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Date : 20220421


Dossier : T‑1269‑21

Référence : 2022 CF 578

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 21 avril 2022

En présence de monsieur le juge Henry S. Brown

ENTRE :

JASON GIRARD

demandeur

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Nature de l’affaire

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue le 5 juillet 2021 [la décision] par le Centre des pensions du gouvernement du Canada [le Centre des pensions] au titre de la Loi sur la pension de retraite de la Gendarmerie royale du Canada, LRC (1985), c R‑11 [la Loi sur la pension de retraite]. Le litige porte sur la question de savoir si le demandeur, membre de la Gendarmerie royale du Canada [GRC] qui a été déclaré coupable d’avoir contrevenu au code de déontologie de la GRC et a reçu l’ordre de démissionner dans les 14 jours suivants, faute de quoi il serait congédié, a droit à la « valeur de transfert » de ses droits à pension ou à une annuité possible (pension), selon la discrétion du Conseil du Trésor. Le Centre des pensions a décidé que le demandeur n’avait droit qu’au remboursement des contributions avec intérêts.

II. Les faits

[2] Le demandeur était un agent de la GRC qui, le 20 novembre 2020, a été déclaré coupable par le comité de déontologie de la GRC d’avoir contrevenu à cinq dispositions du code de déontologie établi en vertu de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, LRC (1985), c R‑10 [la Loi sur la GRC].

[3] En conséquence, agissant au titre de l’alinéa 45(4)b) de la Loi sur la GRC, le comité de déontologie a pris les mesures disciplinaires suivantes à l’égard du demandeur :

[traduction]

  • Allégations 1, 2 et 3 : réprimande et confiscation de solde de 20 jours.

  • Allégations 4 et 5 : j’ordonne à l’agent Girard de démissionner. S’il ne s’exécute pas dans les 14 jours suivants, j’ordonne qu’il soit congédié.

[4] Le demandeur a démissionné le 3 décembre 2020, à l’intérieur du délai de 14 jours qui lui était accordé par le comité de déontologie.

[5] Il a subséquemment reçu du Centre des pensions deux trousses d’information l’avisant de ses droits aux termes de la Loi sur la pension de retraite.

[6] Selon la première trousse, qui portait la date du 11 décembre 2020, deux options s’offraient à lui : une annuité différée payable à l’âge de 60 ans (d’une valeur estimative de 1 482,21 $ par mois) ou une valeur de transfert payable immédiatement, d’une valeur estimative de 382 894,70 $ avant impôts. Le demandeur a choisi le paiement en une somme globale de la valeur de transfert. Il s’est donc désisté de l’appel qu’il avait précédemment déposé à l’égard de la décision du comité de déontologie, parce qu’il savait qu’il ne pourrait toucher la valeur de transfert pendant que son appel serait en cours.

[7] Le défendeur affirme que l’avis du Centre des pensions concernant le droit du demandeur à un transfert de la valeur reposait sur une compréhension erronée du droit à pension de celui‑ci.

[8] En conséquence, le 2 mars 2021, le Centre des pensions a fait parvenir au demandeur une seconde trousse d’information fondée cette fois‑ci sur l’application du paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite au droit à pension du demandeur. Le Centre des pensions a dit au demandeur que deux options s’offraient à lui : soit un remboursement de contributions (avec intérêts) au titre de l’alinéa 11(4)a), lequel montant était évalué à 104 797,27 $ avant impôts, soit une annuité viagère selon le montant qu’établirait le Conseil du Trésor au titre de l’alinéa 11(4)b). Le paiement d’une valeur de transfert n’était pas mentionné dans cette trousse. Le demandeur a téléphoné au Centre des pensions afin de lui demander de « corriger le montant », en vain.

[9] Le demandeur a été informé de son droit de solliciter des conseils juridiques indépendants. Comme il avait besoin de l’argent, il a demandé un remboursement de contributions avec intérêts en signant un formulaire en ce sens le 11 mars 2021. Il a expressément renoncé à son droit à une annuité viagère selon le montant qu’établirait le Conseil du Trésor.

[10] Le 2 juin 2021, le demandeur a contesté l’application du paragraphe 11(4) par le Centre des pensions, soutenant qu’il avait droit à la valeur de transfert de sa pension. Subsidiairement, il a demandé au Conseil du Trésor de se pencher sur la question d’une possible annuité viagère.

[11] Le Centre des pensions a examiné la question et, dans une décision portant la date du 5 juillet 2021, il a confirmé sa position au sujet de l’application du paragraphe 11(4), concluant que le demandeur n’avait droit qu’à un remboursement de contributions avec intérêts. Le Centre des pensions a également confirmé sa décision précédente de ne pas renvoyer l’affaire au Conseil du Trésor, parce que le demandeur avait renoncé à ce droit sur le formulaire de choix qu’il avait signé le 11 mars 2021. C’est cette décision qui fait l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

III. La décision faisant l’objet du contrôle

[12] Voici des extraits pertinents de la décision du Centre des pensions :

[traduction]
En décembre 2020, une trousse d’information sur la retraite vous a été envoyée par la poste. Cette trousse avait été préparée en fonction du motif de votre départ, soit un renvoi volontaire. En janvier 2021, une trousse d’information modifiée a été envoyée, car le Centre des pensions a été informé que votre renvoi devrait être considéré comme un congédiement pour inconduite. Cet avis est fondé sur le fait que votre démission a eu lieu après une audience disciplinaire, à l’issue de laquelle le comité de déontologie vous a ordonné de démissionner en vertu du paragraphe 45(4) de la
Loi sur la GRC. En conséquence, votre emploi a pris fin par suite d’une inconduite et le paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite de la GRC a été appliqué.

Le 11 mars 2021, vous avez signé un formulaire sur lequel vous avez opté pour un remboursement de contributions. Cette prestation vous a été versée le 25 mars 2021. Tel qu’il est mentionné sur le formulaire de choix de prestation de pension que vous avez signé le 11 mars, en optant pour le remboursement de contributions, vous choisissi+ez de renoncer à la possibilité de toucher une annuité viagère selon le montant établi par le Conseil du Trésor.

IV. Les questions en litige

[13] Le demandeur soutient que les questions en litige sont les suivantes :

  1. Le Centre des pensions a‑t‑il refusé de manière déraisonnable d’accorder au demandeur une prestation de valeur de transfert au titre de l’article 12.1 de la Loi sur la pension de retraite?

  2. Subsidiairement, le Centre des pensions a‑t‑il interprété de manière déraisonnable le paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite en concluant que cette disposition s’appliquait aux membres de la GRC qui avaient reçu l’ordre de démissionner?

  3. Subsidiairement, le Centre des pensions a‑t‑il refusé de manière déraisonnable de transmettre au Conseil du Trésor la demande du demandeur, qui souhaitait que le Conseil exerce son pouvoir discrétionnaire de façon à lui accorder une prestation de pension majorée en vertu de l’alinéa 11(4)b) de la Loi sur la pension de retraite?

