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Date : 19991126


IMM-4777-98


E n t r e :


PARBATEE RAMBEHARRY,

     demanderesse,




- et -






MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION

     défendeur.



                            

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE REED

[1]      L"avocate de la demanderesse, Me Robin Seligman, a soutenu, lors des débats, que l"agent des visas n"avait pas examiné équitablement la demande de visa d"immigrant de sa cliente. Elle affirme que l"agent des visas n"a tenu aucun compte de l"offre d"emploi que sa cliente avait reçue et ajoute que l"agent des visas a affirmé qu"elle n"allait [TRADUCTION] " même pas envisager l"opportunité " d"exercer son pouvoir discrétionnaire de manière à octroyer un visa [TRADUCTION] " peu importe ce que vous allez me présenter ". Elle ajoute que [TRADUCTION] " tout le ton de la décision de l"agent laisse planer des doutes quant à l"impartialité de celui-ci " et affirme que l"agent des visas [TRADUCTION] " n"était prêt à entendre rien de ce qui lui était présenté, peu importe la nature ou la façon dont ces éléments lui étaient présentés ".

[2]      Ces assertions ne semblent pas exactes.

[3]      La demanderesse a soumis une demande de visa d"immigrant dans laquelle elle a déclaré que la profession qu"elle envisageait d"exercer au Canada était celle de " puéricultrice ". Dans la lettre qui accompagnait cette demande, l"avocate de la demanderesse faisait valoir que l"on devait attribuer 13 points à sa cliente pour ses études. Elle précisait que la demanderesse était titulaire d"un diplôme d"associée ès arts ainsi que d"un certificat en services sociaux du Portland Community College, de Portland (Oregon), aux États-Unis. Elle ajoutait finalement que la demanderesse était un professeur diplômé à Trinidad et qu"elle avait travaillé comme monitrice de soins infirmiers psychiatriques d"avril 1986 à mai 1990 à Trinidad.

[4]      L"agent des visas a octroyé cinq points à la demanderesse pour ses études. L"agent a conclu que la demanderesse n"avait jamais terminé ses études secondaires à Trinidad, qu"elle était bel et bien titulaire d"un certificat en sciences sociales et d"un diplôme d"associée ès arts (qui portaient tous les deux la date du 9 juin 1979) du Portland Community College, et qu"en 1987, le ministère de l"Éducation de Trinidad et le Nursing Council de Trinidad avaient tous les deux estimé que ces diplômes équivalaient à la note de passage dans six examens de niveau 0. La demanderesse avait, à l"époque, été avisée que ses diplômes lui permettaient de s"inscrire à un programme de sciences infirmières à Trinidad. Elle s"est inscrite le 1er septembre 1991 au programme de soins infirmiers psychiatriques du National Institute for Higher Education Research Science and Technology de Trinidad. Elle n"a pas complété ce cours, qui devait se terminer en avril 1993.

[5]      Suivant la formule de points d"appréciation, l"immigrant se voit attribuer cinq points s"il a obtenu un diplôme d"études secondaires non préparatoire à l"université, et dix points s"il a obtenu un diplôme d"études secondaires préparatoire à l"université. Des points sont également attribués pour les titres professionnels et pour les diplômes universitaires. L"immigrant obtient dix points s"il a un diplôme d"études post-secondaires qui exige une année complète de formation théorique à laquelle il n"est admissible que s"il est titulaire d"un diplôme d"études secondaires qui lui donne le droit de présenter une demande d"admission à l"université.

[6]      Lorsqu"elle a appris que sa cliente n"avait recueilli que cinq points pour ses études, Me Seligman a écrit à l"agent des visas pour lui signaler que son évaluation était erronée, que sa cliente avait [TRADUCTION] " réussi six examens de niveau 0 à Trinidad et [...] ensuite suivi un cours à temps plein de 2 " ans au Portland College aux États-Unis, duquel elle a obtenu un diplôme " (les italiques sont du soussigné). L"avocate affirme qu"il s"agit d"un collège communautaire reconnu par l"État de l"Oregon où la demanderesse a obtenu son diplôme d"associée ès arts avec spécialisation en sciences sociales avec distinction (il n"est nulle part fait mention de ce fait sur le certificat). L"avocate a ajouté : [TRADUCTION] " Comment se fait-il qu"elle n"a obtenu que cinq points ? " L"avocate a joint une copie des diplômes que l"agent des visas avait déjà examinés lors de l"entrevue de la demanderesse.

