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Date : 20220927


Dossier : IMM-9727-21

Référence : 2022 CF 1345

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 27 septembre 2022

En présence de monsieur le juge Henry S. Brown

ENTRE :

SHAHZAD ALI

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Nature de l’affaire

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision, datée du 13 décembre 2021, par laquelle la Section d’appel des réfugiés [la SAR] de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada a rejeté l’appel du demandeur et confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés [la SPR] selon laquelle le demandeur n’avait ni qualité de réfugié au sens de la Convention, ni celle de personne à protéger au titre de l’article 96 et du paragraphe 97(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR].

II. Les faits

[2] Le demandeur est un citoyen de l’Argentine. Né au Pakistan, il a immigré en Argentine en 2011. Il a obtenu la citoyenneté argentine en 2015.

[3] Le demandeur s’est lancé en affaires en Argentine; il y détenait et exploitait plusieurs magasins. Ses affaires étaient lucratives et lui permettaient de vivre dans un quartier huppé.

[4] Le demandeur a été jugé crédible. Il affirme craindre un criminel appelé « El Negro » et ses acolytes.

[5] Étant donné que le demandeur invoque la persécution fondée sur des motifs mixtes, dont un aurait un lien avec un motif énoncé à l’article 96 de la LIPR et s’ajouterait à des actes d’extorsion pour de l’argent, je vais me reporter à la preuve de ce lien dans le présent résumé.

[6] Le demandeur a déclaré ce qui suit dans son formulaire Fondement de la demande d’asile [le formulaire FDA] : [traduction] « Il existe une mafia de la drogue appelée El Negro ou El Patrón; elle est également impliquée dans d’autres activités criminelles en Argentine. À maintes reprises, [ses membres] m’ont menacé et déclaré que, parce que je suis musulman, que je possède plusieurs entreprises et que je vis dans un quartier huppé, je devais leur verser d’importantes sommes d’argent, sinon ils me tueraient ». [Non souligné dans l’original.]

[7] Durant son témoignage, le demandeur a raconté qu’un acolyte d’El Negro avait affirmé à un de ses employés que [traduction] « [L]e Musulman est… vous savez, il prend notre argent, et donc ce Musulman doit payer cet argent ». [Non souligné dans l’original.]

[8] Cependant, la déclaration écrite de l’employé en question ne contenait pas cet élément d’information.

[9] Ceci dit, cet employé a fait part de ce qui suit :

[traduction]

- Des membres d’El Negro s’étaient présentés plusieurs fois pour me poser des questions, sur un ton normal, et je leur ai répondu que je ne savais pas où se trouvait Shahzad. Ils m’ont affirmé qu’eux le savaient et m’ont dit aussi de dire au Musulman qu’il ne leur échappera pas.

  • -Ils m’ont dit que, si le Musulman Ali ne leur remettait pas 30 000 $, ils allaient le tuer et que personne ne viendrait sauver ce fils de pute.

[Non souligné dans l’original.]

[10] La SAR a souligné aussi qu’El Negro appelait le demandeur « Muslo » ou [traduction] « le Musulman » quand il le cherchait dans ses magasins.

[11] Le demandeur a aussi décrit dans son témoignage la protection offerte par la police, en ces termes : [TRADUCTION] « Comme je l’ai déjà dit – sont des citoyens argentins. Eh oui, j’ai peut-être la citoyenneté argentine, mais je suis – vous savez, une personne qui est née en Argentine possède un ensemble différent de droits, on le voit à la façon dont ils en parlent. Moi, en tant que Musulman, et à cause de ma religion, apparemment qu’un enlèvement, ce n’est rien pour moi. Quelqu’un qui essaie de te tuer, ce n’est rien pour moi non plus ». [Non souligné dans l’original.]

[12] Le demandeur a précisé que, de mai 2019 à février 2020, il a été victime de plusieurs actes d’extorsion aux mains d’El Negro et/ou de ses acolytes.

[13] En mai 2019, El Negro et deux hommes armés ont intercepté le demandeur dans son véhicule après qu’il venait d’effectuer un retrait à un guichet automatique et lui ont réclamé de l’argent. Le demandeur leur a remis 2 700 $ US puis a signalé l’incident à la police, qui a affirmé qu’elle ferait enquête. Le demandeur ne sait pas s’il y a eu enquête. On ne sait pas si la police a donné suite à la plainte ou pas.

