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Date : 20221121


Dossier : IMM‑5950‑21

Référence : 2022 CF 1588

[TRADUCTION FRANÇAISE]

St. John’s (Terre‑Neuve‑et‑Labrador), le 21 novembre 2022

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

JUNGWOO SHIN

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS ET JUGEMENT

[1] M. Jungwoo Shin (le demandeur) demande le contrôle judiciaire d’une décision par laquelle un agent d’immigration (l’agent) a refusé sa demande de visa de résident permanent au titre de la catégorie de l’expérience canadienne (la CEC), conformément au paragraphe 87.1(2) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 (le Règlement).

[2] Le demandeur est un citoyen de la Corée du Sud. Il est venu au Canada muni d’un permis d’études en 2006. Il a fait ses études secondaires au Canada de 2006 à 2009. Après deux années en Corée du Sud afin d’effectuer son service militaire obligatoire, il est revenu au Canada muni d’un autre permis d’études et a étudié à l’Université de Toronto. Il a obtenu un baccalauréat et une maîtrise entre 2016 et 2021.

[3] Après avoir obtenu sa maîtrise, le demandeur s’est vu accorder un permis de travail postdiplôme valide jusqu’en octobre 2020.

[4] Le demandeur a occupé deux emplois à temps partiel de septembre 2017 à avril 2019. En avril 2019, il a commencé à travailler à temps plein comme spécialiste en développement économique auprès de la Korea Trade Investment Promotion Agency (la KOTRA), à Toronto, dans la Section des affaires commerciales du consulat général de la République de Corée.

[5] De 2018 à 2020, le demandeur a présenté trois demandes de résidence permanente au titre de la CEC. Le refus de la première demande était fondé sur une erreur commise par le demandeur, qui avait choisi le mauvais code dans la Classification nationale des professions (la CNP). Le refus de la deuxième était fondé sur la conclusion de l’agent selon laquelle le demandeur n’avait pas exercé les fonctions associées à l’un de ses emplois à temps partiel. Le refus de la troisième était fondé sur le défaut de présenter une lettre d’emploi de la part de la KOTRA, en raison de retards entraînés par la pandémie de la COVID‑19.

[6] En novembre 2020, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente en invoquant son emploi auprès de la KOTRA en tant que spécialiste en développement économique, qui correspond à la CNP 4163 – Agents/agentes de développement économique, recherchistes et experts‑conseils/expertes‑conseils en marketing.

[7] L’agent a refusé la demande au motif que le demandeur n’avait pas exercé les fonctions décrites dans la CNP 4163. En particulier, l’agent a conclu que le demandeur ne satisfaisait pas aux exigences énoncées aux alinéas 87.1(2)b) et c) du Règlement qui se lisent comme suit :

Qualité

Member of the class

(2) Fait partie de la catégorie de l’expérience canadienne l’étranger qui satisfait aux exigences suivantes :

(2) A foreign national is a member of the Canadian experience class if

[…]

b) pendant cette période d’emploi, il a accompli l’ensemble des tâches figurant dans l’énoncé principal établi pour la profession dans les descriptions des professions de la Classification nationale des professions;

(b) during that period of employment they performed the actions described in the lead statement for the occupation as set out in the occupational descriptions of the National Occupational Classification;

c) pendant cette période d’emploi, il a exercé une partie appréciable des fonctions principales de la profession figurant dans les descriptions des professions de la Classification nationale des professions, notamment toutes les fonctions essentielles;

(c) during that period of employment they performed a substantial number of the main duties of the occupation as set out in the occupational descriptions of the National Occupational Classification, including all of the essential duties;

[…]

[8] Le demandeur soutient maintenant que l’agent a tiré une conclusion sur la crédibilité sans lui donner l’occasion de répondre aux préoccupations. Il soutient qu’il s’agit d’un manquement à l’équité procédurale.

[9] Le demandeur soutient aussi que la décision est déraisonnable au motif que l’agent n’a pas tenu compte des éléments de preuve présentés.

[10] Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le défendeur) soutient qu’il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale et que la décision est raisonnable.

[11] Les questions d’équité procédurale sont susceptibles de contrôle judiciaire selon la norme de la décision correcte; voir la décision dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, [2009] 1 RCS 339 (CSC).

[12] La décision sur le fond est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, conformément à l’arrêt de la Cour suprême du Canada dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, [2019] 4 RCS 653.

[13] Dans l’examen du caractère raisonnable, la Cour doit se demander si la décision faisant l’objet du contrôle « possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci »; voir Vavilov, précité, au para 99.

[14] Il n’est pas nécessaire que j’examine les arguments au sujet de l’équité procédurale puisque je ne suis pas convaincue que la décision satisfait à la norme applicable de la décision raisonnable.

[15] Le demandeur a présenté des éléments de preuve au sujet de ses fonctions dans le cadre de son emploi à la KOTRA. L’agent a formulé une observation générale, dans laquelle il exprimait son insatisfaction à l’égard du demandeur en ce qui concerne :

[traduction]

[…] l’ensemble des tâches figurant dans l’énoncé principal établi pour la profession dans les descriptions des professions de la CNP 4163, ainsi qu’une partie appréciable des fonctions principales, notamment toutes les fonctions essentielles, figurant dans les descriptions de la CNP 4163.

[16] À mon avis, aucune explication n’accompagne cette conclusion, ce qui va à l’encontre des enseignements de Vavilov, précité, au paragraphe 102. La décision ne comporte aucun mode d’analyse. Sans analyse, la décision ne peut pas être raisonnable.

[17] Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera accueillie, la décision sera annulée et l’affaire sera renvoyée à un autre agent pour nouvel examen. Il n’y a aucune question à certifier.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑5950‑21

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvel examen. Il n’y a aucune question à certifier.

« E. Heneghan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Caroline Tardif


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DoSSIER :

IMM‑5950‑21

 

INTITULÉ :

JUNGWOO SHIN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Audience tenue par vidéoCONFéRENCE ENTRE ST. JOHN’S (tERRE‑NEUVE‑ET‑LABRADOR) ET toronto (ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 1er novembRe 2022

MOTIFS ET JUGEMENT :

LA JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS :

lE 21 NovembRe 2022

COMPARUTIONS :

Jungwoo Shin

POUR LE DEMANDEUR

(POUR SON PROPRE COMPTE)

Stephen Jarvis

POUR LE Défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

pOUR LE Défendeur

 

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