Date : 20220921
Dossiers : T‑547‑20
T‑755‑20
T‑1254‑20
Référence : 2022 CF 1311
[TRADUCTION FRANÇAISE]
Ottawa (Ontario), le 21 septembre 2022
En présence de madame la juge McVeigh
Dossier : T‑547‑20 |
ENTRE : |
LIBRA VOYAGE LIMITED |
demanderesse |
et |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « NA 5501 », |
LE CHALAND « NA 5501 », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LE CHALAND « MLT 6000‑1 », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », |
LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », |
LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », |
1025532 B.C. LTD, MLT CAPITAL CORP, TYMAC LAUNCH SERVICE LTD,
|
SEASPAN ULC, |
MERCURY LAUNCH & TUG LTD., |
UNTEL NO 1, UNTEL NO 2,
|
UNTEL NO 3, UNTEL NO 4, ET
|
SA MAJESTÉ LA REINE |
défendeurs |
et |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « NA 5501 », LE CHALAND « NA 5501 », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LE CHALAND « MLT 6000‑1 », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », |
LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », |
LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », |
1025532 B.C. LTD, MLT CAPITAL CORP, TYMAC LAUNCH SERVICE LTD,
|
SEASPAN ULC, |
MERCURY LAUNCH & TUG LTD., |
UNTEL NO 1, UNTEL NO 2, |
UNTEL NO 3, UNTEL NO 4, ET
|
SA MAJESTÉ LA REINE |
MIS EN CAUSE |
Dossier : T‑755‑20 |
ET ENTRE : |
HARBOUR AIR LTD ET |
WICKHAM GROUP LTD. |
demanderesses |
et |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « NA 5501 », LE CHALAND « NA 5501 », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LE CHALAND « MLT 6000‑1 », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », |
LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », |
LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », |
1025532 B.C. LTD, MLT CAPITAL CORP, TYMAC LAUNCH SERVICE LTD,
|
SEASPAN ULC, |
MERCURY LAUNCH & TUG LTD., |
UNTEL NO 1, UNTEL NO 2, |
UNTEL NO 3, UNTEL NO 4, ET
|
SA MAJESTÉ LA REINE |
défendeurs |
et |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « NA 5501 », LE CHALAND « NA 5501 », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LE CHALAND « MLT 6000‑1 », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », |
LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », |
LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », |
1025532 B.C. LTD, MLT CAPITAL CORP, TYMAC LAUNCH SERVICE LTD,
|
SEASPAN ULC, |
MERCURY LAUNCH & TUG LTD., |
UNTEL NO 1, UNTEL NO 2, |
UNTEL NO 3, UNTEL NO 4, ET
|
SA MAJESTÉ LA REINE |
MIS EN CAUSE |
Dossier : T‑1254‑20 |
ET ENTRE : |
VANCOUVER HARBOUR FLIGHT CENTRE LIMITED PARTNERSHIP ET
|
COAL HARBOUR MARINA LIMITED |
demanderesses |
et |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « NA 5501 », LE CHALAND « NA 5501 », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LE CHALAND « MLT 6000‑1 », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », |
LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », |
LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », |
1025532 B.C. LTD, MLT CAPITAL CORP, TYMAC LAUNCH SERVICE LTD,
|
SEASPAN ULC, |
MERCURY LAUNCH & TUG LTD., |
UNTEL NO 1, UNTEL NO 2,
|
UNTEL NO 3, UNTEL NO 4, ET
|
SA MAJESTÉ LA REINE |
défendeurs |
et |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « NA 5501 », LE CHALAND « NA 5501 », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LE CHALAND « MLT 6000‑1 », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », |
LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », |
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », |
LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », |
1025532 B.C. LTD, MLT CAPITAL CORP, TYMAC LAUNCH SERVICE LTD,
|
SEASPAN ULC, |
MERCURY LAUNCH & TUG LTD., |
UNTEL NO 1, UNTEL NO 2,
|
UNTEL NO 3, UNTEL NO 4, ET
|
SA MAJESTÉ LA REINE |
MIS EN CAUSE |
JUGEMENT ET MOTIFS
I. Introduction
[1] La Cour est saisie de deux requêtes en jugement sommaire présentées par les défendeurs, MLT Capital Corp (MLT) – chaland MLT 6000‑1, et 1025532 B.C. Ltd (1025532 BC) – chaland NA 5501. Les trois actions découlent de la même série de collisions, lesquelles se sont produites le 26 décembre 2018. Ces défendeurs demandent à la Cour de rejeter les allégations formulées contre eux par les demanderesses.
[2] Les collisions se sont produites à Coal Harbour, en Colombie‑Britannique. Le chaland, le NA 5501, était attaché à un autre chaland, le MLT 6000‑1, qui était à son tour attaché au Delta King, lui‑même attaché à des bouées d’amarrage à North Vancouver, en Colombie‑Britannique. Le NA 5501 était chargé de conteneurs. Le 24 décembre 2018, dans le cadre d’opérations distinctes et non liées, des remorqueurs ont été loués pour transporter et arrimer les chalands aux bouées d’amarrage.
[3] Tôt dans la matinée du 26 décembre 2018, les chalands se sont détachés de leurs amarres à North Vancouver. Toujours attachés les uns aux autres, ils ont dérivé sans équipage, sans éclairage et sans être repérés, dans le port de Vancouver jusqu’à Coal Harbour, manquant de peu la station‑service Chevron. Une fois à Coal Harbour, et toujours attachés les uns aux autres, ils ont heurté des biens et sont entrés en collision avec deux grands yachts au mouillage, causant ainsi la série de dommages à l’origine des actions intentées par les demanderesses. Ont aussi subi des dommages le centre de pilotage du port, la Coal Harbour Marina (CHM) et les yachts immatriculés au nom de Libra Voyage (Libra) et de Wickham Group Ltd. (Wickham), respectivement. Les chalands ont été retrouvés aux premières heures du 26 décembre 2018 : ils étaient appuyés contre le restaurant Lift dont ils avaient fracassé quelques fenêtres. Les remorqueurs ont ensuite ramené les deux chalands encore attachés ensemble jusqu’aux bouées d’amarrage où ils les ont réarrimés.
[4] Au moment des collisions, 1025532 BC était la propriétaire inscrite du NA 5501, et MLT Capital Corp (MLT) était la propriétaire inscrite du MLT 6000‑1. Les demanderesses ont intenté une action in rem contre les chalands et le remorqueur « F.W. Wright » (le F.W. Wright), le remorqueur « Tymac Tide » (le Tymac Tide), le remorqueur « Charles H. Cates VIII » (le Cates VIII) et le remorqueur « Charles H. Cates V » (le Cates V).
[5] Ces parties sont défendeurs dans les trois actions dont la Cour est saisie, qui comptent de nombreux autres défendeurs, mis en cause et entités non parties.
[6] Les requérants soutiennent (bien que pour des raisons légèrement différentes) que leurs chalands ne sauraient être tenus responsables des dommages et qu’il serait donc ridicule de les obliger à participer au procès qui doit avoir lieu en février 2023.
[7] Les requérants font valoir qu’ils ont été désignés comme défendeurs dans les présentes actions parce que l’assurance des remorqueurs concernés n’est pas suffisante pour couvrir les dommages allégués, alors que le tonnage des chalands augmente le montant de l’assurance que peuvent toucher les demanderesses afin de couvrir les dommages allégués.
[8] Les requérants soutiennent qu’ils n’ont aucune responsabilité envers les demanderesses et les mis en cause pour les dommages causés par le NA 55011 et le MLT 6000‑1, et que je devrais donc faire droit à la requête en procès sommaire et ordonner la radiation de leurs noms en tant que parties.
[9] La défenderesse Tymac Launch Service Ltd. (Tymac) n’a pas pris position dans la présente requête, mais a fait remarquer que c’est le juge du procès qui devrait déterminer quelle entité a engagé Seaspan ULC (Seaspan). Les demanderesses se sont appuyées sur les observations orales de Libra Voyage et sur l’ensemble de ses observations écrites.
[10] Les parties ont retenu les services d’un cabinet privé, qui tiendra une séance de médiation dans la présente affaire le 21 septembre 2022.
[11] Pour les motifs qui suivent, je rejette la requête en procès sommaire des requérants. Les présentes actions reposent sur une matrice factuelle complexe qui appelle des conclusions de fait, lesquelles toucheront à des questions qui sont au cœur du litige, et où les faits et les questions en litige sont interreliés. C’est donc là une raison pour ne pas faire droit à la requête en procès sommaire. Plusieurs des motifs énumérés dans les décisions Wenzel Downhole Tools Ltd. c National-Oilwell Canada Ltd., 2010 CF 966 [Wenzel] et ViiV Healthcare Company c Gilead Sciences Canada, Inc., 2020 CF 486 [ViiV Healthcare CF], qui militent contre la décision de faire droit à la requête en procès sommaire, sont présents en l’espèce. Les questions soulevées se prêtent mieux à un examen devant le juge du procès, qui bénéficiera d’une matrice factuelle complète et exhaustive compte tenu de l’imbrication des événements.