[14] En juin 2019, les mêmes hommes ont enlevé le demandeur et l’ont sommé de leur donner de l’argent. Le demandeur a été libéré deux jours plus tard après avoir fait le nécessaire pour leur remettre 20 000 $ US. Il a signalé l’incident à la police, qui n’a pas semblé disposée à l’aider. Le demandeur a raconté qu’il [traduction] « avait entendu un policier affirmer quelque chose du genre “eh bien, vous êtes musulman” et ajouter ensuite qu’“un enlèvement, ça ne devrait pas vous déranger vraiment, puisque vous êtes musulman” ». [Non souligné dans l’original.]

[15] En août et en septembre 2019, le demandeur a voyagé à l’extérieur du pays. À son retour, El Negro et/ou ses acolytes se sont rendus dans ses magasins et ont interrogé ses employés afin de savoir où il se trouvait. C’est alors que, pris de peur, le demandeur a déménagé pour se cacher à l’appartement d’un ami.

[16] Le demandeur a reçu un message texte d’El Negro et/ou de ses acolytes exigeant le versement de 30 000 $ US. Il a signalé l’incident à la police. El Negro et/ou ses acolytes l’ont retrouvé, à sa sortie du poste de police, près de l’appartement de son ami, et ont exigé les 30 000 $ US. Le demandeur a informé la police de cette rencontre le 9 février 2022. Les policiers ont alors élaboré un plan suivant lequel le demandeur remettrait 10 000 $ US à El Negro le 10 février 2022 et qu’ils arrêteraient ce dernier au moment où il recevrait l’argent.

[17] Le 10 février 2022, le demandeur a rencontré El Negro et lui a remis 10 000 $ US. La police ne s’est pas présentée comme prévu.

[18] Le demandeur a quitté l’Argentine en 2022 et s’est rendu aux États-Unis muni d’un visa américain valide. Il est ensuite entré au Canada, où il a demandé l’asile.

[19] La SPR a jugé que le demandeur n’avait pas qualité de réfugié au sens de la Convention, ni celle de personne à protéger au titre des articles 96 et 97 de la LIPR. Même si elle estimait que le demandeur était crédible, elle a conclu qu’il n’avait pas de crainte fondée de persécution en raison de son identité pakistanaise ou musulmane. Tout d’abord, elle a affirmé que le demandeur n’avait pu établir de lien entre sa crainte de subir des actes d’extorsion et un des motifs prévus dans la Convention (la race, la religion, la nationalité, l’appartenance à un groupe social et les opinions politiques) – El Negro et/ou ses associés ayant probablement ciblé le demandeur parce qu’il était vu comme un homme riche et non pas en raison de son identité pakistanaise ou musulmane. Ensuite, la SPR a conclu que le demandeur n’avait pas de crainte fondée de persécution du fait de son identité pakistanaise ou musulmane, à l’exception de ses problèmes liés à El Negro. À son avis, les mauvais traitements infligés au demandeur en tant que Musulman équivalaient à de la discrimination plutôt qu’à de la persécution au sens de l’article 96 de la LIPR. En outre, la SPR a conclu qu’il s’agissait d’un risque auquel serait personnellement exposé le demandeur et qu’il n’y avait aucun risque éventuel pour celui-ci advenant son renvoi en Argentine. Elle a conclu que rien n’indiquait qu’El Negro et/ou ses acolytes étaient encore désireux de retrouver le demandeur maintenant que ses entreprises étaient fermées.

[20] Je soulignerai aussi que, dans son examen des motifs mixtes sous-tendant le comportement d’El Negro envers le demandeur, la SPR a utilisé les termes [traduction] « en grande partie » quand elle s’est demandé si le demandeur avait été ciblé parce qu’il était riche plutôt qu’en raison, comme il l’alléguait, de sa race, de sa religion ou de son origine ethnique.

[21] Le demandeur a interjeté appel à la SAR en invoquant principalement la persécution fondée sur des motifs mixtes.

III. La décision faisant l’objet du contrôle

[22] La SAR, comme elle y est tenue, a effectué son propre examen de l’affaire, puis elle a rejeté l’appel. Elle a jugé que la SPR avait eu raison de conclure que le demandeur n’avait pas qualité de réfugié ni celle de personne à protéger au titre de l’article 96 et du paragraphe 97(1) de la LIPR.

A. Le lien avec un motif prévu dans la Convention

[23] Selon le demandeur, quand la SPR a mentionné son identité musulmane, elle l’a fait [traduction] « au passage et de façon limitée, ce qui ne représente pas adéquatement son poids et son importance ». Il soutient que, même si la SPR a conclu à juste titre que les agents de persécution [traduction] « étaient initialement motivés par l’argent, […] il est important de tenir compte tant de la question de minorité religieuse que de la richesse, car les circonstances où la richesse est la seule motivation et celles où la religion et la richesse motivent les agents du préjudice, ce qui est le cas [du demandeur], [exercent] des pressions complètement différentes qui ne devraient jamais être confondues ».