[7]      L"agent des visas a répondu en informant Me Seligman qu"elle avait communiqué avec le Portland Community College qui l"avait informée qu"il n"était pas nécessaire d"être titulaire d"un diplôme d"études secondaires pour être admis dans cet établissement. L"agent des visas a déclaré que, si la demanderesse pouvait apporter la preuve qu"elle avait terminé ses études secondaires à Trinidad et qu"elle avait ensuite fréquenté le collège communautaire, elle lui attribuerait dix points pour ses études.

[8]      L"agent des visas a souligné que, même si elle obtenait dix points à ce chapitre, la demanderesse ne recueillerait malgré tout pas suffisamment de points pour se voir accorder le droit d"établissement. L"agent des visas a également déclaré qu"elle n"était pas disposée à exercer son pouvoir discrétionnaire de manière à recommander que la demanderesse se voit accorder le droit d"établissement malgré l"insuffisance des points obtenus.

[9]      L"avocate a répondu à l"invitation qui lui était faite de fournir de plus amples renseignements au sujet du niveau de scolarité de la demanderesse en demandant que la lettre de refus soit envoyée à sa cliente : [TRADUCTION] " Vous m"avez fait savoir que vous aviez déjà refusé la demande de ma cliente au moment où vous avez consigné les données dans le SITCI le jour de l"entrevue. Auriez-vous l"obligeance de m"envoyer le refus de ce jour-là [...] "

[10]      Au dossier de la demande de contrôle judiciaire de la décision de l"agent des visas, l"avocate de la demanderesse a joint une copie d"une page tirée de l"annuaire 1998-1999 du Portland Community College dans lequel est décrit l"" Oregon Transfer Degree Program ". On y parle notamment de l"" Associate of Arts, Oregon Transfer Degree ", en précisant les conditions d"admissibilité, les cours obligatoires, la moyenne et le nombre de crédits exigés. L"avocate fait reposer une grande partie de son argument sur ce document. Elle a fait valoir qu"il démontre que l"agent des visas a commis une erreur dans son évaluation du certificat et du diplôme d"associée obtenus en 1979 par la demanderesse et que ces attestations équivalaient à deux années d"université.

[11]      L"avocat du défendeur soutient pour sa part qu"on ne doit pas tenir compte de ces nouveaux éléments de preuve parce qu"ils n"avaient pas été portés à la connaissance de l"agent des visas. Il ajoute que la décision de l"agent des visas doit être examinée en fonction des éléments de preuve dont elle disposait. Je suis du même avis.

[12]      Je trouve douteuse la pratique consistant à verser des pièces supplémentaires de ce genre au dossier d"une demande, surtout lorsque l"intéressé ne s"est pas prévalu de l"occasion qui lui était donnée de présenter à l"agent des visas des éléments de preuve supplémentaires visas pour appuyer ses assertions. De plus, le fait d"invoquer une publication de 1998-1999 en ce qui concerne un diplôme d"" équivalence " (transfer) pour justifier la valeur que l"on attribue à un diplôme obtenu en 1979 qui est susceptible d"être très différent est pour le moins contestable. Si on lui avait présenté l"annuaire de 1998-1999, l"agent des visas aurait eu l"occasion de s"informer pour savoir si le diplôme obtenu par la demanderesse était effectivement un " diplôme d"équivalence " et si la description de 1998-1999 vaut pour 1979.

