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Date : 20220706

Dossier : IMM-7504-19

Référence : 2022 CF 999

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 6 juillet 2022

En présence de monsieur le juge Andrew D. Little

ENTRE :

YUEYOU GUAN

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS MODIFIÉS

[1] Dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire, la demanderesse demande à la Cour d’annuler la décision rendue le 4 novembre 2019 par un gestionnaire adjoint du programme de migration (l’agent), au consulat général du Canada à Hong Kong. L’agent a rejeté sa demande d’autorisation de retour au Canada (ARC) au titre du paragraphe 52(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR).

[2] La demanderesse est une citoyenne de la Chine. Son époux actuel et elle ont eu deux fils, ils ont divorcé, puis ils se sont remariés. Les deux fils sont maintenant des résidents permanents du Canada.

[3] En 2004, la demanderesse est venue au Canada pour rendre visite à ses fils, qui étudiaient au pays à cette époque. Elle a présenté une demande d’asile au Canada, au motif qu’elle était une adepte du Falun Gong.

[4] En juin 2006, la Section de la protection des réfugiés a rejeté sa demande. La Cour a par la suite rejeté la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire que la demanderesse avait présentée à l’égard de cette décision.

[5] Pendant qu’elle était au Canada, la demanderesse a rencontré son deuxième mari; le mariage a eu lieu en octobre 2007. Son deuxième mari a demandé à la parrainer. Entre-temps, une mesure d’interdiction de séjour a été prise contre la demanderesse, et cette mesure est devenue une mesure de renvoi. La demanderesse a quitté le Canada le 15 août 2009.

[6] À son retour en Chine, la demanderesse est allée vivre avec son ancien mari, parce qu’elle n’avait apparemment nulle part d’autre où aller.

[7] En mars 2015, son deuxième mari et elle ont divorcé. En avril 2015, elle s’est remariée avec son premier mari. Ils sont toujours mariés en date de la présente demande.

[8] En octobre 2015, la demanderesse a présenté une demande de visa de résident temporaire (VRT) pour venir rendre visite à ses fils au Canada. À ce moment‑là, ils étaient tous les deux des résidents canadiens. La demande de VRT a été rejetée.

[9] En janvier 2016, Yufu, l’un des fils de la demanderesse, a demandé à parrainer ses parents, c’est-à-dire la demanderesse et son mari, pour qu’ils deviennent des résidents permanents au Canada.

[10] En janvier 2018, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) a interviewé la demanderesse et son mari à Hong Kong. À la fin de l’entrevue, l’agent a déclaré qu’il n’était pas convaincu que la relation entre la demanderesse et son mari était authentique. L’agent a retiré le nom de la demanderesse de la demande de résidence permanente, mais a poursuivi le traitement de la demande de parrainage du mari présenté par le fils.

I. La décision défavorable relative à l’ARC

[11] En août 2019, la demanderesse a présenté une demande d’ARC pour qu’elle puisse quitter la Chine et venir au Canada, afin d’être avec son mari et ses fils. Ces derniers sont tous les deux mariés et ont eux‑mêmes des enfants. Les parents de la demanderesse vivaient en Chine, et ils sont maintenant morts. Elle est séparée de ses fils depuis 15 ans et elle vit seule en Chine, sans son mari.

[12] Dans sa demande d’ARC, la demanderesse a invoqué les problèmes occasionnés par la séparation de la famille, en particulier son bien-être sur les plans émotionnel, mental et financier et celui des membres de sa famille. Elle a reconnu qu’elle avait contrevenu aux lois canadiennes en matière d’immigration en ne partant pas dans le délai prescrit suivant la prise de la mesure d’interdiction de séjour, mais a souligné qu’elle était partie comme elle le devait lorsque cette mesure était devenue une mesure d’expulsion exécutoire. Selon la demanderesse, la mesure de renvoi remonte à dix ans, et elle n’a aucunement l’intention de se comporter à nouveau de la manière qui a mené à la délivrance de la mesure d’interdiction de séjour.

[13] Comme il est souligné plus haut, l’agent a rejeté la demande d’ARC présentée par la demanderesse, et le lui a signifié dans une lettre datée du 4 novembre 2019. Après avoir fait référence au paragraphe 52(1) de la LIPR, l’agent a déclaré qu’il n’existait aucun motif impérieux de mettre les dispositions de cette loi de côté et de permettre à la demanderesse d’entrer au Canada. Elle demeurait donc interdite de territoire au Canada.

