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Date : 20220715


Dossier : IMM‑5010‑21

Référence : 2022 CF 1046

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 15 juillet 2022

En présence de madame la juge Furlanetto

ENTRE :

ZHUQI ZHOU

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision du 2 juillet 2021 [la décision] par laquelle un agent principal [l’agent] a rejeté la demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire présentée en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR].

[2] Comme je l’indique plus loin, je conclus que le demandeur n’a pas rempli le critère strict qui permet d’établir l’existence d’une erreur judiciaire, comme il était tenu de le faire pour démontrer qu’il y avait eu manquement à l’équité procédurale en raison de l’incompétence de son conseil. Toutefois, la décision était déraisonnable, car l’agent ne s’est pas suffisamment penché sur les éléments de preuve présentés par le demandeur et n’a pas suffisamment expliqué pourquoi il rejetait la demande. Par conséquent, la demande sera renvoyée à un autre agent pour qu’il rende une nouvelle décision.

I. Le contexte

[3] Le demandeur, Zhuqi Zhou, est un citoyen de la Chine qui est arrivé au Canada en 2001 afin d’y rejoindre ses frères et sœurs ainsi que son père. Monsieur Zhou est devenu chrétien peu de temps après son arrivée au Canada. Il participe aux activités de son église et fait du bénévolat dans la communauté.

[4] Monsieur Zhou a présenté une demande d’asile qui a été rejetée en 2009. La demande d’autorisation et de contrôle judiciaire qu’il a présentée a été rejetée.

[5] En 2012, M. Zhou a présenté une demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire et une demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR). Les deux ont été rejetées. La demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de l’agent chargé de l’ERAR a été rejetée.

[6] Monsieur Zhou est aujourd’hui âgé de 70 ans. Il n’a pas occupé d’emploi depuis qu’il est au Canada, et il a été impliqué dans deux accidents de vélo qui ont entraîné des douleurs chroniques pour lesquelles il touche des prestations d’invalidité. Il s’agit de la deuxième demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire qu’il présente. C’est un consultant en immigration – aussi pasteur de l’église de M. Zhou – qui l’a rédigée. Monsieur Zhou soutient que son ancien consultant l’a mal représenté et que son incompétence a conduit au rejet de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire.

[7] Le 2 juillet 2021, l’agent a rejeté la demande que M. Zhou avait présentée sur le fondement de motifs d’ordre humanitaire. Lorsqu’il a évalué l’établissement du demandeur au Canada, l’agent a fait état des activités ecclésiastiques de M. Zhou, de son bénévolat communautaire et de ses liens d’amitié. Toutefois, l’agent a conclu que le niveau d’établissement de M. Zhou n’avait rien d’inhabituel pour une personne qui vivait au Canada depuis de nombreuses années dans des circonstances semblables. L’agent a souligné que M. Zhou avait accumulé, sans y avoir droit, du temps de présence effective au Canada depuis sa première demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, et qu’il savait que son renvoi du Canada pourrait avoir lieu à la suite d’une mesure de renvoi exécutoire. L’agent a conclu que la situation de M. Zhou ne justifiait pas l’octroi de l’exemption prévue au paragraphe 25(1) de la LIPR.

II. Les questions en litige et la norme de contrôle

[8] La présente demande de contrôle judiciaire soulève les deux questions suivantes :

  1. Y a‑t‑il eu manquement à l’équité procédurale en raison de l’incompétence de l’ancien consultant en immigration du demandeur?

  2. La décision de l’agent était‑elle déraisonnable?

[9] La compétence du conseil se rattache au droit du demandeur de présenter l’intégralité de sa cause, ce droit constituant une question d’équité procédurale (Galyas c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 250 [Galyas] au para 27). Il convient d’examiner les questions d’équité procédurale au regard de la norme de la décision correcte, même si, à proprement parler, aucune norme de contrôle n’est appliquée. La Cour examine plutôt de telles questions en se demandant si la procédure suivie par le décideur était juste et équitable (Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69, [2019] 1 RCF 121 au para 54; Association canadienne des avocats en droit des réfugiés c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2020 CAF 196 au para 35; Sangha c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 95 au para 13).

