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Date : 20010424

Dossier : T-1401-99

Ottawa (Ontario), le mardi 24 avril 2001

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE DAWSON

ENTRE :

LA HAMILTON AND DISTRICT CHAMBER OF COMMERCE

                                                                                          demanderesse

                                                         et

                  LE MINISTRE DE L'ENVIRONNEMENT,

LE MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS,

et NICK MULDER, RAY EFFER et SALLY LERNER en leurs qualités de

membres d'une commission constituée en vertu de la

Loi canadienne sur l'évaluation environnementale

                                                                                                 défendeurs

                                              JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1.                    La demande de contrôle judiciaire est rejetée.


2.                    La question des dépens est reportée, les parties devant présenter des observations additionnelles.

             « Eleanor R. Dawson »        

    Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad .a., LL.L.


Date : 20010424

Dossiers : T-1400-99

T-1993-99

Ottawa (Ontario), le mardi 24 avril 2001

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE DAWSON

ENTRE :

LA MUNICIPALITÉ RÉGIONALE DE HAMILTON-WENTWORTH

                                                                                          demanderesse

                                                         et

                  LE MINISTRE DE L'ENVIRONNEMENT,

LE MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS,

et NICK MULDER, RAY EFFER et SALLY LERNER en leurs qualités de

membres d'une commission constituée en vertu de la

Loi canadienne sur l'évaluation environnementale

                                                                                                 défendeurs

                                              JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

3.                    La demande de contrôle judiciaire est accueillie.


4.                    Il est déclaré que la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, L.C. 1992, ch. 37 (la LCEE) ne s'applique pas à la réalisation du projet de sorte qu'aucune évaluation du projet n'est nécessaire aux termes de cette loi.

5.                    La question des dépens est reportée, les parties devant présenter des observations additionnelles.

             « Eleanor R. Dawson »        

    Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad .a., LL.L.


Date : 20010424

Dossiers : T-1400-99

T-1993-99

Référence neutre : 2001 CFPI 381

ENTRE :

LA MUNICIPALITÉ RÉGIONALE DE HAMILTON-WENTWORTH

                                                                                              demanderesse

                                                         et

                  LE MINISTRE DE L'ENVIRONNEMENT,

LE MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS,

et NICK MULDER, RAY EFFER et SALLY LERNER en leurs qualités de membres

d'une commission constituée en vertu de la

Loi canadienne sur l'évaluation environnementale

                                                                                                   défendeurs

et

Dossier : T-1401-99

ENTRE :

LA HAMILTON AND DISTRICT CHAMBER OF COMMERCE

                                                                                              demanderesse


                                                         et

                  LE MINISTRE DE L'ENVIRONNEMENT,

LE MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS,

et NICK MULDER, RAY EFFER et SALLY LERNER en leurs qualités de membres

d'une commission constituée en vertu de la

Loi canadienne sur l'évaluation environnementale

                                                                                                   défendeurs

                                 MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE DAWSON

1. INTRODUCTION

[1]         Ces trois demandes de contrôle judiciaire découlent de la décision que le ministre de l'Environnement défendeur (le ministre de l'Environnement) a prise, à la demande du ministre des Pêches et des Océans défendeur (le ministre des Pêches), de faire procéder à l'examen d'un projet de route express par une commission aux termes de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, L.C. 1992, ch. 37 (la LCEE ou la Loi). Les défendeurs Nick Mulder, Ray Effer et Sally Lerner ont été nommés membres de la commission.


[2]         Le projet de route express, tel qu'il est défini dans le mandat de la commission, se rapporte à [TRADUCTION] « la construction et l'exploitation d'une route express proposée par la Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth, reliant deux routes express est-ouest existantes à accès limité à Hamilton (Ontario), (le Lincoln Alexander Parkway et le Queen Elizabeth Way) » (le projet ou le RHCE).

[3]         Sur consentement, les demandes T-1400-99 et T-1993-99 ont été entendues ensemble et, par une ordonnance du protonotaire Lafrenière, la demande T-1401-99 a été entendue en même temps que la demande T-1993-99.

(i) L'instance et les parties

a) Dossiers T-1400-99 et T-1993-99

[4]         Dans ces deux demandes, la Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth (la Région) conteste la demande que le ministre des Pêches a faite au ministre de l'Environnement en vue de faire procéder à un examen du projet par une commission, la décision du ministre de l'Environnement de faire procéder à un examen du projet par une commission, la constitution de la commission (en particulier, la question de savoir si la commission est habile à exercer ses fonctions en raison de la nomination de Nick Mulder), la détermination du mandat de la commission et la délivrance par la commission de Lignes directrices sur l'énoncé des incidences environnementales (les Lignes directrices).


[5]         Dans cette instance, la Région a signifié des avis de questions constitutionnelles et a donné avis de son intention de contester l'applicabilité de la LCEE sur le plan constitutionnel. Le procureur général de l'Ontario (l'Ontario) intervient dans la présente instance conformément à l'article 57 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, et aux avis de questions constitutionnelles. L'Ontario souscrit essentiellement à la position de la Région.

[6]         Par une ordonnance de la Cour, les Friends of Red Hill Valley (l'Association) ont obtenu le statut d'intervenants. Il s'agit d'une association non constituée en personne morale dont les objectifs comprennent la conservation, la protection et la mise en valeur de la Red Hill Valley et qui s'oppose essentiellement aux demandes de la Région et souscrit à la position des ministres défendeurs.

(b) Dossier T-1401-99

[7]         Dans cette instance, la Hamilton and District Chamber of Commerce (la Chambre de commerce) conteste la nomination de Sally Lerner à la commission pour le motif que cette nomination donne lieu à une appréhension raisonnable de partialité. La Chambre de commerce et ses membres cherchent à faire valoir les intérêts sociaux, économiques et industriels de la région de Hamilton-Wentworth. Ils appuient le projet.

[8]         Le sous-procureur général du Canada a répondu aux trois demandes pour le compte de tous les défendeurs.


(ii) Résumé des conclusions

[9]         J'ai minutieusement examiné la preuve et les observations de tous les avocats et j'ai conclu que la LCEE ne s'applique pas au projet et que, subsidiairement, le renvoi du projet à une commission n'était pas étayé par un chef valide de compétence fédérale. Dans les motifs ci-après énoncés, j'examine le contexte factuel, les questions préliminaires soulevées par les parties et la norme de contrôle applicable et j'analyse la question de l'applicabilité de la LCEE et de l'existence, le cas échéant, d'un chef valide de compétence fédérale.

[10]       Compte tenu de ces conclusions, il est inutile d'examiner un certain nombre de questions qui ont été soulevées. Lorsque pareilles questions sont entièrement théoriques compte tenu de mes conclusions, je ne les ai pas examinées, et ce, de façon que mes motifs soient rendus publics à bref délai. Lorsque j'estime que la chose est souhaitable eu égard aux circonstances, je fais également des remarques au sujet des conclusions que j'aurais tirées s'il avait été nécessaire d'examiner ces questions.

2. CONTEXTE FACTUEL

[11]       Le projet a suscité et continue à susciter de la controverse.


[12]       La Région décrit le Red Hill Creek Expressway (la route express) comme étant un important couloir de transport qui s'étend au sud et à l'est de la ville de Hamilton depuis la route 403, à Ancaster, passe par le secteur urbain montagneux de la Région et tourne vers le nord en suivant la Red Hill Creek Valley jusqu'à un nouvel échangeur le reliant au Queen Elizabeth Way (le QEW).

[13]       Depuis que le plan de transport de la région de Hamilton a été rendu public en 1963, on a recommandé la Red Hill Creek Valley comme emplacement de la portion nord-sud d'une autoroute reliant le QEW à la route 403.

[14]       La Red Hill Valley s'étend en direction nord-sud depuis le haut de l'Escarpement du Niagara jusqu'au lac Ontario. Elle est en général définie par le cours de la portion nord du Red Hill Creek et de ses tributaires. Le ministère des Richesses naturelles de l'Ontario a décelé un certain nombre de secteurs d'intérêt naturel et scientifique dans la Red Hill Valley et a identifié la zone des étangs et marais Van Wagner comme étant d'importantes terres humides de première catégorie pour la province. Un inventaire biologique de la vallée qui a été préparé en 1995 a permis de déceler la présence de trois espèces d'oiseaux rares à l'échelle nationale ou provinciale et la présence du petit polatouche, qui est vulnérable partout au pays.


[15]       Au mois de mai 1977, la Région a assumé la responsabilité des grandes artères de la Région. Au mois de décembre 1977, elle a autorisé une étude de tous les tracés de rechange pour la portion nord-sud de la route express. Les auteurs de l'étude ont en temps et lieu recommandé comme route privilégiée la route maintenant proposée qui passe par la Red Hill Valley et se rend au QEW. La Région a approuvé cette route privilégiée en 1979.

[16]       À ce moment-là, les entreprises municipales n'étaient pas assujetties à la Loi sur les évaluations environnementales de l'Ontario, S.O. 1975, ch. 69, mais la Région a demandé au ministre provincial de l'Environnement de désigner la route express en vertu de la Loi sur les évaluations environnementales provinciale, à condition que l'audience relative à l'évaluation environnementale en résultant soit jointe à toutes les autres audiences nécessaires aux fins de l'autorisation. Cette demande a été approuvée.

[17]       À la suite de cette désignation, la Région a soumis une évaluation environnementale et une audience d'évaluation publique a ensuite été tenue. Après une longue audience, qui a duré 99 jours, devant une commission mixte composée de membres de la Commission des affaires municipales de l'Ontario et de la Commission des évaluations environnementales de l'Ontario, les membres de la commission mixte ont autorisé à la majorité l'autoroute proposée, et le projet a obtenu toutes les autorisations provinciales nécessaires. On a contesté sans succès la décision de la commission mixte devant le cabinet provincial et la Cour divisionnaire de l'Ontario. L'instance engagée devant les tribunaux a été rejetée au mois de février 1990, l'opposition qui avait été présentée au cabinet ayant été rejetée plus tôt.


[18]       La Région affirme que, compte tenu de ces autorisations et des études qui avaient été déjà effectuées, la mise en valeur de secteurs étendus de la ville de Hamilton et de Stoney Creek a été autorisée. La preuve pertinente, en ce qui concerne des questions comme l'achat et l'expropriation de terrains dans le couloir routier, la démolition d'immeubles et les restrictions à la construction, sera examinée en détail plus loin dans les présents motifs.

[19]       Le 26 juin 1990, une cérémonie d'inauguration des travaux relatifs au Red Hill Creek Expressway a eu lieu à l'échangeur de la rue King, dans la Red Hill Valley. Toutefois, le 17 décembre 1990, le gouvernement provincial qui venait d'être élu a retiré l'engagement de financer la portion nord-sud de la route express passant par la Red Hill Valley que la province avait pris. La Région affirme qu'elle a donc arrêté les travaux de construction de la portion nord-sud de la route express située au bas de l'Escarpement du Niagara, dans la Red Hill Valley, mais qu'elle a procédé à la construction du segment est-ouest de la route express et de la portion nord-sud de la route express au haut de l'Escarpement du Niagara. La Région a également achevé la construction des échangeurs de la rue King et du chemin Queenston et a procédé à l'élimination des passages à niveaux, qui étaient tous situés dans la Red Hill Valley, parce que la réalisation de ces projets avait été entamée avant que les fonds aient été retirés.


[20]       En 1997, la portion de la route express que la Région avait continué à construire entre la route 403 et le chemin Dartnall a été ouverte et, en 1999, le prolongement allant du chemin Dartnall à la rue Mud a été ouvert. Cette portion de la route express est maintenant connue sous le nom de Lincoln M. Alexander Parkway.

[21]       À la fin de l'année 1995, la province a recommencé à financer le projet. La Région a alors entamé des consultations en vue de savoir si la conception initiale pouvait être améliorée et de quelle façon elle pouvait l'être.

[22]       Au cours du processus de consultation, lors d'une réunion qui a eu lieu le 18 janvier 1996 avec les représentants de la Région, le ministère fédéral des Pêches et des Océans (le MPO) a informé la Région que la LCEE s'appliquerait à la portion nord-sud de la route express, et ce, parce qu'à son avis, les ouvrages proposés auraient des incidences sur l'habitat du poisson. Il serait donc nécessaire d'obtenir l'autorisation prévue au paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches, L.R.C. (1985), ch. F-14, à l'égard des ouvrages proposés. Lors de cette réunion, les représentants d'Environnement Canada (EC) ont également fait remarquer qu'en vertu de la [TRADUCTION] « Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, EC a[vait] besoin de renseignements décrivant les effets que la construction de la route pourrait avoir sur les aires de nidification, de repos, d'alimentation et d'élevage des oiseaux migrateurs » .


[23]       Le 5 mars 1997, le cabinet de l'Ontario a accordé une exemption en vertu de la Loi sur les évaluations environnementales de l'Ontario (exemption qui a par la suite été désignée sous le nom de déclaration) exemptant le projet de l'application de l'article 5 de la Loi provinciale. Le projet a été décrit comme suit : [TRADUCTION] « l'élaboration et la réalisation d'améliorations en ce qui concerne le tracé nord-sud du Red Hill Creek Expressway tel qu'il a été approuvé par une commission mixte le 24 octobre 1985 ainsi que la conception détaillée et la construction d'un échangeur menant au Queen Elizabeth Way, comme il en est fait mention dans la demande d'exemption en date du 6 mai 1996. »

[24]       Dans cette exemption, le ministre de l'Environnement et de l'Énergie de l'Ontario a fait remarquer ce qui suit : [TRADUCTION] « Même si la Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth peut réaliser le projet initial tel qu'il a été approuvé en 1985, cela aura des incidences importantes sur l'Escarpement du Niagara ainsi que sur les marais Red Hill Creek et Van Wagner, qui sont vulnérables et n'entraînera pas la construction de l'échangeur nécessaire menant au Queen Elizabeth Way. La Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth a maintenant la possibilité de construire cet échangeur et d'apporter des améliorations au projet de 1985, lesquelles auront pour effet de réduire l'impact sur l'environnement. »

[25]       Le ministre de l'Environnement et de l'Énergie de l'Ontario a indiqué dans l'exemption qu'à son avis, l'intérêt public exigeait que l'on ordonne que l'article 5 de la Loi sur les évaluations environnementales de l'Ontario ne s'applique pas à l'ouvrage, et ce, pour un certain nombre de raisons, notamment :


·                        La Région avait convenu de mettre sur pied un processus d'évaluation en vue d'établir, à l'intention des organismes gouvernementaux, des groupes communautaires et du public, une enceinte où ils pourraient échanger des idées et des renseignements, préciser leurs positions et attentes et travailler en collaboration en vue de mettre au point une conception de la route express qui réduirait les incidences sur le bassin hydrographique de Red Hill Creek.

·                        La Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth avait fait savoir que, si l'exemption n'était pas accordée, elle se prévaudrait de l'autorisation accordée en 1985 par la commission mixte pour réaliser le projet, tel qu'il était alors approuvé, à l'exclusion de l'échangeur QEW. Aucune autorisation n'avait été accordée en vertu de la Loi sur les évaluations environnementales à l'égard de l'échangeur QEW, mais son emplacement (selon la proposition de 1985) devait avoir des incidences sérieuses sur les marais Red Hill et Van Wagner, qui étaient vulnérables, étant donné que l'échangeur devait être construit sur ces terres humides et à proximité de deux lieux d'enfouissement existants.

·                        La nécessité et la raison d'être d'un échangeur permettant d'accéder au QEW avaient été démontrées dans le cadre de l'évaluation environnementale initiale qui avait été soumise et de l'audience tenue par la commission mixte. La seule question que la commission n'avait pas examinée se rapportait aux détails relatifs à l'emplacement et à la conception finale de l'échangeur. Si toutes les exigences de la Loi sur les évaluations environnementales de l'Ontario étaient imposées, la Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth serait tenue de justifier de nouveau ce raccordement même si les travaux, en ce qui concerne le reste du projet, étaient déjà fort avancés. Le processus d'évaluation proposé par la Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth permettrait aux intéressés et aux personnes touchées de participer à la détermination de l'emplacement et des détails relatifs à la conception de ce réseau.

[26]       L'exemption imposait de fait les exigences environnementales à la Région, même si cette dernière croyait comprendre qu'on ne l'empêchait pas de commencer la construction de certains éléments du projet avant que le processus d'évaluation soit mené à bonne fin.

[27]       À la fin de l'année 1997, la Région a soumis au MPO le premier volume d'une ébauche de rapport sommaire (l'ERS) indiquant les différentes solutions possibles en ce qui concerne la construction du RHCE aux fins du raccordement de la route 403 au QEW.


[28]       L'ERS disait, entre autres choses, que la Région prévoyait réaligner une section de cinq kilomètres du Red Hill Creek et du périmètre d'inondation connexe le long du côté ouest de la route express et que la route express franchirait le Red Hill Creek huit fois.

[29]       L'ERS disait également ce qui suit :

·                        La Red Hill Valley serait défrichée dans une proportion d'environ 25 p. 100 (75 hectares) entre la rue Mud et la rue Brampton par suite de la réalisation du projet. Or, dans ce secteur il y avait un habitat considéré comme important, abritant des espèces animales et végétales rares.

·                        La construction de la route express pourrait avoir des incidences négatives sur environ 25 p. 100 (74 hectares) de la Red Hill Valley, mais la pleine étendue de ces incidences serait surveillée et atténuée une fois les travaux achevés.