[14] Dans les notes qu’il a consignées dans le Système mondial de gestion des cas (le SMGC), l’agent a affirmé que la demanderesse avait [traduction] « affiché de longs antécédents de fausses déclarations et de non-respect délibéré sur une période de plus de dix ans ». L’agent a conclu que, dans la demande de VRT qu’elle avait présentée en 2015, la demanderesse n’avait pas déclaré qu’un visa lui avait déjà été refusé par les États-Unis. De plus, dans la demande de parrainage en vue d’obtenir la résidence permanente qu’elle avait présentée en 2016, elle n’avait pas déclaré son mariage antérieur ni le rejet de sa demande de résidence permanente présentée en 2009. L’agent a aussi conclu que la demanderesse et son mari avaient donné [traduction] « des raisons contradictoires » lorsqu’ils avaient été interrogés sur la demande d’asile de la demanderesse et son séjour au Canada, et a ajouté que le mari et la femme ne l’avaient pas convaincu que leur relation était authentique — ils [traduction] « ne semblaient être ensemble que pour les besoins du parrainage ».

[15] L’agent n’a vu aucun élément de preuve démontrant que la demanderesse avait assumé la responsabilité pour les gestes qu’elle avait commis au fil des ans et qui avaient mené à la délivrance de la mesure de renvoi, ni pour le fait qu’elle avait fourni des renseignements faux ou incomplets dans ses demandes. L’agent n’a pas conclu que le fait, pour la demanderesse, d’être séparée de sa famille constituait un [traduction] « motif impérieux suffisant pour justifier l’octroi » d’une ARC. L’agent n’a pas conclu que la demanderesse se trouvait aux prises avec des difficultés déraisonnables ou injustifiées. De plus, [traduction] « [s]i elle est séparée de sa famille au Canada, c’est parce qu’elle n’a pas été honnête avec le gouvernement du Canada et qu’elle a, de manière répétée, posé des gestes qui contrevenaient aux lois et aux règlements ».

II. La position de la demanderesse devant la Cour

[16] S’appuyant sur l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, la demanderesse conteste le caractère raisonnable du rejet de sa demande d’ARC pour les motifs suivants :

  • a) l’agent n’a pas tenu valablement compte des questions centrales soulevées dans la demande qu’elle avait présentée, et ne s’y est pas attaqué de façon significative. Les motifs de l’agent n’étaient axés que sur la séparation de la famille, sans égard aux autres questions qu’elle avait soulevées (citant Vavilov, aux para 127, 128);

  • b) l’agent a mal interprété la preuve.

III. La norme de contrôle

[17] La norme de contrôle applicable à la décision de l’agent est la décision raisonnable, comme la décrit l’arrêt Vavilov. Le contrôle selon la norme de la décision raisonnable consiste en une appréciation empreinte de retenue et rigoureuse, qui vise à déterminer si une décision administrative est transparente, intelligible et justifiée : Vavilov, aux para 12, 13, 15; Quintero Pacheco c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 347, aux para 27, 28.

[18] Les motifs du décideur, qui doivent être interprétés de façon globale et contextuelle, et lus en corrélation avec le dossier dont était saisi le décideur, sont le point de départ du contrôle : Vavilov, aux para 91, 96, 97, 103; Société canadienne des postes c Syndicat des travailleurs et des travailleuses des postes, 2019 CSC 67 aux para 28-33. Une décision raisonnable doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti : Vavilov, en particulier aux para 85, 99, 101, 105, 106, 194; Entertainment Software Association c Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2020 CAF 100 aux para 24-35. La cour de révision doit pouvoir discerner une « explication motivée » pour les principaux aspects de la décision : Alexion Pharmaceuticals Inc v Canada (Procureur général), 2021 CAF 157, aux para 7, 32, 64-66, 70.

