comme ils l’ont fait dans le monde réel, sauf s’il existe une preuve permettant au juge des faits de conclure raisonnablement qu’ils auraient agi différemment.

[Souligné par Janssen]

[25] Janssen estime que l’arrêt Apotex Ramipril et d’autres précédents établissent que, bien qu’une action intentée en vertu de l’article 8 crée une présomption légale selon laquelle un titulaire de brevet aurait agi, dans le monde hypothétique, de la même façon qu’il l’a fait dans le monde réel, il est possible pour le titulaire de brevet (ou toute partie) de démontrer que les événements dans le monde hypothétique se seraient déroulés différemment.

[26] Toutefois, Janssen invoque les mêmes précédents et la même position sur le droit applicable, à l’appui de son argument selon lequel la question proposée par Dr. Reddy’s n’est pas une simple question de droit et que la question sera tranchée en fonction de faits essentiels qui sont contestés. Janssen affirme qu’elle présentera des éléments de preuve au procès pour expliquer pourquoi elle aurait renoncé au sursis, ou pourquoi ce sursis ne serait par ailleurs plus applicable, dans les actions fondées sur l’article 6 contre Apotex et PMS dans le monde hypothétique.

[27] La difficulté de l’argument de Janssen, relativement à la première étape de la requête fondée sur l’article 220 des Règles, est qu’il est circulaire. Pour retenir cet argument, la Cour serait appelée à répondre à la question proposée avant de décider si celle-ci constitue une pure question de droit qui ne serait pas fondée sur des faits importants contestés. En adoptant pareille démarche à la première étape, la Cour commettrait l’erreur décrite par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Google (para 11 et 12).

[28] Je comprends que le libellé de la question proposée, telle que l’a formulée Dr. Reddy’s, pourrait être interprété comme une demande fondée à la fois sur le droit et sur les faits (dans la mesure où les faits comptent). Selon cette interprétation, Janssen considérerait que la réponse à la question dépend de la preuve qui pourrait être présentée au procès. Toutefois, il ressort clairement de l’argumentation écrite et des plaidoiries dans le cadre de la présente requête que cette interprétation de la question que Dr. Reddy’s demande à la Cour de trancher est erronée. Dr. Reddy’s souhaite plutôt confirmer sa position selon laquelle, d’après les dispositions du Règlement et la jurisprudence applicable, il existe un principe de droit selon lequel la conduite dans le monde réel se traduit par des conclusions sur la conduite dans le monde hypothétique, sans égard à la preuve qu’une partie peut souhaiter présenter et à toute conclusion factuelle qui pourrait être tirée d’après ces éléments de preuve. La question de savoir si cette position est correcte est une pure question de droit.

[29] La question proposée pourrait peut-être être formulée différemment ou être mieux formulée. Toutefois, à mon avis, l’interprétation voulue est claire et il n’y a pas d’intérêt particulier à ce que la Cour reformule la question.

[30] En Bref, je conclus que la question proposée répond aux deux premières exigences du critère relatif l’article 220 des Règles.

C. La question de savoir si la décision sur la question proposée disposera de manière définitive d’un point en litige de sorte que soit éliminée la nécessité d’un procès, ou s’il y a procès, s’il sera tout au moins abrégé ou plus rapide

[31] Dr. Reddy’s n’allègue pas que le fait de trancher cette question éliminerait la nécessité d’un procès. Toutefois, elle fait valoir que cette décision disposerait d’un point en litige et permettrait donc aux parties et à la Cour d’économiser temps et argent. Au soutien de cette allégation, elle affirme que si la Cour répondait par l’affirmative a la question proposée, cette décision empêcherait, en droit, Janssen de présenter des éléments de preuve pour démontrer que PMS ou Apotex se retrouveraient sur le marché des produits génériques dans le monde hypothétique de Dr. Reddy’s.