[10] La décision au fond qui règle le sort de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable (Raju c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 900 au para 4). Aucune des situations qui réfutent la présomption d’application de la norme de la décision raisonnable aux décisions administratives n’est présente en l’espèce (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] aux para 16‑17).

[11] Lorsqu’elle procède à l’examen du caractère raisonnable, la Cour doit décider si la décision est « fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle » et si elle est « justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, aux para 85‑86; Société canadienne des postes c Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67 aux para 2, 31). La décision dans son ensemble et en contexte administratif est raisonnable lorsqu’elle possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité (Vavilov, aux para 91‑95, 99‑100).

III. La question préliminaire – L’intitulé

[12] Je souligne, à titre préliminaire, que l’intitulé de la présente affaire a été modifié pour tenir compte du défendeur compétent, le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration.

IV. Analyse

A. Y a‑t‑il eu violation de l’équité procédurale en raison de l’incompétence de l’ancien consultant en immigration du demandeur?

[13] Le demandeur soutient que son ancien conseil ne l’a pas informé des exigences auxquelles il devait satisfaire pour bénéficier de la dispense fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. Il affirme que le consultant a admis qu’il ne lui avait pas demandé de fournir des éléments de preuve pour étayer les difficultés qu’il pourrait éprouver s’il retournait en Chine, l’intérêt supérieur de ses neveux et nièces [l’intérêt supérieur de l’enfant] et ses arguments en faveur de son établissement au Canada. Le demandeur affirme que cette omission et le fait que le représentant n’a présenté aucune observation à l’appui de la demande constituent un manquement à l’équité procédurale.

[14] Le défendeur affirme que le critère qui permet d’accorder réparation en cas d’incompétence est exigeant, et que le demandeur n’a pas démontré l’incompétence de son représentant ni l’existence d’un préjudice découlant des actes que celui‑ci a posés. Selon le défendeur, le fait que l’ancien représentant regrette de ne pas avoir présenté plus d’éléments de preuve ne constitue pas une circonstance extraordinaire qui permet de démontrer qu’il y a eu manquement à la justice naturelle. Le défendeur souligne que la conduite du consultant n’a fait l’objet d’aucune plainte officielle auprès d’un organisme de réglementation.

[15] Le critère permettant d’établir qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale en raison d’une représentation incompétente est très rigoureux et ne s’applique que dans des circonstances extraordinaires (Galyas, au para 83; Huynh c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] ACF no 642 au para 23). Les trois critères auxquels le demandeur doit satisfaire pour étayer l’existence d’un manquement à l’équité procédurale en raison d’une représentation incompétente sont les suivants :

1) les actes ou omissions de l’ancien conseil relèvent de l’incompétence, indépendamment de l’avantage de l’analyse et de la sagesse rétrospectives;

2) il existe une probabilité raisonnable que l’issue aurait été différente n’eût été l’incompétence (c.‑à‑d. que le demandeur a subi un préjudice en raison de la conduite constituant une erreur judiciaire);

3) l’ancien représentant a eu une possibilité raisonnable de répondre à l’allégation.

(Galyas, au para 84; R c GDB, 2000 CSC 22 [GDB] aux para 27‑29; Memari c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 1196 [Memari] aux para 33 et 36)

[16] Le point de départ de l’analyse est la présomption que la conduite du représentant se situe à l’intérieur du large éventail de l’assistance professionnelle raisonnable. Il incombe au demandeur de démontrer que les actes ou omissions reprochés au représentant ne découlaient pas de l’exercice d’un jugement professionnel raisonnable. La sagesse rétrospective n’a pas sa place dans cette appréciation (GDB, au para 27; Nik c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 522 au para 24).