·                        On estimait que 40 000 arbres seraient abattus.

·                        L'impact sur la dynamique de l'écosystème le long de l'Escarpement du Niagara et de la Red Hill Valley serait important (c.-à-d. qu'il ne pourrait pas être atténué) à cause de la perte permanente de zones de végétation et d'habitats fauniques et de la division d'un point de passage primordial de la faune reliant le bord du lac Ontario à l'Escarpement du Niagara et à d'autres secteurs plus éloignés.


[30]       Le MPO a par la suite informé la Région que, compte tenu des renseignements figurant dans l'ERS et des discussions qu'il avait eues avec elle, la proposition pourrait avoir un impact néfaste sur le poisson et l'habitat du poisson dans les marais de Red Hill Creek et Van Wagner. Le MPO a fait remarquer que la détérioration de l'habitat du poisson était prohibée en vertu du paragraphe 35(1) de la Loi sur les pêches, de sorte qu'il fallait obtenir une autorisation en vertu du paragraphe 35(2) de cette loi. Le MPO a en outre fait remarquer que cela déclencherait par ailleurs l'application de la LCEE.

[31]       Lors d'une réunion qui a eu lieu le 5 mai 1998, la Région a informé le MPO qu'elle lui demanderait une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches. Le MPO a donc fait savoir qu'il entamerait le processus d'examen préalable nécessaire. Au mois de juillet 1998, la Région a présenté une demande d'autorisation en vertu de la Loi sur les pêches.

[32]       Le MPO a préparé une ébauche de document déterminant la portée du projet et de l'évaluation aux fins de l'examen du projet de construction de la route express prévu par la LCEE. Le 30 octobre 1998, une copie de l'ébauche de document a été remise à la Région pour commentaires. La Région a fait parvenir ses commentaires et, le 28 janvier 1999, le MPO a rendu public le document concernant le rapport d'examen préalable du projet.


[33]       Dans l'intervalle, le 16 décembre 1998, les représentants du MPO et de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale (l'Agence) ont rencontré les représentants de la Région. Selon le procès-verbal de la réunion, les questions suivantes ont été examinées : la situation, en ce qui concerne la LCEE, la coordination possible du processus fédéral et du processus provincial et la possibilité du renvoi du projet à une commission. Une autre réunion a eu lieu le 19 février 1999; les notes préparées par l'un des représentants de la Région montrent que l'on a dit à la Région qu'il était [TRADUCTION] « fort possible » qu'une audience soit tenue par une commission mais que [TRADUCTION] « la chose n'était pas encore certaine » .

[34]       Le 4 mai 1999, le ministre des Pêches a écrit au ministre de l'Environnement pour lui demander de renvoyer à une commission le projet, telle que sa portée avait été déterminée par le MPO, conformément aux alinéas 25a) et b) de la LCEE. Le 6 mai 1999, à la suite de la réception de cette lettre, le ministre de l'Environnement a renvoyé le projet à une commission. Le seul document dont dispose la Cour qui fait foi de la décision du ministre de l'Environnement est un communiqué de presse que l'Agence a publié le 6 mai 1999.

[35]       Le 25 mai 1999, l'Agence a donné un avis public et a diffusé une ébauche du mandat de la commission. Dans cet avis, on demandait à tous les intéressés de faire parvenir leurs observations au sujet du mandat.

[36]       Le 5 juillet 1999, après avoir reçu les observations, le ministre de l'Environnement a fixé le mandat et a nommé les membres de la commission.

[37]       Avant les nominations, les curriculum vitae des membres éventuels de la commission avaient été examinés par le vice-président de l'Agence responsable de la prestation des programmes et par le directeur de l'Agence chargé de l'évaluation du projet qui, avec un membre du personnel responsable de l'évaluation du projet, a eu une entrevue téléphonique avec ceux-ci.


[38]       Le 9 juillet 1999, la Région a écrit au ministre de l'Environnement pour l'informer qu'elle ne participerait pas au processus prévu par la LCEE [TRADUCTION] « compte tenu du mandat qui a[vait] été fixé » et qu'elle avait demandé à un avocat de demander [TRADUCTION] « le contrôle judiciaire afin d'obtenir une décision portant que la LCEE ne s'applique pas au projet » .

[39]       Le 4 août 1999, la Région a présenté, dans le dossier T-1400-99, une demande en vue de contester la décision du 5 juillet par laquelle le ministre de l'Environnement avait nommé les membres de la commission et fixé le mandat de la commission.

[40]       Le 4 août 1999, la Chambre de commerce a présenté, dans le dossier T-1401-99, une demande visant à contester la décision du 5 juillet 1999 par laquelle le ministre de l'Environnement avait nommé Sally Lerner à la commission.

[41]       Le 11 août 1999, la commission a rendu publique son ébauche de lignes directrices sur l'énoncé des incidences environnementales afin d'obtenir les observations du public, et au mois de septembre 1999, la commission a tenu des réunions publiques dans la région de Hamilton en vue d'obtenir des observations au sujet de cette ébauche. Le 15 octobre 1999, la commission a publié ses lignes directrices définitives.


[42]       Le 14 septembre 1999, la Région, par l'entremise de son avocat, a écrit au MPO pour demander la suspension de l'examen de la demande d'autorisation qu'elle avait faite en vertu du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches compte tenu de la demande qui était en instance devant la Cour, des renseignements que le conseiller en matière de pêches lui avait récemment fournis et de l'avis dans lequel le MPO avait fait savoir que des renseignements additionnels devaient être fournis avant que la demande puisse être traitée.

[43]       Le 4 novembre 1999, la Région a écrit au ministre de l'Environnement pour demander la révocation de la nomination de Nick Mulder à la commission.

[44]       Le 15 novembre 1999, la Région a présenté, dans le dossier T-1993-99, une demande dans laquelle elle contestait essentiellement l'examen du projet en vertu de la LCEE, la nomination de Nick Mulder et la délivrance des Lignes directrices.

[45]       Le 12 janvier 2000, la Région, par l'entremise de son avocat, a informé la commission qu'elle ne participerait pas au processus d'examen pendant que les demandes de contrôle judiciaire étaient en instance devant la Cour.

[46]       Le 3 février 2000, la commission a suspendu l'examen en attendant que la Région soumette son énoncé des incidences environnementales.


3. QUESTIONS PRÉLIMINAIRES : DOSSIERS T-1400-99 ET T-1993-99

[47]       Trois questions préliminaires ont été soulevées dans le contexte de ces deux demandes. Il s'agit des questions ci-après énoncées :

(i)          l'étendue possible des demandes;

(ii)         l'admissibilité de certains éléments de preuve par affidavit déposés par la demanderesse;

(iii)        l'utilisation d'éléments de preuve se rapportant apparemment à des renseignements confidentiels du Conseil privé de la Reine.

[48]       Chaque question préliminaire sera examinée à tour de rôle.

(i) L'étendue possible des demandes

[49]       Au cours de l'instance, les défendeurs ont demandé avec succès devant le protonotaire Lafrenière une ordonnance interlocutoire radiant des parties importantes de l'avis de demande qui avait été déposé dans le dossier T-1400-99, de façon à réduire de beaucoup l'étendue du contrôle judiciaire. La Région a interjeté appel contre cette ordonnance et, subsidiairement, elle a demandé l'autorisation de modifier la demande ainsi qu'une prorogation de délai. En même temps que cet appel, les défendeurs ont demandé la radiation de parties importantes de l'avis de demande qui avait été déposé dans le dossier T-1993-99.


[50]       Ces requêtes ont été entendues ensemble. L'appel de l'ordonnance du protonotaire a été accueilli et la requête visant à la radiation de parties importantes de la demande présentée dans le dossier T-1993-99 a été rejetée. Les ordonnances en résultant réservaient expressément aux défendeurs le droit de plaider, à l'audition des demandes de contrôle judiciaire, que la demande de contrôle judiciaire se rapportant aux décisions des 4 et 6 mai 1999 avait été présentée en dehors du délai imparti et qu'elle devait être rejetée, et de plaider par ailleurs que le retard faisait obstacle à la demande visant à l'obtention de brefs de prérogative.

[51]       La requête que la Région avait présentée en vue d'obtenir une prorogation de délai et l'autorisation de modifier l'avis de demande qui avait été déposé dans le dossier T-1400-99 de façon qu'il y soit précisé que la demande comprenait un examen de la demande que le ministre des Pêches avait faite le 4 mai 1999 et de la décision que le ministre de l'Environnement avait prise le 6 mai 1999, a été ajournée pour une période indéfinie.


[52]       Étant donné que l'appel de l'ordonnance radiant des parties de l'avis de demande avait été accueilli, la Cour n'avait pas à statuer sur la requête relative aux modifications. Toutefois, à la demande des parties, en ma qualité de juge ayant examiné les requêtes interlocutoires, j'ai indiqué quelle aurait été ma décision si l'appel n'avait pas été accueilli. J'ai fait savoir qu'en appliquant les principes énoncés dans les arrêts Grewal c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1985] 2 C.F. 263 (C.A.F.) et Independent Contractors and Business Association c. Canada (Ministre du Travail) (1998), 225 N.R. 19 (C.A.F.), j'aurais accordé l'autorisation d'effectuer des modifications, la prorogation de délai nécessaire et l'autorisation, conformément à la règle 302 des Règles de la Cour fédérale (1998), à l'égard de la demande que le ministre des Pêches avait faite le 4 mai 1999 et de la décision que le ministre de l'Environnement avait prise le 6 mai 1999. Toutefois, j'ai dit que je n'aurais pas accordé l'autorisation de plaider qu'il n'était pas nécessaire d'obtenir une autorisation en vertu du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches. Par conséquent, étant donné que le paragraphe 35(2) est inclus dans la liste de dispositions législatives qui déclenchent l'application de la LCEE, la Région serait en droit tenue de reconnaître que la présentation au MPO d'une demande d'autorisation en vertu du paragraphe 35(2) aurait pour effet de déclencher l'application de la LCEE.

[53]       Aucun appel n'a été interjeté contre ces ordonnances.

[54]       La Région et les défendeurs ont poursuivi ces affaires sur une base préliminaire à l'audience qui a été tenue en vue de déterminer le bien-fondé des demandes.

[55]       Les défendeurs ont soutenu que, sous réserve de leurs droits d'appel, ils voulaient bien poursuivre la demande conformément au dispositif figurant dans mes motifs antérieurs, sous réserve de l'obtention de précisions au sujet de la question de savoir si la Région pouvait plaider que la LCEE ne s'appliquait pas au projet.


[56]       En réponse, la Région a fait savoir que, sous réserve de ses droits d'appel, elle ne cherchait pas à faire examiner de nouveau la décision antérieure. Elle voulait obtenir l'autorisation, au besoin, de façon que la Cour puisse déterminer le bien-fondé des mesures ministérielles qui avaient été prises les 4 et 6 mai, mais elle ne demandait pas de prorogation de délai à l'égard d'une [TRADUCTION] « décision » prise avant le 4 mai 1999. La Région a fait savoir qu'elle ne contestait pas l'indication antérieure selon laquelle la Cour n'aurait pas permis l'examen de la question de savoir s'il fallait obtenir une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches. Toutefois, la Région a affirmé avoir le droit de se fonder sur des arguments se rapportant à la compétence, à savoir que la LCEE ne pouvait pas s'appliquer en dehors des limites qui y étaient prévues, et ce, même si elle avait initialement supposé que cette loi s'appliquait.

[57]       Après avoir entendu les plaidoiries, j'ai reporté ma décision sur la question préliminaire, de façon à permettre aux parties de débattre pleinement devant la Cour toutes les questions litigieuses.

[58]       Les questions que la Région voulait soulever dans ces demandes sont les suivantes :

i)           Le renvoi du projet à la commission et le mandat de la commission sont-ils valides, sur le plan constitutionnel ou légal?

ii)          Les Lignes directrices sont-elles valides sur le plan légal?

iii)          Le ministre avait-il la compétence voulue pour faire procéder à un examen par une commission, pour nommer les membres de la commission et pour fixer le mandat de la commission?

iv)         La LCEE s'applique-t-elle au projet?


v)          La commission est-elle habile à exercer ses fonctions compte tenu de la nomination de M. Mulder?

[59]       Comme il en a ci-dessus été fait mention, le projet a été renvoyé à une commission le 6 mai 1999, les membres de la commission ont été nommés, le mandat de la commission a été fixé le 5 juillet 1999 et les Lignes directrices ont été rendues publiques le 15 octobre 1999.

[60]       Le premier avis de demande a été délivré le 4 août 1999, soit dans les trente jours qui ont suivi le 5 juillet 1999. Il a expressément été dit qu'il s'agissait d'une demande de contrôle judiciaire de la décision que le ministre de l'Environnement avait prise le 5 juillet de nommer les membres de la commission en vue d'effectuer un examen public complet de la nécessité pour la Région de construire la route express, des solutions de rechange et des effets environnementaux y afférents ainsi que de la décision par laquelle le mandat de la commission était fixé. Le mandat de la commission et la nomination des membres de la commission étaient contestés en temps opportun.

[61]       Le deuxième avis de demande a été délivré le 15 novembre 1999; il visait entre autres choses à contester la nomination de M. Mulder, l'omission continue de destituer M. Mulder et la délivrance des Lignes directrices. Il n'a pas été allégué qu'il s'agissait d'autre chose qu'une contestation des Lignes directrices faite en temps opportun.


[62]       Ce qui est fondamentalement contesté, à titre préliminaire, c'est la question de savoir si les dispositions du paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la Cour fédérale empêchent de contester les décisions des 4 et 6 mai 1999 et s'il est possible, compte tenu du retard, de soulever les questions invoquées par la Région au sujet de l'applicabilité de la LCEE.

[63]       En soutenant que la LCEE ne s'applique pas au projet, la Région cherche à plaider que le projet est exclu en vertu du paragraphe 74(4) de la Loi, qu'il ne s'agit pas d'un « projet » auquel la LCEE s'applique et qu'il n'y a rien qui puisse déclencher l'application de la Loi.

[64]       Les défendeurs affirment qu'il faut préciser les remarques que j'ai faites au paragraphe 52 des motifs publiés à (2000) 187 F.T.R. 287 (C.F. 1re inst.) en accueillant l'appel que la Région avait interjeté contre l'ordonnance radiant certaines parties de l'avis de demande dans le dossier T-1400-93, à savoir que si, au besoin, j'avais autorisé certaines modifications, je n'aurais pas accordé « l'autorisation d'affirmer qu'il n'est pas nécessaire d'accorder une autorisation à l'égard du projet en vertu du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches, ou d'affirmer que la nécessité d'obtenir cette autorisation ne déclenche pas l'application de la LCEE » [non souligné dans l'original].


[65]       Ni un consentement ni un retard ne peuvent conférer le pouvoir d'agir en dehors des limites imposées par la loi (voir, par exemple, Merck Frosst Canada Inc. c. Apotex Inc., [1997] 2 C.F. 561 (C.A.F.); autorisation de pourvoi refusée [1997] C.S.C. no 113). Par conséquent, les ministres défendeurs ne pouvaient pas faire procéder à un examen du projet par la commission ou appliquer la LCEE en dehors des limites qui y étaient prévues. À mon avis, rien n'empêche d'invoquer les arguments portant sur les limites imposées par la LCEE. Si la LCEE ne s'applique pas en droit au projet, tout renvoi effectué en vertu de cette loi est nul parce que le ministre qui a renvoyé le projet à la commission n'aurait pas compétence à cet égard. Le fait que la Région a apparemment supposé que la LCEE s'appliquait et qu'elle n'a pas contesté les décisions des 4 et 6 mai ne pourrait pas conférer la compétence voulue au ministre en cause.

[66]       Le fait que les exigences légales doivent être satisfaites et que l'omission de contester une mesure antérieure ne change rien à ces exigences a été reconnu par la Cour d'appel dans l'arrêt Alberta Wilderness Association c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), [1999] 1 C.F. 483 (C.A.F.).

[67]       Je conclus en outre que, comme l'a soutenu la Région, la réparation primordiale qui est sollicitée vise à empêcher la commission d'effectuer l'examen. Les demandes se rapportent à des actes accomplis et envisagés visant à donner effet à la décision antérieure de faire procéder à un examen par la commission. Conformément au principe que la Cour d'appel a énoncé dans l'arrêt Krause c. Canada, [1999] 2 C.F. 476 (C.A.F.), les mesures de mise à exécution sont susceptibles de révision.

[68]       Compte tenu de cette conclusion, la requête relative aux modifications est redondante.


[69]       La Région peut à bon droit soutenir que la LCEE ne s'applique pas soit à cause de l'effet du paragraphe 74(4) de la Loi soit parce qu'il ne s'agit pas ici d'un « projet » auquel la Loi s'applique. Ces arguments peuvent être invoqués parce que la LCEE ne peut pas s'appliquer en dehors des limites qui y sont prévues.

[70]       Cette conclusion ne permet à la Région de contester maintenant, en se fondant sur d'autres motifs que des motifs liés à la compétence, la nécessité d'obtenir une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches. Il est simplement trop tard pour soulever cette question et, à mon avis, rien ne permet d'accorder une prorogation de délai aux fins de l'examen de l'affaire puisque la Région n'a jamais eu l'intention de contester la nécessité d'obtenir une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches.