[32] En particulier, Dr. Reddy’s soutient qu’une réponse affirmative à la question permettrait de réaliser des économies importantes en temps, en efforts et en argent attribuables à l’élimination des procédures suivantes :

  1. les requêtes pour interrogatoire préalable et l’interrogatoire préalable d’Apotex ou de PMS;

  2. la gestion des restrictions en matière de confidentialité relatives aux questions sensibles sur le plan commercial, notamment entre Dr. Reddy’s, Apotex et PMS;

  3. la convocation par Janssen et/ou Dr. Reddy’s des témoins d’Apotex et de PMS au procès pour examiner les questions de preuve à titre d’acteurs potentiels dans le monde hypothétique de Dr. Reddy’s;

  4. l’examen par des témoins experts des scénarios dans le monde hypothétique qui incluent Apotex et PMS, y compris les permutations de modèles de rechange et les calculs où Apotex et PMS, ou ni l’une ni l’autre, se retrouvent sur le marché, la préparation de rapports à cet égard par les témoins experts puis leurs dépositions.

[33] Dr. Reddy’s fait également valoir que de telles économies pourraient s’appliquer à l’autre instance fondée sur l’article 8 dans laquelle Apotex et PMS sont les demanderesses.

[34] En réponse, Janssen soutient que le fait de statuer sur la question proposée ne permettra pas de réduire ou d’accélérer de manière significative la durée du procès. Elle souligne que dans sa réclamation, Dr. Reddy’s demande d’être dédommagée pour la perte permanente de parts de marché et pour pertes futures, sans préciser de date de fin. Janssen fait valoir que, pour traiter de ces aspects de la réclamation, elle devra faire comparaître Apotex et PMS au procès pour confirmer qu’elles seraient entrées sur le marché dans le monde hypothétique au même moment que dans le monde réel.

[35] Janssen fait également valoir que, quelle que soit la réponse à la question proposée, elle devra tout de même traiter des questions de concurrence liées aux produits génériques de cinq autres tiers (c.-à-d. des fabricants de produits génériques autres qu’Apotex et PMS) qui, selon elle, auraient lancé leurs produits dans le monde hypothétique.

[36] En ce qui concerne cette troisième exigence du critère relatif à l’article 220 des Règles, Dr. Reddy’s soutient que le fardeau qui lui incombe est peu exigeant. La Cour n’a pas à conclure avec une absolue certitude que la réponse donnée à la question réglera le litige, en tout ou en partie (voir l’arrêt Perera). Cette exigence vise plutôt à assurer que la question proposée n’est pas purement théorique et qu’elle est susceptible de régler, en tout ou en partie, le litige (voir l’arrêt Google, au para 7).

[37] À mon avis, bon nombre des arguments des parties exposés précédemment sont mieux examinés dans l’analyse relative à l’exercice du pouvoir discrétionnaire dans la prochaine partie des présents motifs. Toutefois, je reconnais que, si la question proposée était réglée au moyen d’une requête fondée sur l’article 220 des Règles et que la réponse était favorable à Dr. Reddy’s, certains arguments présentés en défense par Janssen seraient éliminés. Il ne serait donc plus nécessaire de produire des éléments de preuve sur ces questions, ce qui réduirait probablement la durée du procès dans une certaine mesure.

[38] Bien entendu, si la réponse à la question est favorable à Janssen, la durée du procès ne sera pas raccourcie, et les parties auront consacré des efforts supplémentaires associés à la deuxième étape de la requête fondée sur l’article 220 des Règles. Toutefois, à l’instruction de la première étape de la requête, l’avocat de Janssen n’a pas fait valoir que, pour satisfaire à la troisième exigence de l’article 220 des Règles, la question devait servir à raccourcir le procès, et ce, indépendamment de la réponse. Par conséquent, je ne tiendrai pas compte de ce point dans l’examen de la troisième exigence, même si je considère qu’il convient de l’examiner dans le cadre de l’analyse relative à l’exercice du pouvoir discrétionnaire dans la prochaine partie des présents motifs.

[39] Je conclus que Dr. Reddy’s a satisfait à la troisième exigence.