[17] La partie qui invoque l’incompétence doit établir qu’elle a subi un préjudice important et que ce préjudice découle des actes ou omissions du conseil incompétent. Il faut démontrer qu’il est raisonnablement probable que, n’eût été les erreurs commises par le conseil, l’issue de l’instance aurait été différente (Jeffrey c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 605 au para 9).

[18] En l’espèce, l’ancien consultant du demandeur a produit une déclaration dans laquelle il attestait avoir aidé le demandeur à remplir sa demande et l’avoir informé des documents à fournir. Il souligne certaines irrégularités dans les renseignements exigés du demandeur et joints à la demande, notamment en ce qui concerne le fait que le demandeur ne toucherait pas de prestations d’aide sociale en Chine et le fait que l’épouse du demandeur réside en Chine et souffre de maladie mentale. L’ancien consultant dit également qu’il aurait dû demander à M. Zhou de fournir des documents supplémentaires pour étayer ses liens familiaux au Canada, sa relation avec ses neveux et nièces, ainsi que sa gestion financière. Voici un extrait de la déclaration de l’ancien consultant :

[traduction]

10. Le demandeur m’a expliqué qu’il n’était admissible à aucune pension en Chine en raison de son absence prolongée de la Chine.

11. Je sais que le gouvernement chinois ne fournit pas ce genre d’aide sociale.

12. Toutefois, je n’ai pas pensé joindre la preuve de ce fait à sa demande.

13. Le demandeur m’a expliqué que son épouse vivait dans des conditions difficiles en Chine parce qu’elle souffrait d’une maladie mentale.

14. Je ne lui ai pas demandé de documents qui auraient permis de le prouver.

15. Je n’ai pas présenté d’observations et je n’ai pas conservé une copie du dossier du demandeur.

16. Le demandeur n’est pas proche de ses frères et sœurs qui vivent en Chine et il entretient des liens étroits avec ses frères et sœurs ainsi que leurs familles établis au Canada.

17. Je comprends aujourd’hui que j’aurais dû lui demander de fournir plus de photos de lui en compagnie des membres de sa famille qui sont ici, et plus de détails sur la façon dont il aide ses frères et sœurs à s’occuper de leurs enfants.

18. Enfin, je sais que le demandeur aurait été en mesure de fournir davantage d’éléments de preuve de sa bonne gestion financière si je lui avais demandé de le faire, mais je ne pensais pas que ce serait nécessaire puisqu’il n’a pas beaucoup d’argent.

19 J’aurais aimé avoir fait un meilleur travail quant à la demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire que M. Zhuqi Zhou a présentée.

[19] Le défendeur soutient que la question qui doit être cruciale dans l’analyse est celle du préjudice. Il affirme que, malgré l’admission de la part de l’ancien consultant du demandeur quant aux lacunes dans la preuve, le demandeur n’a fourni aucun élément de preuve supplémentaire à l’appui de sa demande qui auraient modifié la décision.

[20] Le défendeur affirme qu’il y a lieu d’établir une distinction entre les circonstances de l’espèce et celles de l’affaire Kim c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 687 [Kim], invoquée par le demandeur. Dans l’affaire Kim, la preuve des demandeurs démontrait clairement qu’ils disposaient d’autres éléments de preuve pour étayer leur établissement financier et que, n’eût été l’incompétence de leur conseil, les éléments de preuve auraient été joints à la demande. Dans cette affaire, l’agent avait expressément souligné que les documents permettant d’étayer l’établissement financier étaient insuffisants et que ce défaut était important pour la décision (aux para 17‑24).

[21] Le demandeur s’appuie sur la décision Galyas pour affirmer qu’il n’est pas nécessaire de présenter des éléments de preuve pour démontrer que l’issue aurait été différente. Cependant, j’estime que la décision Galyas suit la décision Kim : il doit y avoir un certain fondement pour établir que l’inconduite a compromis la fiabilité de l’issue de l’affaire et démontrer l’existence d’éléments de preuve supplémentaires. La Cour s’est exprimée comme suit au paragraphe 88 de la décision Galyas :