[14] De l’avis du défendeur, les questions en litige sont les suivantes :

  1. Le Centre des pensions a‑t‑il décidé de manière déraisonnable que le paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite s’appliquait au demandeur, parce que le comité de déontologie a ordonné à celui‑ci de démissionner de la GRC au titre du paragraphe 45(4) de la Loi sur la GRC?

  2. Subsidiairement, le Centre des pensions a‑t‑il omis de manière déraisonnable de renvoyer l’affaire au Conseil du Trésor afin que celui‑ci exerce son pouvoir discrétionnaire en vertu de l’alinéa 11(4)b) de la Loi sur la pension de retraite?

[15] La question à trancher est celle de savoir si la décision est raisonnable

V. La norme de contrôle

[16] Le demandeur et le défendeur soutiennent tous les deux que la norme de contrôle applicable est la norme de la décision raisonnable et je suis d’accord avec eux.

[17] La présente affaire porte d’abord et avant tout sur l’interprétation de textes de loi. Cela signifie que la Cour devrait commencer par examiner le libellé, le contexte et l’objet du texte de loi pour comprendre l’« état de la situation », puis analyser la décision du Centre des pensions pour savoir s’il a fait une interprétation raisonnable de la disposition : voir l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c Mason, 2021 CAF 156 [jugement du juge Stratas, auquel ont souscrit les juges Rennie et MacTavish] aux para 16‑19, autorisation d’interjeter appel à la CSC accordée, no 39855 (3 mars 2022) :

[16] L’arrêt Hillier [Hillier c Canada (Procureur général), 2019 CAF 44) commence par rappeler aux cours de révision trois éléments fondamentaux dont elles doivent tenir compte dans les examens effectués selon la norme de la décision raisonnable. Premièrement, dans de nombreuses affaires, un éventail d’options d’interprétation peut s’offrir au décideur administratif, selon le texte, le contexte et l’objet de la loi. Deuxièmement, dans certaines affaires en particulier, le décideur administratif peut être plus en mesure que les cours d’apprécier cet éventail d’options, en raison de sa spécialisation et de son expertise. Enfin, troisièmement, la loi, c’est‑à‑dire le texte législatif que les cours de révision sont tenues d’appliquer, confère non pas aux cours de révision, mais aux décideurs administratifs la responsabilité d’interpréter la loi.

[17] Pour ces motifs, l’arrêt Hillier dit aux cours de révision de laisser aux décideurs administratifs la latitude voulue par le législateur, mais les oblige néanmoins à se justifier. Pour y arriver, les cours de révision peuvent procéder à une analyse préliminaire du texte, du contexte et de l’objet de la loi, simplement pour comprendre l’état de la situation, avant d’examiner les motifs du décideur administratif. Elles doivent toutefois se limiter à cette analyse. Elles ne doivent pas elles‑mêmes rendre des décisions ou des conclusions définitives. Si c’était le cas, elles établiraient alors leur propre critère pour jauger l’interprétation du décideur administratif et s’assurer que cette interprétation est la bonne.

[18] L’arrêt Hillier invite plutôt la cour de révision à « examiner l’interprétation du décideur administratif, à la lumière de ce que ce dernier invoque pour l’étayer et de ce que les parties soulèvent pour ou contre », en tentant de comprendre la démarche du décideur et les motifs qui l’ont amené à rendre la décision qu’il a rendue : Hillier, par. 16.

[19] Selon cette approche, la cour de révision n’agit pas de manière [traduction] « externe », c’est‑à‑dire [traduction] « arriver à une conclusion définitive quant à la meilleure façon d’interpréter la disposition législative en cause avant d’examiner si l’interprétation faite par le décideur correspond à [l’]interprétation privilégiée ». Comme l’a noté le professeur Daly, la cour de révision agit plutôt d’une manière [traduction] « interne », c’est‑à‑dire qu’elle procède à [traduction] « un examen relativement sommaire de la disposition en litige, dans le but d’analyser la rigueur de l’interprétation qu’en a faite le décideur ». Voir Paul Daly, « Waiting for Godot: Canadian Administrative Law in 2019 » (en ligne à l’adresse : https://canlii.ca/t/t23p, p. 11).

[18] En ce qui concerne le caractère raisonnable, dans l’arrêt Société canadienne des postes c Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67, rendu en même temps que l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], la majorité de la Cour suprême du Canada explique, sous la plume du juge Rowe, les attributs que doit présenter une décision raisonnable et les exigences imposées à la cour de révision qui contrôle une décision selon la norme du caractère raisonnable, soulignant les contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti :

[31] La décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, par. 85). Par conséquent, lorsqu’elle procède au contrôle d’une décision selon la norme de la décision raisonnable, « une cour de révision doit d’abord examiner les motifs donnés avec “une attention respectueuse”, et chercher à comprendre le fil du raisonnement suivi par le décideur pour en arriver à [l]a conclusion » (Vavilov, par. 84, citant Dunsmuir, par. 48). Les motifs devraient être interprétés de façon globale et contextuelle afin de comprendre « le fondement sur lequel repose la décision » (Vavilov, par. 97, citant Newfoundland Nurses).

[32] La cour de révision devrait se demander si la décision dans son ensemble est raisonnable : « ce qui est raisonnable dans un cas donné dépend toujours des contraintes juridiques et factuelles propres au contexte de la décision particulière sous examen » (Vavilov, par. 90). Elle doit se demander « si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci » (Vavilov, par. 99, citant Dunsmuir, par. 47 et 74, et Catalyst Paper Corp. c. North Cowichan (District), 2012 CSC 2, [2012] 1 R.C.S. 5, par. 13).

[33] Lors d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, « [i]l incombe à la partie qui conteste la décision d’en démontrer le caractère déraisonnable » (Vavilov, par. 100). La partie qui conteste la décision doit convaincre la cour de justice que « la lacune ou la déficience [invoquée] [. . .] est suffisamment capitale ou importante pour rendre [la décision] déraisonnable » (Vavilov, par. 100).

[Non souligné dans l’original.]

[19] Comme l’a souligné la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Vavilov, la cour de révision doit être convaincue que le raisonnement du décideur est justifié « au regard de l’ensemble du droit et des faits pertinents ». La Cour suprême ajoute dans ce même arrêt que les éléments du contexte juridique et factuel d’une décision constituent des contraintes qui ont une influence sur le décideur :

[104] De même, la logique interne d’une décision peut également être remise en question lorsque les motifs sont entachés d’erreurs manifestes sur le plan rationnel — comme lorsque le décideur a suivi un raisonnement tautologique ou a recouru à de faux dilemmes, à des généralisations non fondées ou à une prémisse absurde. Il ne s’agit pas d’inviter la cour de révision à assujettir les décideurs administratifs à des contraintes formalistes ou aux normes auxquelles sont astreints des logiciens érudits. Toutefois, la cour de révision doit être convaincue que le raisonnement du décideur « se tient ».

[105] En plus de la nécessité qu’elle soit fondée sur un raisonnement intrinsèquement cohérent, une décision raisonnable doit être justifiée au regard de l’ensemble du droit et des faits pertinents : Dunsmuir, par. 47; Catalyst, par. 13; Nor‑Man Regional Health Authority, par. 6. Les éléments du contexte juridique et factuel d’une décision constituent des contraintes qui ont une influence sur le décideur dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont délégués.