[24] La SAR a tenu compte de l’identité musulmane du demandeur lorsqu’elle a analysé l’existence d’un lien entre sa crainte d’être victime d’extorsion et les motifs énoncés dans la Convention, y compris les mentions de cette identité par la SPR. La SPR a souligné que le demandeur était d’origine pakistanaise et musulman, qu’il avait expliqué dans son témoignage qu’il était un membre bien connu de la communauté en raison de son sens des affaires et de son profil ethnique et religieux unique. La SAR a souligné aussi qu’El Negro appelait le demandeur « Muslo » ou [traduction] « le Musulman » quand il le cherchait dans ses magasins.

[25] La SAR a ensuite passé le dossier en revue et découvert les mentions suivantes de l’identité musulmane du demandeur :

Le formulaire FDA du demandeur précise qu’El Negro l’a menacé parce qu’il est musulman, qu’il possède plusieurs entreprises et habite dans un quartier huppé;

La plainte supplémentaire déposée par le demandeur à la police indique qu’El Negro s’est rendu à l’entreprise du demandeur et a demandé à parler au « Muslo »;

La déclaration de l’employé et ami du demandeur mentionne que les hommes qui recherchaient le demandeur [traduction] « l’ont appelé “Le Black” et ont dit de dire au musulman Shahzad qu’il ne [leur] échappera pas »;

Le demandeur a expliqué dans son témoignage devant la SPR que, selon son employé, El Negro lui avait dit : [traduction] « Le musulman est… vous savez, il prend notre argent. Et donc, ce musulman doit payer cet argent ».

[26] D’après la SAR, il est possible d’établir un lien avec un des motifs prévus par la Convention dans les situations où il y a des motifs mixtes, mais ce lien doit être corroboré par des éléments de preuve fiables et convaincants donnant à penser qu’un motif prévu par la Convention est la raison pour laquelle le demandeur a été pris pour cible, comme l’énonce Kaur c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 1130 [le juge Southcott] [Kaur] au para 28. En l’espèce, la SAR a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve crédibles qu’El Negro avait pris le demandeur pour cible à des fins d’extorsion en raison de son identité ethnique.

[27] Plus précisément, la SAR a déclaré ce qui suit : « [36] Comme il a été exposé ci-dessus, j’estime que les éléments de preuve sont clairs à première vue et je suis d’accord avec la SPR qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve crédibles selon lesquels El Negro et ses associés auraient été désireux de prendre l’appelant pour cible s’il n’avait pas été riche, ou qu’ils auraient été motivés à s’en prendre à l’appelant pour autre chose que l’argent. »

B. L’article 96

[28] La SPR s’est penchée sur la question de savoir si le demandeur avait une crainte fondée de persécution en raison de son identité pakistanaise ou musulmane. Elle a indiqué que, à l’exception de ses problèmes avec El Negro, le demandeur n’avait pas prétendu avoir fui l’Argentine en raison du racisme ou de son incapacité à pratiquer sa religion dans ce pays. Le demandeur a expliqué dans son témoignage devant la SPR qu’il avait eu des ennuis en Argentine, notamment avec la police, et qu’il avait reçu des insultes et des commentaires en raison de sa race et de sa religion. La SPR a relevé peu d’éléments de preuve objectifs concernant le traitement des Musulmans en Argentine. Une question déterminante est celle de savoir si, en l’espèce, la discrimination fondée sur l’identité musulmane équivaut à de la persécution.

[29] Le demandeur affirme que la SPR a commis une erreur parce qu’elle a centré son évaluation au titre de l’article 96 sur la religion. Il a fait valoir qu’il [traduction] « a subi de la discrimination au point que sa dignité humaine est affectée dans la mesure où [il lui est devenu presque impossible] de faire respecter ses droits à la sécurité et à la protection ». Il ajoute qu’il n’a pas pu obtenir une protection auprès des autorités et qu’il a subi de la discrimination de la part de la police en raison de son identité musulmane, citant son témoignage et le fait qu’il a entendu un des policiers dire « vous êtes musulman, un enlèvement, ce n’est rien pour vous ».

[30] La SAR a estimé que les éléments de preuve présentés par le demandeur ne démontraient pas que la discrimination qu’il a subie en raison de son identité musulmane équivalait à de la persécution. Pour tirer cette conclusion, elle s’est appuyée sur la preuve fournie par le demandeur concernant le risque auquel il était personnellement exposé de même que sur la preuve relative au pays.

