Date : 20221114
Dossier : IMM-2789-21
Référence : 2022 CF 1545
[TRADUCTION FRANÇAISE]
Ottawa (Ontario), le 14 novembre 2022
En présence de monsieur le juge Norris
ENTRE :
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ANDY ENGENLBERS QUIROZ MORENO
ANGIE CAROLINA QUIROZ GONZALES
LILIANA CAROLINA GONZALES GONZELES
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demandeurs
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et
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LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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défendeur
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JUGEMENT ET MOTIFS
[1] Les demandeurs, qui sont des citoyens du Honduras, ont présenté une demande d’asile au Canada parce qu’ils craignent la Mara Salvatrucha, un gang criminel connu également sous le nom de « MS-13 ». La Section de la protection des réfugiés (la SPR), de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, semble avoir trouvé crédible leur récit selon lequel ils ont été pris comme cibles par le MS-13. Or elle a conclu qu’ils ne sont ni des réfugiés au sens de la Convention ni des personnes à protéger, car ils disposent d’une possibilité de refuge intérieur (la PRI) à Roatán, une île au large de la côte du Honduras.
[2] Les demandeurs sollicitent le contrôle judiciaire de cette décision conformément au paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR). Ils soutiennent que la conclusion de la SPR selon laquelle Roatán constitue une PRI viable est déraisonnable. Comme je l’explique dans les motifs qui suivent, je suis d’accord avec eux. Par conséquent, la présente demande doit être accueillie et l’affaire, renvoyée à un autre décideur pour qu’il rende une nouvelle décision.
[3] En bref, Mme Gonzales Gonzeles travaillait en tant qu’enseignante au niveau primaire dans la petite ville d’Oropoli. Elle a été agressée physiquement devant ses élèves par un membre du MS-13. Ensuite, elle a été victime d’extorsion après avoir critiqué le MS-13 devant ses élèves à la suite d’un vol commis par le gang chez un de ses collègues. M. Quiroz Moreno, le conjoint de fait de Mme Gonzales Gonzeles, gagnait un revenu en vendant des vêtements et d’autres articles dans des foires locales. Il a aussi été victime d’extorsion de la part du MS-13. Le gang a également menacé de faire du mal à leur fille, Angie (qui était alors âgée de 9 ans). Craignant que le MS-13 ne leur cause d’autres préjudices, la famille a fui le Honduras. Elle a fini par se rendre au Canada par la voie terrestre, en passant par le Guatemala, le Mexique et les États-Unis.
[4] La SPR a examiné les demandes d’asile uniquement au titre de l’article 97 de la LIPR, en raison de l’absence de lien entre un motif prévu dans la Convention et les événements vécus par les demandeurs au Honduras. Les demandeurs ne contestent pas cette conclusion.
[5] Tel qu’il a été mentionné précédemment, la SPR a rejeté les demandes d’asile, car, bien qu’elle n’ait exprimé aucune préoccupation quant à la crédibilité des demandeurs, elle a conclu qu’ils disposaient d’une PRI viable sur l’île de Roatán.
[6] En termes simples, une PRI est un lieu dans le pays dont la personne à protéger a la nationalité et où elle ne s’exposerait à aucun risque (au sens où il faut l’entendre et selon la norme applicable, selon que la demande d’asile est présentée au titre de l’article 96 ou de l’article 97 de la LIPR) et où il ne serait pas déraisonnable que cette personne se réinstalle. Lorsqu’il existe une PRI viable, le demandeur d’asile n’a pas droit à la protection d’un autre pays. Pour réfuter la proposition selon laquelle il existe une PRI viable, la partie qui demande l’asile a le fardeau de démontrer qu’elle serait en danger dans la PRI proposée ou, même si elle n’y était pas en danger, qu’il serait déraisonnable en toutes circonstances qu’elle s’y installe : voir Aigbe c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 895 au para 9; en ce qui concerne le critère général aux fins de l’évaluation de la PRI, voir mon analyse à cet égard dans Sadiq c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 430 aux para 38-45 et les décisions qui y sont citées).