[Non souligné dans l’original.]

[20] La Cour suprême résume la question des contraintes juridiques et factuelles en affirmant que les décisions administratives doivent appartenir « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » :

[86] L’attention accordée aux motifs formulés par le décideur est une manifestation de l’attitude de respect dont font preuve les cours de justice envers le processus décisionnel : voir Dunsmuir, par. 47‑49. Il ressort explicitement de l’arrêt Dunsmuir que la cour de justice qui procède à un contrôle selon la norme de la décision raisonnable « se demande dès lors si la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité » : par. 47. Selon l’arrêt Dunsmuir, le caractère raisonnable « tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » : ibid. En somme, il ne suffit pas que la décision soit justifiable. Dans les cas où des motifs s’imposent, le décideur doit également, au moyen de ceux‑ci, justifier sa décision auprès des personnes à laquelle elle s’applique. Si certains résultats peuvent se détacher du contexte juridique et factuel au point de ne jamais s’appuyer sur un raisonnement intelligible et rationnel, un résultat par ailleurs raisonnable ne saurait être non plus tenu pour valide s’il repose sur un fondement erroné.

VI. Les dispositions légales pertinentes

[21] Bien que les observations formulées dans la présente affaire portent principalement sur le paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite, il convient de reproduire en entier l’article 11 de cette loi :

Prestations payables à la retraite

Benefits payable on retirement

11 (1) Un contributeur qui, après avoir atteint l’âge de retraite, cesse d’être membre de la Gendarmerie pour toute raison autre que l’invalidité ou l’inconduite, a droit à une prestation déterminée comme suit :

11 (1) A contributor who, having reached retirement age, ceases to be a member of the Force for any reason other than disability or misconduct is entitled to a benefit determined as follows :

a) s’il a servi dans la Gendarmerie pendant une période inférieure à la période réglementaire prévue pour l’application du présent alinéa, il a droit :

(a) if he or she has served in the Force for a period that is less than the period prescribed by the regulations for the purposes of this paragraph, he or she is entitled to

(i) soit à un remboursement de contributions,

(i) a return of contributions, or

(ii) soit à une allocation de cessation en espèces, si elle est d’un montant supérieur;

(ii) a cash termination allowance, whichever is the greater; and

 

blanc

b) s’il a servi dans la Gendarmerie pendant une période égale ou supérieure à la période réglementaire prévue pour l’application de l’alinéa a), il a droit à une annuité immédiate.

(b) if he or she has served in the Force for a period equal to or greater than the period prescribed by the regulations for the purposes of paragraph (a), he or she is entitled to an immediate annuity.

Retraite attribuable à l’invalidité

Retirement due to disability

(2) Un contributeur qui est obligatoirement retraité de la Gendarmerie du fait qu’il est devenu invalide a droit à une prestation déterminée comme suit :

(2) A contributor who is compulsorily retired from the Force by reason of having become disabled is entitled to a benefit determined as follows :

a) s’il compte à son crédit une période de service ouvrant droit à pension inférieure à la période réglementaire prévue pour l’application du présent alinéa, il a droit :

(a) if he or she has to his or her credit a period of pensionable service less than the period prescribed by the regulations for the purposes of this paragraph, he or she is entitled to

(i) soit à un remboursement de contributions,

(i) a return of contributions, or

(ii) soit à une allocation de cessation en espèces, si elle est d’un montant supérieur;

(ii) a cash termination

 

 

allowance, whichever is the greater; and

b) s’il compte à son crédit une période de service ouvrant droit à pension égale ou supérieure à la période réglementaire prévue pour l’application de l’alinéa a), il a droit à une annuité immédiate.

(b) if he or she has to his or her credit a period of pensionable service equal to or greater than the period prescribed by the regulations for the purposes of paragraph (a), he or she is entitled to an immediate annuity.

Retraite motivée par un souci d’économie ou d’efficacité

Retirement to promote economy or efficiency

(3) Un contributeur qui, avant d’avoir atteint l’âge de retraite, est obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour favoriser l’économie ou l’efficacité, a droit à une prestation déterminée comme suit :

(3) A contributor who, not having reached retirement age, is compulsorily retired from the Force to promote economy or efficiency is entitled to a benefit determined as follows :

a) s’il a servi dans la Gendarmerie pendant une période inférieure à la période réglementaire prévue pour l’application du présent alinéa, il a droit à un remboursement de contributions;

(a) if he or she has served in the Force for a period that is less than the period prescribed by the regulations for the purposes of this paragraph, he or she is entitled to a return of contributions;

b) s’il a servi dans la Gendarmerie pendant une période égale ou supérieure à la période réglementaire prévue pour l’application de l’alinéa a), mais inférieure à celle prévue pour l’application de l’alinéa c), il a droit, à son choix, selon le cas :

(b) if he or she has served in the Force for a period equal to or greater than the period prescribed by the regulations for the purposes of paragraph (a) but less than the period prescribed by the regulations for the purposes of paragraph (c), he or she is entitled to

(i) [Abrogé, 2003, ch. 26, art. 45]

(i) [Repealed, 2003, c. 26, s. 45]

(ii) à une annuité différée,

(ii) a deferred annuity, or

(iii) dans le cas d’un contributeur dont la retraite résulte d’une réduction du nombre total des membres de la Gendarmerie, et dans tout autre cas, selon la discrétion du Conseil du Trésor, à une annuité immédiate, réduite, jusqu’à ce que le contributeur atteigne l’âge de soixante‑cinq ans mais non par la suite, de cinq pour cent pour chaque année entière sans excéder six par laquelle la période de son service dans la Gendarmerie est inférieure à la période réglementaire prévue pour l’application de l’alinéa c);

(iii) in the case of a contributor whose retirement is due to a reduction in the total number of members of the Force, and in any other case in the discretion of the Treasury Board, an immediate annuity, reduced, until the time that the contributor reaches sixty‑five years of age but not after that, by five per cent for each full year not exceeding six by which the period of service in the Force is less than the period prescribed by the regulations for the purposes of paragraph (c),

 

at his or her option; and

c) s’il a servi dans la Gendarmerie pendant une période égale ou supérieure à la période réglementaire prévue pour l’application du présent alinéa, il a droit à une annuité immédiate.

(c) if he or she has served in the Force for a period equal to or greater than the period prescribed by the regulations for the purposes of this paragraph, he or she is entitled to an immediate annuity.