C. Le paragraphe 97(1)

[31] Selon le demandeur, la conclusion qui a été tirée quant à l’absence de risque auquel il pourrait être exposé était erronée, parce que la SPR a commis une erreur en ne tenant pas compte [traduction] « de l’incidence de la race et de la religion – que les agents du préjudice ont confondues ». Qui plus est, la SPR aurait commis une erreur dans son évaluation [traduction] « superficielle » de sa capacité de s’installer ailleurs en Argentine puisque cette mesure ne pouvait le protéger contre le risque qu’El Negro puisse le retrouver et contre l’incapacité de la police de le protéger.

[32] La SAR n’était pas d’accord et a conclu que le demandeur ne serait pas exposé au risque que ses agents de persécution en Argentine lui causent du tort. Elle s’est reportée au principe de la protection de l’État et souligné qu’il incombe au demandeur de réfuter la présomption relative à cette protection au moyen d’une preuve claire et convaincante de l’incapacité de l’État d’offrir une protection. La SAR a conclu que le demandeur ne s’était pas acquitté du fardeau de preuve qui lui incombait de réfuter la présomption relative à la protection de l’État en Argentine.

IV. Les questions en litige

[33] Le demandeur a soulevé les questions suivantes dans le cadre du contrôle judiciaire :

  • 1)La SAR a-t-elle commis une erreur en n’appliquant pas le principe de la persécution fondée sur des motifs mixtes?

  • 2)La SAR a-t-elle commis une erreur en omettant d’appliquer la présomption de crédibilité à un témoignage fait sous serment?

  • 3)La SAR a-t-elle fait preuve d’iniquité envers le demandeur en mettant en doute sa crédibilité au sujet d’une question sur laquelle il n’a pas été interrogé à l’audience sans lui donner la possibilité de répondre?

  • 4)La SAR a-t-elle commis une erreur en n’évaluant pas s’il existait un lien entre la définition d’un réfugié au sens de la Convention et la raison pour laquelle la protection de l’État a été refusée?

  • 5)La SAR a-t-elle commis une erreur en séparant son examen de la persécution de celui qui portait sur l’absence de protection de l’État au lieu d’évaluer ces deux questions ensemble?

[34] À mon humble avis, les questions à trancher dans le présent contrôle judiciaire sont les suivantes :

  • 1)La conclusion de la SAR selon laquelle le demandeur n’a pas qualité de réfugié au sens de la Convention en raison d’un lien démontré avec un motif prévu dans la Convention est-elle raisonnable?

  • 2)La conclusion de la SAR selon laquelle le demandeur ne s’est pas acquitté du fardeau de preuve que lui impose le principe de la protection de l’État est-elle raisonnable?

  • 3)La SAR a-t-elle agi raisonnablement en n’accordant aucun poids à certains éléments de preuve présentés par le demandeur?

V. La norme de contrôle

[35] En l’espèce, la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable. Dans l’arrêt Société canadienne des postes c Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67, qui a été rendu en même temps que l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, [2019] 4 RCS 653, le juge Rowe a expliqué, au nom des juges majoritaires, les attributs que doit présenter une décision raisonnable et les éléments qui doivent être pris en considération par la cour de révision :

[31] La décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, par. 85). Par conséquent, lorsqu’elle procède au contrôle d’une décision selon la norme de la décision raisonnable, « une cour de révision doit d’abord examiner les motifs donnés avec “une attention respectueuse”, et chercher à comprendre le fil du raisonnement suivi par le décideur pour en arriver à [l]a conclusion » (Vavilov, par. 84, citant Dunsmuir, par. 48). Les motifs devraient être interprétés de façon globale et contextuelle afin de comprendre « le fondement sur lequel repose la décision » (Vavilov, par. 97, citant Newfoundland Nurses).

[32] La cour de révision devrait se demander si la décision dans son ensemble est raisonnable : « […] ce qui est raisonnable dans un cas donné dépend toujours des contraintes juridiques et factuelles propres au contexte de la décision particulière sous examen » (Vavilov, par. 90). Elle doit se demander « si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle-ci » (Vavilov, par. 99, citant Dunsmuir, par. 47 et 74, et Catalyst Paper Corp. c. North Cowichan (District), 2012 CSC 2, [2012] 1 R.C.S. 5, par. 13).

[33] Lors d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, « [i]l incombe à la partie qui conteste la décision d’en démontrer le caractère déraisonnable » (Vavilov, par. 100). La partie qui conteste la décision doit convaincre la cour de justice que « la lacune ou la déficience [invoquée] […] est suffisamment capitale ou importante pour rendre [la décision] déraisonnable » (Vavilov, par. 100). […]

[Non souligné dans l’original.]