[71]       Je tire cette conclusion parce que, au mois de juillet 1998, la Région a transmis au MPO une demande en vue d'obtenir une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches. Dans la lettre d'envoi, la Région déclarait ce qui suit :

[TRADUCTION]

Cette demande qui est faite au tout début facilitera le processus d'autorisation en permettant au MPO de procéder à un examen préliminaire en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

[72]       L'article 35 de la Loi sur les pêches est en vigueur depuis bien des années. Indépendamment de la question de savoir si la LCEE s'applique au projet, j'ai conclu que la Région doit se conformer au processus prévu par la Loi sur les pêches en l'absence d'un motif lié à la compétence. Je ferai ci-dessous des remarques au sujet de l'argument de la Région selon lequel aucune autorisation n'est nécessaire en vertu de la Loi sur les pêches.


(ii) L'admissibilité de certains éléments de la preuve par affidavit déposés par la demanderesse

[73]       Au début de l'audience, les défendeurs ont demandé une ordonnance :

a)          radiant les affidavits de Tony Battaglia, Nicolas Catalano, Stephen Janes, Ronald Marini, Sharon Fortis, Cameron Portt, Hart Solomon, Ian Williams et Tony Yarranton;

b)          subsidiairement, radiant certaines parties de ces affidavits, tel qu'il est énoncé dans l'annexe jointe à l'avis de requête; et

c)          radiant certaines parties d'autres affidavits, telles qu'elles sont énumérées dans l'annexe jointe à l'avis de requête.

[74]       Par suite des discussions qui ont eu lieu avec l'agent de gestion de l'instance, les parties ont convenu que la présente requête ne serait pas débattue oralement en tant que requête préliminaire, mais que les avocats plaideraient plutôt, de façon que les éléments contestés puissent être examinés dans le contexte factuel pertinent, la question de l'admissibilité de la preuve contestée dans le cadre des observations qu'ils présenteront au sujet des questions de fond. À cause de contraintes de temps, les défendeurs n'ont pas présenté, à l'audience, de plaidoiries au sujet de leur requête, mais ils se sont plutôt fondés sur le dossier de la requête. De plus, le dernier jour de l'audience, ils ont fait savoir qu'ils limitaient la portée de leurs objections comme le disait une lettre qui devait être livrée une fois l'audience close. La lettre qui a été livrée disait que même si les défendeurs demandaient encore la réparation énoncée à l'alinéa a) ci-dessus, le nombre de questions, en b) et c), avait été réduit.


[75]       La preuve contestée est volumineuse. L'objection est fondée sur ce que les affidavits contiennent des arguments ou des avis et que des faits et des pièces non pertinents ne peuvent pas être présentés en preuve devant la Cour.

[76]       Je ne crois pas qu'il soit ici nécessaire d'examiner l'une à la suite de l'autre les objections des défendeurs. J'ai plutôt noté la preuve que les défendeurs contestaient; je l'examinerai avec leurs objections, dans la mesure où j'estime qu'elle peut de quelque façon se rapporter aux questions au sujet desquelles je tire des conclusions. Le cas échéant, ma décision en ce qui concerne l'admissibilité de la preuve, et l'analyse connexe seront énoncées dans les présents motifs.

(iii) L'utilisation d'éléments de preuve se rapportant à des renseignements confidentiels du Conseil privé de la Reine


[77]       Au début de l'audience, un avocat a comparu au nom du Conseil privé pour faire savoir que cinq documents qui, avait-il été allégué, constituaient des renseignements confidentiels du Cabinet se trouvaient dans le dossier de la demanderesse. L'avocat n'a pas demandé une ordonnance retranchant du dossier les documents en question, mais il a plutôt demandé une ordonnance empêchant les avocats et la Cour de mentionner les documents en question. Une ordonnance temporaire a été rendue pour la période nécessaire en vue de permettre à l'avocat de la Région de répondre à cette demande. Après avoir entendu des plaidoiries additionnelles, en l'absence d'une requête en radiation et d'une preuve relative à la divulgation faite par inadvertance, l'ordonnance temporaire a été annulée pour les motifs qui ont été prononcés oralement, et j'ai refusé de rendre une ordonnance telle que celle qui était demandée. Toutefois, j'ai demandé aux avocats de tenir compte des demandes. Par la suite, les avocats n'ont aucunement fait mention des documents versés au dossier à l'égard desquels un privilège était revendiqué en vertu de l'article 39 de la Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. (1985), ch. C-5 et, dans les présents motifs, il n'est pas fait mention de ces documents.

4. LA NORME DE CONTRÔLE

[78]       Selon la jurisprudence de la présente Cour, l'interprétation de la LCEE est une question de droit, de sorte que la norme de contrôle qui s'applique aux questions relatives à la compétence ou à l'interprétation qu'il convient de donner à la Loi est celle de la décision correcte (Friends of the West Country Association c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), [2000] 2 C.F. 263 (C.A.F.), au paragraphe 10, autorisation de pourvoi refusée [1999] C.S.C. no 585).

[79]       De même, la Cour d'appel fédérale a récemment statué qu'en ce qui concerne les décisions discrétionnaires portant sur le fond qui sont prises conformément à un pouvoir conféré en vertu des articles 15 et 16 de la LCEE, la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable (Bow Valley Naturalists Society c. Canada (Ministre du Patrimoine canadien), [2001] A.C.F. no 18, A-642-99 (10 janvier 2001) (C.A.F.), au paragraphe 55). Cela découle en particulier de l'absence de clause privative et du degré minimal d'expertise nécessaire en ce qui concerne l'application de la Loi.


[80]       Les parties ont présenté des observations fort divergentes au sujet de la norme de contrôle qui s'applique à la décision que le ministre a prise lorsqu'il s'est agi de nommer des membres précis à la commission. Les défendeurs ont soutenu que compte tenu du statut politique et du niveau de responsabilité du décideur, de la nature discrétionnaire de la décision et du fait que la personne nommée fait face à une conception large de l'intérêt public, la norme de contrôle se rapproche du bout du spectre où se situent les décisions à l'égard desquelles il faut faire preuve de retenue. Comme on peut s'y attendre, les demanderesses ont soutenu dans toutes les instances que la décision de nommer des membres individuels ne justifie pas que l'on fasse preuve de retenue puisque la LCEE ne confère aucun pouvoir discrétionnaire au ministre en ce qui concerne l'exigence selon laquelle les membres de la commission doivent être impartiaux et ne faire face à aucun conflit d'intérêts.

[81]       S'il avait fallu que j'examine la question, j'aurais conclu que la norme de contrôle est celle de la décision correcte. Cette norme indique que la question de l'admissibilité de la personne désignée n'est pas une question de principe et d'absence de clause privative. Cela tient également compte du fait que les décisions discrétionnaires doivent être prises compte tenu de la compétence conférée par la loi. Comme la Cour suprême du Canada l'a fait remarquer dans l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, au paragraphe 53 :


[...] lorsque le législateur confère par voie législative des choix étendus aux organismes administratifs, son intention est d'indiquer que les tribunaux ne devraient pas intervenir à la légère dans de telles décisions, et devraient accorder une marge considérable de respect aux décideurs lorsqu'ils révisent la façon dont les décideurs ont exercé leur discrétion. Toutefois, l'exercice du pouvoir discrétionnaire doit quand même rester dans les limites d'une interprétation raisonnable de la marge de manoeuvre envisagée par le législateur, conformément aux principes de la primauté du droit (Roncarelli c. Duplessis [citation omise]), suivant les principes généraux de droit administratif régissant l'exercice du pouvoir discrétionnaire, et de façon conciliable avec la Charte canadienne des droits et libertés (Slaight Communications Inc. c. Davidson, [citation omise]).

5. LA LCEE S'APPLIQUE-T-ELLE À LA RÉALISATION DU RHCE?

[82]       Comme il en a ci-dessus été fait mention, la Région soutient que la LCEE ne s'applique pas à la réalisation du RHCE compte tenu du paragraphe 74(4) de la Loi, du fait qu'il ne s'agit pas d'un « projet » au sens de la LCEE et du fait que rien ne permettait de déclencher l'application de cette loi. J'examinerai maintenant ces arguments dans l'ordre où ils ont été présentés.

(i) L'application de la LCEE est-elle exclue compte tenu du paragraphe 74(4) de la Loi?

[83]       La LCEE a reçu la sanction royale le 23 juin 1992 et est entrée en vigueur aux dates fixées par décret du gouverneur en conseil. Les articles 61 à 70, 73, 75 et 78 à 80 sont entrés en vigueur le 22 décembre 1994 alors que les autres dispositions sont entrées en vigueur le 19 janvier 1995. La LCEE remplaçait le Décret sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement, DORS/84-467 (le « Décret » ).

[84]       Les dispositions transitoires sont énoncées à l'article 74 de la LCEE; elles prévoient ce qui suit :

·                        Paragraphe (1) : le Décret continuerait à s'appliquer à toute proposition qui, avant l'entrée en vigueur de l'article 74, avait été soumise au ministre pour examen public et pour laquelle une commission d'évaluation avait été constituée;

·                        Paragraphe (2) : le Décret continuerait à s'appliquer à toute proposition pour laquelle un examen préalable ou une évaluation initiale avait été commencé avant l'entrée en vigueur de l'article 74, à moins que la proposition n'ait été renvoyée à une commission, auquel cas la LCEE s'appliquait;


·                        Paragraphe (3) : lorsqu'un un promoteur avait proposé la réalisation de tout ou partie d'un projet à l'égard duquel un examen préalable ou une évaluation initiale avait été effectué sous le régime du Décret, mais que le projet n'avait pas été réalisé ou qu'une réalisation différente avait été proposée, ou que les modalités de réalisation du projet étaient nouvelles, ou lorsqu'une demande de renouvellement d'une licence, d'un permis, d'une autorisation ou d'une autre mesure était présentée, l'autorité responsable pouvait utiliser l'examen préalable antérieur ou en permettre l'utilisation.

[85]       Le paragraphe (4) est la disposition qui s'applique peut-être aux faits ici en cause; il prévoit ce qui suit :


74(4) Dans les cas où la construction ou l'exploitation d'un ouvrage ou la réalisation d'une activité concrète a été entamée avant le 22 juin 1984, la présente loi ne s'applique à la délivrance ou au renouvellement d'une licence, d'un permis, d'une autorisation ou à la prise d'une autre mesure en vertu d'une disposition désignée par règlement à l'égard du projet que si telle mesure entraîne la modification, la désaffectation ou la fermeture d'un ouvrage en tout ou en partie.


74(4) Where the construction or operation of a physical work or the carrying out of a physical activity was initiated before June 22, 1984, this Act shall not apply in respect of the issuance or renewal of a licence, permit, approval or other action under a prescribed provision in respect of the project unless the issuance or renewal entails a modification, decommissioning, abandonment or other alteration to the project, in whole or in part.


Je retiens l'argument des défendeurs selon lequel les mots « la construction ou l'exploitation d'un ouvrage » et les mots « la réalisation d'une activité concrète » , tels qu'ils sont employés dans cette disposition, correspondent à la définition du mot « projet » figurant au paragraphe 2(1) de la LCEE :


« _projet_ » Réalisation -- y compris l'exploitation, la modification, la désaffectation ou la fermeture -- d'un ouvrage ou proposition d'exercice d'une activité concrète, non liée à un ouvrage, désignée par règlement ou faisant partie d'une catégorie d'activités concrètes désignée par règlement aux termes de l'alinéa 59b). [Non souligné dans l'original.]


"project" means

(a) in relation to a physical work, any proposed construction, operation, modification, decommissioning, abandonment or other undertaking in relation to that physical work, or

(b) any proposedphysical activity not relating to a physical work that is prescribed or is within a class of physical activities that is prescribed pursuant to regulations made under paragraph 59(b). [underlining added]



[86]       Or, le RHCE est un « ouvrage » . Par conséquent, la seconde partie de la définition du mot « projet » ne s'applique pas. À mon avis, les mots « ou la réalisation d'une activité concrète » figurant au paragraphe 74(4) de la Loi ne s'appliquent pas eux non plus à un « ouvrage » .

[87]       Par conséquent, il faut se demander si, en ce qui concerne le RHCE :

a)          la construction ou l'exploitation d'un ouvrage a été entamée avant le 22 juin 1984;

b)          la délivrance d'un permis, d'une autorisation ou la prise d'une autre mesure entraîne la modification du projet en tout ou en partie.

a) La construction du RHCE a-t-elle été entamée avant le 22 juin 1984?

[88]       Ni le mot « construction » ni le mot « entamée » ne sont définis dans la LCEE. En se fondant sur les définitions lexicographiques, les défendeurs soutiennent que la construction d'un ouvrage s'entend de son édification ou son érection, et que par « entamée » , on entend simplement le début ou le commencement des travaux. Les défendeurs affirment qu'étant donné que le projet a commencé au mois de juin 1990 (lors de la cérémonie officielle d'inauguration des travaux), le paragraphe 74(4) de la LCEE ne s'applique pas dans ce cas-ci.


[89]       L'Association souscrit à cet avis; elle soutient que le libellé du paragraphe 74(4) de la LCEE est clair et précis. Il n'est pas fait mention des travaux préparatoires ou de la planification, de sorte que par « construction » , on entend que [TRADUCTION] « la pelle est enfoncée dans le sol » .

[90]       L'Association dit également que cette interprétation est étayée par l'article 4 de la Loi et par la définition du mot « projet » . En ce qui concerne l'article 4 de la Loi, l'Association soutient que la LCEE vise notamment à « permettre [...] de prendre des mesures à l'égard de tout projet susceptible d'avoir des effets environnementaux en se fondant sur un jugement éclairé quant à ces effets » et à « veiller à ce que le public ait la possibilité de participer au processus d'évaluation environnementale » . Cet objet est clairement compromis si un ouvrage est déjà construit, mais l'Association dit que l'application de la LCEE aux projets qui en sont encore au stade de la planification, et notamment au stade de l'autorisation et de l'acquisition de terrains, ne compromettrait pas l'objet de cette loi. En ce qui concerne le mot « projet » , l'Association fait remarquer que la définition figurant dans la version anglaise de la Loi dit : « any proposed construction » ( « réalisation » dans la version française) alors que le paragraphe 74(4) s'applique aux cas « où la construction ou l'exploitation d'un ouvrage » ( « where the construction or operation of a physical work » dans la version anglaise) a été entamée avant le 22 juin 1984. Elle affirme que l'absence du mot « proposed » dans la version anglaise du paragraphe 74(4) indique que la disposition doit se rapporter à la construction elle-même.


[91]       De son côté, la Région soutient que dans le cas d'un programme d'infrastructure tel que la route express, la « réalisation » ne peut pas se résumer au fait [TRADUCTION] d' « enfoncer la pelle dans le sol » . La Région signale des choses comme la nécessité d'acheter des terres, de se procurer des fonds, d'obtenir des autorisations, d'exproprier des terrains et de démolir des immeubles. Elle affirme que la construction d'un ouvrage est donc entamée au moyen d'une série de mesures qui sont prises l'une après l'autre. Elle affirme que ce sens est conforme aux définitions lexicographiques du mot anglais « initiate » (entamer), ce mot étant défini dans le Webster's Third New International Dictionary comme voulant notamment dire : [TRADUCTION] « commencer ou mettre en branle; mettre la main à (une chose à faire); accomplir ou faciliter les premières actions ou les premières étapes » et dans le Ninth New Collegiate Dictionary comme voulant notamment dire : [TRADUCTION] « causer ou faciliter le commencement : mettre en branle (entamer un programme de réforme) (enzymes qui ont pour effet d'entamer la fermentation). »

[92]       Afin de déterminer l'interprétation qu'il convient de donner au paragraphe 74(4) de la LCEE, je commence par la prémisse selon laquelle [TRADUCTION] « [...] il faut interpréter les termes d'une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s'harmonise avec l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du législateur » (Driedger, Construction of Statutes (2e éd. 1983)), que la Cour suprême du Canada a citée dans l'arrêt Québec (Communauté urbaine) c. Corp. Notre-Dame de Bon-secours, [1994] 3 R.C.S. 3, à la page 17.


[93]       Au début de la LCEE se trouve un préambule, dont le deuxième attendu prévoit ce qui suit :


Attendu :

[...]

que l'évaluation environnementale constitue un outil efficace pour la prise en compte des facteurs environnementaux dans les processus de planification et de décision, de façon à promouvoir un développement durable.


WHEREAS environmental assessment provides an effective means of integrating environmental factors into planning and decision-making processes in a manner that promotes sustainable development.


[94]       Le paragraphe 11(1) de la LCEE traite du moment où est effectuée une évaluation environnementale; il prévoit ce qui suit :


11. (1) Dans le cas où l'évaluation environnementale d'un projet est obligatoire, l'autorité fédérale visée à l'article 5 veille à ce que l'évaluation environnementale soit effectuée le plus tôt possible au stade de la planification du projet, avant la prise d'une décision irrévocable, et est appelée, dans la présente loi, l'autorité responsable de ce projet.

[Non souligné dans l'original]


11. (1) Where an environmental assessment of a project is required, the federal authority referred to in section 5 in relation to the project shall ensure that the environmental assessment is conducted as early as is practicable in the planning stages of the project and before irrevocable decisions are made, and shall be referred to in this Act as the responsible authority in relation to the project.