[12] La présente affaire sera résolue dans un avenir relativement proche, étant donné que les parties ont prévu la tenue d’une séance de médiation et que le procès doit avoir lieu dans environ cinq mois. Il ne convient pas de procéder par procès sommaire dans les circonstances.
[13] Bien que j’aie exposé les faits et présenté les parties concernées dans les présents motifs de jugement, je n’ai tiré aucune conclusion de fait. Les faits devront être prouvés au procès. J’ai parfois utilisé les termes « application de la charte‑partie d’affrètement » ou « relations d’entreprise » que les parties ont utilisés dans leur argumentation, mais il appartiendra au juge du procès de tirer ces conclusions.
I. Les parties
[14] Il convient tout d’abord de présenter les parties et leurs intérêts respectifs dans les présentes affaires, ainsi que les entités qui ne sont pas des parties nommément désignées, mais qu’il est possible d’identifier à partir de la preuve.
A. Les demanderesses
[15] Libra Voyage est une société constituée sous le régime des lois des îles Vierges britanniques. Elle est la propriétaire inscrite de l’autoyacht « KOGO » (Libra). Le KOGO est un super yacht à coque en acier d’une longueur d’environ 72 mètres et d’une jauge brute de 1 892 tonneaux.
[16] Harbour Air Ltd. est une société constituée sous le régime des lois de la Colombie‑Britannique. Elle est la propriétaire inscrite d’un quai au terminal d’hydravions de Harbour Air à Coal Harbour, en Colombie‑Britannique (Harbour Air).
[17] Wickham est une société constituée sous le régime des lois des îles Vierges britanniques. Elle est la propriétaire inscrite du croiseur Hatteras 85’, Azura, nommé le KUMA. Le KUMA est un yacht de luxe d’environ 26 mètres de long.
[18] CHM est une société fédérale constituée sous le régime des lois du Canada. CHM possède et exploite la marina de Coal Harbour, dont l’adresse est 1525 Coal Harbour Quay, à Vancouver, en Colombie‑Britannique.
[19] Vancouver Harbour Flight Centre Limited Partnership (VHFC) est une personne morale constituée à l’extérieur de la province sous le régime des lois de la province de la Colombie‑Britannique. VHFC exploite l’aérogare d’hydravions du Vancouver Harbour Flight Centre (l’aérogare).
[20] Au total, il y a cinq demanderesses dans les trois actions.
B. Les défendeurs
[21] En décrivant les parties, j’ai utilisé des termes ayant des conséquences juridiques tels que « charte‑partie d’affrètement coque nue »
et « entrepreneur indépendant »
. Il s’agit de termes que les parties ont utilisés pour se décrire lorsqu’elles ont présenté leurs arguments en l’espèce. Je n’ai pas tiré ces conclusions de nature juridique et j’ai laissé au juge du procès le soin de déterminer le type de charte‑partie à laquelle sont assujettis les chalands, ainsi que d’autres relations.
[22] Plusieurs défendeurs « untel » ont été désignés dans les actions intéressant des capitaines et des matelots de pont inconnus à l’époque. Depuis la conclusion des interrogatoires préalables, toutes ces personnes sont désormais connues et sont identifiées ci‑dessous en lien avec leurs remorqueurs.
(1) Les défendeurs connus
[23] Les défendeurs sont les mêmes dans les trois demandes. Chacun des chalands et des bateaux mentionnés est également défendeur à l’action.
[24] 1025532 BC est la propriétaire inscrite du chaland NA 5501. Le NA 5501 est un chaland commercial pour conteneurs d’environ 80 mètres de long et 22 mètres de large. Il est sans équipage, et avec 1025532 BC, il a déposé l’une des deux requêtes en procès sommaire (les requérants 1025532 BC). Matthew Stradiotti et son père Henry Gino Stradiotti sont les administrateurs de 1025532 BC.
[25] MLT est la propriétaire inscrite du MLT 6000‑1 (les requérants MLT). L’administrateur de MLT a indiqué que MTL était une société de portefeuille possédant plusieurs navires. Le MLT 6000‑1 est un chaland commercial à gravier d’environ 80 mètres de long et 22 mètres de large. Les requérants MLT sont les deuxièmes requérants à présenter une requête en procès sommaire. Robert Errington est l’un des deux administrateurs de MLT. M. Errington est président et secrétaire de MLT et de Mercury Launch & Tug Ltd. (Mercury) en plus d’être l’un des deux administrateurs de Mercury. L’épouse de M. Errington, Anne Louise Boyle, est vice‑présidente et l’autre administratrice de MLT.
[26] Le chaland MLT 6000‑1 est affrété ou remorqué par divers exploitants, dont Mercury. En décembre 2018, Mercury a affrété le chaland selon des taux standard journaliers. À l’époque, Mercury l’utilisait pour transporter du gravier entre Sechelt et Lehigh Deport 28 à North Vancouver. Un contrat conclu entre Mercury et Lehigh en témoigne.
[27] Il existe un différend entre les parties, qui s’est traduit par des objections lors des interrogatoires préalables, concernant la divulgation de renseignements sur les actionnaires de MLT et Mercury et d’autres renseignements d’ordre organisationnel. Mercury et MLT partagent la même adresse. Libra a présenté une requête visant à obtenir des réponses concernant la propriété de Mercury et de MLT, laquelle est toujours en suspens.
[28] Le 23 juin 2022, le juge chargé de la gestion de l’instance a ajourné la requête visant à obtenir des réponses et a ordonné, entre autres, que les demanderesses signifient et déposent toute réponse qu’elles avaient l’intention de déposer. À la date de la présente audience, la nouvelle date d’audition de la requête visant à obtenir des réponses n’avait toujours pas été fixée.
[29] Le remorqueur F.W. Wright a remorqué le chaland à gravier entre Sechelt et Lehigh Depot les 17, 19, 21 et 27 décembre 2018. Mercury a facturé Lehigh en conséquence et MLT a facturé Mercury pour l’utilisation du chaland MLT pour ces mêmes dates. Le F.W. Wright a attaché le MLT 6000‑1 sur son côté bâbord au côté tribord du Delta King, qui était déjà attaché aux câbles fixes des bouées d’amarrage.
[30] Le 27 décembre 2018, la direction et le président de MLT et de Mercury ont été avisés par un représentant de North Arm Transportation Ltd. (North Arm) que le MLT 6000‑1 était à la dérive.
[31] Mercury est la propriétaire inscrite et l’exploitante du F.W. Wright (les défendeurs Mercury). Une action in rem a été déposée à l’encontre du F.W. Wright. Le même avocat représente les requérants Mercury et MLT. Il y a sur chacun des côtés du chaland 6000‑1 une grande enseigne peinte où il est écrit « Mercury »
. Le capitaine du F.W. Wright était Troy Proudlove et le matelot de pont, Adam Dunsmoor.
[32] Tymac est la propriétaire inscrite et l’unique exploitante du remorqueur Tymac Tide (les défendeurs Tymac).
Une action in rem a été déposée à l’encontre du remorqueur Tymac Tide. Tymac a déposé un dossier de requête en réponse aux deux requêtes. Le capitaine du Tymac était Lucian Laing et les matelots de pont, Birch Haigh et Arkady Itkovich.
[33] Seaspan est la propriétaire inscrite et l’exploitante du remorqueur Cates VIII
(les défendeurs Seaspan). Une action in rem a été déposée à l’encontre du Cates VIII. Le capitaine Ronald Simonson était le capitaine du Cates VIII et Justin Scott en était le matelot de pont.
[34] Les défendeurs Seaspan sont également propriétaires et exploitants du remorqueur Cates V. Une action in rem a été déposée contre le Cates V. Le capitaine du Cates V était John Armstrong et le matelot de pont, Martin Pipes.
[35] Sa Majesté le Roi (SMLR), par l’intermédiaire du ministère des Pêches et des Océans et de la Garde côtière canadienne, organise et exploite le service de trafic maritime connu sous le nom de Services de communication et de trafic maritimes (SCTM). Les SCTM exercent leurs activités 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 à Victoria, en Colombie‑Britannique. Les SCTM surveillent également le port de Vancouver à l’aide de radars et d’autres équipements.
C. Les mis en cause
[36] Chacun des défendeurs a déposé une demande de mise en cause contre les autres défendeurs dans les trois actions.
[37] Les requérants 1025532 BC ont déposé des demandes de mise en cause contre toutes les personnes déjà parties à l’action.
[38] Les requérants MLT ont déposé des demandes de mise en cause contre les autres défendeurs dans les trois actions, à l’exception des défendeurs Mercury et de leur remorqueur, le F.W. Wright.
[39] Les défendeurs Mercury ont déposé une demande de mise en cause contre toutes les personnes déjà parties à l’action, à l’exception des requérants MLT et du MLT 6000‑1.