[13]      L"avocate de la demanderesse sait ou du moins devrait savoir que celui qui demande un visa d"immigrant est tenu de faire la preuve du bien-fondé de ses prétentions à l"agent des visas. En l"espèce, la demanderesse a soumis à l"agent des visas l"évaluation que les autorités de Trinidad avaient faite des études qu"elle avait suivies à Portland. Si la demanderesse voulait se fonder sur une évaluation faite en Oregon de ses études, il lui fallait en soumettre une à l"agent des visas. L"affirmation générale et non étayée de l"avocate suivant laquelle les diplômes de la demanderesse ont telles ou telles caractéristiques ne suffit pas, et les agents des visas ne devraient pas accepter ce genre d"affirmation.

[14]      Je passe maintenant à l"argument de l"avocate suivant lequel l"agent des visas n"a pas tenu compte de l"offre d"emploi que sa cliente lui a présentée et a fait preuve d"étroitesse d"esprit parce qu"elle n"a accordé que cinq points pour la personnalité et a refusé de revenir sur sa décision de ne pas exercer son pouvoir discrétionnaire.

[15]      Il ressort à l"évidence des notes SITCI de l"agent des visas que celle-ci a bel et bien tenu compte de l"offre d"emploi. Elle l"a même évaluée. Elle a signalé qu"il s"agissait d"une offre d"emploi comme " travailleuse sociale " dans une maison de soins infirmiers, mais a fait remarquer que la demanderesse ne possédait pas les qualités requises pour travailler comme aide-infirmière. Elle a souligné que [TRADUCTION] " pour une employée non spécialisée de soins à domicile, le salaire [14 $ de l"heure] est trop élevé ". Dans sa demande de visa d"immigrant, la demanderesse avait précisé qu"elle prévoyait travailler au Canada comme puéricultrice. Non seulement l"offre d"emploi portait-elle sur un poste de travailleuse sociale, mais en plus la maison de soins infirmiers dont il était question dans l"offre d"emploi hébergeait des " personnes âgées malades ", et non des enfants.

[16]      L"agent des visas a attribué cinq points à la demanderesse pour sa personnalité. L"avocat du défendeur soutient qu"il s"agit là d"un score moyen. L"avocate de la demanderesse affirme pour sa part que le score moyen est de six points. L"avocate de la demanderesse soutient que la décision de n"attribuer que cinq points à sa cliente au chapitre de la personnalité est déraisonnable, étant donné que la demanderesse parle couramment l"anglais, qu"elle avait en main une offre d"emploi, qu"elle possédait une vaste expérience et qu"elle était très instruite et détenait un diplôme des États-Unis. Elle affirme que le ton des notes de l"agent des visas démontre bien que son évaluation reposait sur un conflit de personnalités plutôt que sur l"examen de la question de savoir si la demanderesse avait des chances de réussir son installation au Canada.

[17] Le fait que la demanderesse parle couramment l"anglais a été reconnu tant dans les points d"appréciation que dans le nombre approprié de points qui a été attribué à la demanderesse à ce chapitre. L"agent des visas a également tenu compte du fait que la demanderesse avait de la famille au Canada, comme le démontre le fait qu"elle l"a évaluée dans la catégorie des parents aidés et qu"elle lui a attribué cinq points supplémentaires pour cette raison. La demanderesse ne possédait pas une vaste expérience. En fait, elle avait été sans travail pendant six ans avant de présenter sa demande d"établissement. Elle n"était pas très instruite et, comme il a déjà été souligné, bien que son avocate affirme que le diplôme que le Portland Community College a décerné à la demanderesse mérite qu"on lui reconnaissance une certaine valeur, ni elle ni sa cliente n"a présenté à l"agent des visas de preuve concrète pour justifier cette affirmation. Le ton des notes de l"agent des visas ne permet pas de conclure à un conflit de personnalité, mais simplement que l"agent des visas faisait son travail et évaluait les éléments de preuve qui lui étaient soumis.