[underlining added]


[95]       L'article 16 de la LCEE traite des éléments à prendre en compte dans le cadre d'une évaluation. Les paragraphes (1) et (2) sont ainsi libellés :


16. (1) L'examen préalable, l'étude approfondie, la médiation ou l'examen par une commission d'un projet portent notamment sur les éléments suivants_:

a) les effets environnementaux du projet, y compris ceux causés par les accidents ou défaillances pouvant en résulter, et les effets cumulatifs que sa réalisation, combinée à l'existence d'autres ouvrages ou à la réalisation d'autres projets ou activités, est susceptible de causer à l'environnement;

b) l'importance des effets visés à l'alinéa a);

c) les observations du public à cet égard, reçues conformément à la présente loi et aux règlements;

d) les mesures d'atténuation réalisables, sur les plans technique et économique, des effets environnementaux importants du projet;

e) tout autre élément utile à l'examen préalable, à l'étude approfondie, à la médiation ou à l'examen par une commission, notamment la nécessité du projet et ses solutions de rechange, -- dont l'autorité responsable ou, sauf dans le cas d'un examen préalable, le ministre, après consultation de celle-ci, peut exiger la prise en compte.

(2) L'étude approfondie d'un projet et l'évaluation environnementale qui fait l'objet d'une médiation ou d'un examen par une commission portent également sur les éléments suivants_:

a) les raisons d'être du projet;

b) les solutions de rechange réalisables sur les plans technique et économique, et leurs effets environnementaux;

c) la nécessité d'un programme de suivi du projet, ainsi que ses modalités;

d) la capacité des ressources renouvelables, risquant d'être touchées de façon importante par le projet, de répondre aux besoins du présent et à ceux des générations futures.


16. (1) Every screening or comprehensive study of a project and every mediation or assessment by a review panel shall include a consideration of the following factors:

(a) the environmental effects of the project, including the environmental effects of malfunctions or accidents that may occur in connection with the project and any cumulative environmental effects that are likely to result from the project in combination with other projects or activities that have been or will be carried out;

(b) the significance of the effects referred to in paragraph (a);

(c) comments from the public that are received in accordance with this Act and the regulations;

(d) measures that are technically and economically feasible and that would mitigate any significant adverse environmental effects of the project; and

(e) any other matter relevant to the screening, comprehensive study, mediation or assessment by a review panel, such as the need for the project and alternatives to the project, that the responsible authority or, except in the case of a screening, the Minister after consulting with the responsible authority, may require to be considered.

(2) In addition to the factors set out in subsection (1), every comprehensive study of a project and every mediation or assessment by a review panel shall include a consideration of the following factors:

(a) the purpose of the project;

(b) alternative means of carrying out the project that are technically and economically feasible and the environmental effects of any such alternative means;

(c) the need for, and the requirements of, any follow-up program in respect of the project; and

(d) the capacity of renewable resources that are likely to be significantly affected by the project to meet the needs of the present and those of the future.



[96]       Compte tenu de ces dispositions, j'estime que la législation vise principalement à exiger que le promoteur d'un projet envisage, et soit prêt à justifier, des choses telles que la nécessité du projet, ses solutions de rechange et les autres moyens permettant de mettre en oeuvre le projet, et ce, au stade de la planification du projet, avant la prise d'une décision irrévocable.

[97]       À mon avis, une interprétation du paragraphe 74(4) de la LCEE selon laquelle la construction est entamée au moment où la pelle est enfoncée dans le sol n'est pas conforme à l'économie et à l'objet de la Loi, ou à l'intention du législateur, tels qu'ils ressortent des dispositions susmentionnées.

[98]       À mon avis, il ne convient pas de retenir une interprétation du paragraphe 74(4) de la Loi qui nous amène à conclure que, quelles que soient les autorisations qui ont été accordées ou les mesures qui ont été prises, un projet peut être examiné depuis les toutes premières étapes dans la mesure où les travaux de construction eux-mêmes n'ont pas commencé. L'argument des défendeurs selon lequel les raisons d'être du projet, les autres moyens permettant de le mettre en oeuvre (éléments qu'une commission est tenue de prendre en compte) ou la nécessité du projet et ses solutions de rechange (éléments que le ministre peut demander à une commission de prendre en compte) peuvent faire l'objet d'un réexamen dans la mesure où, le 22 juin 1984, la pelle n'avait pas encore été enfoncée dans le sol n'est pas conforme à la logique ou à l'exigence énoncée au paragraphe 11(1) de la Loi, à savoir que les autorités fédérales concernées doivent veiller à ce qu'une évaluation environnementale soit effectuée « le plus tôt possible au stade de la planification du projet, avant la prise d'une décision irrévocable » .


[99]       Dans la décision Bande indienne des Tsawwassen c. Canada (Ministre des Finances) (1998), 27 C.E.L.R. (N.S.) 177 (C.F. 1re inst.), Monsieur le juge Richard (tel était alors son titre) est arrivé à une conclusion similaire, en statuant que le terminal à conteneurs Deltaport n'était pas un « projet » au sens de la LCEE et que la Loi ne s'appliquait pas parce que, comme le juge l'a dit au paragraphe 61 de ses motifs :

La LCEE précise bien que, là où on est tenu d'y procéder, les évaluations environnementales doivent être achevées « avant la prise d'une décision irrévocable » et « le plus tôt possible au stade de la planification » d'un « projet » [voir note 6 ci-dessus]. Il ressort clairement de ces dispositions que la LCEE n'est censée s'appliquer qu'aux projets qui n'en étaient, à compter du 19 janvier 1995, qu'à l'étape préliminaire, et à l'égard desquels aucune décision irrévocable n'avait été prise.

__________________________________________________________________

Note 6 : Voir les dispositions 8(1), 9, 10(1), 11(1), 54(1) et 54(2).

__________________________________________________________________

Cette décision a récemment été confirmée en appel : voir (2001) C.A.F. 58. Je n'ai pas jugé nécessaire de demander des observations supplémentaires au sujet de l'effet du jugement rendu par la Cour d'appel.

[100]     En outre, l'interprétation d'une loi par un organisme administratif chargé de son application peut servir d'outil d'interprétation de cette loi : voir Société canadienne des postes c. Canada (Ministre des Travaux publics), [1993] 3 C.F. 320 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 43; confirmé [1995] 2 C.F. 110 (C.A.F.).


[101]     Au mois d'octobre 1998, l'Agence, dont le logo est le suivant : « L'évaluation environnementale d'abord [...] la décision ensuite » , a publié un énoncé de politique opérationnelle (voir pièce C jointe à l'affidavit de Paul Bernier, vice-président, Prestation des programmes) dans le but exprès de « présenter une clarification et guider les autorités responsables (AR) qui effectuent des évaluations environnementales (EE) en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale (la Loi) » . Selon l'énoncé de politique, l'évaluation environnementale prévue par la LCEE est « un outil de planification pour la prise de décision plutôt [qu'un] outil strictement d'évaluation des effets du projet » . L'énoncé dit ensuite ce qui suit :

Cette approche permet, dès les premières étapes de l'élaboration du projet et avant la prise de décisions irrévocables, de créer le lien entre la « nécessité du projet » , les « raisons d'être » du projet, les « solutions de rechange » au projet et les « autres moyens » de réaliser le projet. Ainsi, l'AR et (ou) le promoteur seront mieux placés pour définir les solutions qui pourraient permettre de résoudre un problème et d'établir la viabilité des solutions de rechange. Il est également important de constater que l'analyse de ces éléments pourrait peut-être aider à établir les circonstances en vertu desquelles certains effets peuvent être justifiés ou non, si une telle détermination devenait nécessaire.

[102]     Cet énoncé de la politique montre la position de l'Agence, à savoir que l'évaluation environnementale vise à ce qu'il soit obligatoirement tenu compte de la nécessité d'un projet, de ses solutions de rechange et des autres moyens permettant de mettre en oeuvre le projet, et ce, aux toutes premières étapes de la planification. À mon avis, cela est conforme à l'interprétation selon laquelle le mot « construction » , tel qu'il est employé au paragraphe 74(4) de la LCEE, comprend une série de mesures au moyen desquelles un projet est réalisé d'une façon irrévocable plutôt que de se rapporter simplement au moment où la « pelle est enfoncée dans le sol » .


[103]     Je conclus donc que le mot « construction » tel qu'il est employé au paragraphe 74(4) de la LCEE comprend toute une série d'événements tels que le fait d'acquérir et de défricher un terrain, d'imposer des restrictions à la construction et de se procurer les fonds et les autorisations nécessaires, ces événements visant tous à permettre d'entreprendre les travaux de construction eux-mêmes et constituant des conditions préalables. À mon avis, pour déterminer si une étape fait partie du moment où la construction est entamée au sens du paragraphe 74(4) de la LCEE, il faut absolument se demander si la mesure en question est à la fois une condition nécessaire pour que la « pelle soit enfoncée dans le sol » et si elle vise un projet particulier de sorte qu'elle manifeste une décision irrévocable de procéder à la réalisation du projet.

[104]     La façon dont le MPO interprète l'application possible de la LCEE au RHCE est révélatrice comme l'indique un projet de lettre préparé au mois de juin 1998 par Edwin R. DeBruyn au nom du ministre des Pêches. Pendant la période pertinente, M. DeBruyn travaillait au MPO à titre de conseiller principal, Habitat, Programme de gestion des pêches, pour le secteur ontarien de la Région du Centre et de l'Arctique. Dans la présente instance, les défendeurs l'ont présenté à titre de représentant du MPO. Le projet de lettre disait notamment ce qui suit :

[TRADUCTION]

Le ministère des Pêches et des Océans a discuté avec la Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth et d'autres groupes d'intérêt des exigences prévues par la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, le Règlement sur les dispositions législatives et réglementaires désignées et la Loi sur les pêches.

Le paragraphe 11(1) de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale exige qu'un projet soit examiné le plus tôt possible au stade de la planification par une autorité responsable au sens de la LCEE. Diverses propositions en vue de la construction et de l'achèvement du Red Hill Expressway ont été étudiées depuis la fin des années 1950. Or, la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale a été promulguée au mois de janvier 1995.


Le MPO délivre un permis ou accorde une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches à la suite d'une demande présentée en vertu de la Loi sur les pêches. En l'absence d'une demande d'autorisation présentée en vertu du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches, rien ne permet au MPO de déclencher l'application de la LCEE et de devenir une autorité responsable au sens de la LCEE pour un projet qui est à l'étude depuis plus de 30 ans. En outre, la décision d'accorder une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches ([...] délivre un permis ou donne une autorisation [...] en vertu de la LCEE) dépend de ce que le demandeur garantit qu'il n'y a pas de perte nette d'habitat du poisson conformément au principe directeur sous-tendant la Politique de gestion de l'habitat du poisson. Une évaluation environnementale effectuée en vertu de la LCEE (qui a été promulguée au mois de janvier 1995) à l'égard d'un projet dont la réalisation est envisagée depuis plus de 30 ans ne peut malheureusement jamais être considérée comme étant effectuée « le plus tôt possible au stade de la planification » .

[105]     Tel était à mon avis le point de vue du MPO avant que la présente controverse ait pris naissance, à savoir qu'à toutes fins utiles, il était trop tard pour procéder à une véritable évaluation environnementale d'un projet [TRADUCTION] « dont la réalisation [était] envisagée depuis plus de 30 ans » ; le MPO reconnaît ainsi en outre que, selon la LCEE, il faut agir le plus tôt possible au stade de la planification.

[106]     J'ai noté en passant que la lettre prévoit de fait l'application de la LCEE dans le cas où une demande a été soumise aux fins de l'obtention d'une autorisation en vertu du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches. Toutefois, sur le plan de l'interprétation de la loi, cela pourrait uniquement être le cas si, compte tenu de la preuve, la construction avait été entamée après le 22 juin 1984. Telle est la question qu'il faut maintenant aborder.

[107]     Avant d'examiner cette question, il faut faire d'autres remarques au sujet de certains arguments qui ont été invoqués pour le compte des défendeurs et de l'Association.


[108]     Les défendeurs soutiennent que le critère relatif à l'applicabilité de la LCEE doit être utilisé lorsqu'une autorité fédérale est tenue d'exercer l'une de ses attributions à l'égard d'un projet. Ils se fondent sur la décision que la Cour d'appel fédérale a rendue dans l'affaire La Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada c. Parc national de Banff (Directeur) et autres (1996), 202 N.R. 132 (C.A.F.), autorisation de pourvoi refusée [1996] C.S.C. no 498, où la question de l'applicabilité du Décret, qui s'appliquait avant que la LCEE entre en vigueur, a été examinée. Toutefois, à mon avis, cet arrêt est peu utile en ce qui concerne la question de l'interprétation qu'il convient de donner aux dispositions transitoires expresses de la LCEE figurant à l'article 74.

[109]     Les défendeurs soutiennent également que l'expression « décision irrévocable » figurant au paragraphe 11(1) de la LCEE vise la décision prise par une autorité responsable en vertu de la LCEE plutôt que celle du promoteur. À mon avis, pareille interprétation n'est pas très sensée : cela voudrait dire que le paragraphe 11(1) exige simplement que les autorités fédérales ne prennent pas leur décision définitive au sujet de l'exercice de leurs attributions avant qu'il soit procédé à une évaluation environnementale obligatoire. Cette interprétation aurait pour effet de rendre en bonne partie inutile le paragraphe 11(2) de la Loi, qui traite du moment où les attributions fédérales sont exercées. En outre, l'interprétation que les défendeurs donnent au paragraphe 11(1) n'est pas conforme à celle du juge Richard dans la décision Tsawwassen, précitée. Elle n'est pas non plus conforme à l'interprétation donnée par l'Agence, telle qu'en fait foi son énoncé de politique opérationnelle, où en parlant de l'évaluation environnementale en tant qu'outil de planification, l'Agence dit que les autorités responsables et le promoteur sont mieux placés pour « définir les solutions qui pourraient permettre de résoudre un problème et d'établir la viabilité des solutions de rechange » .


[110]     Quant à l'argument de l'Association selon lequel son interprétation du paragraphe 74(4) de la LCEE est étayée par la définition du mot « projet » figurant à l'article 2 de la Loi, je ne trouve pas cet argument convaincant en ce qui concerne l'interprétation du libellé exprès d'une disposition transitoire dans laquelle il est question d' « entamer » la construction. En outre, si l'article 74 est examiné dans son ensemble, il est clair que certaines dispositions traitent expressément de la réalisation proposée, par exemple lorsque la réalisation proposée a été renvoyée en vue d'un examen public en vertu du paragraphe 74(1).

[111]     J'examinerai maintenant la question de savoir si la preuve étaye la prétention selon laquelle la « construction » du RHCE, telle que j'ai interprété ce mot, a été entamée avant le 22 juin 1984.

[112]     La Région signale un certain nombre de mesures qu'elle a prises ou que son prédécesseur a prises, lesquelles établissent, allègue-t-elle, que la construction a été entamée, notamment les mesures suivantes :


a)          Au mois de mai 1963, dans le Plan de transport de la région de Hamilton (le PTRH), on recommandait la construction d'une autoroute reliant le QEW à la route 403. Le 25 février 1964, la ville de Hamilton a approuvé en principe cette recommandation. Le 14 mars 1967, la ville de Hamilton a adopté la Modification 228 du plan officiel (la MPO 228), par laquelle on incorporait les plans se rapportant à une autoroute en se fondant sur le tracé indiqué dans le PTRH. Le ministre des Affaires municipales de l'Ontario a approuvé la MPO 228 le 19 septembre 1969. L'énoncé suivant est inclus dans la MPO 228 :

[TRADUCTION]

Dans l'avenir immédiat, il faudra absolument élaborer une conception fonctionnelle de la route 53 proposée et du Red Hill Creek Freeway de façon à assurer une corrélation appropriée entre l'emplacement et l'exploitation de ces routes principales et l'aménagement des terrains adjacents.

L'annexe F de la MPO 228, intitulée [TRADUCTION] « Routes principales » indiquait l'emplacement et la largeur de l'emprise pour une autoroute allant à l'ouest depuis la route 403 et tournant ensuite vers le nord en passant par la Red Hill Valley jusqu'au QEW. Conformément à l'article 24 de la Loi sur l'aménagement du territoire de l'Ontario, L.R.O. 1990, ch. P.13, personne ne pouvait entreprendre par la suite des travaux publics à des fins non conformes au plan.

b)          Afin d'atténuer le bruit causé par la route express, la ville de Hamilton a approuvé, le 9 octobre 1973, l'établissement d'une politique sur les normes d'aménagement qui imposait des restrictions à la réalisation de tous les nouveaux projets de lotissement et à la construction sur les terrains affectés à des fins résidentielles qui étaient situés à côté de la route express, les propriétaires des terrains en cause devant céder une servitude aux fins de la construction d'une levée de terre. Cette politique a par la suite été modifiée le 9 décembre 1975, le 29 juin 1976, le 27 septembre 1977 et le 11 avril 1978.


c)          Le 27 mars 1973, la ville de Hamilton a adopté un rapport dans lequel on lui recommandait de prendre des mesures précises à l'égard du [TRADUCTION] « Mountain Freeway et [du] Red Hill Creek Freeway » , notamment :

A.         l'acquisition de propriétés aux diverses fins de l'autoroute, au coût estimatif de 1,4 million de dollars, tel qu'il était prévu dans le budget de 1973-1977;

B.          la présentation d'une demande à la Commission des affaires municipales de l'Ontario aux fins de l'approbation du projet; et

C.         la présentation d'une demande à la Commission des affaires municipales de l'Ontario en vue de l'obtention de l'autorisation de financer la partie du coût prise en charge par la ville au moyen de l'émission de débentures d'une durée de 20 ans.