IV. Analyse

A. L’agent a-t-il omis de tenir compte des questions centrales soulevées dans la demande d’ARC?

[19] La demanderesse a soutenu que l’agent s’était concentré exclusivement sur la séparation de la famille et qu’il ne s’était pas penché sur les autres observations qu’elle avait présentées à l’appui de sa demande d’ARC. Plus précisément, la demanderesse a soutenu que les quatre points suivants étaient hautement pertinents aux fins de l’appréciation de sa demande :

  • la raison invoquée par la demanderesse pour justifier le fait qu’elle était restée au Canada au-delà du délai prescrit suivant la prise de la mesure d’interdiction de séjour, à savoir qu’elle craignait de retourner en Chine du fait de son appartenance au Falun Gong;

  • le fait qu’elle s’était présentée à des bureaux de l’ASFC pendant que la mesure de renvoi était en vigueur, et était retournée en Chine quand avait été prise contre elle une mesure d’expulsion exécutoire;

  • la violation commise en matière d’immigration remontait à plus de dix ans avant sa demande d’ARC, et son dossier était sans tache depuis;

  • le fait qu’elle n’avait pas de dossier criminel et ne serait pas un danger pour le public canadien si elle était autorisée à revenir et à rester au Canada.

[20] La demanderesse a aussi fait référence à l’orientation fournie aux agents dans un manuel relatif au traitement des demandes à l’étranger intitulé OP 1 — Procédures. À la section 6.2, il est dit aux agents qui examinent une demande d’ARC de tenir compte de la gravité de l’infraction à la LIPR qui a mené au renvoi, des antécédents de collaboration du demandeur avec IRCC et des motifs de la demande de revenir au Canada. La demanderesse a fait valoir que l’agent n’avait tenu compte d’aucune de ces trois questions.

[21] La décision de l’agent d’accorder ou de refuser une ARC au titre du paragraphe 52(1) de la LIPR était relativement sans contrainte. Aucune des parties n’a laissé entendre que la LIPR ou ses règlements contenaient un critère quelconque. Dans différentes décisions, les décideurs ont laissé entendre qu’il n’existait pas de démarche à suivre ou de liste obligatoire de facteurs devant être examinés par l’agent : Dheskali c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 1191 au para 14; Quintero Pacheco, au para 51; Akbari c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2006 CF 1421 aux para 8, 11. Un agent doit tenir compte de toutes les circonstances de l’affaire dont il est saisi, de la raison d’être du paragraphe 52(1) et du contexte global des objectifs de la LIPR : Dheskali, au para 14; Akbari, au para 11.

[22] Dans des décisions antérieures, la Cour a typiquement décrit les décisions relatives à l’ARC comme étant des décisions discrétionnaires qui reposaient sur les faits et qui commandaient une grande retenue : Dheskali, au para 14 (citant Dirir c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1547 au para 24); Del Rio c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 737 au para 7; Parra Andujo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 731 aux paras 23, 31; Umlani c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1373 au para 60).

[23] Les parties dans la présente affaire ont toutes deux convenu que l’agent pouvait tenir compte de la question de savoir s’il existait des « motifs impérieux » pour accorder une ARC. Dans la décision Dheskali, la juge Strickland a conclu que l’agent pouvait se demander s’il existait des motifs impérieux d’octroyer une ARC, compte tenu de toutes les circonstances ayant donné lieu à la prise d’une mesure de renvoi contre le demandeur (au para 23). La juge Strickland a aussi conclu qu’un agent pouvait examiner les antécédents d’un demandeur en matière d’immigration (au para 15), la question de savoir si ces antécédents montraient que le demandeur contreviendrait de nouveau aux lois en matière d’immigration (au para 23) et une variété « [d’]autres considérations découlant de la demande », y compris l’importance du motif de la visite proposée ainsi que la situation particulière du demandeur et des membres de sa famille au Canada (aux para 16-18).

[24] En l’espèce, l’agent a examiné le motif central invoqué par la demanderesse pour demander une ARC, à savoir sa réunification avec les membres de sa famille et l’impact de leur séparation. L’agent n’a pas conclu que ce motif était suffisamment impérieux pour accorder une ARC à la demanderesse. L’agent n’a constaté aucune difficulté déraisonnable ou injustifiée, et la demanderesse n’a fait aucune allégation à ce sujet. L’agent a conclu qu’elle n’avait pas assumé la responsabilité pour ses gestes ayant mené à son renvoi du Canada ou pour le fait qu’elle avait fourni des renseignements faux ou incomplets dans ses demandes en matière d’immigration. Elle était séparée de sa famille en raison de sa propre conduite. Elle n’a pas démontré que le fait de tenir compte de ces facteurs constituait une erreur susceptible de contrôle.