[7] La SPR a conclu qu’il a été satisfait aux deux volets du critère applicable pour déterminer si les demandes d’asile devraient être rejetées au motif que les demandeurs disposent d’une PRI viable : les demandeurs n’avaient pas réussi à établir qu’ils s’exposeraient à un risque à Roatán et qu’il serait déraisonnable pour eux, en toutes circonstances, de s’y installer. Les demandeurs contestent ces deux conclusions dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire.
[8] Il est bien établi que le fond de la décision de la SPR, notamment la conclusion de la SPR sur l’existence d’une PRI, doit être contrôlé selon la norme de la décision raisonnable. La norme de la décision raisonnable est désormais la norme de contrôle présumée, sous réserve d’exceptions précises « lorsqu’une indication claire de l’intention du législateur ou la primauté du droit l’exige »
(Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 au para 10). Rien ne justifie en l’espèce de déroger à cette présomption.
[9] Une décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti »
(Vavilov, au para 85). La cour de révision doit faire preuve de déférence à l’égard d’une décision qui possède ces attributs (ibid.).
[10] Comme il est expliqué dans l’arrêt Vavilov, l’exercice de tout pouvoir public « doit être justifié, intelligible et transparent, non pas dans l’abstrait, mais pour l’individu qui en fait l’objet »
(Vavilov, au para 95). Par conséquent, le décideur administratif est tenu « de justifier, de manière transparente et intelligible pour la personne visée, le fondement pour lequel il est parvenu à une conclusion donnée »
(Vavilov, au para 96). Comme le souligne également la Cour suprême dans l’arrêt Vavilov, « [l]e point de vue de la partie ou de l’individu sur lequel l’autorité est exercée est au cœur de la nécessité d’une justification adéquate. Lorsque la décision a des répercussions sévères sur les droits et intérêts de l’individu visé, les motifs fournis à ce dernier doivent refléter ces enjeux »
(au para 133). Voir également Gomez Dominguez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 1098 au para 24.
[11] Il incombe aux demandeurs de démontrer que la décision de la SPR est déraisonnable. Avant de pouvoir annuler une décision pour ce motif, la cour de révision doit être convaincue que cette décision « souffre de lacunes graves à un point tel qu’on ne peut pas dire qu’elle satisfait aux exigences de justification, d’intelligibilité et de transparence »
(Vavilov, au para 100). Il est important de préciser que, lorsqu’elle applique la norme de la décision raisonnable, la cour de révision doit s’abstenir d’apprécier à nouveau ou de réévaluer les éléments de preuve examinés par le décideur, ou de modifier les conclusions de fait, à moins de circonstances exceptionnelles (Vavilov, au para 125).
[12] Je suis d’avis que la conclusion de la SPR ayant trait à l’existence d’une PRI est déraisonnable, et ce, à deux égards importants.
[13] Premièrement, en ce qui concerne le premier volet du critère, je juge déraisonnable la conclusion de la SPR selon laquelle les demandeurs n’avaient pas réussi à établir qu’ils s’exposeraient à un risque à Roatán, car cette conclusion ne tient pas compte de la preuve déposée devant la SPR. Cette dernière a conclu que le MS-13 n’avait pas la motivation de rechercher les demandeurs à Roatán. Elle s’est notamment fondée sur un élément clé pour conclure que le MS-13 ne s’intéressait plus aux demandeurs : le gang ne s’en était pas pris aux membres de la famille des demandeurs, qui vivaient toujours à Oropoli, ni pour en faire des cibles à leur tour, ni pour chercher à savoir où se trouvaient les demandeurs après leur départ.
[14] Je ne suis pas d’accord avec les demandeurs pour dire que l’analyse de la SPR à cet égard relève de la conjecture ou que la SPR a présumé, de manière déraisonnable, que les auteurs du préjudice agiraient rationnellement. Compte tenu des éléments de preuve au dossier sur la manière dont les membres du MS-13 agissent habituellement, je suis plutôt d’accord avec le défendeur pour dire que l’absence de tels efforts de la part des auteurs du préjudice pourrait raisonnablement indiquer qu’ils ne s’intéressent plus aux demandeurs. Les décideurs peuvent se fonder sur la logique et le bon sens afin de tirer des conclusions à partir d’éléments de preuve évidents et non conjecturaux ou de faits connus : voir Ifeanyi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 419 au para 32, et Soos c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 455 aux para 13-14. Par conséquent, si, en effet, le gang n’a déployé aucun effort pour rechercher les demandeurs, il n’est pas déraisonnable que la SPR tienne compte de ce fait pour trancher la question de savoir si les demandeurs s’étaient acquittés du fardeau que leur imposait le premier volet du critère relatif à la PRI.