La Commission des affaires municipales de l'Ontario a approuvé la demande de la ville et, le 16 octobre 1974, elle a approuvé, par ordonnance, des dépenses de 1,4 million de dollars aux fins de l'acquisition de terrains pour la route ainsi que l'emprunt de certaines sommes à cette fin et aux fins de l'émission par la Région des débentures nécessaires. Au mois de mars 1978, la ville de Hamilton a obtenu l'approbation de la Commission des affaires municipales de l'Ontario, lui permettant de porter de 1,4 à 1,9 million de dollars les dépenses liées à l'acquisition de terrains, ces dépenses devant être financées au moyen de subventions.


d)          En 1977, la Région a pris en charge les principales artères. Le 3 avril 1979, elle a reporté une demande à l'égard du [TRADUCTION] « lotissement de Battleridge » proposé parce que l'emplacement proposé se trouvait peut-être dans le couloir de la route express. Cette preuve est tirée de l'affidavit de Stephen Janes. Les défendeurs ne cherchent pas à faire radier le paragraphe précis renfermant cette preuve, mais ils cherchent à faire radier l'affidavit de M. Janes au complet.

M. Janes est inscrit à titre d'ingénieur en Ontario ainsi qu'à titre de planificateur. Il a déclaré sous serment avoir une grande expérience en matière de planification et de gestion de projets. L'avocat de la Région a retenu ses services pour qu'il examine la documentation portant sur l'aménagement de la route express et fasse des commentaires à ce sujet. M. Janes a déclaré sous serment avoir examiné une grande partie de la volumineuse documentation se rapportant au RHCE. Compte tenu de ses compétences et de son expertise ainsi que du fait qu'il a témoigné avoir examiné les documents pertinents, je ne suis pas prête à radier son affidavit au complet ou son énoncé des faits en ce qui concerne le report d'une demande de lotissement.


e)          Le 28 août et le 18 septembre 1979, la ville de Hamilton et la Région ont respectivement approuvé, comme route privilégiée [TRADUCTION] « le tracé d'une artère de circulation au sud du chemin Limeridge et le tracé d'une autoroute le long de la partie sud du chemin Mt. Albion, allant ensuite vers le nord en passant par la Red Hill Creek Valley jusqu'au QEW » . En même temps, la Région a approuvé les activités suivantes en prévision de la construction de la route express :

[TRADUCTION]

a)              l'identification et la protection des terrains additionnels nécessaires aux fins des échangeurs futurs sur la portion est-ouest de la route express;

b)             la notification des propriétaires dont les terrains seront requis aux fins de la route express dès que des plans détaillés indiquant les terrains touchés auront été préparés.

f)           Le 20 novembre 1979, la Région a adopté des résolutions modifiant son plan officiel et enjoignant aux municipalités de la région de modifier leurs plans officiels et leurs plans secondaires de façon à désigner la route express et à protéger les terrains aux fins des échangeurs futurs, et demandant à la ville de Hamilton de continuer à appliquer les normes d'aménagement à l'égard des terrains riverains.

g)          Le 15 août 1980, le lieutenant-gouverneur en conseil de l'Ontario a approuvé le Règlement 675/80 en vertu de la Loi sur les évaluations environnementales provinciale de 1975, lequel exemptait le Red Hill Creek Expressway de l'application de la Loi. Dans le Règlement, le Red Hill Creek Expressway était défini comme suit :

[TRADUCTION]

[...] une route régionale proposée devant aller à l'est depuis la partie du King's Highway connue sous le nom de route 403, là où elle croise une voie de circulation connue sous le nom de chemin Mohawk, dans la ville d'Ancaster, dans la Région, en passant par une zone connue sous le nom de Redhill Creek Valley, jusqu'à la partie du King's Highway connue sous le nom de Queen Elizabeth Way, près de la limite de la ville de Hamilton et de la ville de Stoney Creek, en vue de répondre aux besoins de la région en matière de transport, et toute solution de rechange qui a été définie comme un ouvrage auquel la Loi s'applique.


h)          Au mois d'août 1983, la province de l'Ontario a publié son [TRADUCTION] « Examen fondé sur la Loi sur les évaluations environnementales » , dans lequel il était conclu que l'évaluation environnementale de la Région satisfaisait aux exigences de la Loi sur les évaluations environnementales. Dans ce rapport, le projet était décrit comme suit :

[TRADUCTION]

Le réseau proposé relie la route 403, à Ancaster, au Queen Elizabeth Way, dans l'est de la ville de Hamilton. Le raccordement est composé de deux réseaux intégrés à une route à accès limité allant dans la direction nord-sud et une artère à accès limité, en direction est-ouest.

La Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth est le promoteur de cet ouvrage.

On se propose de construire une autoroute allant du Queen Elizabeth Way jusqu'à un nouvel échangeur, suivant la Red Hill Creek Valley vers le sud jusqu'à un point situé au nord de l'avenue Greenhill. À cet endroit, la route monte de la vallée en suivant le tracé général du chemin Mount Albion existant et rejoint la route est-ouest près de la rue Mud et du chemin Pritchard. Dans le segment nord-sud, l'accès serait limité au moyen d'échangeurs situés rue Barton, chemin Queenston, rue King, avenue Greenhill, rue Mud et chemin Dartnall. Toutes les autres traverses routières et ferroviaires seraient superposées.

Dans la direction est-ouest, une artère va de niveau de l'échangeur de la rue Mud en passant par l'échangeur du chemin Mohawk existant, jusqu'à la route 403. Le réseau est-ouest suit d'une façon générale le couloir non bâti d'une largeur de 60 mètres situé juste au sud du chemin Limeridge existant.

i)           Le 22 juin 1984, la ville et la Région avaient acquis les terrains dont on avait besoin pour le Red Hill Creek Expressway de sorte que, le 22 juin 1984, près de 100 terrains avaient été acquis et expropriés. Trois de ces expropriations visaient des propriétés situées dans la portion nord-sud du Red Hill Creek Expressway.


j)           Avant le 22 juin 1984, la ville et la Région avaient exigé la démolition de maisons et de commerces privés en prévision de la création du couloir du Red Hill Creek Expressway. L'une des trois propriétés démolies était située dans le couloir nord-sud du Red Hill Creek Expressway.

k)          En plus d'acquérir des propriétés, la ville et la Région avaient obtenu de particuliers dont les propriétés étaient situées juste à côté du RHCE une servitude de 50 pieds pour une levée de terre. La servitude permettait la construction d'une levée de terre destinée à servir d'ouvrage antibruit entre la route express et les propriétés adjacentes. Trente-cinq servitudes de ce genre ont été acquises avant le 22 juin 1984.

l)           Les frais liés à la construction du Red Hill Creek Expressway avant le 22 juin 1984 comprenaient une somme d'au moins 8,9 millions de dollars qui avait été dépensée aux fins de l'acquisition des terrains nécessaires à la réalisation du projet.


m)         Plus de 1,5 million de dollars ont été dépensés aux fins de l'acquisition de terrains situés dans la portion nord-sud du couloir du Red Hill Creek Expressway, et plus de 700 000 $ ont été dépensés à l'égard de la portion du Red Hill Creek Expressway située au bas de l'Escarpement. Le budget quinquennal des immobilisations de la Région qui avait été approuvé le 20 décembre 1983 prévoyait que 67,7 millions de dollars seraient affectés au Red Hill Creek Expressway entre 1984 et 1988, ces fonds devant permettre de continuer à acheter des terrains et de payer les frais de construction. Le ministère des Transports de l'Ontario subventionnait les frais d'acquisition des terrains ainsi que les frais de construction et, avant le 22 juin 1984, le ministère avait versé ou s'était engagé à verser à la Région près de 3 millions de dollars aux fins de l'acquisition de terrains.

[113]     En réponse, il est affirmé que cette preuve qui, alléguait-on, montrait que la construction avait été entamée n'est pas pertinente, et ce, pour les raisons suivantes :

(i)          seul l'examen du projet, telle que sa portée a été déterminée en vertu de la LCEE, est pertinent. Il est affirmé que le projet vise la portion non construite de la route express au bas de l'Escarpement, de sorte que la Région se fonde sur des travaux de construction qui ne font pas partie du projet, telle que sa portée a été déterminée;

(ii)         de plus, l'Association affirme qu'en 1995, le projet avait été modifié à un point tel qu'il s'agissait d'un nouvel ouvrage.

J'examinerai ces arguments dans l'ordre inverse.


[114]     À l'appui de l'assertion selon laquelle le projet était un nouvel ouvrage, l'Association signale que les modifications que l'on se proposait d'apporter au projet en 1995 ont amené la Région à demander une exemption en vertu de la Loi sur les évaluations environnementales de l'Ontario. Elle affirme que l'ordonnance qui en a résulté constitue [TRADUCTION] « une preuve claire que le projet ne faisait plus partie du projet qui avait été approuvé en 1985, étant donné qu'un examen indépendant devait être effectué » .

[115]     Je ne suis pas convaincue que la demande d'exemption soit telle que l'Association l'a soutenu. Dans la déclaration, le ministre de l'Environnement et de l'Énergie de l'Ontario a simplement défini la proposition comme suit : [TRADUCTION] « La Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth a maintenant la possibilité d'[...] apporter des améliorations au projet de 1985, lesquelles auront pour effet d'atténuer ses incidences environnementales » . Cela n'indique pas qu'il y a un nouvel ouvrage.

[116]     Fait encore plus important, je conclus que la preuve montre que le MPO n'interprétait pas les travaux proposés par la Région comme constituant un nouvel ouvrage et qu'il ne considérait pas le projet comme constituant un nouvel ouvrage. Le projet de lettre susmentionné, que M. DeBruyn a préparé pour le ministre des Pêches au mois de juin 1998, montre plutôt que selon le MPO :

[TRADUCTION]


La Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth s'occupe de la planification de la construction du Red Hill Expressway, dans la Red Hill Creek Valley, depuis la fin des années 1950. La route express nord-sud (soit une portion du Red Hill Expressway) doit passer par la Red Hill Creek Valley pour rejoindre une route express est-ouest existante (le raccordement) située dans l'ouest de la ville de Hamilton. La construction de la portion nord-sud de la route express devrait permettre d'achever le Red Hill Expressway depuis le Queen Elizabeth Way, dans l'est de la ville de Hamilton, jusqu'à la route 403, dans l'ouest de la ville. La portion de la Red Hill Valley reliera le Queen Elizabeth Way entre le Centennial Parkway et la rue Burlington, dans l'est de la ville de Hamilton, près du lac Ontario. [Non souligné dans l'original.]

M. DeBruyn a conclu sa lettre en disant que la réalisation du projet était [TRADUCTION] « envisagée depuis plus de 30 ans » . À mon avis, il reconnaît ainsi clairement que le MPO considérait les travaux comme visant à permettre d'achever le Red Hill Creek Expressway plutôt que comme constituant un nouvel ouvrage.

[117]     Par conséquent, je ne retiens pas l'argument de l'Association selon lequel les travaux que la Région se proposait d'exécuter se rapportaient à un nouvel ouvrage.

[118]     Qu'en est-il donc de l'assertion selon laquelle c'est la portion non construite de la route express au bas de l'Escarpement qui est en litige, de sorte qu'une bonne partie de la preuve que la Région a présentée au sujet de la construction n'est pas pertinente?

[119]     La portée du projet a été définie comme suit dans le mandat de la commission :

[TRADUCTION]

La route express proposée relierait deux routes express est-ouest existantes à accès limité à Hamilton (Ontario) (le Lincoln Alexander Parkway et le Queen Elizabeth Way). Le projet comprend la construction et l'exploitation de la route express et les travaux accessoires nécessaires.

À l'annexe 2 jointe au mandat, des détails ont été donnés au sujet de la portée du projet :

[TRADUCTION]


La proposition du promoteur se rapporte à la portion de la route express qui se trouve dans la vallée, depuis l'échangeur du chemin Dartnall (à l'extrémité est de la portion Mountain de la route express, maintenant appelée le « raccordement » ) en passant par la Red Hill Creek Valley, jusqu'à l'échangeur reliant la route au QEW, entre le passage supérieur de la rue Burlington et du QEW (dans l'ouest) et le passage supérieur du Centennial Parkway et du QEW (dans l'est).

[120]     À mon avis, il est donc inexact, compte tenu de la preuve, de dire que le projet en question se rapporte uniquement à la portion non construite de la route express au bas de l'Escarpement, et ce, pour les raisons suivantes :

(i)          le projet tel qu'il est défini dans le mandat était déjà réalisé entre l'échangeur du chemin Dartnall, à l'est, jusqu'à la rue Mud, et certains travaux de nivellement avaient été exécutés à l'échangeur de la rue Mud;

(ii)         les passages supérieurs pour les échangeurs, rue King et chemin Queenston, qui faisaient également partie du projet, telle que sa portée avait été déterminée, étaient déjà construits en 1991;

(iii)        les chenaux de béton, qui faisaient partie du projet telle que sa portée avait été déterminée, permettant au Red Hill Creek de franchir le chemin Queenston et la rue King étaient, comme il en était fait mention dans les Lignes directrices [TRADUCTION] « des travaux qui avaient antérieurement été achevés » .

[121]     À mon avis, ce qui est essentiel lorsqu'il s'agit de déterminer si la construction a été entamée avant le 22 juin 1984, c'est la question de savoir si les mesures qui, selon la Région, indiquaient que la construction était entamée se rapportaient en fait à la construction ou à l'achèvement d'un seul couloir routier continu qui faisait fondamentalement l'objet de l'examen devant la commission mixte de l'Ontario en 1985. Dans l'affirmative, il s'ensuit à mon avis que les mesures qui avaient été prises avant le 22 juin 1984 et sur lesquelles la Région se fonde peuvent à juste titre donner à penser que la réalisation du projet maintenant en cause a été entamée.


[122]     Les défendeurs et l'Association ont soutenu avec véhémence que, même si M. DeBruyn parle d'un seul projet dont la réalisation est envisagée depuis 30 ans et de l'achèvement de ce projet, le litige porte en fait sur un couloir nord-sud autonome. Comme l'Association l'a succinctement soutenu dans son mémoire des faits et du droit :

[TRADUCTION]

86.            Entre 1990 et 1996, le couloir de transport Mountain est-ouest et nord-sud, tel qu'il était envisagé lors des audiences relatives à l'évaluation environnementale provinciale qui ont eu lieu en 1985, a été divisé, pour des raisons de commodité et de planification, en un couloir est-ouest et un couloir nord-sud.

[...]

87.            Après 1990, la Région a consacré ses efforts et ses ressources à la conception et à la construction du couloir est-ouest. Cette route express a été ouverte en 1997 entre la route 403 et le chemin Dartnall et en 1999 entre le chemin Dartnall et la route 20. La dernière portion permet d'accéder au QEW. Cette nouvelle route express est-ouest est connue sous le nom de Lincoln Alexander Parkway, ou du « Linc » . On ne la désigne pas sous le nom de Red Hill Creek Expressway. Le Linc relie l'extrémité est de la Région à l'extrémité ouest de la Région. Il est en pleine exploitation. Il s'agit d'un projet indépendant qui est achevé.

[...]

90.            La Région soutient que la construction du « Red Hill Valley Expressway » a commencé avant le 22 juin 1984, exemptant ainsi le projet de l'application de la LCEE, en vertu du paragraphe 74(4). Toutefois, le projet se rapportant au couloir nord-sud a été proposé en 1996, au moment où la demande visant à l'obtention d'une déclaration a été présentée. Par conséquent, la réalisation de ce projet n'a pas pu être entamée en 1984.

[123]     Malgré la véhémence avec laquelle ces arguments ont été présentés, j'ai conclu que le projet, telle que sa portée était déterminée dans le mandat de la commission, se rapporte à l'achèvement d'un couloir continu.


[124]     Je tire cette conclusion pour les motifs ci-après énoncés.

[125]     Premièrement, depuis 1967, l'ensemble du Red Hill Creek Expressway figure sur les plans officiels de la ville de Hamilton et de la Région qui ont été approuvés en vertu de la Loi sur l'aménagement du territoire de l'Ontario. La MPO 228 indiquait l'emplacement de l'autoroute qui reliait la QEW à la route 403; or, la portion nord-sud passait par la Red Hill Creek Valley.

[126]     Deuxièmement, la Région et son prédécesseur ont demandé et obtenu l'autorisation de financer le projet dans son ensemble au moyen de l'émission de débentures, et ont imposé des normes d'aménagement pour ce projet dans son ensemble.

[127]     Troisièmement, dans le règlement de 1980 que le lieutenant-gouverneur en conseil avait approuvé en vertu de la Loi sur les évaluations environnementales provinciale, dans l'examen de 1983 qui avait été effectué en vertu de cette loi et dans l'autorisation accordée par la commission mixte de l'Ontario en 1985, l'ouvrage était décrit comme un couloir unique reliant la route 403 au QEW.

