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Date : 20221116


Dossier : IMM-5621-21

Référence : 2022 CF 1565

[TRADUCTION FRANÇAISE]

St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador), le 16 novembre 2022

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

JEAN-CLAUDE NDIKUM NGOLLE

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] M. Jean-Claude Ndikum Ngolle (le demandeur) sollicite le contrôle judiciaire de la décision par laquelle un agent a rejeté sa demande d’examen des risques avant renvoi (la demande d’ERAR) présentée en application de l’article 112 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi).

[2] Le demandeur, citoyen du Cameroun, est entré au Canada le 17 avril 2016. Le 18 avril 2016, il a présenté une demande d’asile, qu’il a ensuite retirée le 17 octobre 2016.

[3] Le 15 février 2019, le demandeur a soumis sa demande d’ERAR. En tant que citoyen du Cameroun ayant un nom à consonance francophone, il court, selon lui, le risque d’être dans la mire des séparatistes anglophones puisque le Cameroun est aux prises avec des troubles civils causés par des divisions politico-linguistiques. Il a également fait valoir qu’en raison de son grand-père et de son père, sa famille a été associée publiquement au Conseil national du Cameroun méridional (Southern Cameroons National Council – SCNC) pendant de nombreuses années, ce qui l’avait exposé à un risque de violence. De plus, il a affirmé que sa famille vivait à Buea, une région principalement anglophone [traduction] « enlisée » dans la violence politique.

[4] Le demandeur a fait également valoir qu’il serait ciblé en tant que demandeur d’asile [traduction] « débouté ». Selon lui, la protection de l’État n’est pas adéquate au Cameroun.

[5] L’agent a conclu que les éléments de preuve objectifs étaient insuffisants pour étayer les allégations du demandeur portant que le SCNC s’en prendrait à lui ou que les autorités camerounaises apprendraient que sa demande d’asile avait été refusée.

[6] L’agent a également conclu que les éléments de preuve objectifs étaient insuffisants pour démontrer, selon la prépondérance des probabilités, l’absence de protection de l’État. L’agent a jugé que le demandeur n’avait pas établi qu’il craignait avec raison d’être persécuté du fait d’opinions politiques [traduction] « présumées et réelles ».

[7] Le demandeur soutient maintenant que l’agent a omis de prendre en compte la totalité des éléments de preuve concernant les risques courus et la protection de l’État, qu’il a tiré une conclusion voilée quant à la crédibilité et qu’il a entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire.

[8] Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le défendeur) estime que l’agent n’a pas commis d’erreur susceptible de contrôle.

[9] La décision de l’agent est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, conformément à l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, [2019] 4 RCS 653 (CSC).

[10] Dans son évaluation du caractère raisonnable, la Cour doit se demander si la décision sous examen « possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle-ci »; voir Vavilov, précité, au para 99.

[11] J’estime, après examen de la preuve figurant au dossier certifié du tribunal et des observations écrites et orales des parties, et compte tenu de la norme de contrôle applicable, que la décision est déraisonnable.

[12] Les déclarations répétées de l’agent quant à l’insuffisance des éléments de preuve objectifs ne satisfont pas au critère de transparence et de justification, comme l’exige l’arrêt Vavilov, précité. Les déclarations montrent que l’agent n’a pas tenu dûment compte des éléments de preuve soumis.

[13] À mon avis, l’agent ne s’est pas attaqué aux éléments de preuve soumis par le demandeur. Ce défaut rend sa décision déraisonnable; voir Vavilov, précité, au para 128.

[14] Je n’ai pas besoin d’examiner les autres arguments soulevés par le demandeur.

[15] Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvelle décision. Il n’y a aucune question à certifier.

 


JUGEMENT dans le dossier IMM-5621-21

LA COUR STATUE QUE la demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de l’agent est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvelle décision. Il n’y a aucune question à certifier.

« E. Heneghan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5621-21

INTITULÉ :

JEAN-CLAUDE NDIKUM NGOLLE c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE ENTRE CALGARY (ALBERTA) ET ST. JOHN’S (TERRE-NEUVE-ET-LABRADOR)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 21 JUILLET 2022

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS :

LE 16 NOVEMBRE 2022

COMPARUTIONS :

Faraz Bawa

POUR LE DEMANDEUR

David Shiroky

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AUX AU DOSSIER :

Stewart Sharma Harsanyi

Avocats

Calgary (Alberta)

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Calgary (Alberta)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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