[36] De plus, l’arrêt Vavilov précise, et c’est directement pertinent en l’espèce, que le rôle de la Cour n’est pas d’apprécier à nouveau la preuve, à moins de « circonstances exceptionnelles ». La Cour suprême du Canada émet ainsi les directives suivantes :

[125] Il est acquis que le décideur administratif peut apprécier et évaluer la preuve qui lui est soumise et qu’à moins de circonstances exceptionnelles, les cours de révision ne modifient pas ses conclusions de fait. Les cours de révision doivent également s’abstenir « d’apprécier à nouveau la preuve examinée par le décideur » : CCDP, par. 55; voir également Khosa, par. 64; Dr Q, par. 41‑42. D’ailleurs, bon nombre des mêmes raisons qui justifient la déférence d’une cour d’appel à l’égard des conclusions de fait tirées par une juridiction inférieure, dont la nécessité d’assurer l’efficacité judiciaire, l’importance de préserver la certitude et la confiance du public et la position avantageuse qu’occupe le décideur de première instance, s’appliquent également dans le contexte du contrôle judiciaire : voir Housen, par. 15‑18; voir Dr Q, par. 38; Dunsmuir, par. 53.

[Non souligné dans l’original.]

[37] La Cour d’appel fédérale a jugé récemment, dans l’arrêt Doyle c Canada (Procureur général), 2021 CAF 237, que la Cour fédérale peut seulement soupeser à nouveau les éléments de preuve si le tribunal administratif a commis, dans son examen des faits, des erreurs fondamentales qui minent l’acceptabilité de la décision :

[3] La Cour fédérale avait tout à fait raison d’agir ainsi. Selon ce régime législatif, le décideur administratif, en l’espèce le directeur, examine seul les éléments de preuve, tranche les questions d’admissibilité et d’importance à accorder à la preuve, détermine si des inférences doivent en être tirées, et rend une décision. Lorsqu’elle effectue le contrôle judiciaire de la décision du directeur en appliquant la norme de la décision raisonnable, la cour de révision, en l’espèce la Cour fédérale, peut intervenir uniquement si le directeur a commis des erreurs fondamentales dans son examen des faits, qui minent l’acceptabilité de la décision. Soupeser à nouveau les éléments de preuve ou les remettre en question ne fait pas partie de son rôle. S’en tenant à son rôle, la Cour fédérale n’a relevé aucune erreur fondamentale.

[4] En appel, l’appelant nous invite essentiellement dans ses observations écrites et faites de vive voix à soupeser à nouveau les éléments de preuve et à les remettre en question. Nous déclinons cette invitation.

VI. Analyse

A. La conclusion de la SAR selon laquelle le demandeur n’a pas qualité de réfugié au sens de la Convention en raison d’un lien démontré avec un motif prévu dans la Convention est-elle raisonnable?

[38] Cet aspect, à mon humble avis, réside au cœur de la présente demande de contrôle judiciaire. Il doit exister un lien entre la crainte de persécution du demandeur et les motifs prévus à la Convention pour que la définition de l’expression « réfugié au sens de la Convention » puisse être applicable (Canada (Procureur général) c Ward, [1993] 2 RCS 689 [juge La Forest] à la p 732 de l’anglais).

[39] Selon le principe de la persécution fondée sur des motifs mixtes qui est invoqué par le demandeur, un agent de persécution peut se fonder sur plus d’un motif ou facteur (Canada (Citoyenneté et Immigration) c B344, 2013 CF 447 [le juge Noël] aux para 39-41). En outre, selon les contraintes juridiques applicables, dans les situations où il y a des motifs mixtes, soit un motif qui n’est pas lié à un motif prévu dans la Convention et un autre qui l’est, ce dernier peut être invoqué uniquement lorsque ce fait est corroboré par des éléments de preuve fiables et convaincants donnant à penser qu’un motif prévu dans la Convention est la raison pour laquelle les demandeurs d’asile ont été ciblés : Kaur, précitée. [Non souligné dans l’original.]

[40] À titre préliminaire, je souligne que le demandeur a consacré énormément d’efforts et d’attention dans ses observations écrites à critiquer la méconnaissance qu’avait la SPR du principe de la persécution fondée sur des motifs mixtes et à décrire les erreurs que la SPR aurait commises dans son évaluation et son analyse. Je rappelle bien humblement que le rôle de la Cour consiste à évaluer le caractère raisonnable de la décision de la SAR et non pas de celle de la SPR.