[128]     Quatrièmement, des terrains ont été acquis et expropriés et des travaux de démolition ont été effectués tout le long du couloir du RHCE, et ce, tant avant l'octroi de l'autorisation par la commission mixte qu'après. Une preuve détaillée a été présentée par l'entremise du directeur des finances et de l'administration, Service de la voirie, de la Région, laquelle montrait que :


·                        la ville et la Région avaient acquis et exproprié des terrains simultanément tout le long du couloir du RHCE;

·                        la ville et la Région avaient démoli des immeubles et des structures tout le long du couloir du RHCE.

[129]     Cinquièmement, je considère comme exacte la description donnée par M. Gary Moore, directeur du génie, Bureau chargé du projet relatif à l'autoroute, de la Région, à savoir que:

[TRADUCTION]

[...] la route express a jusqu'à ce jour été construite et est utilisée sur près de 72 kilomètres de voie, soit dans une proportion de 60 p. 100, y compris la portion nord-sud sur une distance de 22,1 kilomètres de voie, c'est-à-dire dans une proportion de 37 p. 100. La portion de la route express qui va de la route 403, à Ancaster, au chemin Dartnall représente plus de 62 kilomètres de voie et est ouverte à la circulation depuis le 15 octobre 1997. Le prolongement qui va du chemin Dartnall à la rue Mud couvre près de 10 kilomètres de voie et est ouvert à la circulation depuis le mois de juillet 1999.

[130]     L'Association a fortement contesté cette preuve, en affirmant en particulier que le couloir nord-sud n'était pas achevé dans une proportion de 37 p. 100, mais plutôt dans une proportion de zéro pour cent. Elle a soutenu qu'un projet, le couloir est-ouest, était achevé à 100 p. 100 alors que les travaux relatifs à l'autre projet, le couloir nord-sud de 1997, n'avaient même pas été entamés.

[131]     Cette controverse semble être attribuable au différend qui existe au sujet de la question de savoir où commencent et où prennent fin les portions nord-sud et est-ouest du projet.

[132]     Je retiens les conclusions de M. Moore parce que, à mon avis, elles sont à juste titre étayées par la preuve. À cet égard, je me fonde sur les facteurs ci-après énoncés :


·                        En 1982, dans son évaluation environnementale, la Région a décrit le segment nord-sud comme commençant au chemin Dartnall; voici ce qu'elle a dit : [TRADUCTION] « Dans le segment nord-sud du réseau, une autoroute de base à six voies sera nécessaire en vue de tenir compte du débit projeté entre le chemin Dartnall et la rue Barton. Au nord de la rue Barton jusqu'au Queen Elizabeth Way, une section d'autoroute à quatre voies est proposée. » Il a été dit que la transition entre l'artère est-ouest Mountain et la section nord-sud du Parkway se ferait à l'est de l'avenue Upper Gage. La pièce 1 jointe à l'affidavit de M. Moore montre que la route est maintenant construite à l'est entre l'avenue Upper Gage, en passant par le chemin Dartnall, jusqu'à la rue Mud.

·                        Un autre examen de l'évaluation environnementale de la Région montre que la première phase du projet visait les travaux entre l'avenue Upper Gage et la rue King. La phase finale visait les travaux entre l'avenue Upper Gage et la route 403. La première phase devait comprendre la construction du saut-de-mouton du T.H. & B. Railway ainsi que le réalignement de la rue King et la construction de l'échangeur. Les travaux qui auraient été exécutés dans la première phase ont été achevés.


[133]     Je retiens également la preuve présentée par M. Moore, selon laquelle en 1990-1991, la Région a été obligée de suspendre la construction de la portion nord-sud de la route express située au bas de l'Escarpement du Niagara lorsque le gouvernement provincial a annoncé qu'il ne continuerait pas à financer cette portion de la route express. La Région a donc uniquement poursuivi les travaux relatifs à la portion nord-sud de la route express située au haut de l'Escarpement et la construction de ce qui aurait constitué la troisième phase du projet. Dans la Red Hill Valley, au bas de l'Escarpement du Niagara, les travaux avaient été entamés en ce qui concerne le réalignement de la rue King, la reconstruction du chemin Queenston et le saut-de-mouton du T.H. & B. Railway. Ces travaux ont été exécutés au complet. Les ponts, rue King, chemin Queenston, et la traverse T.H. & B. Railway ont été conçus et construits expressément pour la route express, à un coût de plus de 20 millions de dollars, chaque pont coûtant environ 8 millions de dollars et la traverse ferroviaire coûtant environ 4 millions de dollars.

[134]     Il a été soutenu que les travaux, rue King et chemin Queenston, n'étaient pas exécutés en prévision de la construction du Red Hill Creek Expressway au bas de l'Escarpement du Niagara, mais qu'ils étaient plutôt de toute façon nécessaires; toutefois, pendant le contre-interrogatoire, M. Moore a déclaré, et je retiens son témoignage, que ces ouvrages auraient pu être laissés tels quels et que ces nouveaux travaux n'amélioraient pas la circulation générale, rue King ou chemin Queenston.

[135]     Il a été concédé que, si le Red Hill Creek Expressway n'était pas achevé, le passage supérieur du T.H. & B. Railway était tout à fait inutile.

[136]     Enfin, j'ai tenu compte de l'historique du financement :

·                        Le 1er mai 1991, le ministère des Transports de l'Ontario a envoyé à la Région une lettre ainsi libellée : [TRADUCTION] « Une affectation de fonds a été approuvée en 1991 aux fins de l'achèvement des portions nord-sud du Red Hill Creek Expressway qui étaient en voie de construction avant le 17 décembre 1990, comme il en est ci-dessous fait mention. De plus, le ministre a approuvé une affectation supplémentaire de fonds pour les travaux se rapportant à la portion est-ouest de la route express tel qu'il est indiqué ci-dessous. »


·                        Le 29 novembre 1995, le ministère des Transports a de nouveau écrit à la Région et lui a dit ce qui suit : [TRADUCTION] « [...] le gouvernement reconnaît que le Red Hill Creek Expressway est important lorsqu'il s'agit d'assurer la prospérité future de Hamilton-Wentworth. Par conséquent, la province fournira une somme de 100 millions de dollars au cours des cinq prochaines années en vue de permettre l'achèvement de la route express et des échangeurs la reliant à la route 403 et au QEW, le coût projeté devant s'élever à 200 millions de dollars. Ce niveau d'engagement permettra d'achever la route au plus tard en 2001. »

·                        Le 22 octobre 1998, un autre accord de financement a été conclu. Le début de l'accord était ainsi libellé : [TRADUCTION] « Le 29 novembre 1995, la province a annoncé un important programme visant à aider la Région de Hamilton-Wentworth à achever le Red Hill Creek Expressway » ; à l'article 6, la portée du projet était définie comme suit : [TRADUCTION] « La Région, en sa qualité de promoteur, envisage d'achever, de posséder et d'exploiter le RHCE depuis la route 403 à la limite sud de l'échangeur reliant la route au QEW [...]. » [Non souligné dans l'original.]

[137]     Ces ententes, qui avaient toutes été conclues avant que le présent litige prenne naissance, sont conformes à la conclusion selon laquelle le litige porte maintenant sur l'achèvement d'un seul couloir de transport reliant le QEW à la route 403 et renforcent cette conclusion.

[138]     Puisque j'ai tiré cette conclusion et puisque, selon moi, la construction d'un ouvrage est entamée lorsque les étapes postérieures à la planification nécessaires sont exécutées, je conclus que les mesures que la Région et son prédécesseur ont prises, considérées ensemble, à savoir la désignation de l'emplacement et de l'emprise de la route sur le plan officiel, l'acquisition de terrains aux fins de l'autoroute, la démolition d'immeubles en prévision de la création du couloir routier, la restriction à l'aménagement du territoire, l'acquisition de servitudes et l'imposition de normes d'aménagement à l'égard de ce couloir, indiquent que la construction de l'ouvrage, et notamment la réalisation du projet ici en cause, a été entamée. Je conclus également que la construction a été entamée avant le 22 juin 1984.


(b) L'autorisation qui doit être obtenue en vertu de la Loi sur les pêches se rapporte-t-elle à la modification du projet au sens du paragraphe 74(4) de la LCEE de façon à éliminer l'effet « d'antériorité » de cette disposition?

[139]     Subsidiairement, les défendeurs soutiennent que l'autorisation prévue par la Loi sur les pêches se rapporte à la modification de l'ouvrage en tout ou en partie.

[140]     Le mot « modification » n'est pas défini dans la LCEE. Les défendeurs mettent l'accent sur l'ERS, dans lequel une comparaison était faite entre les conceptions de 1985 et de 1998 du projet, en vue de soutenir qu'un projet différent est maintenant proposé: huit traverses routières sont proposées plutôt que les 14 traverses initialement prévues, et un chenal naturel est préconisé en vue de minimiser l'effet de ce qui était initialement une berge de béton de 4 kilomètres le long du Red Hill Creek. Les défendeurs signalent également la soumission de la Région visant à l'obtention d'une exemption, dans laquelle étaient mentionnées trois catégories de modifications à apporter à la route express qui avait été approuvée : la conception et l'emplacement de l'échangeur du QEW, l'emplacement et la structure de la traverse de l'Escarpement du Niagara, et les possibilités d'accès communautaire.

[141]     Les défendeurs soutiennent que toute modification de la conception constitue une modification de l'ouvrage au sens du paragraphe 74(4) de la LCEE.


[142]     La Région répond que les modifications ne changent rien à la nature de l'ouvrage ou du couloir prévu. Elle affirme que ce n'est pas une modification de l'ouvrage qui est proposée, mais la modification des mesures d'atténuation proposées.

[143]     C'est la façon dont les défendeurs ont traité le projet à l'égard duquel l'autorisation prévue par la Loi sur les pêches serait apparemment nécessaire qui, selon moi, permet le mieux d'interpréter et d'appliquer le paragraphe 74(4) de la Loi à cet égard.

[144]     Un examen acceptable de la portée de ce projet, telle qu'en font foi le mandat de la commission et les Lignes directrices, n'étaye aucunement la prétention selon laquelle le litige porte uniquement sur les modifications apportées à la portion non achevée de la route express, telles qu'elles sont décrites dans l'ERS et dans la demande d'exemption. Cela est fondamentalement incompatible avec la prétention selon laquelle le litige porte uniquement sur une modification au sens du paragraphe 74(4) visant à ce que le mandat de la commission comprenne l'examen de la nécessité du projet et de ses solutions de rechange. Je retiens l'argument de la Région, selon lequel aux fins de l'interprétation de l'applicabilité du paragraphe 74(4) de la LCEE, les défendeurs sont liés par la façon dont ils ont déterminé la portée du projet.

[145]     Je conclus donc que l'examen que la commission doit effectuer ne se rapporte pas à une « modification » éliminant l'effet d'antériorité du paragraphe 74(4) de la LCEE.


(ii) La prise de décisions irrévocables, avant l'entrée en vigueur de la LCEE, a-t-elle pour effet d'exclure l'application de la Loi?

[146]     Si je me trompe en interprétant le paragraphe 74(4) de la Loi, je conclus néanmoins que la LCEE ne s'applique pas à l'ouvrage proposé parce que, avant l'entrée en vigueur de la Loi, la Région avait pris des décisions irrévocables au sujet du couloir de transport proposé. Avec égards, j'adopte l'analyse effectuée par le juge Richard (tel était alors son titre) dans la décision Tsawwassen, précitée, à savoir que la LCEE est uniquement destinée à s'appliquer aux projets proposés qui en étaient encore au stade de la planification le 19 janvier 1995 ou par la suite et pour lesquels des décisions irrévocables n'ont pas été prises.

[147]     Tel n'est pas ici le cas. Les décisions irrévocables que la Région a prises et sur lesquelles je me fonde sont notamment les suivantes :

(i)          Avant le 31 décembre 1994, la ville et la Région avaient dépensé plus de 10 millions de dollars en vue d'acquérir des terrains dans le couloir nord-sud, dont une somme de 1,5 million de dollars se rapportait à des terrains situés dans la Red Hill Creek Valley au bas de l'Escarpement. Des terrains avaient été expropriés en 24 occasions, et des structures avaient été démolies sur 94 propriétés en prévision de la construction de la route express. Dans dix-neuf cas, ces travaux de démolition ont eu lieu sur des propriétés qui étaient situées dans le couloir nord-sud;


(ii)         Le lendemain du jour où l'audience tenue par la commission mixte a commencé [TRADUCTION] « pour de bon » comme l'a dit le directeur des finances et l'administrateur du service de voirie de la Région, la Région a décidé d'affecter une somme de 44 638 000 $ au financement d'immobilisations de la route express sur une période de dix ans, de 1985 à 1994. Cette résolution a été transmise à la commission mixte, lors de l'audience, en vue d'établir le niveau de financement qui avait été approuvé à l'égard de la route express. Le 19 juin 1990, en partie en vue de financer ces frais d'immobilisation, la Région a adopté un règlement imposant des frais d'aménagement à l'égard des lotissements résidentiels et non résidentiels;

(iii)        Après la cérémonie d'inauguration des travaux qui a eu lieu le 26 juin 1990 à l'échangeur de la rue King, dans la Red Hill Creek Valley, pour la première phase de la route express, la phase I des travaux de construction eux-mêmes a commencé au mois de juin 1990 et les phases II et III ont commencé plus tard cette année-là;

(iv)        Même après que le gouvernement provincial eut cessé de financer le projet, la Région, comme il en a ci-dessus été fait mention, a achevé le réalignement de la rue King, la reconstruction du chemin Queenston et les ouvrages de franchissement du T.H. & B. Railway, ces travaux faisant partie des phases I et II;


(v)         Le 31 décembre 1994, la Région avait dépensé environ 58,9 millions de dollars aux fins de la construction de la route express, dont 20,4 millions de dollars dans la Red Hill Creek Valley, au bas de l'Escarpement, en 1990-1991, et 38,5 millions de dollars entre la route 403 et la rue Mud. Dans la portion nord-sud de la route express, des ponts avaient été construits à l'intersection de l'avenue Upper Gage et de la rue Upper Ottawa, au coût de 5,3 millions de dollars, et des ouvrages de nivellement coûtant un million de dollars avaient été achevés à l'est de l'avenue Upper Gage;

(vi)        M. Janes a déclaré ce qui suit sous serment :

[TRADUCTION]

138.          Au moment où le couloir de la route express a initialement été défini, une bonne partie des terrains situés en haut de la zone Mountain n'étaient pas bâtis, comme l'indiquait la Modification 228 du plan officiel de la ville de 1967. Au fur et à mesure que le projet de la route express se concrétisait et que l'on a procédé à l'acquisition de terrains, on a régulièrement pris des décisions relatives à l'infrastructure compte tenu du tracé établi, qui influait sur le réseau des routes locales et des routes collectrices, la conception des lotissements résidentiels, l'emplacement des levées de terre destinées à atténuer le bruit et une myriade d'autres mesures.

139.          Des décisions majeures ont également été prises au sujet de l'emplacement des nouveaux systèmes de collecte des eaux usées, de distribution d'eau et de drainage pluvial, comme le montre en bonne partie la modification 228 du plan officiel de 1968.

Je note encore une fois que les défendeurs cherchent à faire radier l'affidavit de M. Janes au complet, même s'ils ne contestent pas expressément les paragraphes précités de l'affidavit.


Une copie d'une copie certifiée conforme de la Modification 228 du plan officiel de la Région de Hamilton telle qu'elle a été approuvée par le ministre des Affaires municipales et une copie certifiée conforme du règlement par lequel la ville de Hamilton a adopté la MPO 228 ont été produites en preuve et sont admissibles conformément à l'article 24 de la Loi sur la preuve au Canada. Cela étant, et compte tenu des compétences et de l'expertise de M. Janes, je ne suis pas prête à radier la preuve susmentionnée. J'estime qu'elle est pertinente et admissible;

(vii)       M. Ronald Marini a déclaré sous serment ce qui suit :

[TRADUCTION]

7.              En 1980, le plan officiel de la Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth désignait une partie des terrains du district de West Mountain comme étant visés par la phase I (prêts à être aménagés) (1 218 acres) et une partie des terrains comme étant visés par la phase II (aménagement reporté) (1 560 acres) en attendant qu'une voie de communication additionnelle nord-sud soit établie : voir les pièces 5 et 6 ci-jointes.

8.              Les terrains visés par la phase II dont il est fait mention au paragraphe 7 devaient faire l'objet d'une nouvelle désignation de façon à être visés par la phase I lorsque toutes les autorisations nécessaires auraient été accordées à l'égard du réseau de transport nord-sud (le Red Hill Creek Freeway) : voir la pièce 6 ci-jointe.

[...]

11.            En attendant que les terrains visés par la phase II fassent l'objet d'une nouvelle désignation de façon à être visés par la phase I dans la zone de West Mountain, les terrains visés par la phase I ne devaient pas comprendre plus de 16 500 personnes : voir les pièces 6 et 7, pages 66 et 67, et carte no 7 ci-jointe. Ce chiffre a été porté à 21 000 personnes, conformément à une résolution adoptée par la Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth le 1er octobre 1996, dont une copie est jointe aux présentes sous la cote 8.

12.            Le 24 octobre 1985, un comité chargé de la tenue d'une audience commune a approuvé le projet. Cette décision a été confirmée par le cabinet provincial le 12 mars 1987.