[40] Les défendeurs Tymac ont déposé des demandes de mise en cause contre certains propriétaires et certaines personnes déjà parties à l’action. Ils ont aussi ont déposé des demandes de mise en cause contre le remorqueur F.W. Wright, le remorqueur Charles H. Cates V, MLT, Seaspan, Mercury, SMLR, Troy Proudlove et John Armstrong.
[41] Les défendeurs Seaspan ont déposé des demandes de mise en cause contre certains propriétaires et certaines personnes déjà parties à l’action. Ils ont déposé une demande de mise en cause contre le remorqueur F.W. Wright, MLT, Mercury, SMLR et Troy Proudlove.
D. Les entités non parties
[42] Dans la preuve présentée dans le cadre de la présente requête en procès sommaire, beaucoup d’autres entités sont mentionnées, mais elles ne sont pas des parties nommément désignées. Pour comprendre les faits, il faut les identifier.
(1) North Arm Transportation Ltd.
[43] North Arm appartient à la famille Stradiotti. Matthew Stradiotti est le directeur général de North Arm. North Arm a conclu avec 1025532 BC ce qu’elle dit être une charte‑partie d’affrètement coque nue pour le NA 5501.
[44] North Arm s’occupe normalement des déplacements du NA 5501 par l’intermédiaire de son préposé aux mouvements des navires. North Arm assure l’entretien du NA 5501. North Arm s’occupe généralement des opérations de remorquage du chaland, mais engage parfois d’autres remorqueurs. Libra et Tymac allèguent que North Arm a engagé Seaspan pour remorquer le chaland le 24 décembre 2018.
[45] Tymac et North Arm n’avaient pas de contrat ferme. Elles fonctionnaient sur une base ponctuelle.
[46] Au moment des collisions, North Arm et DP World (Canada) Inc. (DP World) avaient conclu un contrat de remorquage pour transporter le NA 5501 entre Nanaimo, sur l’île de Vancouver, et Centerm, dans le port de Vancouver. North Arm fournissait des services de remorquage à DP World avec ses propres remorqueurs. North Arm louait aussi de temps à autre d’autres remorqueurs. Le 24 décembre 2018, les remorqueurs de North Arm étaient occupés ailleurs et la société avait dû louer un remorqueur pour remorquer le NA 5501.
[47] La preuve révèle que personne n’a appelé North Arm ou communiqué avec elle au sujet de l’amarrage; elle a simplement loué un remorqueur pour que ce soit fait. Peter Hewlett, le préposé aux mouvements des navires de North Arm, a déclaré qu’il n’avait pas dirigé le remorqueur lors de l’amarrage ou du remorquage, et qu’il n’avait pas non plus indiqué le nombre de cordes à utiliser pour arrimer les chalands. Il a expliqué que toutes les décisions relatives à l’amarrage du remorqueur ont été prises par les capitaines. 1025532 BC affirme qu’elle n’a aucunement décidé du processus étant donné que North Arm avait conclu une charte‑partie d’affrètement coque nue et agissait en tant qu’entrepreneur indépendant. 1025532 BC allègue donc que tout le pouvoir décisionnel était entre les mains de l’affréteur et non des siennes.
[48] Le préposé aux mouvements des navires de North Arm a été informé de l’incident vers 6 h ou 6 h 30 le 26 décembre 2018. Michael Stradiotti en a été informé vers 9 h le 26 décembre 2018.
(2) T and B Mooring LTD.
[49] T and B Mooring LTD. (T&B) a facturé l’amarrage aux bouées d’amarrage. C’est le Council of Marine Carriers qui s’occupe de la perception des droits et de l’entretien des bouées d’amarrage pour T&B. Seaspan effectue les contrôles quotidiens pour le compte de T&B. On a produit des éléments de preuve montrant que T&B a facturé les amarrages à North Arm.
II. Les faits
A. Les collisions
[50] Le MLT 6000‑1 a été chargé de gravier le 21 décembre 2018, puis remorqué par le F.W. Wright jusqu’au dépôt de Lehigh et laissé à cet endroit. Le 23 décembre 2018, le chaland vide a été remorqué par le F.W. Wright de Lehigh jusqu’aux bouées d’amarrage à North Vancouver. Il a été amarré au Delta King par l’équipage du F.W. Wright à la plus occidentale des quatre bouées de la marine, la bouée ouest. L’équipage du F.W. Wright était composé d’un capitaine et d’un matelot de pont expérimentés, employés à l’époque par Mercury.
[51] Le préposé aux mouvements des navires de Mercury avait dit à l’équipage du F.W. Wright que le MLT 6000‑1 serait attaché aux bouées d’amarrage pendant les vacances de Noël, et que l’équipage devait donc s’assurer que le chaland était en sécurité. Le MLT 6000‑1 n’a pas été déplacé avant de se détacher le 26 décembre 2018, vers 4 h 40. Le MLT 6000‑1, toujours attaché au chaland NA 5501, s’est déplacé sans être détecté depuis North Vancouver et a ainsi causé des dommages aux demanderesses à Coal Harbour.
[52] Mercury avait déjà remorqué le NA 5501 de Nanaimo à North Vancouver et l’avait amarré aux bouées d’amarrage à 2 h le 24 décembre 2018. Le 24 décembre 2018, à 7 h, Seaspan a été chargée d’amener le chaland à Centerm. Le capitaine n’a eu aucun problème lorsqu’il a pris en charge le chaland et s’est rendu à Centerm.
[53] Comme Centerm fermait ses portes la veille de Noël, le NA 5501 devait avoir quitté les lieux avant midi le 24 décembre 2018. Peter Hewlett (préposé aux mouvements des navires de North Arm) a communiqué avec Seaspan afin qu’un remorqueur déplace le chaland avant midi. Comme Seaspan ne le pouvait pas, le préposé aux mouvements des navires de North Arm a communiqué avec Tymac pour lui demander de déplacer le NA 5501 avant midi. La question est de savoir qui a engagé le remorqueur Cates VIII de Seaspan, car le remorqueur a rencontré le Tymac Tide à mi‑chemin et a participé au remorquage. Le matin du 24 décembre 2018, le NA 5501 est arrivé à Centerm, chargé de 139 conteneurs, en provenance de Nanaimo. Lorsque le NA 5501 s’est rendu aux bouées d’amarrage, il était chargé de 92 conteneurs.
[54] Vers 13 h le 24 décembre 2018, le Tymac Tide et le Cates VIII ont amarré le NA 5501 en le plaçant à côté du MLT 6000‑1. Le NA 5501 chargé a été arrimé par son côté bâbord au côté tribord du MLT 6000‑1.
[55] Le NA 5501 et le MLT 6000-1 n’étaient pas fixés directement à la bouée ouest de quelque manière que ce soit. Ainsi, la sécurité de l’amarrage du NA 5501 dépendait de la sécurité de l’amarrage du MLT 6000‑1 au Delta King. Les chalands n’étaient pas équipés de leurs propres ancres. Lors des interrogatoires préalables, l’identité des personnes qui étaient montées directement sur quel chaland et qui avaient vérifié les câbles selon les instructions de qui et à l’aide des câbles de qui a été révélée.
[56] Il n’est pas rare qu’aux bouées d’amarrage un chaland soit amarré à d’autres chalands lorsqu’il n’y a pas de bouée qui permette d’utiliser directement les câbles fixes.
[57] Aucun des chalands n’a été déplacé le 25 décembre 2018.
[58] Vers 4 h 30 le 26 décembre 2018, le Cates V revenait de la IOCO et se dirigeait vers les quais de Seaspan qui se trouvent à proximité des bouées d’amarrage. Le Cates V est passé à proximité des bouées d’amarrage, sans rien remorquer. Toutes les demanderesses allèguent que le sillage excessif, causé par la vitesse élevée du Cates V, a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase et provoqué la rupture de ce qui restait des câbles entre le MLT 6000‑1 et le Delta King.
[59] On estime qu’à 4 h 45 le 26 décembre 2018, les chalands se sont détachés du Delta King et de la bouée ouest. Les chalands ont ensuite dérivé sans surveillance, sans éclairage et sans être détectés dans le port de Vancouver, au gré du vent, des vagues et du courant.
[60] Les opérateurs du système radar des SCTM situé à Victoria n’ont pas détecté la masse importante que constituaient les deux chalands flottant dans le port de Vancouver. À l’audience, l’avocat de Libra a expliqué que le radar aurait produit des ombres indiquant que les chalands flottaient dans le port de Vancouver.
[61] Les chalands ont atteint Coal Harbour vers 6 h. Ils ont d’abord heurté l’angle nord‑est de la jetée Delta, puis l’angle nord-est de la jetée Foxtrot du terminal d’hydravions du Vancouver Harbour Flight Centre.
[62] Ensuite, les chalands ont heurté l’angle nord‑est du quai ouest de Harbour Air et l’extrémité ouest du quai de Harbour Green.
[63] Vers 6 h 30, les chalands ont heurté l’arrière du KOGO, qui était amarré au quai extérieur de la marina de Coal Harbour et qui n’était pas sous tension. La preuve révèle que le NA 5501 est entré en contact avec la poupe du KOGO. Quinze personnes dormaient à bord, mais toutes ont pu quitter le bateau endommagé.