[41] Par conséquent, mon analyse visera essentiellement à juger si l’application de la doctrine relative aux motifs mixtes par la SAR était raisonnable.

[42] Le demandeur fait valoir que la SAR n’a pas appliqué le principe de la persécution fondée sur des motifs mixtes et n’en a pas [traduction] « compris l’importance ». Il soutient que la conclusion de la SAR, soit qu’il existe des motifs mixtes mais qu’il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve crédibles selon lesquels [traduction] « [El Negro et ses acolytes] étaient motivés par autre chose que l’argent », crée de la confusion et de l’incertitude. En outre, il affirme que, dans les situations où l’agent de persécution exprime deux motifs, le fait de conclure qu’un seul des deux importe relève de la pure conjecture.

[43] Le défendeur soutient qu’il est faux de dire que la SAR [traduction] « n’a pas compris l’importance » du principe de la persécution fondée sur des motifs mixtes ou qu’elle ne l’a pas appliqué. La SAR s’est reportée à la décision rendue par la Cour fédérale dans Kaur, selon laquelle il est possible d’établir un lien avec un motif prévu dans la Convention dans les cas où il y a des motifs mixtes, mais seulement lorsque ce fait est corroboré par des éléments de preuve fiables et convaincants donnant à penser qu’un motif prévu par la Convention est la raison pour laquelle les demandeurs d’asile ont été ciblés (Kaur, au para 28) :

[28] S’appuyant sur la décision Gonsalves, la SAR a admis qu’il est possible d’établir un lien dans les situations où il y a des motifs mixtes, mais seulement lorsque ce fait est corroboré par des éléments de preuve fiables et convaincants donnant à penser qu’un motif prévu par la Convention est la raison pour laquelle les demandeurs d’asile ont été ciblés. La SAR a conclu que, à part la déclaration de la demanderesse principale dans son formulaire FDA quant à sa croyance, de tels éléments de preuve n’ont pas été présentés. La SAR a fait une distinction avec la décision Gonsalves, car les faits dans cette affaire comprenaient des insultes raciales proférées à l’endroit des demandeurs d’asile.

[Non souligné dans l’original.]

[44] Je conviens que la décision Kaur fait partie des contraintes juridiques en ce qui concerne la question des motifs mixtes.

[45] Dans la présente affaire, la SAR a examiné et évalué la preuve qui lui avait été présentée et en a tiré la conclusion suivante :

[36] Comme il a été exposé ci-dessus, j’estime que les éléments de preuve sont clairs à première vue et je suis d’accord avec la SPR qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve crédibles selon lesquels El Negro et ses associés auraient été désireux de prendre l’appelant pour cible s’il n’avait pas été riche, ou qu’ils auraient été motivés à s’en prendre à l’appelant pour autre chose que l’argent. »

[Non souligné dans l’original.]

[46] La SAR a fait état des éléments de preuve sur lesquels s’est fondé le demandeur et a conclu, de façon raisonnable à mon avis, que les quelques occasions où le demandeur avait été reconnu comme musulman ne suffisent pas à démontrer qu’il avait été pris pour cible à des fins d’extorsion en raison de sa race, de sa religion ou de son identité ethnique.

[47] Par conséquent, bien humblement, j’estime qu’il n’y a aucun fondement à l’argument du demandeur relatif à la persécution fondée sur des motifs mixtes. La SAR n’a pas omis de se plier aux contraintes juridiques. La décision n’est pas non plus incompatible avec les contraintes découlant du dossier. Il incombait au demandeur d’établir l’existence d’un motif supposément lié à la Convention, selon la prépondérance des probabilités, en présentant des éléments de preuve fiables et convaincants donnant à penser qu’un motif prévu par la Convention est la raison pour laquelle les demandeurs d’asile ont été ciblés. [Non souligné dans l’original.] La SAR n’a pas été convaincue et, à mon humble avis, je ne crois pas que ce soit déraisonnable. En toute humilité, je considère qu’il s’agit en l’espèce d’un cas où le demandeur ne s’est pas acquitté de façon raisonnable du fardeau de preuve qui lui incombait.