Renvoi pour inconduite

Dismissal for misconduct

(4) Un contributeur qui est obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour motif d’inconduite a droit :

(4) A contributor who is compulsorily retired from the Force by reason of misconduct is entitled to

a) soit à un remboursement de contributions;

(a) a return of contributions; or

b) soit, selon la discrétion du Conseil du Trésor, à la totalité ou à une partie spécifiée par le Conseil du Trésor de toute prestation à laquelle il aurait eu droit selon le présent article, si :

(b) in the discretion of the Treasury Board, the whole or any part specified by the Treasury Board of any benefit to which he or she would have been entitled under this section if

(i) dans le cas d’un contributeur qui, à la date de sa retraite, avait atteint l’âge de retraite, il avait cessé d’être membre de la Gendarmerie pour quelque motif autre que l’invalidité ou l’inconduite,

(i) in the case of a contributor who at the time of his or her retirement had reached retirement age, he or she had ceased to be a member of the Force for any reason other than disability or misconduct, or

(ii) dans le cas d’un contributeur qui, à la date de sa retraite, n’avait pas atteint l’âge de retraite, il avait été obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour favoriser l’économie ou l’efficacité à cause d’une réduction du nombre total des membres de la Gendarmerie,

(ii) in the case of a contributor who at the time of his or her retirement had not reached retirement age, he or she had been compulsorily retired from the Force to promote economy or efficiency due to a reduction in the total number of members of the Force,

sauf que, dans aucun cas, la valeur capitalisée de cette prestation ne peut être inférieure au montant du remboursement de contributions, mentionné à l’alinéa a).

except that in no case shall the capitalized value of the benefit be less than the amount of the return of contributions referred to in paragraph (a).

Autres motifs

Retirement for other reasons

(5) Le contributeur qui cesse d’être membre de la Gendarmerie, sans avoir atteint l’âge de retraite, pour quelque motif autre que l’invalidité, l’inconduite ou le souci d’économie ou d’efficacité, a droit à une prestation déterminée comme suit :

(5) A contributor who, not having reached retirement age, ceases to be a member of the Force for any reason other than disability, misconduct or to promote economy or efficiency is entitled to a benefit determined as follows :

a) s’il a servi dans la Gendarmerie pendant une période inférieure à la période réglementaire prévue pour l’application du présent alinéa, il a droit à un remboursement de contributions;

(a) if the contributor has served in the Force for a period that is less than the period prescribed by the regulations for the purposes of this paragraph, the contributor is entitled to a return of contributions;

b) s’il a servi dans la Gendarmerie pendant une période égale ou supérieure à la période réglementaire prévue pour l’application de l’alinéa a), mais inférieure à celle prévue pour l’application de l’alinéa c), il a droit à une annuité différée;

(b) if the contributor has served in the Force for a period equal to or greater than the period prescribed by the regulations for the purposes of paragraph (a) but less than the period prescribed by the regulations for the purposes of paragraph (c), the contributor is entitled to a deferred annuity;

c) s’il a servi dans la Gendarmerie pendant une période égale ou supérieure à la période réglementaire prévue pour l’application du présent alinéa, mais inférieure à celle prévue pour l’application de l’alinéa d), il a droit à une allocation annuelle payable au moment où il cesse d’être membre de la Gendarmerie et diminuée de cinq pour cent pour chaque année entière par laquelle :

(c) if the contributor has served in the Force for a period equal to or greater than the period prescribed by the regulations for the purposes of this paragraph but less than the period prescribed by the regulations for the purposes of paragraph (d), the contributor is entitled to an annual allowance payable immediately on the contributor ceasing to be a member of the Force reduced by five per cent for each full year by which

(i) la durée de son service dans la Gendarmerie est inférieure à la période réglementaire prévue pour l’application de l’alinéa d),

(i) the period of the contributor’s service in the Force is less than the period prescribed by the regulations for the purposes of paragraph (d), or

(ii) son âge à sa retraite est inférieur à l’âge de retraite applicable à son grade, si ce chiffre est inférieur;

(ii) the contributor’s age at the time of retirement is less than the retirement age applicable to the contributor’s rank,

 

whichever is the lesser; and

d) s’il a servi dans la Gendarmerie pendant une période égale ou supérieure à la période réglementaire prévue pour l’application du présent alinéa, il a droit à une annuité immédiate.

(d) if the contributor has served in the Force for a period equal to or greater than the period prescribed by the regulations for the purposes of this paragraph, the contributor is entitled to an immediate annuity.

[Je souligne]

[Emphasis added]

[22] L’article 12.1 de la Loi sur la pension de retraite est ainsi libellé :

Valeur de transfert

Transfer value

12.1 (1) Malgré les autres dispositions de la présente loi, à l’exception du paragraphe 24.1(6), le contributeur qui cesse d’être membre de la Gendarmerie et qui y a servi pendant une période égale ou supérieure à la période réglementaire mais n’a pas droit à une annuité immédiate a droit, sous réserve des règlements, en remplacement des prestations auxquelles il aurait par ailleurs droit en vertu de la présente loi à l’égard du service ouvrant droit à pension qu’il compte à son crédit, à une valeur de transfert qui lui est versée conformément au paragraphe (2).

12.1 (1) Despite any other provision of this Act, except subsection 24.1(6), but subject to the regulations, a contributor who has ceased to be a member of the Force, has served in the Force for a period equal to or greater than the period prescribed by the regulations and is not entitled to an immediate annuity is entitled, in the place of any other benefit under this Act to which the contributor would otherwise be entitled in respect of the pensionable service that the contributor has to their credit, to a transfer value that is payable to the contributor in accordance with subsection (2).

[Je souligne]

[Emphasis added]

[23] Voici le libellé du paragraphe 45(4) de la Loi sur la GRC :

Mesure disciplinaire

Conduct measures

45(4) Si le comité de déontologie décide qu’un membre a contrevenu à l’une des dispositions du code de déontologie, il prend à son égard une ou plusieurs des mesures disciplinaires suivantes :

45(4) If a conduct board decides that an allegation of a contravention of a provision of the Code of Conduct by a member is established, the conduct board shall impose any one or more of the following conduct measures on the member, namely,

a) il recommande que le membre soit congédié de la Gendarmerie, s’il est sous‑commissaire, ou, s’il ne l’est pas, le congédie de la Gendarmerie;

(a) recommendation for dismissal from the Force, if the member is a Deputy Commissioner, or dismissal from the Force, if the member is not a Deputy Commissioner,

b) il ordonne au membre de démissionner de la Gendarmerie, et si ce dernier ne s’exécute pas dans les quatorze jours suivants, il prend à son égard la mesure visée à l’alinéa a);

(b) direction to resign from the Force and, in default of resigning within 14 days after being directed to do so, recommendation for dismissal from the Force, if the member is a Deputy Commissioner, or dismissal from the Force, if the member is not a Deputy Commissioner, or

c) il impose une ou plusieurs des mesures disciplinaires prévues dans les règles.

(c) one or more of the conduct measures provided for in the rules.

[Je souligne]

[Emphasis added]

VII. Analyse

[24] Bien que la question en litige soit celle de savoir si la décision est raisonnable, j’examinerai chacun des arguments du demandeur. Dans la présente affaire, le demandeur soutient qu’il a droit à la valeur de transfert de ses droits à pension en raison de l’article 12.1 de la Loi sur la pension de retraite, qui a été modifié relativement récemment et qui s’applique, selon les mots introductifs de cette disposition, « [m]algré les autres dispositions de la présente loi ». Subsidiairement, il affirme que le paragraphe 11(4) ne s’applique pas à un membre de la GRC qui a démissionné à l’intérieur du délai de 14 jours prévu par la décision du comité de déontologie, c’est‑à‑dire que le paragraphe 11(4) s’applique à un membre qui est congédié, mais non à un membre qui démissionne, même par suite d’un ordre. Subsidiairement, il invoque le droit d’exiger que le Conseil du Trésor (et non le Centre des pensions qui a rendu la décision en l’espèce) établisse le montant de l’annuité (pension), le cas échéant, qu’il pourrait toucher.