[25] Je suis d’avis que les arguments de la demanderesse fondés sur les quatre points ci-dessus reviennent à demander à la Cour d’apprécier à nouveau, sur le fond, la gravité du non-respect, par la demanderesse, des lois et des ordonnances canadiennes en matière d’immigration, ce que la Cour n’est pas autorisée à faire dans le cadre de la présente demande : Vavilov, aux para 125, 126. Je précise qu’aucun des quatre points supplémentaires de la demanderesse ne représente un motif indépendant de lui accorder une ARC. Il s’agit en fait de contre-arguments pour tenter de répondre aux motifs invoqués par l’agent pour justifier son refus de lui accorder une ARC en raison de ses antécédents en matière d’immigration. L’observation de la demanderesse selon laquelle l’agent aurait dû en traiter expressément dans les motifs ne révèle pas une erreur dans le raisonnement suivi, comme le prévoit l’arrêt Vavilov. Je ne peux pas non plus conclure que les quatre points, individuellement ou collectivement, représentaient une telle contrainte à la décision de l’agent que ce dernier devait en tenir compte.

[26] Bien que la demanderesse ait soutenu que les motifs de l’agent étaient insuffisants, je suis convaincu que les notes consignées par ce dernier dans le SMGC contiennent une explication motivée pour une décision prise au titre du paragraphe 52(1) de la LIPR, conformément aux arrêts Vavilov et Alexion Pharmaceuticals.

B. L’agent a-t-il mal interprété la preuve?

[27] La demanderesse a présenté quatre observations pour étayer son argument selon lequel l’agent avait mal interprété la preuve.

[28] Dans sa première observation, la demanderesse a soulevé des questions au sujet de la transparence, faisant valoir qu’il était difficile de savoir sur quoi l’agent s’était appuyé pour rendre sa décision, puisque le dossier certifié du tribunal (le DCT) ne contenait pas toutes les demandes présentées antérieurement par la demanderesse, notamment sa demande de VRT de 2015 ainsi que ses demandes de résidence permanente de 2016 et 2018 (parrainées par son fils). La demanderesse a reproché à l’agent le fait qu’il se soit apparemment fondé sur les notes consignées au SMGC plutôt que sur les demandes mêmes.

[29] La demanderesse a également fait référence à des décisions de la Cour où il est mentionné qu’une décision peut être annulée si le DCT est incomplet, c’est-à-dire s’il ne contient pas tous les documents sur lesquels l’agent s’est appuyé pour rendre une décision : Narcisse c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 514 aux paras 16-18; Li c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 498 au para 15.

[30] En l’espèce, je ne conclus pas qu’il y a une cause suffisante pour justifier l’annulation de la décision au motif que le DCT est incomplet.

[31] Il est vrai que le DCT ne contient pas toutes les demandes que la demanderesse avait déjà présentées à IRCC. Cependant, dans le dossier de sa demande, la demanderesse a choisi de contester la décision de l’agent en déposant toutes les demandes sous-jacentes dans le but de montrer que le raisonnement qui ressortait des notes consignées par l’agent dans le SMGC était déraisonnable. L’argument de la demanderesse était centré sur la question de savoir si l’absence de documents entraînait des préoccupations supplémentaires quant à la transparence et à l’intelligibilité des motifs exposés par l’agent dans ses notes au SMGC. La demanderesse n’a présenté aucune observation au sujet de l’équité procédurale liée au contenu du DCT (ou à ce qui ne se trouvait pas dans le DCT).

[32] Je suis d’avis que les notes du SMGC montrent suffisamment clairement ce sur quoi l’agent s’est appuyé pour refuser une ARC. Bien qu’il ait commencé ses notes en mentionnant ce qui suit : [traduction] « Dossier, notes et documents examinés », l’agent a également explicitement fait état, d’une part, du fait que la demanderesse n’avait pas fait une divulgation complète de ses demandes antérieures de VRT de 2015 et de sa demande de résidence permanente de 2016 et, d’autre part, de ses réponses lors d’une entrevue en lien avec cette dernière demande. Je suis convaincu qu’à la lecture des notes au SMGC, la demanderesse a compris les préoccupations de l’agent. Du point de vue de la Cour, il y avait suffisamment d’information dans les notes du SMGC et dans le dossier de la demande pour effectuer un contrôle judiciaire approprié ainsi que pour comprendre les préoccupations de l’agent relativement au paragraphe 52(1) : voir Administration de l’aéroport international de Vancouver c Alliance de la fonction publique du Canada, 2010 CAF 158, [2011] 4 RCF 425, au para 16d). Le dossier indique que l’agent avait bel et bien examiné toutes les demandes, et ces dernières ont été présentées à la Cour.