[88] Je suis également d’avis que la représentation incompétente, du moins en ce qui concerne le FRP, a amené la SPR à juger non crédible la crainte d’être persécuté en Hongrie alléguée par le demandeur, et que le résultat aurait fort bien pu être différent si le demandeur avait eu de l’assistance pour rédiger un FRP satisfaisant aux exigences de la SPR. D’après les motifs de la SPR, celle‑ci a conclu que le demandeur n’était pas crédible après avoir examiné chacun des incidents de persécution évoqués par ce dernier, puis constaté qu’aucun d’entre eux n’était mentionné dans le FRP. Je conviens avec le demandeur que les conclusions fondées sur un FRP inadéquat ont des incidences sur l’ensemble de la décision. De plus, le demandeur a clairement établi dans son affidavit qu’il aurait pu ajouter des éléments de preuve additionnels à l’appui de sa demande si ses anciens conseils lui avaient donné les consignes adéquates.

[22] En l’espèce, les motifs de l’agent ne font pas état d’une preuve insuffisante et n’indiquent pas non plus que l’issue de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire serait différente si le demandeur avait présenté les éléments de preuve qui, selon le consultant, auraient dû être fournis. Il n’existe pas de lien clair entre les motifs pour lesquels l’agent a rejeté cette demande et la représentation incompétente du représentant.

[23] De plus, contrairement à l’affaire Galyas, le demandeur n’a présenté en l’espèce aucun élément de preuve au soutien de sa demande indiquant qu’il aurait pu produire des éléments de preuve supplémentaires s’il avait reçu plus de consignes de la part de son ancien représentant.

[24] Par conséquent, la Cour n’a aucune raison de conclure que, s’agissant de l’intérêt supérieur de l’enfant, le demandeur serait en mesure d’établir le bien‑fondé de ses prétentions à l’égard de ses neveux et nièces, ou même que l’âge de ses neveux et nièces permet d’invoquer l’intérêt supérieur de l’enfant. Dans le même ordre d’idée, rien ne permet de savoir si le demandeur disposait d’autres éléments de preuve concernant ses liens familiaux ni comment ces éléments auraient eu pu influer sur l’analyse relative à l’établissement, le cas échéant.

[25] Il est raisonnable de s’attendre à ce que le consultant ait pu obtenir à partir de sources faisant état de la situation en Chine des renseignements au sujet de son admissibilité à l’aide sociale dans ce pays et fournir d’autres éléments de preuve établissant les difficultés tirés de la documentation relative à ce pays. À tout le moins, j’estime que ces renseignements auraient permis à l’agent de se pencher sur la question des difficultés. Toutefois, en l’absence de commentaires particuliers de la part de l’agent et de renseignements sur l’étendue et le contenu de la preuve concernant la situation dans ce pays, il est difficile de savoir dans quelle mesure de tels éléments de preuve auraient pu influer sur l’issue de la demande, le cas échéant. Pour cette raison, je ne puis conclure que les lacunes relevées dans la déclaration du consultant sont suffisamment préjudiciables pour constituer une erreur judiciaire, étayant ainsi l’existence d’un manquement à l’équité procédurale.

[26] Le défendeur affirme que l’absence d’une plainte officielle auprès d’un organisme de réglementation dénonçant le comportement du consultant est également pertinente en l’espèce, vu que le consultant et le demandeur se connaissent personnellement. Selon la preuve, le consultant est le pasteur du demandeur et il l’a baptisé en 2005. En l’absence d’une plainte officielle, il est possible de déduire que les admissions du consultant sont gratuites et sans conséquence.

[27] Je fais remarquer que l’obligation d’informer un ancien consultant qu’il est visé par une allégation d’incompétence repose sur son droit de pouvoir justifier sa conduite (Basharat c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 559 aux para 14‑15). En l’espèce, nul ne conteste que l’ancien consultant était au courant des allégations d’incompétence formulées contre lui et qu’il y a répondu dans sa déclaration. De plus, aucune raison ne permet de douter de sa déclaration sous serment ou de mettre en doute sa crédibilité. Toutefois, je suis d’accord avec le défendeur pour dire que le contexte dans lequel l’ancien consultant a fait sa déclaration démontre qu’il était possible de savoir en rétrospective quels éléments de preuve auraient pu être déposés pour aider le demandeur, plutôt que de savoir quels éléments de preuve n’ont pas été joints à la demande en raison de l’incompétence.