[64] Les chalands ont continué à dériver dans Coal Harbour et ont ensuite heurté la marina de Coal Harbour au poste d’amarrage A1.
[65] Vers 6 h 31, la Garde côtière a reçu le premier rapport radio l’informant des chalands à la dérive et de la collision. Les SCTM ont été alertés et ont commencé à prendre des dispositions pour que des remorqueurs soient envoyés en renfort.
[66] Vers 6 h 55, les chalands ont heurté le KUMA, qui était amarré au quai nord‑sud de la marina de Coal Harbour et qui n’était pas sous tension.
[67] Les chalands ont fini leur course contre le restaurant Lift à Coal Harbour, faisant voler en éclats ses fenêtres. Ils sont restés attachés l’un à l’autre pendant toute la durée de l’incident. De fait, ils ont été remorqués jusqu’aux bouées d’amarrage, toujours amarrés l’un contre l’autre.
[68] La police de Vancouver a été chargée de l’enquête et a rédigé un rapport. De nombreux interrogatoires préalables ont été menés et les actions font l’objet d’une gestion de l’instance étroite.
B. Les allégations des demanderesses
[69] Les allégations formulées par les demanderesses (les défenderesses dans les présentes requêtes) dans toutes les demandes sont similaires, notamment les allégations de négligence et de nuisance visant 1025532 BC‑NA 5501, et le MLT 6000‑1, qui sont pertinentes pour déterminer s’il y a lieu de procéder par voie de procès sommaire.
[70] Les demanderesses demandent que les défendeurs soient condamnés, conjointement et solidairement, à des dommages‑intérêts de plus 2 700 000 $, et que le MLT 6000‑1, le NA 5501, le F.W. Wright, le Tymac Tide, le Cates V et le Cates VIII soient grevés d’un privilège maritime.
(1) La négligence
[71] Les demanderesses allèguent que le F.W. Wright et son capitaine, Troy Proudlove, ainsi que son équipage, ont fait preuve de négligence en n’arrimant pas correctement, et en bon marin, le MLT 6000‑1 au Delta King ou à la bouée d’amarrage. Elles affirment qu’une fixation adéquate aurait empêché le MLT 6000‑1 de se détacher. Elles prétendent aussi que Mercury est responsable de la faute et de la négligence du F.W. Wright, de son capitaine Troy Proudlove et de son équipage.
[72] Les demanderesses allèguent que le Tymac Tide, le capitaine Lucian Laing et son équipage, ainsi que le Cates VIII, le capitaine Ronald Simonson et son équipage, ont fait preuve de négligence en ne fixant pas correctement, et en bon marin, le NA 5501 au MLT 6000‑1. Elles allèguent que Tymac est responsable de la faute et de la négligence du Tymac Tide, du capitaine Lucian Laing et de son équipage. Seaspan est responsable de la faute et de la négligence du Cates VIII, du capitaine Ronald Simonson et de son équipage.
[73] Les demanderesses allèguent que l’action du Cates V a causé la rupture des câbles d’arrimage entre le MLT 6000‑1 et le Delta King ou y a contribué, rupture qui a créé un danger pour la navigation et le transport maritime, et causé des dommages au KOGO. Elles allèguent que le Cates V, son capitaine John Armstrong et son équipage ont été négligents. Seaspan est responsable de la faute et de la négligence du Cates V, de son capitaine John Armstrong et de son équipage.
[74] Les demanderesses allèguent que le F.W. Wright, le Cates VIII, le Tymac Tide, le Cates V, et leurs capitaines et équipages respectifs ont, par négligence, causé la rupture complète des câbles d’arrimage entre le MLT 6000‑1 et le Delta King, ou y ont contribué.
[75] Les demanderesses prétendent également que le MLT 6000‑1 et le NA 5501 sont tous deux responsables et à l’origine des collisions. Elles soutiennent que les deux navires étaient incontrôlables, qu’ils constituaient un danger pour la navigation et une nuisance, et qu’ils ont causé des dommages au KOGO, au KUMA et au terminal après les avoir heurtés, soit directement, soit indirectement. Les demanderesses affirment que MLT était au moment des faits responsable de la navigation, de la gestion, de la faute et de la négligence du MLT 6000‑1. De même, elles allèguent que 1025532 BC était au moment des faits responsable de la navigation, de la gestion, de la faute et de la négligence du NA 5501.
[76] Enfin, les demanderesses prétendent que les agents des SCTM en service au moment des faits ont été négligents. Elles soutiennent que, grâce aux balayages radar, on pouvait voir clairement les déplacements des chalands entre North Vancouver et Coal Harbour sur les moniteurs radar à la disposition des agents des SCTM en service. Les demanderesses prétendent par conséquent que le Canada est responsable du fait d’autrui pour les actions ou inactions des agents des SCTM en service au moment des faits.
(2) La nuisance
[77] Les demanderesses font valoir que les chalands constituaient un danger pour la navigation et pour tous les navires qui se trouvaient dans le port de Vancouver, qu’ils aient été ancrés, à quai ou en mouvement. Selon les demanderesses, les chalands constituaient une nuisance. Les chalands ont causé, directement ou indirectement, des dommages à la marina, au terminal, à la CHM, au KUMA et au KOGO.
(3) Les précisions relatives aux allégations des demanderesses
[78] Au cours de l’interrogatoire préalable, le NA 5501 a demandé des précisions sur la faute et la négligence qu’il aurait commises. Plus précisément, au cours de l’interrogatoire préalable du témoin de Harbour Air, Eric Scott, les avocats de 1025532 BC et du NA 5501 ont demandé des précisions sur les allégations formulées dans la déclaration de Harbour Air et de Wickham Group. Dans le même ordre d’idées, Libra a expliqué qu’au cours de l’interrogatoire préalable de Mark McElwaine, les avocats de 1025532 BC et du NA 5501 ont demandé des précisions sur la faute et la négligence commises par le NA 5501. VHFC et CHM n’indiquent pas dans leur dossier de requête en réponse si 1025532 BC et le NA 5501 ont demandé des précisions à ce sujet. Elles s’appuient plutôt sur les détails donnés au sujet de la faute dans le mémoire des faits et du droit déposé par Libra.
[79] À l’heure actuelle, MLT n’a pas demandé de précisions au sujet de la négligence, bien qu’elle mentionne qu’[traduction] « aucun détail sur la négligence reprochée à MLT ne figure dans la déclaration »
.
[80] C’est Libra qui est à l’origine des allégations de faute et de négligence à l’endroit du NA 5501, et qui a fourni les détails concernant la nuisance causée par les chalands à la dérive dans le port de Vancouver. De même, les demanderesses Harbour Air et Wickham Group ont donné des précisions sur leur allégation de faute et de négligence, et au sujet de la nuisance causée par les chalands, lesquelles sont [traduction] « pour l’essentiel, analogues »
à celles fournies par Libra.
III. Questions en litige
[81] Les questions en litige sont les suivantes :
Y a‑t‑il lieu de tenir un procès sommaire?
Si la présente affaire se prête à la tenue d’un procès sommaire, les requérants sont‑ils responsables envers les demanderesses et les mis en cause des dommages prétendument causés par le NA 5501 et le MLT 6000‑1?
IV. Analyse
A. Procès sommaire
[82] Les avocats des chalands affirment qu’il s’agit simplement d’appliquer l’arrêt de la Cour suprême du Canada Goodwin Johnson v The Ship (Scow) AT & B No 28, 1954 CanLII 59 (CSC), [1954] RCS 513 [Goodwin Johnson] et d’exclure les défendeurs, le chaland NA 5501 de 1025532 BC et le chaland 6000‑1 de MLT, de la demande d’indemnisation. Les requérants font valoir qu’ils échapperaient ainsi à un procès inutile de quatre semaines alors qu’il est clair qu’il n’existe aucun droit d’action contre les chalands en raison de l’arrêt Goodwin Johnson. Ils soutiennent que de demander à la Cour d’appliquer l’arrêt Goodwin Johnson est une question préliminaire qui n’exige pas de la Cour qu’elle tire des conclusions de fait. Ils affirment en outre que les questions de droit soulevées dans la présente requête sont relativement simples.
[83] Les demanderesses Libra, VHFC et CHM, Harbour Air et Wickham Group font valoir que la présente affaire ne se prête pas à la tenue d’un procès sommaire, étant donné sa complexité et le lien qui existe entre les parties concernées. Elles soutiennent qu’il ne s’agit pas d’une affaire simple où la Cour peut simplement appliquer la jurisprudence et exclure les chalands de la demande. Le juge du procès devra tirer de nombreuses conclusions compliquées qui, sans vraiment toucher à la crédibilité, seront des conclusions de fait. Ces conclusions de fait serviront à déterminer qui, le cas échéant, a été négligent et doit être tenu responsable des dommages causés par les chalands. Les requérants soutiennent qu’il serait absurde d’exclure de la demande les deux chalands qui ont réellement causé les dommages avant la tenue d’un procès complet sur la question.