D. Pouvoir discrétionnaire résiduel

[40] Une fois que la Cour conclut que les exigences relatives à la première étape d’une requête fondée sur l’article 220 des Règles sont remplies, son pouvoir discrétionnaire résiduel entre en jeu. Le rôle et la nature de ce pouvoir discrétionnaire sont expliqués de la façon suivante dans l’arrêt Perera (qui renvoie à l’article 474 des Règles, disposition antérieure à l’article 220 des Règles) :

15. Une fois ces conditions réunies, la Cour n’a pas d’obligation d’accueillir la requête fondée sur la Règle 474. Elle doit, à cette étape, exercer son pouvoir discrétionnaire en se rappelant que la procédure prévue par la Règle 474 est exceptionnelle et que la Cour ne doit y recourir que lorsqu’elle est d’avis que l’adoption de cette mesure extraordinaire entraînera des économies de temps et d’argent. C’est dans cet esprit que la Cour doit examiner tous les faits de l’espèce qui, à son avis, sont favorables ou défavorables à la décision d’accueillir la requête. Il n’est pas possible de les énumérer tous. Le fait que les parties s’entendent en est manifestement un. Moins évident est peut-être le fait que le juge puisse tenir compte de sa propre opinion quant à la probabilité que la question soit tranchée d’une façon qui ne réglera pas le litige. Il peut également prendre en compte la complexité des faits qui devront être établis au procès et de l’opportunité de tenter d’éviter pareille instruction pour cette raison. Il doit en outre prendre en considération la difficulté et l’importance des questions de droit proposées, la mesure dans laquelle il est souhaitable qu’il n’y soit pas répondu hors de tout contexte et la possibilité que la décision rendue à leur égard avant l’instruction n’entraîne pas, en fin de compte, d’économie de temps ni d’argent.

[41] J’ai examiné les arguments des parties en fonction des facteurs ou des circonstances énoncés dans l’arrêt Perera, que j’analyse de la façon suivante.

1) L’entente entre les parties

[42] Il ne s’agit évidemment pas d’une affaire dans laquelle les parties s’entendent pour proposer que la Cour statue sur une question préliminaire avant le procès. Ce facteur ne milite pas en faveur d’une décision préliminaire.

2) La probabilité que la question soit tranchée d’une façon qui ne réglera pas le litige

[43] Je ne me prononcerai pas sur la question de savoir si la réponse à la question proposée serait affirmative ou négative. Toutefois, je tiens compte du fait que, comme je l’ai mentionné dans les présents motifs, seule une de ces réponses produirait un résultat susceptible de raccourcir le procès. Il ne s’agit pas d’une situation où, quelle que soit la réponse à la question, le simple fait de trancher la question éliminerait une certaine quantité d’éléments de preuve que les parties seraient tenues de présenter à l’étape du procès si une décision préliminaire n’était pas rendue. Je considère donc qu’il s’agit d’un facteur neutre.

3) La complexité des faits qui devront être établis au procès

[44] Au titre de ce facteur, je tiens à souligner de nouveau les observations de Dr. Reddy’s au sujet de la preuve qui ne serait pas nécessaire de produire au procès si elle obtenait une réponse affirmative de la Cour à sa question plus tôt. Ces observations portent sur la preuve fournie par Apotex et PMS en qu’acteurs potentiels du monde hypothétique de Dr. Reddy’s et la preuve d’expert connexe, y compris de nombreux modèles et calculs éventuels.

[45] J’ai également pris en considération les observations de Janssen selon lesquelles, quelle que soit la réponse à la question proposée, des éléments de preuve sur le moment où Apotex et PMS sont entrés sur le marché devront être produits. Dr. Reddy’s conteste cette prétention, faisant valoir qu’en se fondant sur la présomption énoncée dans l’arrêt Apotex Ramipril (au para 158), c’est à Dr. Reddy’s qu’incombera le fardeau de la preuve sur cette question. Toutefois, il me semble que, quelle que soit la partie qui assume le fardeau de preuve, il est possible qu’Apotex et PMS soient tenues de produire une preuve même si la question proposée est tranchée à titre préliminaire. Janssen fait également valoir qu’il sera malgré tout nécessaire d’obtenir des éléments de preuve concernant la présence, sur le marché, de fabricants de produits génériques autres qu’Apotex et PMS. De plus, cette preuve pourrait vraisemblablement être prise en considération dans les analyses des experts.

[46] Compte tenu de ce qui précède, une réponse affirmative à la question proposée pourrait réduire quelque peu la complexité des faits au procès. Toutefois, il est difficile d’évaluer l’importance de cet avantage. Je conclus que ce facteur est favorable à Dr. Reddy’s, mais dans une faible mesure.