[25] Étant donné que la présente affaire concerne principalement l’interprétation de la Loi sur la pension de retraite de la GRC et que cette loi est complexe et prévoit de nombreuses prestations différentes qui pourraient être accordées, il est utile, comme il est mentionné dans l’arrêt Mason au para 17, de décrire l’« état de la situation » sur le plan des prestations pouvant être obtenues. Cette loi énonce en effet six types différents de droits, que le demandeur a résumés dans un exposé que le défendeur ne conteste pas :

[traduction]

  • 1) Remboursement de contributions : Il s’agit du total des paiements que le contributeur (par ex., le demandeur) a versés au fil des années à son régime de retraite et que le gouvernement du Canada lui rembourse avec intérêts. Il ne comprend pas les paiements versés par le gouvernement dans la caisse de retraite, lesquels demeurent dans la caisse de retraite. Le remboursement de contributions est défini en ces termes au paragraphe 9(1) :

Remboursement :

a) d’une part, du montant versé par le contributeur au compte de pension de retraite ou à la Caisse de retraite de la Gendarmerie royale du Canada, à l’exclusion de tout montant ainsi versé conformément au paragraphe 39(7) de la Loi sur la pension de la fonction publique;

b) d’autre part, de tout montant qu’il a versé à un autre compte, caisse ou fonds, avec intérêt, le cas échéant, qui a été transféré au compte de pension de retraite ou à la Caisse de retraite de la Gendarmerie royale du Canada,

dans la mesure où ce montant reste à son crédit au compte de pension de retraite ou à la Caisse de retraite de la Gendarmerie royale du Canada, avec intérêt, le cas échéant, calculé en application du paragraphe (6). (return of contributions)

Selon le défendeur, le remboursement de contributions est la prestation à laquelle le demandeur a droit au titre de l’alinéa 11(4)a). Dans la présente affaire, ce remboursement s’élève à environ 104 797,27 $ avant impôts.

  • 2) Allocation de cessation en espèces : Cette allocation équivaut essentiellement à un mois de solde pour chaque année de service. L’allocation de cessation en espèces est définie en ces termes au paragraphe 9(1) :

Montant égal à un mois de solde pour chaque année de service ouvrant droit à pension au crédit du contributeur, calculé sur la base du taux de solde qu’on est autorisé à lui verser à la date où il cesse d’être membre de la Gendarmerie, moins un montant égal à l’excédent du montant visé à l’alinéa a) sur celui visé à l’alinéa b) :

a) le montant total que le contributeur aurait été tenu de verser au compte de pension de retraite ou à la Caisse de retraite de la Gendarmerie royale du Canada jusqu’au moment où il a cessé d’être un membre de la Gendarmerie — à l’exception des intérêts ou des frais requis pour des paiements échelonnés — relativement à du service postérieur à 1965, s’il avait contribué sur la base des taux indiqués au paragraphe 5(1), dans sa version au 31 décembre 1965;

b) le montant total que le contributeur était tenu de verser au compte ou à la caisse jusqu’au moment où il a cessé d’être un membre de la Gendarmerie — à l’exception des intérêts ou des frais requis pour des paiements échelonnés — relativement à du service postérieur à 1965; (cash termination allowance)

Cette prestation n’est pas en litige en l’espèce.

  • 3) Annuité immédiate : Il s’agit d’une pension (ou annuité) payable immédiatement. L’annuité immédiate est définie en ces termes au paragraphe 9(1) :

Annuité qui devient payable au contributeur dès qu’il y devient admissible; (immediate annuity)

Cette prestation n’est pas en litige en l’espèce.

  • 4) Annuité différée : Il s’agit de la pension totale (selon la période de service, le salaire, etc.) payable au contributeur lorsqu’il atteint l’âge de 60 ans. Elle est définie en ces termes au paragraphe 9(1) :

Annuité qui devient payable au contributeur lorsqu’il atteint l’âge de 60 ans; (deferred annuity)

Cette prestation n’est pas en litige en l’espèce.

  • 5) Allocation annuelle : Il s’agit d’une pension immédiate qui est réduite de 5 % pour chaque année où le contributeur n’a pas atteint l’âge et la période de service ouvrant droit à une pension complète. Cette prestation n’est pas en litige en l’espèce.

  • 6) Valeur de transfert : Il s’agit de la valeur globale actualisée, fondée sur une évaluation actuarielle, de la pension différée que le contributeur pourrait toucher pendant sa durée de vie estimée. Elle est définie en ces termes au paragraphe 9(1) :

Somme globale, déterminée conformément aux règlements, représentant la valeur des prestations de pension du contributeur; (transfer value)

Le paiement de la somme globale de la valeur de transfert est la prestation que le demandeur demande au titre du paragraphe 12.1(1). Dans la présente affaire, la valeur de transfert s’élève à une somme d’environ 382 894,70 $ avant impôts.

A. Le Centre des pensions a‑t‑il refusé de manière déraisonnable d’accorder au demandeur une prestation de valeur de transfert au titre de l’article 12.1 de la Loi sur la pension de retraite?

[26] Le Centre des pensions a conclu, suivant son interprétation du paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite, que le demandeur n’avait pas droit à une valeur de transfert. Le demandeur soutient que le Centre des pensions s’est fondé de manière déraisonnable sur cette dernière disposition, parce que le paragraphe 12.1(1) de cette même loi énonce qu’il a droit à une valeur de transfert « [m]algré les autres dispositions de la présente loi », c.‑à‑d. la Loi sur la pension de retraite. Je souscris à la prétention du demandeur.

[27] Selon l’arrêt Vavilov aux para 31‑33, 86 et 104‑105 (cités plus haut), la disposition légale contraignante à cet égard est le paragraphe 12.1(1) de la Loi sur la pension de retraite, qui accorde un large droit à des paiements de la valeur de transfert, pourvu uniquement que cinq conditions préalables soient réunies :

12.1 (1) Malgré les autres dispositions de la présente loi, [1] à l’exception du paragraphe 24.1(6), [2] [sous réserve des règlements] le contributeur [3] qui cesse d’être membre de la Gendarmerie [4] et qui y a servi pendant une période égale ou supérieure à la période réglementaire [5] mais n’a pas droit à une annuité immédiate a droit […], en remplacement des prestations auxquelles il aurait par ailleurs droit en vertu de la présente loi à l’égard du service ouvrant droit à pension qu’il compte à son crédit, à une valeur de transfert qui lui est versée conformément au paragraphe (2).

[Caractères gras et soulignement ajoutés par le demandeur]

[28] Fait intéressant à souligner, l’article 12.1 prévoit qu’un contributeur comme le demandeur « a droit », « [m]algré les autres dispositions de la présente loi », à une valeur de transfert « en remplacement des prestations auxquelles il aurait par ailleurs droit en vertu de la présente loi à l’égard du service ouvrant droit à pension qu’il compte à son crédit » en l’occurrence, en remplacement d’un remboursement de contributions décrit dans la décision du Centre des pensions, qui est fondée sur le paragraphe 11(4).