[48] Qui plus est, le demandeur sollicite une nouvelle appréciation de la preuve par la Cour, ce qui n’est pas acceptable, car ce n’est pas le rôle de la Cour; c’était celui de la SAR et, avant elle, de la SPR. Comme l’a souligné la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Doyle, le tribunal administratif « examine seul les éléments de preuve, tranche les questions d’admissibilité et d’importance à accorder à la preuve, détermine si des inférences doivent en être tirées, et rend une décision. Lorsqu’elle effectue le contrôle judiciaire de la décision du directeur en appliquant la norme de la décision raisonnable, la cour de révision, en l’espèce la Cour fédérale, peut intervenir uniquement si le directeur a commis des erreurs fondamentales dans son examen des faits, qui minent l’acceptabilité de la décision. Soupeser à nouveau les éléments de preuve ou les remettre en question ne fait pas partie de son rôle ». [Non souligné dans l’original.]

[49] À mon avis, les doléances du demandeur, prises isolément ou cumulativement, ne soulèvent pas de façon raisonnable une erreur fondamentale commise dans l’examen des faits qui mine l’acceptabilité de la décision. Il n’y a pas de faute fondamentale ni de lacune grave dans la décision contestée. Selon moi, la SAR a procédé à un examen raisonnable des éléments de preuve.

[50] Non seulement la SAR a-t-elle jugé que la preuve présentée par le demandeur était insuffisante, mais elle a aussi expressément conclu que l’argent était le seul motif d’El Negro : « [il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve] selon lesquels [ils] auraient été motivés à s’en prendre à l’appelant pour autre chose que l’argent ». [Non souligné dans l’original.] La SAR n’aurait pu s’exprimer plus clairement quand elle a rejeté les observations du demandeur sur les motifs mixtes, et je suis d’avis qu’il lui était loisible raisonnablement de tirer cette conclusion.

B. La conclusion de la SAR selon laquelle le demandeur ne s’est pas acquitté du fardeau de preuve que lui impose le principe de la protection de l’État est-elle raisonnable?

[51] Le demandeur a fait valoir également que l’État ne lui a pas offert sa protection parce qu’il est musulman. Selon lui, la SAR a commis une erreur en n’analysant pas le lien entre un motif prévu dans la Convention et la protection de l’État. Plus particulièrement, il soutient que la SAR a commis une erreur en ne se demandant pas si l’incapacité des autorités argentines à le protéger reposait sur un motif prévu dans la Convention. Il affirme par ailleurs que la SAR, dans son analyse de la protection de l’État, s’est fondée seulement sur des informations relatives aux conditions dans le pays en général, sans tenir compte du déni de protection de l’État subi par le demandeur.

[52] À cet égard, il incombait au demandeur de présenter une « preuve claire et convaincante » pour réfuter la présomption de protection de l’État. La SAR a évalué la preuve du demandeur à cet égard et a estimé qu’elle était insuffisante.

[53] En ce qui a trait à l’argument fondé sur l’existence d’un lien entre un motif prévu à la Convention et la protection de l’État, je souligne que la décision Badran c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), (1996), 111 FTR 211 (CFPI) énonce que « la loi n’exige pas que l’incapacité d’assurer la protection soit liée à un motif prévu dans la Convention ». Je réitère ma conclusion ci-dessus, suivant laquelle il était raisonnable pour la SAR de rejeter l’argument relatif à l’existence d’un lien avec un motif prévu dans la Convention en s’appuyant à la fois sur l’insuffisance de la preuve et sur le fait que, selon elle, El Negro était seulement motivé par l’argent.

[54] Je suis convaincu qu’il était raisonnable pour la SAR d’examiner puis de rejeter l’argument du demandeur suivant lequel il ne pourrait pas, à titre de Musulman, bénéficier de la protection de l’État en Argentine. Lorsqu’elle a évalué si le demandeur éprouvait une crainte fondée de persécution visée à l’article 96 de la LIPR, la SAR a tenu compte de l’argument avancé par le demandeur, soit qu’il n’a pas pu obtenir la protection de l’État auprès de la police et qu’il a subi de la discrimination de la part des policiers en raison de son identité musulmane quand il a entendu un des policiers lui affirmer : [traduction] « vous êtes musulman, un enlèvement, ce n’est rien pour vous ». Par la suite, la SAR a analysé la preuve générale relative à la discrimination exercée en Argentine contre les Musulmans. Compte tenu de tous ces éléments de preuve et du fardeau de preuve supérieur exigé en raison du niveau de démocratie atteint en Argentine, la SAR a jugé que le demandeur ne s’était pas acquitté du fardeau qui lui incombait de réfuter la présomption relative à la protection de l’État.

[55] Bien humblement, je suis d’avis que la conclusion tirée par la SAR relativement à la protection de l’État est raisonnable étant donné le dossier dont la SAR disposait.

C. La SAR a-t-elle agi raisonnablement en n’accordant aucun poids à certains éléments de preuve présentés par le demandeur?