[84] Voici les dispositions pertinentes :
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[85] L’article 3 des Règles prévoit ce qui suit :
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[86] La partie requérante a le fardeau de prouver que la tenue d’un procès sommaire est appropriée dans les circonstances (Premium Sports Broadcasting Inc. c 9005‑5906 Québec Inc. (Resto-bar Mirabel), 2017 CF 590 au para 54). La question de savoir s’il y a lieu de tenir un procès sommaire doit être tranchée à l’étape de l’instruction de la requête en procès sommaire (Collins c Canada, 2014 CF 307 au para 41, conf. par 2015 CAF 281).
[87] La Cour d’appel fédérale a expliqué que l’opportunité de tenir un procès sommaire dépend des circonstances. Elle a déclaré ce qui suit dans l’arrêt ViiV Healthcare Company c Gilead Sciences Canada, Inc., 2021 CAF 122 [ViiV Healthcare CAF] :
[41] Tout dépend des circonstances. Le tribunal doit exercer de manière judicieuse son pouvoir discrétionnaire : interpréter le libellé des Règles à la lumière des objets de l’article 3 des Règles et des exemples de la jurisprudence, puis appliquer cette interprétation aux circonstances particulières de l’espèce.
[88] Une série de facteurs doivent être pris en compte en l’espèce. Il peut être indiqué de tenir un procès sommaire si l’efficacité sur le plan des coûts et du temps s’en trouve accrue (ViiV Healthcare CAF, au para 38, renvoyant avec approbation à la décision Wenzel, au para 38).
[89] D’autre part, la décision Wenzel donne un aperçu utile des facteurs qui militent contre la décision d’orienter les parties vers un procès sommaire (au para 38). Il s’agit notamment de la complexité de la question, du coût, du temps, de l’absence d’avis d’expert, de l’urgence ou de la perte de temps, et du morcellement du litige.
[90] La Cour a également reconnu d’autres facteurs tels que l’ampleur du litige et la question de savoir si la crédibilité est un facteur crucial : voir Wenzel, au para 37, renvoyant à l’arrêt Dahl et al v Royal Bank of Canada et al, 2005 BCSC 1263 au para 12. Les facteurs sont propres à chaque cas.
[91] Appliqués à la présente affaire, les facteurs énumérés dans la décision Wenzel militent contre la décision de faire droit aux requêtes en procès sommaire. La situation ne se prête pas à la tenue d’un procès sommaire. Je présente ci‑dessous une analyse des principaux facteurs qui militent contre la décision de faire droit aux requêtes en procès sommaire.
B. Les arguments des requérants
[92] Les avocats de 1025532 BC et du chaland NA 5501 soutiennent qu’il convient d’ordonner la tenue d’un procès sommaire dans les circonstances. Ils font valoir que la question de savoir si 1025532 BC et le chaland NA 5501 sont responsables, compte tenu de l’arrêt Goodwin Johnson, n’est pas complexe, mais bien définie. Ils ajoutent que leurs clients seront lésés s’ils doivent continuer à participer à l’action.
[93] Les avocats de 1025532 BC et du chaland prétendent que la présente affaire ne soulève aucune question de crédibilité et de preuve quant au remorquage et à l’arrimage du NA 5501. Certes, il existe une certaine confusion quant à savoir qui a engagé Seaspan, mais les avocats de 1025532 BC estiment que cela n’a pas d’importance pour les questions visées par le procès sommaire. Selon eux, les faits sont très cohérents et clairement établis sur cette question.
[94] MLT affirme que, selon le paragraphe 216(6) des Règles, il y a lieu de tenir un procès sommaire compte tenu des faits de l’espèce, et pour le démontrer, elle s’appuie sur la jurisprudence, dont celle de la Colombie‑Britannique. MLT attire l’attention sur le paragraphe 41 de l’arrêt ViiV Healthcare CAF : la Cour doit être d’avis qu’il est satisfait aux conditions préalables relatives au jugement ou au procès sommaire, définies dans les Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 [les Règles] et interprétées à la lumière de l’article 3 des Règles.
[95] MLT soutient que la Cour dispose d’une preuve suffisante pour rendre une décision sommaire. MLT fait également valoir qu’il n’y a aucun risque que la crédibilité soit mise en cause et que, quoi qu’il en soit, les parties ont la possibilité, sur ordonnance de la Cour, de contre‑interroger le déclarant d’un affidavit.
[96] MLT explique que les faits principaux exposés lors du procès sommaire ne seront pas contestés et que la Cour se concentrera plutôt sur les questions de droit soulevées par les parties requérantes. Elle se prononcera principalement sur la responsabilité de MLT pour les actes ou omissions du remorqueur et sur la nature de la relation entre le remorqueur et la barge remorquée. MLT soutient que cette décision n’a rien à voir avec les décisions en matière de responsabilité qui seront rendues au procès. MLT fait aussi valoir que d’instruire séparément la question de la responsabilité de MLT et du MLT 6000‑1 favorisera le déroulement plus rapide de l’action ou le règlement du litige entre les parties.
[97] MLT soutient qu’une décision sommaire devrait permettre d’apporter une solution au présent litige qui soit plus expéditive et économique, et ne présente aucun risque important de perte de temps et d’efforts. En conclusion, MLT estime que la tenue d’un procès sommaire est non seulement indiquée, mais aussi bénéfique, car elle permettrait de morceler efficacement un litige complexe faisant intervenir plusieurs parties.
[98] Les requérants soutiennent qu’il y a lieu de tenir un procès sommaire car, si leur requête est accueillie, le nombre de parties devant participer à un procès complet s’en trouvera réduit. Il s’agit donc d’un mécanisme qui permet à toutes les parties concernées de réaliser des économies de temps et d’argent.
[99] Les requérants font valoir que l’allégation de nuisance doit être rejetée. Les avocats de 1025532 BC et du chaland soutiennent que la preuve montre clairement que l’affréteur n’a su que le chaland constituait une nuisance qu’après que l’incident se soit produit. 1025532 BC affirme que l’allégation de nuisance doit donc être rejetée, car une partie doit avoir connaissance de la nuisance pour pouvoir la faire cesser. MLT fait valoir que l’allégation de nuisance portée contre elle doit aussi être rejetée parce qu’elle n’avait pas le contrôle du chaland MLT 6000‑1. Par conséquent, les requérants prétendent qu’il s’agit là d’une question facile à trancher.
[100] Les requérants soutiennent que les demanderesses doivent présenter leurs meilleurs arguments lors du procès sommaire. Ils prétendent que les demanderesses ne peuvent pas se contenter de dire qu’elles pourraient présenter des témoignages d’experts ou apporter des précisions lors du procès, mais qu’elles doivent plutôt produire leurs éléments de preuve dès maintenant. MLT affirme que, bien que le litige dans son ensemble soit complexe, je n’ai qu’à me pencher sur les questions restreintes que soulève le présent procès sommaire. Selon MLT, tout ce que je dois décider, c’est si le MLT 6000‑1 doit être tenu responsable des actes ou omissions du F.W. Wright ou du Mercury. La question est bien définie et MLT affirme qu’elle entre dans la catégorie de celles qui se prêtent à la tenue d’un procès sommaire. Les avocats de MLT ajoutent que le procès sommaire ne causerait aucun retard puisque les interrogatoires préalables sont terminés et que la date du procès est fixée. La tenue du procès sommaire pourrait seulement vouloir dire que leurs clients n’auraient pas à assister au procès.
[101] MLT indique que la question de la crédibilité ne se pose pas, car les demanderesses n’ont pas contre‑interrogé les déposants des affidavits produits dans le cadre de la présente requête et que, par conséquent, elles ne sauraient maintenant affirmer que la crédibilité est un problème. MLT soutient que cela illustre bien la simplicité de la présente requête. MLT allègue que les demanderesses font paraître l’affaire plus complexe qu’elle ne l’est en présentant des décisions qui se distinguent de la présente affaire et qui portent sur des faits survenus aux États‑Unis avant que le Canada n’adopte sa propre Loi sur la responsabilité en matière maritime, LC 2001, c 6. En outre, MLT affirme que la jurisprudence invoquée par les demanderesses porte sur l’approvisionnement et n’a rien à voir avec les collisions maritimes.
[102] 1025532 BC affirme en réponse qu’aucun des autres défendeurs ne s’est opposé au rejet de l’action visant les chalands, ce qui, selon elle, signifie qu’il s’agit d’une question simple et non litigieuse, alors que les autres défendeurs s’opposent à ce que les requérants soient exclus du litige.
C. Les arguments des défenderesses (demanderesses)
[103] Les demanderesses se sont appuyées sur les observations écrites et orales de Libra. Harbour Air et Wickham Group s’appuient sur les éléments contenus dans le mémoire des faits et du droit de Libra produit en réponse aux requêtes en procès sommaire de MLT et de 1025532 BC. CHM et VHFC souscrivent aux observations et à la jurisprudence contenues dans les observations de Libra et s’y appuient.