[29] À mon humble avis, le demandeur a droit, en vertu de la disposition légale, à une valeur de transfert, parce qu’il respecte les cinq conditions préalables énoncées au paragraphe 12.1(1) de la Loi sur la pension de retraite :

  1. Le paragraphe 24.1(6) ne doit pas s’appliquer : cette disposition concerne les accords de transfert de pension conclus avec un autre employeur admissible et permet aux membres de la GRC qui acceptent un poste auprès de cet employeur de transférer leurs droits à pension au régime de celui‑ci. Le demandeur n’a pas accepté un poste auprès d’un autre employeur admissible, de sorte qu’il respecte cette condition préalable.

  2. Le droit est sous réserve des règlements : le Règlement sur la pension de retraite de la Gendarmerie royale du Canada, CRC, ch 1393 [le Règlement sur la pension de retraite] exige que le membre ne soit pas admissible à une annuité immédiate à la date où il exerce son choix [paragraphe 55(1) du Règlement sur la pension de retraite]. Ce même règlement exige également que le membre exerce un choix en faveur de la valeur de transfert dans le délai d’un an qui suit la date de l’envoi de l’avis l’informant de son droit [articles 56‑57 du Règlement sur la pension de retraite]. Le demandeur n’avait pas atteint l’âge requis pour être admissible à une annuité immédiate et il a exercé son choix à l’intérieur du délai d’un an. Il respecte cette condition.

  3. Le contributeur doit cesser d’être membre de la Gendarmerie : en d’autres mots, le membre de la GRC ne peut recevoir sa valeur de transfert et continuer à travailler pour la GRC. Le demandeur n’est plus membre de la Gendarmerie. Il respecte cette condition.

  4. Le contributeur doit avoir été membre de la GRC pendant la période de service exigée : la période prescrite est de deux ans et le demandeur avait accumulé un peu plus de 10 années de service. Il respecte cette condition.

  5. Le membre ne doit pas avoir droit à une annuité immédiate : le demandeur n’avait pas droit à une annuité immédiate. Il respecte cette condition.

[30] J’ajoute que le défendeur ne conteste pas le fait que le demandeur respecte les cinq conditions énoncées au paragraphe 12.1(1).

[31] Les mots introductifs de l’article 12.1, « [m]algré les autres dispositions de la présente loi, à l’exception du paragraphe 24.1(6) », ainsi que les mots « sous réserve des règlements », ont une importance cruciale en ce qui a trait à la contrainte juridique en l’espèce. Ces mots ont été ajoutés assez récemment à la Loi sur la pension de retraite, par suite d’une modification que le législateur a apportée en 2012 à l’article 12.1 de cette loi.

[32] Je conviens avec le demandeur que l’ajout de ces mots introduisant une exception a pour effet d’éliminer toute ambiguïté entre cette disposition et les autres dispositions de la Loi sur la pension de retraite et d’établir que l’article 12.1 s’applique malgré « les autres dispositions de la » Loi sur la pension de retraite. En toute déférence, ces autres dispositions comprennent le paragraphe 11(4). Plus précisément, s’il y avait le moindre doute, ces mots éliminent clairement et sans équivoque l’application possible du paragraphe 11(4).

[33] De plus, le paiement de la valeur de transfert d’une pension à un contributeur (même à celui qui est retraité pour motif d’inconduite) va de pair avec le principe d’interprétation général selon lequel une loi conférant des avantages devrait recevoir une interprétation libérale et généreuse en faveur de ceux qui ont droit aux avantages de cette loi (voir l’arrêt Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 RCS 27 au para 36 [Rizzo], et la décision Syndicat national de l’automobile, de l’aérospatiale, du transport et des autres travailleurs et travailleuses du Canada (TCA‑Canada, section locale 2182) c Canada (Procureur général), 2007 CF 449 [le juge Lemieux] aux para 109‑113 [Syndicat national de l’automobile]).

[34] La disposition de la Loi sur la pension de retraite concernant les pensions différées et, par extension, la valeur de transfert (la valeur actualisée d’une pension différée) crée une pension à prestations déterminées. Examinées d’un point de vue très critique, les pensions à prestations déterminées « sont une forme de rémunération différée ». En effet, selon l’arrêt IBM Canada Limitée c Waterman, 2013 CSC 70 au para 4 :

[4] À mon avis, les prestations de retraite versées aux employés, y compris les sommes versées au titre d’un régime de retraite à prestations déterminées comme en l’espèce, constituent un type de prestations qui ne devraient généralement pas réduire le montant des dommages‑intérêts autrement payables pour congédiement injustifié. Cette conclusion repose tant sur la nature de la prestation que sur l’intention des parties. Les prestations de retraite sont une forme de rémunération différée pour les services rendus par l’employé et constituent un type d’épargne‑retraite. Elles ne sont pas censées représenter une indemnité pour la perte de salaire découlant d’une perte d’emploi. Les parties n’auraient pu vouloir que l’épargne‑retraite de l’employé soit utilisée pour financer son congédiement injustifié. Notre Cour n’a jamais rendu de décision dans laquelle une prestation non indemnitaire à laquelle le demandeur a contribué, comme les prestations de retraite en l’espèce, a été déduite des dommages‑intérêts accordés.

[Non souligné dans l’original.]

[35] Il est également de jurisprudence constante qu’il faut une disposition légale explicite pour priver le contributeur d’un régime de retraite de façon générale, notamment le demandeur en l’espèce, de son droit à la rémunération différée qu’il a gagnée et qu’il toucherait par ailleurs (Société de crédit commercial GMAC ‑ Canada c. T.C.T. Logistics Inc., 2006 CSC 35 au para 51 [Crédit commercial GMAC]) :

[51] Si l’article 47 pouvait recevoir une interprétation assez large pour permettre de porter atteinte à tous les droits qui, bien que protégés par la loi, gênent le processus de faillite, il pourrait être invoqué pour éteindre tous les droits en matière d’emploi si le tribunal de faillite estimait qu’il s’agit d’une mesure « indiquée » aux termes de l’al. 47(2)c). Pour que l’art. 47 confère un pouvoir aussi étendu, en dépit de l’existence de l’art. 72 protégeant les droits civils d’origine provinciale, il faudrait un texte explicite. Comme l’a indiqué le juge Major dans l’arrêt Crystalline Investments Ltd. c. Domgroup Ltd., [2004] 1 RCS 60, 2004 CSC 3 :

… il faut une disposition législative explicite pour priver une personne de droits dont elle jouit par ailleurs en droit. […] [T]ant que la doctrine de la primauté des lois fédérales n’entre pas en jeu, on ne saurait utiliser des procédures en matière de faillite et d’insolvabilité régies par le droit fédéral pour écarter des droits de propriété et autres droits civils régis par le droit provincial. [par. 43]

Le texte du par. 47(2) est loin de satisfaire à cette condition. Le tribunal de faillite peut indubitablement donner au séquestre des instructions en matière d’emploi, mais, compte tenu du libellé actuel du par. 47(2) de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, le tribunal n’est pas habilité à abroger de son propre chef le droit de présenter une demande à une commission des relations de travail.