[56] La SAR a souligné qu’une partie du témoignage du demandeur devant la SPR n’était pas corroborée par la déclaration de l’employé, comme je le mentionne plus haut, déclaration qui ne renfermait pas l’information que le demandeur prétendait y retrouver. Ces éléments de preuve sont décrits ci-dessus, mais rappelons que le demandeur a affirmé ce qui suit dans son témoignage : [TRADUCTION] « Les commentaires d’El Negro, qui figurent également dans la déclaration de mon employé, sont les suivants : “Le musulman est – vous savez, il prend notre argent” ».

[57] Le problème, comme je l’ai indiqué, c’est que la déclaration de l’employé ne contient pas les mots qui, selon le demandeur, sont censés y figurer.

[58] La SAR a considéré également que le témoignage du demandeur n’était pas corroboré et qu’il était incohérent. Le dossier confirme l’exactitude de ces deux observations. La question en litige consiste à savoir si elles sont raisonnables.

[59] Le demandeur fait valoir que la SAR a omis d’appliquer à son témoignage la présomption de crédibilité qui se rattache aux témoignages faits sous serment. Dans ses observations présentées en réponse, le demandeur soutient que la SAR a commis une erreur en ne soulignant pas, lorsqu’elle conclut que son témoignage était insuffisant, qu’il y avait d’autres parties de sa preuve où son identité musulmane était mentionnée. En outre, selon lui, la conclusion relative à l’insuffisance de son témoignage constitue une conclusion défavorable au sujet de sa crédibilité et non une appréciation de la valeur probante du témoignage.

[60] Le demandeur affirme qu’il n’y a aucune incohérence entre son témoignage et la déclaration de son employé. Il fait valoir que l’absence de corroboration dans la déclaration de l’employé ne jette pas un doute sur son témoignage, puisqu’elle ne permet pas de réfuter la présomption de crédibilité rattachée à un témoignage fait sous serment. Il s’appuie à cette fin sur l’arrêt Maldonado c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1979] ACF no 248 (CAF) [les juges Heald et Ryan, le juge suppléant MacKay] [Maldonado] et Dayebga c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 842 [le juge O’Keefe].

[61] À mon humble avis, les commentaires de la SAR ne se rapportent pas à la crédibilité, mais bien simplement au poids de ce témoignage. Il ne s’agit pas non plus de conclusions déguisées sur la crédibilité, mais d’une autre question liée à la suffisance de la preuve présentée par le demandeur afin d’établir le lien qui existerait avec un motif prévu dans la Convention.

[62] Je conclus que la SAR a traité cette preuve de manière raisonnable et conforme aux précédents et aux éléments de preuve contraignants dans la présente affaire. En l’espèce, l’employé a fourni une déclaration écrite, de sorte qu’il existait des éléments de preuve corroborants raisonnablement accessibles. De plus, il incombe au demandeur de fournir une preuve suffisante à l’appui de ses allégations : Sallai c Canada (Citoyenneté et Immigration)), 2019 CF 446 [la juge Kane] au para 57; Huang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 940 [le juge Gascon] au para 43. C’est particulièrement vrai dans le cas où la preuve est présentée par un témoin qui a un intérêt personnel dans la cause, parce que « généralement, ce genre de preuve requiert une corroboration pour avoir une valeur probante » : Ferguson c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1067 [le juge Zinn] au para 27.

[63] Je conviens aussi avec le défendeur que la Cour peut conclure à la véracité du témoignage d’un demandeur et, en même temps, décider qu’il n’a pas présenté une preuve suffisante pour établir ses allégations selon la prépondérance des probabilités (Sallai c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 446 au para 57).

VII. Conclusion

[64] À mon avis, la décision de la SAR est raisonnable parce qu’elle est justifiée, transparente et intelligible au regard des contraintes juridiques et des éléments de preuve présentés. Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

VIII. Question à certifier

[65] Aucune des parties n’a proposé de question de portée générale à certifier, et l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM-9727-21

LA COUR REND LE JUGEMENT qui suit :

La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée, aucune question de portée générale n’est certifiée et aucuns dépens ne sont adjugés.

« Henry S. Brown »

Juge

Traduction certifiée conforme

Martine Corbeil


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-9727-21

 

INTITULÉ :

SHAHZAD ALI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 22 SEPTEMBRE 2022

JUGEMENT ET MOTIFS

LE JUGE BROWN

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 27 SEPTEMBRE 2022

COMPARUTIONS :

David Matas

POUR LE DEMANDEUR

Alexander Menticoglou

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

David Matas

Avocat

Winnipeg (Manitoba)

 

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Winnipeg (Manitoba)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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