[104] Libra s’appuie principalement sur les mêmes facteurs que les requérants, mais invoque à l’appui de ces facteurs la décision Lululemon Athletica Canada Inc. c Campbell, 2022 CF 194. Libra s’appuie également sur la décision Wenzel, dans laquelle la Cour fédérale a conclu que la tenue d’un procès sommaire dans une affaire complexe de contrefaçon de brevet ne serait pas dans l’intérêt de la justice. Dans cette affaire, la Cour fédérale a jugé que la proximité de la date du procès, la nature technique de l’affaire et les considérations relatives à la preuve n’étaient pas de nature à justifier la tenue d’un procès sommaire.
[105] Libra se tourne vers une décision de la Colombie‑Britannique pour affirmer que la Cour a reconnu que celle‑ci pouvait être utile et convaincante dans le contexte d’une requête en procès sommaire fondée sur les Règles. Dans la décision Greater Vancouver Water District v Bilfinger Berger AG, 2015 BCSC 485 [GVWD], la Cour suprême de la Colombie-Britannique a mentionné d’autres facteurs à prendre en considération dans ce contexte. Plus précisément, la Cour a déclaré ce qui suit :
[traduction]
[110] En résumé, il ressort clairement de la jurisprudence applicable en Colombie‑Britannique, y compris l’arrêt Hryniak, que la cour qui est saisie d’une requête en procès sommaire visant à ce qu’elle tranche une partie seulement des questions en litige doit tenir compte des facteurs suivants :
a) la question de savoir si elle peut dégager les faits nécessaires pour trancher les questions de fait ou de droit;
b) la question de savoir s’il serait injuste de trancher les questions en litige par voie de procès sommaire, compte tenu, entre autres, de ce qui suit :
i. des conséquences d’une décision tranchant seulement certaines des questions en litige, ce qui oblige à considérer notamment :
(1) la possibilité que des conclusions se recoupent ou se contredisent, à savoir si les questions tranchées sont liées à celles qui restent à trancher;
(2) la possibilité d’appels multiples;
(3) la nouveauté des questions à trancher;
ii. la somme en cause;
iii. la complexité de l’affaire;
iv. son urgence;
v. tout préjudice susceptible de découler d’un retard;
vi. le coût de la tenue d’un procès traditionnel par rapport à la somme en jeu.
[106] Libra fait valoir quatre points principaux pour expliquer pourquoi il n’y a pas lieu de tenir un procès sommaire dans les circonstances.
[107] Tout d’abord, Libra fait valoir que le procès sommaire ne permettra pas de trancher toutes les questions soulevées dans l’action. Le juge du procès devra encore se prononcer sur de nombreuses questions. Libra dresse une liste non exhaustive des questions qui resteront en suspens en l’espèce, même si la Cour fait droit à la requête en procès sommaire des requérants. Libra fait également valoir que les questions soulevées par les présentes requêtes devront probablement être réexaminées à la faveur d’un procès complet et à la lumière d’un dossier de preuve complet. Il est à prévoir que le juge du procès sera limité dans ses conclusions sur ces questions complexes de responsabilité s’il est fait droit à la requête en procès sommaire.
[108] Deuxièmement, Libra fait valoir que les questions que les requérants cherchent à faire trancher sont étroitement liées aux questions qui resteront à trancher au procès. Elle ajoute que le succès des poursuites intentées contre MLT, le MLT 6000‑1, 1025532 BC et le NA 5501 dépendra de la décision du juge du procès sur l’attribution de la faute. Il en est ainsi à cause des questions de propriété soulevées par Libra. Libra affirme que ces questions ne sont pas prêtes à être tranchées dans le cadre des présentes requêtes.
[109] Troisièmement, Libra soutient que les présentes requêtes pourraient aboutir à des conclusions incohérentes. Sa principale réserve a trait aux répercussions que la décision de la Cour sur la question de savoir si elle est en présence d’une affaire de remorquage indépendant pourrait avoir sur d’autres aspects du litige. Dans le cadre de la présente requête, MLT et 1025532 BC soutiennent que c’est le droit applicable aux remorqueurs indépendants qui devrait s’appliquer de sorte que seuls les remorqueurs et non les chalands devraient être tenus responsables. Tandis que dans leur réponse à la requête visant à obtenir des réponses, MLT et Mercury font valoir qu’il ne s’agit pas d’une affaire de remorquage. Libra affirme que, si la Cour répond à cette question, les actions pourraient bien donner lieu à des décisions contradictoires.
[110] Quatrièmement, Libra fait valoir qu’un procès sommaire ne présente aucun avantage. Le litige dure depuis plus de deux ans et le procès en responsabilité est prévu pour le 6 février 2023. La Cour a scindé les questions en litige et le procès ne portera donc que sur la responsabilité. Libra conteste l’idée que les présentes requêtes réduiront la durée du procès. Elle soutient que, parce que les questions sont interreliées, une grande partie du procès sommaire sera basée sur les mêmes éléments de preuve que ceux qui seront examinés au cours du procès. Elle affirme que le procès sommaire sera redondant et aura pour effet de morceler le litige.
[111] En conclusion, Libra soutient que les questions soulevées dans la présente requête ne se prêtent pas à un procès sommaire et ne contribueront pas efficacement au règlement des actions. L’interdépendance des questions à trancher dans la présente requête et les faits sur lesquels il restera à se prononcer au procès touchent autant à la question de savoir si la Cour est capable de dégager les faits nécessaires qu’à celle de savoir s’il serait juste de trancher ces questions dans le cadre d’un procès sommaire.
D. L’affaire est complexe
[112] Bien que la complexité ne soit pas le seul facteur qu’un tribunal doit prendre en considération, ce facteur est particulièrement pertinent en l’espèce. Le litige, qui est d’une grande ampleur et fait intervenir plusieurs parties, est en cours depuis deux ans. Il y a un grand nombre de demandes, des mises en cause et six actions in rem. Les requérants estiment que la preuve produite dans la présente requête est simple, mais je ne suis pas d’accord avec eux. Les parties ne s’entendent pas sur les circonstances factuelles applicables, il y a un désaccord sur les faits en cause dans la présente requête et la question de la propriété n’a pas encore été réglée.
[113] Je reconnais que les collisions et les événements du 26 décembre 2018 sont relativement simples. Or, cela ne veut pas dire que les questions de droit que soulèvent ces événements sont simples elles aussi. Trancher la question en cause ne signifie pas trancher toutes les questions ou simplifier l’action. Je pense au contraire que cela pourrait compliquer l’action.
[114] Les questions de responsabilité que soulève la présente affaire sont complexes. Décider de certains aspects de ces questions complexes, en vase clos, sans disposer de la matrice factuelle complète, n’aide pas les parties. Je suis d’accord avec Libra pour dire que, même si la Cour devait trancher les questions soulevées par les requérants, les parties finiraient par essayer de débattre à nouveau de la preuve lors du procès complet. Ce qui pourrait avoir pour conséquence involontaire de lier les mains du juge du procès, dont les conclusions pourraient être différentes au vu d’un dossier factuel plus complet.
[115] Bien que le procès sommaire n’ait pas pour objet de trancher toutes les questions en litige, il vise à ce que les parties parviennent à un règlement rapide et efficace du litige : voir ViiV Healthcare CAF, aux para 36 à 42. Libra a dressé une liste non exhaustive de 16 questions auxquelles le juge du procès devra probablement répondre. J’estime que de tirer maintenant des conclusions factuelles et juridiques sur la responsabilité des requérants limitera de façon générale la capacité du juge du procès à tirer ses propres conclusions, qui seront fondées sur l’ensemble du dossier.
[116] Les questions soulevées par la présente requête sont étroitement liées à celles qui devront être tranchées lors du procès. Il est donc difficile d’isoler les questions de droit et d’examiner pleinement les requêtes des requérants. Je suis d’accord avec Libra pour dire que le succès des poursuites intentées contre MLT, le MLT 6000‑1, 1025532 BC et le NA 5501 dépendra de la décision sur l’attribution de la faute que le juge du procès rendra à l’égard des autres défendeurs et des mis en cause. Ces questions ne sont pas prêtes à être tranchées dans le cadre des présentes requêtes.
[117] Libra estime que l’action in rem contre le MLT 6000‑1 sera accueillie si le F.W. Wright et son équipage sont tenus responsables de négligence. Elle fait aussi valoir que l’action in rem contre le NA 5501 sera accueillie si le Tymac Tide et son équipage sont tenus responsables de négligence. Selon elle, la décision concernant la propriété aura une incidence sur l’issue de ces actions. Bien que la Cour ne soit pas actuellement en mesure de savoir si oui ou non Libra peut avoir gain de cause dans ces actions, ce sont là des points défendables qu’il est préférable de trancher lors du procès.
[118] Ces questions de propriété sont si étroitement liées aux questions de responsabilité que, même si la Cour pouvait tirer des conclusions à partir des éléments de preuve dont elle dispose, il serait injuste qu’elle se prononce sur la responsabilité des requérants.