[Non souligné dans l’original.]

[36] Par suite de la décision du Centre des pensions, les contributions personnelles du demandeur au titre de sa pension sont remboursées avec intérêts, mais la rémunération différée qu’il a gagnée est perdue. La différence est importante, comme le montre une comparaison entre la valeur estimative de la valeur de transfert et celle du remboursement de contributions avec intérêts. La différence que perd le demandeur s’élève à 278 097,43 $ avant impôts.

[37] À mon humble avis, ce résultat doit être fondé sur une disposition légale claire et explicite. Aucune disposition claire et explicite de cette nature n’existe dans la Loi sur la pension de retraite. En fait, je constate, en toute déférence, que non seulement le texte explicite nécessaire pour priver le demandeur de la rémunération différée à laquelle il aurait droit ne figure‑t‑il pas à l’article 12.1 de la Loi sur la pension de retraite, mais aussi que cette disposition énonce précisément le contraire en raison de l’exception introduite dès le départ par les mots « [m]algré les autres dispositions de la présente loi » (le reste du texte introduisant l’exception n’est pas pertinent en l’espèce, ce qui n’est pas contesté).

[38] Compte tenu de la contrainte juridique (les mots introductifs de l’article 12.1 de la Loi sur la pension de retraite) et des directives données aux para 31‑33, 86 et 104‑105 de l’arrêt Vavilov au sujet des contraintes juridiques, je suis enclin à conclure qu’il était déraisonnable de la part du Centre des pensions de nier au demandeur le droit à la valeur de transfert de sa pension.

[39] J’ai examiné l’argument du défendeur selon lequel le « principe relatif aux lois conférant des avantages » (et les arguments sur la rémunération différée) ne peuvent l’emporter sur les règles d’interprétation des lois. Cependant, j’ai également pris note des observations de la Cour d’appel fédérale selon lesquelles on ne peut exciper de l’objet perçu d’une loi pour étendre le sens d’une disposition légale au‑delà de ce que son libellé clair et exempt de toute ambiguïté permet (voir Wilson c Énergie atomique du Canada limitée, 2015 CAF 17 [le juge Stratas] au para 86, infirmé sur un autre point par 2016 CSC 29) :

[86] Le principe relatif aux lois conférant des avantages ne répond pas à la question qui nous est soumise. Il ne nous éclaire pas sur la nature précise des avantages que le législateur a concrètement accordés aux employés sous le régime de la partie III du Code. Nous ne pouvons nous servir de ce principe pour donner au libellé du Code un sens plus large que celui qu’autorise une interprétation véritable de la partie III du Code – un examen de son texte, de son contexte et de son objet. Autrement dit, bien que son existence soit incontestable, le principe des avantages conférés par la loi ne saurait être utilisé comme une autorisation de modifier le texte de loi adopté par le législateur.

[40] Voir également l’arrêt Hillier, précité au para 25 et l’arrêt Canada c Cheema, 2018 CAF 45 aux para 74‑75.

[41] Cependant, je suis loin d’être convaincu que le demandeur cherche à donner au texte de loi un sens plus large que celui qu’autorise une interprétation véritable du paragraphe 12.1(1), ou à modifier le texte de loi adopté par le législateur. À mon humble avis, le législateur a choisi de faire précéder le paragraphe 12.1(1) d’une introduction précise à l’aide des mots « [m]algré autres dispositions de la présente loi ».

[42] Le demandeur demande que cette disposition de la Loi sur la pension de retraite soit appliquée, parce que le législateur l’a rédigée de façon claire et non ambiguë; je ne vois pas pourquoi il ne pourrait recevoir ce que le législateur a décidé de lui accorder.

[43] Pour sa part, le défendeur invoque le principe d’interprétation des lois selon lequel le législateur ne peut avoir voulu des conséquences absurdes (voir Rizzo, précité au para 27). Dans la mesure du possible, les tribunaux devraient éviter d’adopter des interprétations qui dépouillent une partie d’une loi de tout son sens ou qui la rendent redondante. Le défendeur soutient que l’acceptation de l’argument du demandeur conduirait à des conséquences absurdes. Selon la logique du demandeur, le paragraphe 12.1(1) s’appliquerait même dans le cas d’un membre qui a été congédié immédiatement au titre de l’alinéa 45(4)a) ou congédié parce qu’il n’a pas démissionné, comme le prévoit l’alinéa 45(4)b) (tant et aussi longtemps que le membre respecterait les autres conditions préalables énoncées à l’article 12.1).

[44] Cependant, il me semble que, lorsque le législateur a choisi de faire précéder une disposition légale d’une introduction portant que la disposition s’applique « [m]algré les autres dispositions de la présente loi », il a exprimé très clairement cette intention. Au paragraphe 120 de l’arrêt Vavilov, la Cour suprême du Canada souligne que « le fond de l’interprétation [d’une disposition législative] par le décideur administratif doit être conforme à son texte, à son contexte et à son objet ». En ce sens, les principes habituels d’interprétation législative s’appliquent tout autant lorsqu’un décideur administratif interprète une disposition. Par exemple, lorsque le libellé d’une disposition est « précis et non équivoque », son sens ordinaire joue normalement un rôle plus important dans le processus d’interprétation : Hypothèques Trustco Canada c Canada, 2005 CSC 54, [2005] 2 R.C.S. 601, au par. 10. C’est précisément le cas en l’espèce : à mon avis, les mots introductifs du paragraphe 12.1(1) sont précis et non équivoques. Ils disent ce qu’ils veulent dire, pas plus ni moins. Le législateur a choisi de décréter que le paragraphe 12.1(1) l’emportait sur « les autres dispositions » de la Loi sur la pension de retraite. C’est ce que le législateur a choisi de faire. Je ne vois aucune raison de rejeter l’adoption de ces mots introductifs par le législateur en invoquant des règles d’interprétation qui contredisent cette modification précise et non équivoque.

[45] En tout état de cause, il n’y a pas de redondance, car même si le demandeur n’est pas admissible à une annuité immédiate, à une annuité différée, à une allocation de cessation en espèces ou à une allocation annuelle aux termes du paragraphe 11(4), il n’est pas inadmissible à un paiement de la valeur de transfert (c.‑à‑d. qu’il a droit à ce paiement), en raison des mots introductifs du paragraphe 12.1(1).

[46] Au mieux, en ce qui concerne la question des règles ou principes d’interprétation, il y a contradiction entre les règles concernant les dispositions relatives à la rémunération différée et celles qui portent sur la nécessité d’éviter la redondance. À mon avis, il n’est pas nécessaire d’invoquer l’une ou l’autre de ces règles, parce que les mots “[m]algré toutes les autres dispositions de la présente loi” sont clairs et non ambigus. Au besoin, j’appliquerais le principe selon lequel il faut une disposition légale explicite pour priver le demandeur de façon générale, notamment le demandeur en l’espèce, de son droit à une valeur de transfert, soit la valeur actualisée de la rémunération différée qu’il a gagnée et qu’il toucherait par ailleurs, comme l’a décidé la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Crédit commercial GMAC, précité au para 51. Je fais cette affirmation en raison non seulement de l’absence de mots clairs et explicites en ce sens, mais aussi en raison des mots clairs et explicites énonçant le contraire au tout début de l’article 12.1.