4) La difficulté et l’importance de la question proposée

[47] Je ne suis pas particulièrement convaincu qu’il sera difficile de trancher la question proposée, que ce soit par voie de décision préliminaire ou au procès. Toutefois, je considère que la décision est importante, car elle peut avoir une incidence considérable sur le calcul des dommages-intérêts dans la présente action, dans les actions fondées sur l’article 8 intentées par Apotex et PMS ainsi que dans d’autres poursuites futures fondées sur l’article 8 dans le cadre desquelles la décision pourrait servir de précédent. Je conclus que ce facteur ne milite pas en faveur d’une décision de la Cour à l’extérieur du cadre d’un procès complet.

5) La mesure dans laquelle il est souhaitable de statuer sur la question hors de tout contexte

[48] En ce qui concerne le dernier facteur, j’ai des réserves quant à l’opportunité de trancher la question proposée hors de tout contexte.

[49] Je tiens à souligner que je ne fais pas référence à l’observation de Janssen selon laquelle la question ne devrait pas être tranchée parce qu’elle est tributaire des faits. Comme je l’ai expliqué dans les présents motifs, la conclusion à la première étape de cette requête ne devrait pas être fondée sur une réponse possible à la question (en l’espèce, la réponse que Janssen proposerait, à savoir que la preuve et les faits comptent aux fins des caractéristiques du monde hypothétique).

[50] Or, selon moi, même si elle est appelée à statuer sur une pure question de droit, la Cour peut tirer parti du contexte factuel complet du procès en tenant compte des arguments juridiques des parties sur une question qui pourrait avoir une incidence non seulement sur ce litige, mais aussi sur les litiges connexes futurs. Ce facteur ne milite pas en faveur d’une décision préliminaire par la Cour.

6) La possibilité que la décision rendue à l’égard de la question avant l’instruction n’entraîne pas, en fin de compte, d’économie de temps ni d’argent

[51] À mon avis, ce facteur milite également à l’encontre d’une décision préliminaire sur la question proposée.

[52] Le procès en l’espèce devrait commencer le 5 juin 2023, soit dans un peu plus de six mois. D’après les observations de l’avocat de Janssen concernant l’état de certaines des principales mesures à prendre avant le procès, je crois savoir que la seconde série d’interrogatoires préalables est terminée, et que les requêtes en rejet doivent être instruites le 20 décembre 2022. Les rapports d’experts principaux doivent être déposés par Dr. Reddy’s au plus tard le 23 décembre 2022, les rapports d’experts de Janssen doivent être déposés au plus tard le 24 mars 2023 et la date limite pour les rapports en réplique de Dr. Reddy’s est le 21 avril 2023. De plus, la date provisoire du 31 janvier 2023 a été fixée pour l’instruction d’une requête pour production et interrogatoire préalable visant un tiers, concernant Apotex et PMS.

[53] Aucune des parties n’a fourni à la Cour des observations détaillées sur la question de savoir si et comment le calendrier serait touché dans l’éventualité où la requête fondée sur l’article 220 des Règles dépassait la première étape, de sorte qu’il serait nécessaire de fixer une date pour l’instruction de la deuxième étape de la requête, d’instruire la requête et de trancher celle-ci pour que la Cour puisse statuer sur la question de droit proposée. Toutefois, je souscris à l’argument de Janssen selon lequel la partie requérante au titre de l’article 220 des Règles (en l’espèce, Dr. Reddy’s) doit faire plus que simplement invoquer des économies de temps et d’argent et doit fournir des éléments de preuve à l’appui des économies potentielles. Il ne suffit pas de soutenir que les économies vont de soi (voir l’arrêt Google, au para 22).

[54] Je partage également la réserve évoquée par Janssen selon laquelle, alors que les parties sont maintenant à environ six mois du procès, l’ajout de la deuxième étape de la présente requête fondée sur l’article 220 des Règles dont l’instruction n’a pas encore fixée, ainsi que la possibilité d’un appel connexe (voir l’arrêt Google, au para 24), donne à penser, qu’au bout du compte, une décision préliminaire au procès sur la question proposée n’entraînera pas des économies de temps ou argent. En effet, ce processus pourrait, en fin de compte, s’ajouter au travail effectué par les parties. Ce serait particulièrement le cas si la Cour répondait par la négative à la question, car les parties auraient consacré du temps et de l’argent au processus lié à la deuxième étape de la requête fondée sur l’article 220 des Règles, y compris la possibilité d’un appel, sans éliminer aucun élément de preuve à produire lors du procès ultérieur.