[28] J’estime que le demandeur n’a pas satisfait aux exigences élevées qui permettent d’établir qu’il y a eu erreur judiciaire en raison de l’incompétence de son consultant.

B. La décision de l’agent était-elle déraisonnable?

[29] Subsidiairement, le demandeur affirme que l’agent a fait une évaluation erronée de sa demande parce qu’il n’a pas fourni de motifs suffisants pour expliquer pourquoi les liens familiaux du demandeur, l’intérêt supérieur de ses neveux et nièces ainsi que les difficultés qu’il éprouverait s’il retournait en Chine ne suffisaient pas pour justifier une dispense fondée sur des motifs d’ordre humanitaire.

[30] Comme l’a souligné le demandeur, les motifs de l’agent sont brefs parce qu’il s’est limité à analyser l’établissement du demandeur, sans examiner la question des liens familiaux et celle des difficultés.

[31] L’agent fait les remarques suivantes dans sa décision : [traduction] « [Le demandeur] a subi des blessures qui continuent de lui causer de l’inconfort et il prend des analgésiques pour se soulager. Il compte sur les prestations du POSPH pour son subvenir à ses besoins. » Or, l’agent n’examine pas comment ces blessures et ces prestations pourraient être affectées si le demandeur retournait en Chine. Il ne dit rien non plus au sujet de la déclaration du demandeur selon laquelle, s’il retournait en Chine, il n’aurait pas de pension ou d’assurance‑maladie. Bien que la preuve sur ces aspects soit mince, je suis d’accord avec le demandeur pour dire que l’analyse aurait néanmoins dû porter sur ces facteurs pour régler la question des difficultés.

[32] Dans le même ordre d’idée, l’agent dit seulement dans sa décision que [traduction] « le demandeur a trois frères et sœurs résidant au Canada, avec lesquels il entretient des liens étroits », mais il ne fait aucune analyse quant à l’impact de ces liens familiaux sur l’établissement. Le demandeur a indiqué dans sa demande que l’intérêt supérieur de l’enfant ne s’appliquait pas à lui, mais ses liens familiaux avec ses frères et sœurs et ses neveux et nièces sont néanmoins toujours pertinents pour son établissement. L’agent n’a pas démontré qu’il avait tenu compte des témoignages des frères et sœurs du demandeur ni fait état de la manière dont il les avait pris en compte dans son analyse relative à l’établissement.

[33] À mon avis, il incombait à l’agent de montrer dans ses motifs qu’il avait tenu compte de la preuve et d’expliquer pourquoi cette preuve n’était pas suffisante pour accorder la dispense fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. À mon avis, l’insuffisance des motifs rend la décision déraisonnable, de sorte qu’elle devrait être renvoyée à un autre agent pour qu’il statue à nouveau.

[34] Pour ces motifs, la demande est accueillie.

[35] Aucune question à certifier n’a été soulevée par les parties et le présent dossier n’en soulève aucune.

 


JUGEMENT dans le dossier IMM‑5010‑21

La Cour statue :

  1. L’intitulé est modifié afin de désigner le défendeur compétent, le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration.

  2. La demande est accueillie, la décision du 2 juillet 2021 est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour qu’il statue à nouveau.

  3. Il n’y a aucune question à certifier.

« Angela Furlanetto »

Juge

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑5010‑21

 

INTITULÉ :

ZHUQI ZHOU c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE:

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 5 juillet 2022

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE FURLANETTO

 

DATE DES MOTIFS :

Le 15 juillet 2022

 

COMPARUTIONS :

Anna Aazam

 

Pour le demandeur

 

Rachel Hepburn Craig

 

Pour LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Anna Aazam

Avocate

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour LE Défendeur

 

 

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