[18] Le paragraphe 11(3) du Règlement sur l"immigration confère à l'agent des visas le pouvoir discrétionnaire de recommander l"octroi du droit d"établissement à un immigrant qui n'obtient pas le nombre de points d'appréciation requis s'il est d'avis qu'il existe de bonnes raisons de croire que le nombre de points d'appréciation obtenu ne reflète pas les chances de cet immigrant de réussir son installation au Canada.

[19]      Dans ses notes SITCI, l"agent des visas explique pourquoi elle a décidé de ne pas exercer son pouvoir discrétionnaire de manière à recommander que le droit d"établissement soit accordé à la demanderesse malgré le nombre insuffisant de points d"appréciation qu"elle avait obtenus. Il ressort de ses notes qu"elle a demandé à la demanderesse pourquoi elle estimait que l"agent des visas devait ainsi exercer son pouvoir discrétionnaire. La demanderesse a répondu que son fils avait besoin d"un père et que son frère avait obtenu le droit de s"établir au Canada. L"agent des visas a signalé à la demanderesse que le père de son fils vivait à Trinidad. L"agent des visas a fait remarquer que la demanderesse avait été sans emploi pendant six ans avant de présenter sa demande d"établissement, qu"elle n"avait jamais travaillé comme monitrice de soins infirmiers psychiatriques, contrairement à ce qu"elle prétendait, et qu"il y avait [TRADUCTION] " beaucoup de contradictions " et que l"agent des visas avait " du mal à croire " la demanderesse. L"agent des visas a conclu qu"elle estimait que les points qui avaient été attribués à la demanderesse reflétaient fidèlement les chances de la demanderesse de réussir son installation au Canada.

[20]      À la suite de l"envoi de la lettre de refus, l"agent des visas a noté au dossier qu"elle avait reçu un appel téléphonique dans lequel Me Seligman lui avait dit que les conclusions qu"elle avait tirées étaient [TRADUCTION] " mal fondées ", qu"elle avait [TRADUCTION] " commis des erreurs de droit " et qu"elle devait consulter d"autres fonctionnaires de l"immigration. Je rappelle qu"aucun élément de preuve n"avait été porté à la connaissance de l"agent des visas pour justifier les assertions que l"avocate de la demanderesse formulait au sujet de la valeur des diplômes obtenus par la demanderesse.

[21]      Il m"est impossible de conclure que la décision de l"agent des visas est mal fondée. La demanderesse n"a pas réussi à me convaincre que l"agent des visas a commis des erreurs de droit, qu"elle a mal qualifié la preuve ou n"a pas tenu compte de certains éléments de preuve ou encore qu"elle n"a pas observé les principes de justice naturelle en l"espèce.



[22]      Par ces motifs, la demande est rejetée.

                                     " B. Reed "

     J.C.F.C.

Toronto (Ontario)

Le 26 novembre 1999


Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL. L.


     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     Avocats et procureurs inscrits au dossier

No DU GREFFE :                  IMM-4777-98
INTITULÉ DE LA CAUSE :          PARBATEE RAMBEHARRY

                         et

                         MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION

DATE DE L"AUDIENCE :              LE MARDI 23 NOVEMBRE 1999
LIEU DE L"AUDIENCE :              TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L"ORDONNANCE prononcés par le juge Reed le vendredi 26 novembre 1999



ONT COMPARU :                  M e Robin Seligman
                             pour la demanderesse
                         M e Geraldine McDonald
                             pour le défendeur
                        
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :     
                         M e Robin Seligman

                         Avocat et procureur

                         33, rue Bloor Est, bureau 1000
                         Toronto (Ontario)
                         M4W 3H1
                             pour la demanderesse
                         M e Morris Rosenberg
                         Sous-procureur général du Canada
                        
                             pour le défendeur

                         COUR FÉDÉRALE DU CANADA


                                 Date : 19991126

                        

         IMM-4777-98


                         E n t r e :

                         PARBATEE RAMBEHARRY


demanderesse


et



                         MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                         ET DE L"IMMIGRATION


défendeur


                        

            

                                                                         MOTIFS DE L"ORDONNANCE

                            

                        






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