13.            Par suite de l'approbation du projet, le conseil régional de Hamilton-Wentworth a adopté une résolution le 19 mai 1987 en vue de modifier la désignation des terrains visés par la phase II dans la zone West Mountain de la ville, de façon qu'ils soient visés par la phase I : résolution jointe sous la cote 9.

Dans le rapport 10-87 du Comité de la planification économique de la Région qui a été examiné et adopté par le conseil régional le 19 mai 1987, on recommandait au conseil régional de permettre que les terrains visés par la phase II fassent l'objet d'une nouvelle désignation de façon à être visés par la phase I, compte tenu des énoncés suivants :

Attendu que la politique 14.4.4 du plan officiel de Hamilton-Wentworth prévoit que les zones visées par la phase II figurant sur la carte no 7, à Stoney Creek, fassent l'objet d'une nouvelle désignation, sans que le plan soit modifié, une fois que l'autorisation et les engagements financiers provinciaux auront été donnés pour le réseau de transport nord-sud;

Attendu que la Province a approuvé le réseau de transport nord-sud à certaines conditions;

Attendu que la Province et la Région ont engagé des fonds aux fins de la construction de ce réseau;

14.            Par suite de la résolution du conseil régional et de la décision du cabinet d'approuver le projet, le conseil de la ville a adopté, le 26 août 1987, une résolution par laquelle les terrains visés par la phase II situés dans la zone de West Mountain faisaient l'objet d'une nouvelle désignation de façon à être visés par la phase I : résolution jointe sous la cote 10.

15.            Le 8 décembre 1987, le conseil de la ville a pris un règlement en vue d'adopter la modification no 11 du plan officiel de la ville, laquelle a été approuvée par le président régional le 5 avril 1988, établissant un plan secondaire aux fins de l'aménagement urbain d'une partie des terrains situés dans la zone West Mountain. Des extraits de la modification no 11 du plan officiel sont joints sous la cote 11.

La modification du plan officiel comprend une section intitulée : « Fondement de cette modification » , qui est en partie ainsi libellée :

[...] Cette modification est considérée comme souhaitable, et ce, pour les raisons suivantes :

i) L'approbation récente par le lieutenant-gouverneur en conseil, le 12 mars 1987, du réseau de transport nord-sud (Red Hill Creek) a entraîné l'incorporation de cet emplacement dans la phase I d'aménagement, de sorte qu'il est maintenant possible de procéder à cet aménagement.


16.            Le 26 septembre 1989, le conseil de la ville a pris un règlement en vue d'adopter la modification no 22 du plan officiel de la ville (la MPO 22), laquelle a été approuvée par le président régional le 19 décembre 1989, établissant un plan secondaire aux fins de l'aménagement urbain d'une partie des terrains situés dans la zone de West Mountain. Des extraits de la MPO 22 sont joints sous la cote 12.

17.            Le 25 juillet 1989, le conseil de la ville a pris un règlement en vue d'adopter la modification no 23 du plan officiel (la MPO 23), laquelle a été approuvée par le commissaire régional de la planification et du développement le 15 décembre 1993. Cette modification englobe la plupart des terrains situés dans la zone West Mountain et comprend les terrains visés par la MPO 11 et la MPO 22; elle doit remplacer la MPO 70. Des extraits de la MPO 23 sont joints sous la cote 13.

18.            La MPO 23 était fondée sur l'approbation par le lieutenant-gouverneur en conseil du réseau de transport nord-sud (le Red Hill Creek Expressway), ce qui a entraîné l'incorporation des terrains touchés par cette modification dans la phase I d'aménagement, de sorte qu'il était possible de procéder à l'aménagement : voir la pièce 13, page 6.

[...]

20.            Le 24 juillet 1990, le conseil de la ville a pris un règlement en vue d'adopter la modification no 33 du plan officiel (la MPO 33), laquelle a subséquemment été approuvée par le président régional le 15 décembre 1993. Les terrains visés par cette modification font partie des terrains visés par la MPO 23 et font l'objet d'un plan secondaire d'aménagement urbain. Des extraits de cette modification sont joints sous la cote 14.

21.            L'aménagement des terrains visés par les MPO 11, 22, 23 et 33 a en partie été réalisé conformément aux nombreux règlements de zonage de la ville qui ont été pris de temps en temps depuis 1987.

22.            La planification par la ville de la zone West Mountain était fondée sur le fait que l'on procéderait à la construction de la portion Red Hill Creek visée par le projet. Cette déclaration est en partie fondée sur un rapport en date du 25 janvier 1991 de J.D. Thoms, qui était alors commissaire régional, Planification et développement, que j'ai reçu et qui est joint aux présentes sous la cote 15. À la première page de ce rapport, on recommande de reporter les MPO 23 et 33 de la ville pour une durée de six mois tant que « les effets de l'annulation du financement provincial pour la portion nord-sud du Red Hill Creek Expressway n'auront pas été déterminés » . Voir la pièce 15, page 1 ci-jointe.

23.            Le rapport mentionné au paragraphe 23 a été adopté par le Comité de planification et de développement économique régional le 19 février 1991 et par le conseil régional le 5 mars 1991. La résolution du conseil est jointe aux présentes sous la cote 16.

[...]


29.            L'omission de procéder à la construction de la portion nord-sud de la route visée par le projet aura les effets suivants :

7)                    une grosse partie de la zone de West Mountain de la ville qui est importante aux fins de l'aménagement risque de ne plus pouvoir être aménagée, et ce, pour des raisons de transport;

8)                    la ville contrevient à l'article 1.2 de l'Énoncé de politique provincial en matière de logement par suite de la perte de logements, puisqu'elle sera approvisionnée pour une période de moins de dix ans en terrains à destination résidentielle : voir la pièce 19, page 4.

Les défendeurs cherchent à faire radier l'affidavit de M. Marini au complet. Du mois d'août 1977 jusqu'en 1999, M. Marini était directeur, Planification, de la Corporation de la ville de Stoney Creek. En 1999, il est devenu directeur général, Planification et développement, de cette ville. En ces qualités, il était chargé de donner au conseil de la ville des conseils en matière de planification et de développement. Compte tenu de ses fonctions et de sa participation antérieure, je conclus que la preuve susmentionnée est pertinente et admissible.

[148]     J'estime que, considérées isolément, ces décisions montrent que des décisions irrévocables ont été prises avant que la LCEE soit édictée, mais je conclus également que l'effet cumulatif de cette preuve établit qu'avant que la LCEE soit édictée, une décision irrévocable avait été prise aux fins de la construction de la route express au complet, et notamment de la réalisation du projet ici en cause.


[149]     Je tire cette conclusion en me fondant sur le poids de la preuve susmentionnée, mais ma conclusion est renforcée par l'avis que M. Janes a exprimé, à savoir :

[TRADUCTION]

143.          Ces diverses mesures relatives à la planification de l'utilisation du sol et à l'infrastructure ne font pas uniquement partie du processus de planification de la route express et sont associées au processus d'urbanisation qui était en cours à ce moment-là dans les secteurs non aménagés de la ville, mais le processus visant à préciser le tracé de la route express au moyen de désignations dans des plans officiels, la mise au point de plans urbains individuels et la mise en application de règlements de zonage et de plans de lotissement à l'appui ont tous pour effet de créer un modèle irrévocable d'utilisation du sol. Dans bien des cas, les rues ou les cours arrière des lots voisins de la route express n'avaient pas d'issue de façon que les habitations ne donnent pas directement sur la route express.

144.          La définition de l'accès des rues locales à la route express, les décisions portant sur le tracé des systèmes de drainage pluvial qui doivent également utiliser le couloir de la vallée, l'inclusion de la part liée à la croissance des coûts d'immobilisation de la Région pour la route express dans la détermination des frais d'aménagement régional, l'acquisition de terrains, y compris les expropriations par la ville et par la Région et la modification des plans officiels, constituent dans tous les cas des mesures qui visent à mener à bonne fin d'une façon irrévocable la construction de la route express. Chacune de ces mesures renforce la nature irrévocable de la construction de la route express dans la mesure où un grand nombre de ces mesures accessoires sont fondées sur la prémisse selon laquelle la route express permet de remplir la fonction fondamentale de transport indiquée dans les plans officiels de la ville, de la Région et de la ville de Stoney Creek. La désignation approuvée de la route express figurant dans ces plans officiels et la nature permanente des mesures qui ont été prises en vue de la construction de la route express sont des décisions irrévocables et, lorsqu'elles sont considérées ensemble, elles montrent qu'il avait été décidé d'une façon irrévocable de procéder à la construction de la route express au complet, de la route 403 jusqu'au QEW.


[150]     Les défendeurs ont sollicité la radiation de ces paragraphes pour le motif qu'il s'agit d'une preuve sous forme d'opinion inadmissible; ils ont soutenu que pareille preuve n'est admissible que si elle est fournie par un expert et si les conditions énoncées dans la règle 482 (maintenant règle 279) des Règles de la Cour fédérale (1998) sont remplies. Je rejette cet argument. La règle 279 ne s'applique pas à une instance engagée au moyen d'un avis de demande. Je conclus que lorsque l'instance est engagée au moyen d'un avis de demande, la preuve d'opinion est admissible si elle satisfait aux exigences énoncées par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt R. c. Mohan, [1994] 2 R.C.S. 9, soit la pertinence, la nécessité et la présentation de la preuve par un expert dûment qualifié.

[151]     Je conclus que la preuve figurant dans les paragraphes contestés susmentionnés de l'affidavit de M. Janes satisfait à ces exigences. La preuve est légalement pertinente, elle fournit des renseignements au sujet de questions de planification ne relevant pas de l'expérience et de la connaissance de la Cour et elle est présentée par un témoin qualifié ayant des connaissances spéciales en matière de planification de projets, comme il en est fait mention aux paragraphes 13 à 18 de l'affidavit de ce témoin.

(iii)        L'application de la LCEE a-t-elle été validement déclenchée?


[152]     Étant donné la conclusion que j'ai ci-dessus tirée, je n'examinerai que brièvement ce que la Région définit comme étant son argument final relatif à la compétence en ce qui concerne l'applicabilité de la LCEE. L'argument de la Région est fondé sur deux points. En premier lieu, la Région soutient que conformément à la politique du MPO, les autorisations prévues au paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches ne sont pas nécessaires pour des ouvrages ou des entreprises qui, en fin de compte, après atténuation, s'avèrent avantageux pour l'habitat du poisson. En second lieu, la Région se fonde sur la preuve, dont l'admissibilité est contestée par les défendeurs, pour soutenir que de l'avis de son expert, la création d'un chenal naturel atténue les effets négatifs possibles à un point tel qu'il n'est pas nécessaire d'obtenir une autorisation en vue de déclencher l'application de la LCEE et que la LCEE ne s'applique pas.

[153]     Bien que cet argument soit défini comme se rapportant à la compétence, je conclus que la Région cherche fondamentalement à soutenir qu'en exigeant une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches, les défendeurs appliquent leur politique d'une façon déraisonnable. À mon avis, cet argument ne se rapporte pas à proprement parler à la compétence. J'ai conclu qu'il est trop tard pour que la Région puisse soulever la question.

(iv)        Conclusion relative à la question de l'applicabilité de la LCEE

[154]     Il ressort de la conclusion que j'ai tirée, à savoir que la LCEE ne s'applique pas à l'achèvement du RHCE, que les demandes de contrôle judiciaire qui ont été présentées dans les dossiers T-1400-99 et T-1993-99 seront accueillies et qu'un jugement déclaratoire sera rendu, portant que la LCEE ne s'applique pas au projet et qu'aucun examen n'est nécessaire en vertu de la LCEE. Il s'ensuit en outre que la demande de contrôle judiciaire qui a été présentée dans le dossier T-1401-99 sera rejetée pour le motif que la question qui y est soulevée n'a plus maintenant qu'un intérêt théorique.


[155]     J'ai minutieusement examiné la question de savoir s'il est souhaitable d'examiner subsidiairement les autres questions qui sont soulevées dans ces demandes. Puisque j'ai également conclu que le renvoi à une commission n'était pas validement étayé par un chef approprié de compétence fédérale, je me propose de prononcer de brefs motifs au sujet de cette conclusion. Toutefois, je crois qu'eu égard aux circonstances, il est inutile d'examiner les autres questions qui ont été soulevées.

6.          LE PROJET A-T-IL ÉTÉ VALIDEMENT RENVOYÉ À UNE COMMISSION?

[156]     Dans l'arrêt Friends of the Oldman River Society c. Canada (Ministre des Transports), [1992] 1 R.C.S. 3 (l'arrêt Oldman), la Cour suprême du Canada a examiné la nature et l'étendue de la compétence fédérale et de la compétence provinciale en matière d'environnement, en faisant remarquer que la Loi constitutionnelle de 1867 n'attribuait pas la compétence en matière d' « environnement » en tant que telle à l'un ou l'autre palier de gouvernement. À la page 64, la Cour a dit que l'environnement était « au sens constitutionnel, une matière obscure qui ne peut être facilement classée dans le partage actuel des compétences, sans un grand chevauchement et une grande incertitude » . Tout exercice du pouvoir législatif doit être lié à un chef approprié de compétence. Étant donné que la nature des divers chefs diffère, la mesure dans laquelle les questions environnementales peuvent être prises en compte dans l'exercice d'un pouvoir peut différer d'un chef de compétence à l'autre.


[157]     Dans l'arrêt Oldman, précité, la Cour suprême a également dit que, lorsque les paliers respectifs de pouvoir constitutionnel sont en cause, il n'est pas utile de qualifier un projet de projet provincial ou de projet local. Les projets locaux relèvent en général de la responsabilité provinciale, mais la participation fédérale est nécessaire si le projet empiète sur un domaine de compétence fédérale. Tel était le cas du barrage d'Oldman River. Toutefois, comme la Cour l'a dit aux pages 71 et 72, le gouvernement fédéral ne peut pas utiliser le « prétexte de l'existence de quelque champ restreint de compétence fédérale, [pour] procéder à un examen approfondi de questions qui relèvent exclusivement de la compétence des provinces » .

[158]     Le fondement sur lequel le ministre des Pêches s'est appuyé pour demander au ministre de l'Environnement de renvoyer à une commission le projet, telle que sa portée était déterminée par le MPO, a été énoncé comme suit dans la lettre du ministre :

[TRADUCTION]

Nous avons récemment discuté de la conservation et de la protection des pêches et des oiseaux migrateurs qui peuvent être en danger à cause de la construction proposée du Red Hill Creek Expressway dans la Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth. Comme vous le savez, la Municipalité régionale a demandé, conformément au paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches, l'autorisation à l'égard du déplacement et de la reconfiguration du Red Hill Creek. Le MPO croit que, si le projet allait de l'avant, il serait possible d'en atténuer les effets de façon que la chose soit en fin de compte avantageuse pour l'habitat du poisson. Néanmoins, il sera nécessaire d'obtenir une autorisation par suite de la « détérioration, de la destruction ou de la perturbation de l'habitat du poisson » étant donné que l'on déplacera une bonne partie du Red Hill Creek. Par conséquent, le ministère est tenu de procéder à un examen préalable du projet conformément à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. À cet égard, le MPO a assumé le rôle d'autorité responsable de cette évaluation. Le processus et le progrès accompli par le MPO en ce qui concerne l'examen préalable me satisfont.

[...]

Je sais bien que le promoteur a déploré la façon dont cet examen préalable avançait. Toutefois je sais également que la Municipalité régionale ne s'est pas empressée de fournir les renseignements nécessaires afin de mener l'examen préalable à bonne fin, du moins au point de vue de l'habitat du poisson. À mon avis, cette question serait normalement réglée entre le promoteur et les représentants régionaux du MPO et ma participation ne serait pas vraiment nécessaire. Les circonstances ont changé, de sorte que je dois réexaminer l'affaire.


Des représentants d'Environnement Canada ont informé le MPO que le projet, tel qu'il est décrit, peut avoir des effets environnementaux négatifs importants sur les oiseaux migrateurs, compte tenu des effets environnementaux négatifs importants qu'il a sur l'habitat terrestre et marécageux, dont les fonctions écologiques sont importantes pour les oiseaux migrateurs. De plus, Environnement Canada m'a informé qu'à son avis, il est peu probable que l'on change d'idée une fois l'examen préalable terminé étant donné les incidences possibles du projet sur l'habitat terrestre et marécageux et ses répercussions subséquentes sur les oiseaux migrateurs.

Compte tenu de ces renseignements ainsi que des préoccupations manifestées par le public au sujet de ce projet, je vous demande de renvoyer à une commission le projet, telle que sa portée a été déterminée par notre ministère, conformément à l'article 25 de la LCEE. On m'a fait savoir qu'Environnement Canada, l'Office national de l'énergie et l'Agence canadienne d'évaluation environnementale appuient tous le renvoi à une commission.

[159]     La décision du ministre de l'Environnement de renvoyer l'affaire à une commission a fait l'objet d'un communiqué de presse publié par l'Agence le 6 mai 1999, dans lequel le ministre déclare ce qui suit :

[TRADUCTION]

J'ai conclu que, compte tenu de la demande que le ministre Anderson a faite, de la préoccupation manifestée par le public à ce sujet et de la possibilité qu'il y ait des effets environnementaux négatifs importants, ce projet justifie la tenue d'un examen public par une commission.

[160]     Il faut donc déterminer si le soi-disant exercice du pouvoir fédéral de renvoyer l'affaire à une commission en vertu de la LCEE était lié à la compétence que possède le ministre à l'égard des oiseaux migrateurs, ou s'il était par ailleurs fondé compte tenu des préoccupations du public.