[15] Cependant, la difficulté tient au fait que certains éléments de preuve établissaient qu’après que les demandeurs eurent quitté le Honduras, les auteurs du préjudice étaient allés chez la mère de Mme Gonzales Gonzeles à la recherche des demandeurs, lieu où ces derniers avaient vécu auparavant. La SPR ne mentionne aucunement ces éléments de preuve lorsqu’elle conclut que les auteurs du préjudice n’étaient plus motivés à rechercher les demandeurs.
[16] Comme je l’ai mentionné précédemment, la SPR semble avoir conclu que le récit des demandeurs était crédible; rien n’indique que cette partie de leur récit a été rejetée. Le défendeur tente de relativiser ces éléments de preuve et en souligne d’autres qui soutiennent la conclusion de la SPR, mais il s’agit d’un ajout inacceptable aux motifs réellement fournis par la SPR : voir l’arrêt Vavilov, aux para 96-98. De la même façon, la SPR a conclu que rien n’indiquait que les auteurs du préjudice disposaient des moyens de rechercher les demandeurs d’asile dans le lieu de la PRI. Elle a tiré cette conclusion sans tenir compte des éléments de preuve présentés par les demandeurs (qui concordent avec les documents sur la situation dans le pays), selon lesquels le MS-13 est doté d’un réseau d’informateurs à l’échelle du Honduras. Compte tenu de ces lacunes dans les motifs de la SPR, il ne peut être soutenu que la conclusion tirée par la SPR au titre du premier volet du critère relatif à la PRI est justifiée et intelligible au regard des éléments de preuve dont disposait le décideur : voir Vavilov, au para 126.
[17] Deuxièmement, il était déraisonnable que la SPR rejette les éléments de preuve présentés par les demandeurs après l’audience au sujet de la situation actuelle à Roatán.
[18] Il est nécessaire d’apporter des précisions supplémentaires pour replacer cette question dans son contexte.
[19] Au début de l’audience devant la SPR, la commissaire a indiqué que la question de l’existence d’une PRI viable figurait parmi les questions à trancher. La commissaire a relevé deux PRI éventuelles : San Pedro Sula et Roatán. Les éléments de preuve des demandeurs ainsi que les observations de la conseil étaient axés sur le premier volet du critère relatif à la PRI, à savoir les moyens dont dispose le MS-13 et sa motivation à trouver les demandeurs partout au Honduras. Les demandeurs ont présenté peu d’éléments de preuve, voire aucun, au sujet de leurs conditions de vie éventuelles dans les endroits proposés pour la PRI.
[20] La conseil des demandeurs a reconnu en toute franchise qu’elle ne s’était pas préparée pour traiter des conditions aux endroits proposés pour la PRI, car cela relevait du second volet du critère (il semble qu’elle ne s’attendait pas du tout à ce que l’endroit proposé pour la PRI soulève de questions). Par conséquent, elle a demandé la possibilité de présenter des éléments de preuve et des observations après l’audience. À la suite d’une discussion, la commissaire de la SPR a invité la conseil à présenter une demande d’autorisation à cet égard.
[21] À la suite de l’audience, la conseil des demandeurs a présenté des observations écrites concernant le second volet du critère relatif à la PRI, ainsi que trois documents sur la situation dans le pays : l’un au sujet de Roatán et les deux autres au sujet de San Pedro Sula. La commissaire de la SPR a accepté les observations déposées après l’audience, mais a refusé d’admettre les documents sur la situation dans le pays, car « ils ne sont ni pertinents ni probants ».
La commissaire a également conclu que le document ayant trait à Roatán est de portée générale et « ne fournit aucun renseignement pertinent qui permettrait de savoir en quoi les demandeurs d’asile subiraient des épreuves indues découlant directement de leur profil et de leur situation »
. En outre, la commissaire a fait remarquer que les trois articles ont été publiés en 2019, et que rien n’empêchait donc leur présentation avant l’audience.