[119] Dans la décision GVWD, la Cour suprême de la Colombie‑Britannique a traité de la même façon une requête complexe en procès sommaire dans le domaine de la construction. En rejetant la requête en procès sommaire, la cour s’est dite préoccupée par la complexité de l’affaire. Elle a conclu ce qui suit :
[TRADUCTION]
[133] Je crains que les conclusions que je pourrais tirer maintenant n’aient un effet préjudiciable involontaire sur les conclusions qui devront être tirées au procès sur les autres questions contractuelles. Que fera la Cour si, lors du procès, les éléments de preuve l’amènent à conclure qu’elle a mal compris les faits essentiels sur lesquels elle s’est fondée pour statuer sur la requête en procès sommaire? La Cour sera‑t‑elle obligée de réexaminer les conclusions antérieures ou de formuler des conclusions incohérentes, ou l’une des parties sera‑t‑elle lésée par les conclusions antérieures erronées? En raison de la complexité de la présente affaire et du lien étroit entre les questions, je suis d’avis qu’il y a de fortes chances qu’un tel dilemme se présente si je tranche maintenant les questions soulevées au procès sommaire.
[120] À l’instar de la Cour suprême de la Colombie‑Britannique dans la décision GVWD, je conclus que les questions soulevées dans la présente requête en procès sommaire sont étroitement liées aux autres questions soulevées dans l’affaire, ce qui suscite les réserves mentionnées ci‑dessus.
E. Conclusions incohérentes
[121] Si la Cour tire des conclusions de fait sur le type d’affrètement, le contrôle et la propriété des chalands et des remorqueurs concernés, cela pourrait être injuste et donner lieu à des conclusions incohérentes au procès. Cela est d’autant plus vrai compte tenu de la requête visant à obtenir des réponses qui est en instance. Je suis d’accord avec Libra pour dire que cette requête pourrait donner lieu à des conclusions incohérentes.
[122] MLT et Mercury ont refusé de répondre aux questions relatives à la propriété pour des raisons de pertinence. Dans leurs observations écrites concernant la requête visant à obtenir des réponses, elles font valoir qu’il ne s’agit pas d’une affaire de « flottille » et qu’il n’y a donc pas lieu de tenir compte de la répartition des actions de personnes morales distinctes. MLT et Mercury soutiennent que, puisqu’il ne s’agit pas d’une affaire de flottille, la question de la propriété commune n’a rien à voir avec la question de la limitation de responsabilité. Cependant, Libra renvoie à des décisions qui vont à l’encontre des arguments de MLT sur la pertinence de la question de la propriété. Ainsi, si la Cour juge que la question de la propriété est pertinente pour la présente requête, sa conclusion aura une incidence défavorable importante sur l’issue de la requête visant à obtenir des réponses.
[123] Je conclus que la nature temporelle de la relation juridique entre les chalands et les remorqueurs est une autre question qui ajoute à la complexité de l’affaire et qu’un juge du procès serait plus apte à trancher. Cela concerne directement les chalands.
F. La nécessité d’obtenir des éléments de preuve supplémentaires
[124] Dans l’état actuel des choses, la Cour ne peut pas répondre pleinement aux questions soulevées par les requérants dans les présentes requêtes. MLT affirme que la principale conclusion que la Cour doit tirer concerne la question du « contrôle »
. Si la Cour estime que MLT n’avait pas le « contrôle »
du chaland remorqué, le droit canadien est clair : il ne peut y avoir de privilège maritime. À l’inverse, s’il s’avère que MTL avait le « contrôle »
du chaland remorqué, alors la Cour devra vraisemblablement se prononcer sur la responsabilité du F.W. Wright et de son équipage.
[125] Le manque d’éléments de preuve sur la structure organisationnelle de T&B, ou de documents concernant cette entreprise, empêche la Cour de tirer des conclusions de fait sur le type d’affrètement dont faisaient l’objet les chalands, ce qui pourrait ou non être lié à la question de la responsabilité. Il vaut même mieux laisser au juge du procès, qui aura une vue d’ensemble de la situation, le soin de tirer les conclusions qu’on me demande de tirer concernant l’acceptabilité des éléments de preuve.
[126] Je ne vois pas très bien comment la Cour pourrait tirer des conclusions sur le contrôle de la remorque sans comprendre comment sont répartis les droits de propriété entre les parties concernées. Les données disponibles sont actuellement insuffisantes pour répondre à cette question. Si la Cour devait tirer de telles conclusions en fonction d’un dossier de preuve incomplet, cela pourrait vraisemblablement avoir des répercussions importantes sur les autres questions du procès. Pour déterminer le type d’affrètement dont il est question, il faut davantage d’éléments de preuve.
[127] Aucune preuve d’expert n’a été déposée dans la présente requête et pourtant il semble qu’une telle preuve serait nécessaire pour trancher plusieurs questions. Bien que le défendeur ait raison de dire que les demanderesses doivent faire valoir leurs meilleurs arguments lors d’un procès sommaire, l’absence de preuve d’expert montre encore une fois que la question se prête davantage à la tenue d’un procès complet et qu’il ne s’agit pas d’une question distincte qui favorise l’efficacité.
[128] Si l’affaire est complexe, c’est non pas parce que les demanderesses n’ont pas présenté leurs meilleurs arguments, mais plutôt parce qu’elle est complexe sur le plan juridique comme tel. Les éléments de preuve disponibles auraient pu être plus nombreux, mais j’estime que s’il n’y en a pas plus, c’est en partie à cause du processus de préparation du procès, et non pas parce que les demanderesses ont intentionnellement omis de faire valoir leurs meilleurs arguments.
G. Le morcellement du litige
[129] Enfin, les présentes requêtes en procès sommaire occasionneraient un morcellement du litige. Le procès sommaire ne résoudrait pas toutes les questions en litige. Contrairement à ce que prétendent les requérants, le procès sommaire ne raccourcirait pas les débats pas plus qu’il ne permettrait d’économiser de l’argent et du temps. Une grande partie du procès sommaire reposerait sur les mêmes éléments de preuve que ceux qui seront présentés au procès, et il serait donc préférable que le juge du procès instruise lui‑même les questions sans avoir à tenir compte de certains éléments du casse‑tête qui auraient déjà été tranchés de façon isolée. La question n’est pas aussi distincte que les requérants voudraient me le faire croire et elle est liée à d’autres conclusions de fait que le juge du procès tirera dans le cadre de l’instruction. Pour répondre aux questions de responsabilité soulevées par les requérants, la Cour doit examiner l’ensemble des éléments de preuve disponibles.
[130] Je suis d’accord avec les demanderesses pour dire que le fait de statuer sur la demande n’élimine pas la nécessité de produire des éléments de preuve sur des questions connexes et que, par conséquent, il n’y a pas d’économie de temps importante. Il est également probable que ces questions reviendront au procès.
[131] Le procès sommaire vise à offrir aux parties un moyen de résoudre rapidement un litige et de réduire les délais. Or, l’instruction des actions aura lieu dans moins de six mois. Les présentes requêtes constituent davantage un obstacle qu’un moyen d’apporter une solution au litige qui soit expéditive et économique. En outre, les parties ont prévu de tenir une séance de médiation le 21 septembre 2022. La présence de toutes les parties devant le médiateur sera bénéfique.
[132] Bien que l’avocat de 1025532 BC et du chaland craigne de devoir assister à un long procès qui, selon lui, ne concerne pas ses clients, je suis plus préoccupée par le résultat qu’il cherche à obtenir. Exclure de l’instance 1025532 BC et le chaland lierait les mains du juge du procès et limiterait ses pouvoirs en matière de recherche des faits quant aux questions qui lui sont soumises. Il serait en effet déconcertant que les chalands qui ont causé les dommages ne soient plus parties à l’action. Puisque la question de la responsabilité des chalands aurait déjà été réglée, il ne resterait au juge du procès qu’à régler le cas des parties liées.
[133] Exclure les chalands de la présente action revient, semble‑t‑il, à tirer sur un fil qui dépasse d’un chandail. Il ne s’agit pas d’un seul fil sur lequel on peut tirer sans risque, mais d’un fil susceptible de défaire entièrement le chandail. Même si les parties requérantes affirment que la détermination de la responsabilité n’est pas en litige ici, elles demandent à la Cour de couper le fil qui tient le chandail. Cela n’est tout simplement pas possible : la détermination de la responsabilité des autres parties repose sur les rapports et le lien qu’elles ont avec les chalands. Il n’est pas possible d’exclure les chalands, ni de considérer leur responsabilité en vase clos, et le faire constituerait une injustice pour les autres parties à l’instance.
H. Un préjudice est susceptible de découler du retard
[134] Étant donné que la médiation doit avoir lieu le 21 septembre 2022 et que le procès est prévu pour février 2023, le retard ne causera aucun préjudice. D’autant plus que tous les interrogatoires préalables ont déjà eu lieu.