[161]     J'ai tenu compte de l'argument des défendeurs selon lequel la demande que la Région a faite en vue d'obtenir une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches était à l'origine de la nécessité de procéder à une évaluation environnementale. Toutefois, tel n'était pas le fondement qui a été invoqué à l'appui de la décision du ministre de l'Environnement de renvoyer le projet à une commission. Il semble que cela n'aurait pas pu non plus être le fondement au moment pertinent parce que le MPO avait fait savoir qu'il ne pouvait pas traiter la demande de la Région sans que d'autres détails soient fournis.

[162]     La Région et l'Ontario affirment que le renvoi était invalide parce que, entre autres choses, le pouvoir de réglementation en ce qui concerne les oiseaux migrateurs est strictement délimité et n'étaye pas le renvoi, et parce que tout renvoi fondé sur la préoccupation du public doit être lié à un chef de compétence fédérale.

(i)          La compétence relative aux oiseaux migrateurs

[163]     Les ministres défendeurs soutiennent que la décision de faire procéder à un examen du projet par une commission était liée à l'article 132 de la Loi constitutionnelle de 1867 et qu'elle était étayée par cette disposition. Il a été soutenu que la Convention concernant les oiseaux migrateurs (la COM), qui constitue une annexe de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, L.C. 1994, ch. 22 (la LCOM) confère au palier fédéral la compétence voulue en ce qui concerne la protection de l'habitat, dans la mesure où certains effets sur l'habitat peuvent menacer directement les oiseaux migrateurs, leurs nids et leurs oeufs.

[164]     Cet argument exige que l'on examine minutieusement la nature de ce chef de compétence fédérale en vue de déterminer la mesure dans laquelle il permet de tenir compte des questions environnementales.


[165]     L'article 132 de la Loi constitutionnelle de 1867 permet de faire des lois assurant la mise en application des traités impériaux et inclut la compétence d'édicter des lois qui vont au-delà des termes stricts du traité, dans la mesure où elles s'y rapportent (voir : The King v. Stuart, [1925] 1 D.L.R. 12 (C.A. Man.)).

[166]     Dans la décision Alliance animale du Canada c. Canada (Procureur général), [1999] 4 C.F. 72 (C.F. 1re inst.), le juge Gibson a examiné la COM et la LCOM. Au paragraphe 12, il a conclu, et je souscris respectueusement à son avis, que la Convention a pour but de « préserver du massacre général certains oiseaux migrateurs qui « traversent » certaines parties du Canada et des États-Unis au cours de leur migration annuelle et d'assurer leur conservation » . La chose se fait en établissant une « saison pendant laquelle il est interdit de chasser » et en protégeant les nids et les oeufs. La LCOM a été édictée en vue de mettre en oeuvre la COM, « par la protection des oiseaux migrateurs et de leurs nids » comme le dit l'article 4 de cette loi.

[167]     La Région et l'Ontario font remarquer avec raison qu'aucune disposition de la COM ne traite expressément de la protection de l'habitat des oiseaux migrateurs. Ils soutiennent que, par conséquent, aucune disposition de la COM ou de la LCOM ne confère la compétence voulue en vue de protéger l'habitat des oiseaux et que le pouvoir général de protéger l'habitat n'est pas un pouvoir accessoire, sur le plan constitutionnel, au pouvoir de protéger les oiseaux migrateurs.


[168]     Environnement Canada a reconnu que la LCOM ne confère pas de fondement juridique en ce qui concerne la protection générale de l'habitat des oiseaux. La Direction du contrôle environnemental a énoncé comme suit la façon dont elle interprétait le pouvoir fédéral dans son projet d'analyse du Red Hill Expressway, en date du 31 juillet 1998 :

[TRADUCTION]

La LCOM ne confère pas de pouvoir en vue d'empêcher la destruction, la détérioration ou la perturbation de l'habitat des oiseaux migrateurs, et notamment des aires de nidification et de reproduction, ou en vue de prendre des mesures à cet égard, en dehors de la saison de la ponte.

[169]     Malgré tout, la destruction de l'habitat peut être liée à un effet néfaste sur les oiseaux migrateurs. Ainsi, dans la décision Alberta Wilderness Association c. Cardinal River Coals Ltd. (T-1790-98, 17 avril 2000 (C.F. 1re inst.)), une commission conjointe a pu conclure que la destruction permanente de deux aires probables de nidification aurait pour effet de réduire la population de certains oiseaux migrateurs et qu'il existait un risque important que la population ne puisse pas être rétablie à cause de la destruction permanente de certains habitats. Dans cette décision-là, le juge Campbell a conclu que la LCOM et son règlement d'application indiquaient l'existence d'une intention claire de fournir une protection étendue aux oiseaux migrateurs.

[170]     Je conclus qu'afin de déterminer si le pouvoir fédéral se rapportant aux oiseaux migrateurs étaye le renvoi du projet à une commission, il faut chercher un lien avec les oiseaux migrateurs et non simplement avec leur habitat.


[171]     L'avis sur lequel le ministre de Pêches s'est fondé pour faire sa demande au ministre de l'Environnement se trouve dans la lettre du 9 avril 1999 du directeur général régional du ministère de l'Environnement où des questions sont soulevées au sujet des effets négatifs du projet sur les oiseaux migrateurs et sur leur habitat. Toutefois, dans le rapport, il était expressément reconnu [TRADUCTION] qu' « il n'existe pas de données ou d'études scientifiques permettant de déterminer la façon dont la destruction locale d'habitat et la perte de fonctions écologiques peuvent influer sur les populations générales d'oiseaux migrateurs » .

[172]     La preuve scientifique à l'appui de cet avis figure dans l'analyse de la DCE d'Environnement Canada du 31 juillet 1998. Comme la Région et l'Ontario l'ont fait remarquer, les conclusions tirées dans ce document sont au mieux équivoques. En voici des extraits importants :

[TRADUCTION]

Bien que l'on craigne que la destruction et la fragmentation de l'habitat aient réduit la quantité de bonnes aires de séjour en général en Amérique du Nord, il existe peu de données au sujet de la façon dont la réduction de l'habitat influe sur les oiseaux migrateurs individuels ou dans leur ensemble. Nous savons que les oiseaux se concentrent à proximité d'obstacles tels que les Grands Lacs et nous pouvons donc supposer que, dans ces régions, les habitats ont une importance spéciale, mais nous ne disposons d'aucun moyen nous permettant de savoir jusqu'à quel point ils sont importants, c'est-à-dire que nous ne savons pas si la destruction de ces habitats influe sur le niveau de population d'oiseaux. Cependant, pareils renseignements ne seront probablement pas disponibles pendant bien longtemps et ne le seront peut-être même jamais.

[...]

Cela ne veut pas nécessairement dire que le retrait du site aura un effet sur les populations d'oiseaux à l'échelle provinciale, mais plutôt que l'aménagement influera probablement sur l'utilisation du site.

[...]

Malheureusement, il n'existe absolument aucune littérature au sujet de l'effet de ces types d'aménagements sur les oiseaux migrateurs, de sorte qu'il est difficile de dire avec certitude si la proposition aura des effets importants après que des tentatives d'atténuation auront été faites.


[...]

Habitat de reproduction des oiseaux migrateurs

[...]

Cela donne à entendre que le site n'est pas important sur le plan provincial en ce qui concerne les oiseaux nicheurs, et qu'il est probablement peu important au sein de la MRHW [Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth].

[...]

En conclusion, la RHV [Red Hill Valley] est le site le plus important pour les oiseaux nicheurs dans l'est de la ville de Hamilton, mais elle n'a pas d'importance sur le plan régional ou provincial. Un petit nombre d'espèces importantes se sont avérées être des oiseaux nicheurs ou pourraient l'être, mais compte tenu de la nature urbaine et linéaire du site et du grand nombre de prédateurs et de parasites de la reproduction, il est peu probable que les espèces d'oiseaux se reproduisent en général avec succès.

[...]

Position recommandée par la DCE :

Nous n'avons jamais disposé d'un ensemble de données aussi complet à examiner dans le contexte d'une EE. Malgré l'existence de ces excellentes données de base, il n'est néanmoins pas possible pour le ME de prédire exactement l'effet que la route express aura sur les éléments importants de l'écosystème (les EIE) comme le couloir étroit et localement important suivi par les oiseaux migrateurs. Les données scientifiques associées à la prévision de pareils effets sont extrêmement faibles et les effets de projets locaux similaires, comme le Don Valley Parkway, à Toronto, n'ont pas été documentés. De plus, la littérature ne cite pas d'autres exemples, dans d'autres ressorts, des effets de pareils projets sur les oiseaux migrateurs.

Il est également difficile de prédire avec exactitude les effets de réduction des terres humides dans les étangs Van Wagner et dans la zone marécageuse de Red Hill sur les EIE comme l'habitat de reproduction du petit butor et l'habitat de reproduction possible de la guifette noire. [Non souligné dans l'original.]

[173]     Étant donné que l'habitat, dans la zone visée par le projet, n'avait pas d'importance régionale ou provinciale, je conclus que l'on n'a pas réussi à démontrer l'existence d'un lien entre les questions se rapportant à la destruction de l'habitat causée par la réalisation du projet et les questions influant sur la conservation des oiseaux migrateurs.


[174]     Cela ne veut pas dire que, pour que l'on puisse à bon droit procéder à un renvoi devant une commission, il doit exister une certitude scientifique au sujet de l'existence d'un effet néfaste sur les populations d'oiseaux migrateurs . Toutefois, il doit exister un fondement valable permettant de conclure qu'il est fort possible qu'une commission soit en mesure de conclure que, dans ce cas-ci, il y aurait un effet négatif important sur la conservation des oiseaux migrateurs. Or, cette condition nécessaire pour que le processus soit entamé n'était pas remplie. On a fait remarquer que les renseignements pertinents nécessaires n'étaient probablement plus disponibles depuis bien longtemps et qu'ils pourraient bien ne jamais l'être.

[175]     J'ai déjà cité un passage de l'analyse effectuée par la DCE. En ce qui concerne la position recommandée par la DCE, le rapport conclut ce qui suit :

[TRADUCTION]

Le principal objectif de la commission serait d'examiner d'une façon indépendante la nécessité du projet, les « autres moyens » permettant de réaliser le projet (comme la modification des échangeurs) et ses solutions de rechange (comme d'autres tracés).

[...]

Si la commission déterminait d'une façon indépendante que le projet est réellement nécessaire et que d'autres tracés sont possibles sur les plans technique et économique, les effets environnementaux de ces solutions de rechange seraient comparés à ceux de la conception qui est proposée à l'heure actuelle.


[176]     Étant donné que la commission est principalement chargée d'examiner d'une façon indépendante la nécessité réelle du projet, je ne puis conclure à l'existence d'un lien suffisant entre les questions relatives aux oiseaux migrateurs et le fait d'établir d'une façon indépendante la nécessité de la route express. L'évaluation environnementale doit être liée au pouvoir de réglementation qui peut déclencher l'application de la LCEE.

[177]     Je conclus donc que le pouvoir fédéral, en ce qui concerne les oiseaux migrateurs, n'étayait pas le renvoi du projet à une commission.

(ii)         Préoccupation du public

[178]     Comme il en a été fait mention, la compétence dans le domaine de l'environnement doit être liée à un chef de compétence. Je reconnais que ce principe s'applique aux dispositions figurant dans la LCEE qui autorisent le ministre de l'Environnement à faire procéder à l'examen d'un projet par une commission compte tenu des préoccupations du public. Je conclus donc que tout renvoi effectué pour ce motif doit être fondé sur la préoccupation manifestée par le public au sujet des effets environnementaux qui sont liés à un chef de compétence fédérale.

[179]     Je retiens la preuve présentée par la Région selon laquelle la préoccupation manifestée par le public au sujet du projet était axée sur la nécessité du projet et sur ses solutions de rechange. Pendant le contre-interrogatoire, M. DeBruyn a témoigné ce qui suit :

[TRADUCTION]

a)              La préoccupation du public est en bonne partie axée sur la nécessité du projet et sur ses solutions de rechange. Or, la nécessité du projet et ses solutions de rechange sont liées à des questions de transport qui, à mon avis, relèvent de la responsabilité provinciale.


b)             [...] Un grand nombre des personnes qui s'opposent au projet demandent que le projet soit renvoyé immédiatement au ministre de l'Environnement pour examen par une commission parce qu'il faut inclure les questions relatives à la « nécessité » du projet et à ses « solutions de rechange » dans l'évaluation fédérale. En outre, un grand nombre des commentaires que le comité formé des intéressés de la collectivité et le public ont faits au sujet du projet de document relatif à la portée du projet mettaient l'accent sur le fait que ces deux questions n'étaient pas mentionnées.

c)              [...] La préoccupation du public était en bonne partie fondée sur le fait que la nécessité du projet et ses solutions de rechange n'étaient pas examinées dans le processus d'examen de la Municipalité régionale elle-même [...].

d)             Il ne s'agit pas ici d'une commission mixte à laquelle la province participe, mais la préoccupation du public se rapporte davantage à des questions provinciales (nécessité, fondement, solutions de rechange).

De plus, pendant le contre-interrogatoire, Paul Bernier a témoigné ce qui suit :

[TRADUCTION]

e)              [...] Le projet doit être réalisé sur des terres provinciales et la plupart des préoccupations du public se rapportent à des questions de compétence provinciale.

[180]     Le fait que la préoccupation du public était surtout axée sur la nécessité du projet et sur ses solutions de rechange, soit des questions relevant exclusivement de la compétence provinciale, ne pourrait pas à mon avis étayer l'exercice du pouvoir fédéral lorsqu'il s'agit de renvoyer le projet à une commission. Comme les services juridiques l'ont fait savoir au ministère de l'Environnement :

[TRADUCTION]

Lorsque la préoccupation du public se rapporte à des questions relevant de la compétence provinciale, la Loi n'interdit pas le renvoi, mais des considérations pratiques le font - c'est-à-dire que l'AR ne serait probablement pas en mesure de donner suite aux recommandations de la commission et que la province peut considérer le renvoi comme un empiétement injustifié sur sa compétence.

À ma connaissance, l'Agence ne renvoyait pas par le passé les projets pour examen public si le gouvernement fédéral n'avait pas le pouvoir législatif de donner suite aux recommandations qui étaient faites à la suite de l'examen. Compte tenu des faits que vous avez porté à mon attention, il semble que la préoccupation du public se rapporte à des questions qui relèvent entièrement de la province. Cela étant, je ne recommanderais pas le renvoi pour examen public.


[181]     Je conclus donc que la décision que le ministre de l'Environnement a prise lorsqu'il s'est agi de renvoyer le projet à une commission n'était pas étayée par un chef valide de compétence fédérale et qu'elle est donc invalide.

7.          CONCLUSION

[182]     Pour les motifs susmentionnés, les demandes de contrôle judiciaire qui ont été présentées dans les dossiers T-1400-99 et T-1993-99 sont accueillies et il est déclaré que la LCEE ne s'applique pas au projet de sorte qu'il n'est pas nécessaire de procéder à un examen en vertu de la LCEE. La demande de contrôle judiciaire qui a été présentée dans le dossier T-1401-99 est rejetée.

[183]     La question des dépens est reportée en attendant que les parties présentent des observations additionnelles.

                      « Eleanor R. Dawson »                

Juge

Ottawa (Ontario)

Le 24 avril 2001

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad .a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU DOSSIER :                                                        T-1401-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                       Hamilton and District Chamber of Commerce

                                                                                         c.

Le ministre de l'Environnement et autres

Nos DES DOSSIERS :                                                  T-1400-99 et T-1993-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                       Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth

                                                                                         c.

Le ministre de l'Environnement et autres

LIEU DE L'AUDIENCE :                                            Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                                           le 27 novembre 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR :                  Madame le juge Dawson

DATE DES MOTIFS :                                                  le 24 avril 2001

ONT COMPARU

Mme Michele Ballagh                                           POUR LA DEMANDERESSE (T-1401-99)

M. L. Frapporti

M. David Estrin                                                   POUR LA DEMANDERESSE (T-1400-99

M. Andrew Lokan                                               et T-1993-99)

M. Peter Vita                                                         POUR LE DÉFENDEUR (dans tous les dossiers)

Mme Janice Rodgers

Mme Anne-Marie Waters


M. Paul Muldoon                                                 POUR L'INTERVENANTE

Mme Theresa McCleneghan                                  (Friends of the Red Hill Valley)

Mme Janet Minor                                                   POUR L'INTERVENANT

M. Richard J.K. Stewart                                      (Procureur général de l'Ontario)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Gowling Lafleur Henderson LLP                       POUR LA DEMANDERESSE (T-1401-99)

Hamilton (Ontario)

Gowling Lafleur Henderson LLP                       POUR LA DEMANDERESSE (T-1400-99

Toronto (Ontario)                                                et T-1993-99)

M. Morris Rosenberg                                           POUR LE DÉFENDEUR (dans tous les dossiers)

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Association canadienne du droit de                    POUR L'INTERVENANTE

   l'environnement                                                 (Friends of the Red Hill Valley)

Toronto (Ontario)

M. Charles Harnick                                              POUR L'INTERVENANT

Procureur général de l'Ontario              (Procureur général de l'Ontario)

Toronto (Ontario)

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