[22] Étant donné que la SPR a finalement conclu que Roatán constituait une PRI viable, les demandeurs n’ont pas contesté son refus d’admettre les documents ayant trait à San Pedro Sula. En revanche, selon moi, le refus par la SPR d’admettre le document ayant trait à Roatán était déraisonnable. Ce document, préparé par l’organisation non gouvernementale Cercle de la santé international (Circle of Health International), laquelle mène des activités à Roatán, décrivait la situation actuelle dans ce lieu, en particulier l’incidence dévastatrice qu’a entraînée la pandémie de COVID-19 sur l’industrie du tourisme local, qui est la principale source de revenus sur cette île déjà défavorisée. La conclusion de la SPR selon laquelle le contenu de ce document n’était ni pertinent ni probant pour le second volet du critère relatif à la PRI était déraisonnable. En outre, les documents sur la situation dans le pays comportent intrinsèquement des renseignements d’ordre général. Le fait que le document ne visait pas en particulier le profil ou la situation des demandeurs n’était pas une raison de le rejeter. De plus, puisqu’ils n’avaient reçu aucun avis avant l’audience quant au fait que Roatán était envisagée en tant que lieu éventuel de la PRI, les demandeurs n’auraient eu aucun motif de présenter le document d’avance. Enfin, il est tout simplement insensé que la SPR ait accepté les observations présentées par les demandeurs après l’audience, mais ait rejeté les éléments de preuve sur lesquels ces observations étaient fondées.
[23] En résumé, la commissaire de la SPR a souligné à juste titre la norme élevée applicable à laquelle les demandeurs devaient satisfaire pour démontrer qu’il serait déraisonnable pour eux de s’installer à Roatán : voir Ranganathan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (CA), 2000 CanLII 16789 (CAF), [2001] 2 CF 164 au para 15, et Hamdan c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 643 au para 12. Cependant, cette norme élevée ne constitue pas un motif raisonnable pour le rejet d’éléments de preuve pertinents ayant trait à la situation actuelle dans l’endroit proposé pour la PRI.
[24] Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision de la SPR, datée du 1er avril 2021, est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre décideur pour qu’il rende une nouvelle décision.
[25] Les parties n’ont soulevé aucune question grave de portée générale à certifier au titre de l’alinéa 74d) de la LIPR. Je conviens que l’affaire n’en soulève aucune.
[26] Enfin, à l’avis de demande d’autorisation et de contrôle judiciaire des demandeurs était jointe une demande d’adjudication des dépens. Les demandeurs n’ont pas donné suite à cette demande dans leur mémoire des faits et du droit ou dans leurs observations verbales. Quoi qu’il en soit, compte tenu de l’article 22 des Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22, rien ne justifie que des dépens soient adjugés en l’espèce.
JUGEMENT dans le dossier IMM-2789-21
LA COUR REND LE JUGEMENT suivant :
La demande de contrôle judiciaire est accueillie.
La décision de la SPR datée du 1er avril 2021 est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre décideur pour qu’il rende une nouvelle décision.
Aucune question de portée générale n’est énoncée.
Aucuns dépens ne sont adjugés.
« John Norris »
Juge
Traduction certifiée conforme
Sandra de Azevedo, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
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IMM-2789-21
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INTITULÉ :
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ANDY ENGENLBERS QUIROZ MORENO ET COLL c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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LIEU DE L’AUDIENCE :
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AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE
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DATE DE L’AUDIENCE :
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LE 29 MARS 2022
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JUGEMENT ET MOTIFS :
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LE JUGE NORRIS
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DATE DES MOTIFS ET DU JUGEMENT :
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LE 14 NOVEMBRE 2022
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COMPARUTIONS :
Nathaniel Ng-Cornish
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POUR LEs DEMANDEURs
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Stephen Jarvis
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POUR LE DÉFENDEUR
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Nathaniel Ng-Cornish
Toronto (Ontario)
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POUR LEs DEMANDEURs
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Procureur général du Canada
Toronto (Ontario)
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POUR LE DÉFENDEUR
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