[55] Bien que je conclue que ce facteur milite en faveur du rejet de la requête à la première étape, je tiens à souligner que je ne critique pas Dr. Reddy’s quant au moment où elle a présenté la présente requête. Je retiens ses observations selon lesquelles elle a entamé le processus de présentation de cette requête plus tôt cette année, après avoir appris les détails des positions de Janssen en défense dans les interrogatoires préalables. L’audition de la première étape de la requête devait avoir lieu le 19 septembre 2022, mais l’audience a été ajournée en raison du jour férié inattendu annoncé par le gouvernement fédéral à la suite du décès de la reine Elizabeth II. Toutefois, comme l’a souligné la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Perera (au para 15), la décision préliminaire sur une question de droit est une procédure exceptionnelle, et je ne suis pas convaincu de l’opportunité de s’engager dans pareille procédure à ce stade du litige (voir l’arrêt Windsor Refrigeration Co Ltd v Branch Nominees, (1961) 1 All ER 277 (CA) à la p 283, cité dans l’arrêt Perera, au para 5, note en bas de page 7).

7) Conclusion

[56] En conclusion, en ce qui a trait à l’analyse relative à l’exercice de mon pouvoir discrétionnaire, je juge que les facteurs mentionnés précédemment militent à l’encontre d’une décision préliminaire à la première étape du critère applicable au titre de l’article 220 des Règles. La requête sera donc rejetée. Dr. Reddy’s pourra bien entendu faire connaître sa position sur le point de droit pertinent au procès.

V. Dépens

[57] Janssen fait valoir qu’il y a lieu d’adjuger à la partie obtenant gain de cause dans la présente requête une somme forfaitaire de 5 000 $ à titre de dépens. Dr. Reddy’s estime que les dépens devraient suivre l’issue de la cause ou, si la Cour est disposée à adjuger des dépens suivant l’issue de la cause, que ces dépens soient fixés à 2 500 $.

[58] Je ne vois aucune raison de m’écarter de la méthode d’adjudication des dépens employée par la Cour dans le cadre de l’instruction récente de requêtes de nature procédurale d’une complexité comparable dans des litiges connexes qui portent sur l’article 8 et qui concernent Apotex (voir les décisions Apotex Inc c Janssen Inc, 2022 CF 1476 et Apotex Inc c Janssen Inc, 2022 CF 1477). Conformément à ces décisions, les dépens au titre de la présente requête suivront l’issue de la cause, et j’adjugerai à Janssen la somme de 3 000 $.


ORDONNANCE dans le dossier T-1168-21

LA COUR REND L’ORDONNANCE qui suit :

  1. La requête des demanderesses est rejetée.

  2. J’adjuge aux défenderesses des dépens de 3 000 $ dans le cadre de la présente requête.

« Richard F. Southcott »

Juge

Traduction certifiée conforme

Mélanie Lefebvre


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :

T-1168-21

INTITULÉ :

DR REDDY’S LABORATORIES LTD. et DR. REDDY’S LABORATORIES, INC. c JANSSEN INC., JANSSEN ONCOLOGY, INC. et BTG INTERNATIONAL LTD.

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 16 novembre 2022

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE SOUTHCOTT

DATE DES MOTIFS :

Le 5 décembre 2022


COMPARUTIONS :

Bryan Norrie

Jonathan Giraldi

Pour les demanderesses

Stephanie Anderson

POUR LES DÉFENDERESSES (Janssen Inc. et BTG International Ltd.)

Orestes Pasparakis

William Chalmers

David Yi

POUR LA DÉFENDERESSE (Janssen Oncology)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Aitken Klee LLP

Ottawa (Ontario)

Pour les demanderesses

Belmore Neiderauer LLP

Toronto (Ontario)

POUR LES DÉFENDERESSES (Janssen Inc. et BTG International Ltd.)

Norton Rose Fulbright Canada LLP

Toronto (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE (Janssen Oncology)

 

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