I. La nouveauté
[135] Les requérants soutiennent que la présente question n’est pas nouvelle puisque l’arrêt Goodwin Johnson a établi le droit concernant les chalands en 1955 et qu’il est appliqué depuis.
[136] Les demanderesses soutiennent que les questions de responsabilité générale sont nouvelles et ne devraient pas faire l’objet d’un procès sommaire sur dossier.
[137] Bien qu’il soit parfaitement acceptable que des questions de droit nouvelles soient tranchées lors d’un procès sommaire, elles doivent être réglées aussi facilement qu’elles le seraient à l’issue d’un procès complet (0871768 BC Ltd c Aestival (Navire), 2014 CF 1047 au para 58). Or, ce n’est pas le cas en l’espèce.
V. Conclusion
[138] Je rejetterai les deux requêtes, car la présente affaire ne devrait pas être tranchée par jugement sommaire pour les motifs exposés ci‑dessus.
[139] Si la Cour devait tirer des conclusions en rapport avec les présentes requêtes en procès sommaire, elle le ferait dans un vide factuel et juridique, sans tenir compte des autres questions à résoudre. Il existe une multitude d’éléments factuels pertinents pour la question de la responsabilité qui doivent être laissés à l’appréciation du juge du procès. Je rejette l’argument des requérants, selon qui il est possible de n’examiner que les questions juridiques soulevées par les présentes requêtes. Les présentes actions sont complexes et interreliées, et les conclusions du juge du procès pourraient y être liées. Il ne conviendrait donc pas de permettre la tenue d’un procès sommaire.
VI. Les dépens
[140] MLT et le MLT 6000‑1 ont demandé des dépens selon la colonne 4.
[141] 1025532 BC et le NA 5501 ont demandé des dépens.
[142] Libra a demandé des dépens selon la colonne 3 du tarif B, quelle que soit l’issue de la cause.
[143] VHFC et CHM ont demandé des dépens.
[144] Harbour Air et le Wickham Group ont demandé des dépens selon la colonne 3.
[145] Tymac Tide n’a pas pris position et n’a pas demandé de dépens.
[146] J’adjugerai donc les dépens aux demanderesses quelle que soit l’issue de la cause.
JUGEMENT DANS LES DOSSIERS T‑547‑20, T‑755‑20 et T‑1254‑20
LA COUR ORDONNE :
La requête est rejetée;
Les dépens suivront l’issue de la cause.
« Glennys L. McVeigh »
Juge
Traduction certifiée conforme
Édith Malo
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
Dossiers : |
T‑547‑20, T‑755‑20 ET T‑1254‑20 |
DOSSIER :
|
T‑547‑20 |
INTITULÉ :
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LIBRA VOYAGE LIMITED c LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « NA 5501 », LE CHALAND « NA 5501 », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », 1025532 B.C. LTD, MLT CAPITAL CORP, TYMAC LAUNCH SERVICE LTD, SEASPAN ULC, MERCURY LAUNCH & TUG LTD., UNTEL NO 1, UNTEL NO 2, UNTEL NO 3, UNTEL NO 4, ET SA MAJESTÉ LA REINE ET LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « NA 5501 », LE CHALAND « NA 5501 », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », 1025532 B.C. LTD., MLT CAPITAL CORP., TYMAC LAUNCH SERVICE LTD., SEASPAN ULC, MERCURY LAUNCH et TUG LTD., UNTEL NO 1, UNTEL NO 2, UNTEL NO 3, UNTEL NO 4, ET SA MAJESTÉ LA REINE |
ET DOSSIER :
|
T‑755‑20 |
INTITULÉ :
|
HARBOUR AIR LTD ET WICKHAM GROUP LTD. c LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « NA 5501 », LE CHALAND « NA 5501 », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », 1025532 B.C. LTD, MLT CAPITAL CORP, TYMAC LAUNCH SERVICE LTD, SEASPAN ULC, MERCURY LAUNCH & TUG LTD., UNTEL NO 1, UNTEL NO 2, UNTEL NO 3, UNTEL NO 4, ET SA MAJESTÉ LA REINE ET LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « NA 5501 », LE CHALAND « NA 5501 », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », 1025532 B.C. LTD., MLT CAPITAL CORP., TYMAC LAUNCH SERVICE LTD., SEASPAN ULC, MERCURY LAUNCH et TUG LTD., UNTEL NO 1, UNTEL NO 2, UNTEL NO 3, UNTEL NO 4, ET SA MAJESTÉ LA REINE |
ET DOSSIER :
|
T‑1254‑20 |
INTITULÉ :
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VANCOUVER HARBOUR FLIGHT CENTRE LIMITED PARTNERSHIP ET COAL HARBOUR MARINA LIMITED c LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « NA 5501 », LE CHALAND « NA 5501 », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », 1025532 B.C. LTD, MLT CAPITAL CORP, TYMAC LAUNCH SERVICE LTD, SEASPAN ULC, MERCURY LAUNCH & TUG LTD., UNTEL NO 1, UNTEL NO 2, UNTEL NO 3, UNTEL NO 4, ET SA MAJESTÉ LA REINE ET LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « NA 5501 », LE CHALAND « NA 5501 », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LE CHALAND « MLT 6000‑1 », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LE REMORQUEUR « F.W. WRIGHT », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LE REMORQUEUR « TYMAC TIDE », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES VIII », LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », LE REMORQUEUR « CHARLES H. CATES V », 1025532 B.C. LTD., MLT CAPITAL CORP., TYMAC LAUNCH SERVICE LTD., SEASPAN ULC, MERCURY LAUNCH et TUG LTD., UNTEL NO 1, UNTEL NO 2, UNTEL NO 3, UNTEL NO 4, ET SA MAJESTÉ LA REINE |
LIEU DE L’AUDIENCE :
|
Vancouver (Colombie-Britannique)
|
DATE DE L’AUDIENCE :
|
Le 31 août 2022
|
JUGEMENT ET MOTIFS : |
La juge McVeigh
|
DATE DES MOTIFS :
|
Le 21 septembre 2022
|
COMPARUTIONS :
Jonathan McLean
Darlene Crimeni
Madison Vonk
Or Regev
Roger Watts |
Pour la demanderesse Libra Voyage Ltd. Pour les demanderesses Harbour Air Ltd. et Wickham Group Ltd. Pour les demanderesses Vancouver Harbour Flight Centre Limited Partnership et Coal Harbour Marina Limited
|
Peter Swanson
Nicholas Wilson
Kim Wigmore
David Fung Braeden Stang |
POUR LES DÉFENDEURS/MIS EN CAUSE 1025532 B.C. Ltd, les propriétaires et toutes les autres personnes ayant un droit sur le chaland « NA 5501 », le chaland « NA 5501 ». POUR LES DÉFENDERESSES/MISES EN CAUSE MLT Capital Corp. et Mercury Launch & Tug Ltd.
POUR LES DÉFENDEURS/MIS EN CAUSE les propriétaires et toutes les autres personnes ayant un droit sur le remorqueur « Tymac Tide », le remorqueur « Tymac Tide » et Tymac Launch Service Ltd. |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Stikeman Elliott S.E.N.C.R.L., s.r.l. Vancouver (Colombie‑Britannique) Lindsay LLP Vancouver (Colombie‑Britannique) Hakemi & Ridgedale LLP Vancouver (Colombie‑Britannique) |
Pour la demanderesse Libra Voyage Ltd. Pour les demanderesses Vancouver Harbour Flight Centre Limited Partnership et Coal Harbour Marina Limited Pour les demanderesses Harbour Air Ltd. et Wickham Group Ltd. |
Borden Ladner Gervais s.r.l.
Vancouver (Colombie‑Britannique)
Whitelaw Twining Law Corporation
Vancouver (Colombie‑Britannique) Bernard LLP Vancouver (Colombie‑Britannique) Norton Rose Fulbright Canada S.E.N.C.R.L. s.r.l.
Vancouver (Colombie‑Britannique) Procureur général du Canada Vancouver (Colombie‑Britannique) |
POUR LES DÉFENDEURS/MIS EN CAUSE les propriétaires et toutes les autres personnes ayant un droit sur le remorqueur « Tymac Tide », le remorqueur « Tymac Tide » et Tymac Launch Service Ltd. POUR LES DÉFENDERESSES ET MISES EN CAUSE MLT Capital Corp. et Mercury Launch & Tug Ltd.
POUR LES DÉFENDEURS/MIS EN CAUSE 1025532 B.C. Ltd, les propriétaires et toutes les autres personnes ayant un droit sur le chaland « NA 5501 », le chaland « NA 5501 » POUR LES DÉFENDEURS/MIS EN CAUSE les propriétaires et toutes les autres personnes ayant un droit sur le remorqueur « Charles H. Cates V », le remorqueur « Charles H. Cates V », les propriétaires et toutes les autres personnes ayant un droit sur le remorqueur « Charles H. Cates VIII », le remorqueur « Charles H. Cates VIII » et Seaspan ULC POUR LE DÉFENDEUR/MIS EN CAUSE Sa Majesté le Roi du chef du Canada |