[33] Compte tenu de la manière dont la demanderesse a articulé ses observations relatives à la transparence et à l’intelligibilité, du contenu du dossier de sa demande et des notes consignés au SMGC, je ne juge pas approprié d’annuler la décision au seul motif que le DCT était incomplet. Voir Togtokh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 581 au para 16; Patel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 804 aux para 29-32; Torales Bolanos c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 388 au para 52.

[34] La deuxième observation de la demanderesse était que le contenu de la demande de VRT de 2015 et celui de la demande de résidence permanente de 2016 contredisaient la conclusion de l’agent. La demanderesse a présenté un argument complexe pour expliquer ce qu’elle voulait dire en cochant une case dans son formulaire, puis a énuméré certains refus qu’elle avait reçus, mais pas tous. À l’appui de son argument, la demanderesse a demandé à la Cour de tirer des conclusions ou des inférences différentes de celles de l’agent quant à ses intentions lorsqu’elle avait rempli ses demandes d’immigration. En l’absence de circonstances exceptionnelles (et l’affaire ne présente pas de telles circonstances), la Cour ne peut pas modifier les conclusions de l’agent dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire : arrêt Vavilov, au para 125.

[35] Dans sa troisième observation, la demanderesse a soutenu que l’agent aurait dû examiner [traduction] « l’entièreté » de ses demandes et qu’il n’avait pas tenu compte de sa demande de résidence permanente de 2018 ni de sa demande d’ARC de 2019. Il a plutôt examiné les demandes présentées en 2015 et en 2016. Cet argument est sans fondement. Il était loisible à l’agent de s’appuyer sur des omissions et des déclarations fausses faites dans l’un ou l’autre des formulaires d’immigration de la demanderesse, et de conclure qu’elles étaient pertinentes et importantes, eu égard à la décision à rendre concernant l’ARC. De la même manière, l’agent aurait pu conclure que les omissions ou les déclarations fausses étaient sans importance ou qu’elles avaient été faites de bonne foi. Si l’agent ne s’est pas fondamentalement mépris sur des éléments de preuve substantiels ou qu’il n’a pas omis d’en tenir compte (rien de cela ne s’est produit en l’espèce), la Cour ne modifiera pas la conclusion de l’agent : Vavilov, au para 126; Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F‑7, alinéa 18.1(4)d).

[36] Dans sa quatrième et dernière observation, la demanderesse a soutenu que les réponses qu’elle et son époux avaient données à Hong Kong, lors de l’entrevue, n’étaient pas contradictoires comme l’avait conclu l’agent. Elle a soutenu que, contrairement à la conclusion tirée par un agent en 2016 et sur laquelle l’agent en l’espèce s’est appuyé pour rendre sa décision concernant la demande d’ARC, son mariage est bel et bien authentique. Une fois de plus, la Cour ne peut apprécier à nouveau la preuve au dossier : arrêt Vavilov, au para 125.

[37] Ayant lu les passages pertinents des notes d’entrevue dont ont fait état les avocats des parties, je ne constate aucune erreur susceptible de contrôle dans l’appréciation du dossier par l’agent. Je ne vois pas clairement comment la demanderesse peut contester la conclusion de l’agent précédent dans le cadre de la présente demande; il n’était pas déraisonnable pour l’agent en l’espèce de s’appuyer sur cette conclusion.

V. Conclusion

[38] La demande sera donc rejetée. Il n’y a pas de question à certifier.

JUGEMENT dans le dossier IMM-7504-19

LA COUR STATUE que :

  1. La demande est rejetée;

  2. Aucune question n’est certifiée au titre de l’alinéa 74d) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.

« Andrew D. Little »

Juge

Traduction certifiée conforme

Christian Laroche, LL.B., juriste‑traducteur


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-7504-19

 

INTITULÉ :

YUEYOU GUAN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETE ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 8 MARS 2022

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :

LE JUGE A. D. LITTLE.

 

DATE DES MOTIFS ET DU JUGEMENT :

LE 6 juillet 2022

 

COMPARUTIONS :

Mitchell Pearlmutter

 

Pour la demanderesse

 

Leanne Briscoe

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Chantal Desloges

Desloges Law Group

Toronto (Ontario)

Pour la demanderesse

 

Leanne Briscoe

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

 

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