[47] J’ajouterais que j’accepte l’observation formulée par les deux avocats, selon laquelle les débats parlementaires sur la modification ajoutant les mots introductifs au paragraphe 12.1(1) ne nous éclairent pas sur cette question d’interprétation. Le projet de loi édictant finalement la modification a reçu un large appui tant à la Chambre des communes qu’au Sénat et a été adopté sans débat pertinent sur cette question devant l’une ou l’autre des Chambres ou en comité.

[48] En résumé, je conclus que le législateur a modifié le paragraphe 12.1(1) de façon à exiger que des paiements de la valeur de transfert soient versés à toutes les personnes visées par cette disposition, y compris les personnes se trouvant dans la position du demandeur. Il s’agit d’une conclusion déterminante, de sorte qu’il n’est pas nécessaire que j’examine les autres arguments du demandeur. Cependant, étant donné qu’ils ont été plaidés, j’ajoute les observations suivantes.

B. Le Centre des pensions a‑t‑il interprété de manière déraisonnable le paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite en concluant que cette disposition s’appliquait aux membres de la GRC qui ont reçu l’ordre de démissionner?

[49] Subsidiairement, le demandeur soutient que les membres de la GRC comme le demandeur, qui démissionnent après avoir reçu l’ordre de démissionner dans un délai de 14 jours, faute de quoi ils sont congédiés, comme le prévoit l’alinéa 45(4)b) de la Loi sur la GRC, ne sont pas visés par le paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite, dont voici le libellé :

11(4) Un contributeur qui est obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour motif d’inconduite a droit :

a) soit à un remboursement de contributions;

b) soit, selon la discrétion du Conseil du Trésor, à la totalité ou à une partie spécifiée par le Conseil du Trésor de toute prestation à laquelle il aurait eu droit selon le présent article, si :

(i) dans le cas d’un contributeur qui, à la date de sa retraite, avait atteint l’âge de retraite, il avait cessé d’être membre de la Gendarmerie pour quelque motif autre que l’invalidité ou l’inconduite,

(ii) dans le cas d’un contributeur qui, à la date de sa retraite, n’avait pas atteint l’âge de retraite, il avait été obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour favoriser l’économie ou l’efficacité à cause d’une réduction du nombre total des membres de la Gendarmerie,

sauf que, dans aucun cas, la valeur capitalisée de cette prestation ne peut être inférieure au montant du remboursement de contributions, mentionné à l’alinéa a).

[Non souligné dans l’original.]

[50] Le demandeur soutient que le paragraphe 11(4) devrait être lu dans le contexte du régime disciplinaire établi au paragraphe 45(4) de la Loi sur la GRC, qui prévoit trois mesures disciplinaires que le comité de déontologie peut prendre sur constat d’une contravention :

45(4) Si le comité de déontologie décide qu’un membre a contrevenu à l’une des dispositions du code de déontologie, il prend à son égard une ou plusieurs des mesures disciplinaires suivantes :

a) il recommande que le membre soit congédié de la Gendarmerie, s’il est sous‑commissaire, ou, s’il ne l’est pas, le congédie de la Gendarmerie;

b) il ordonne au membre de démissionner de la Gendarmerie, et si ce dernier ne s’exécute pas dans les quatorze jours suivants, il prend à son égard la mesure visée à l’alinéa a);

c) il impose une ou plusieurs des mesures disciplinaires prévues dans les règles.

[Non souligné dans l’original.]

[51] Selon le demandeur, la Loi sur la GRC établit une distinction entre un congédiement et un ordre de démissionner, en raison de la position juridique de longue date selon laquelle la démission consécutive à un ordre de démissionner est une façon de procéder qui permet de préserver la pension d’un agent de police (Thompson c Oakville (Town) (1963), 41 DLR (2d) 294 [le juge en chef McRuer, Haute Cour de justice de l’Ontario] au para 14 [Thompson]). Le demandeur cite également une décision qu’un comité de déontologie a rendue dans l’affaire Commanding Officer, “E” Division (Conduct Authority) c Sergeant Sukhjit Dhillon, Regimental Number 47909, 2019 RCAD 13 au para 195, où cette interprétation a été reprise très récemment par un représentant des autorités disciplinaires de la GRC devant un comité de déontologie de celle‑ci.

[52] Je conviens avec le demandeur que l’objet du délai de grâce de 14 jours que le législateur accorde aux membres de la GRC pour démissionner sous peine de congédiement vise à leur donner la possibilité de démissionner et, de ce fait, de préserver leurs droits à pension. L’ordre de démissionner est donc une « pénalité moindre », parce qu’il protège la pension du membre de la GRC.

[53] À mon humble avis, l’interprétation que donne le Centre des pensions au paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite va à l’encontre de la jurisprudence qui fait autorité en la matière, à savoir la décision Thompson rendue en 1963 qui a été reprise en 2019 par une autorité disciplinaire de la GRC. De plus, elle va à l’encontre de l’objet que visait le législateur en prévoyant une pénalité moindre au paragraphe 11(4), soit la démission dans le délai de grâce de 14 jours. À mon avis, la décision en litige en l’espèce constitue une nouvelle interprétation qui, en pratique, signifie que les membres de la GRC ne peuvent recevoir qu’un remboursement de contributions, indépendamment de la question de savoir s’ils démissionnent dans le délai de grâce de 14 jours ou s’ils sont congédiés. Elle élimine de manière déraisonnable la distinction fondamentale et peut‑être très importante sur le plan financier, comme c’est le cas en l’espèce, entre la démission et le congédiement.

[54] L’interprétation que donne le Centre des pensions au paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite réunit ces deux concepts distincts en un seul, contrairement à l’intention claire du législateur qui était de prévoir deux pénalités distinctes comportant des conséquences différentes, soit l’ordre de démissionner, qui permet de préserver la pension du membre, et le congédiement, qui ne le permet pas.

[55] À mon humble avis, le Centre des pensions a agi de manière déraisonnable, parce que sa décision va à l’encontre de deux contraintes juridiques distinctes. D’abord, elle va à l’encontre de la jurisprudence contraignante établie dans la décision Thompson; en deuxième lieu, elle va à l’encontre d’une disposition légale contraignante, soit le paragraphe 11(4) lui‑même.

[56] Je me fonde sur la décision qu’a rendue le juge en chef McRuer dans l’affaire Thompson, précitée, dans laquelle deux agents de police ont été déclarés coupables d’avoir contrevenu au Code of Offences applicable à la police de l’Ontario. La disposition légale en cause énonçait différentes peines possibles qui s’apparentent à celles de la présente affaire, soit la démission à l’intérieur d’un certain délai ou le congédiement :

[traduction]
12(1) Le membre d’un corps de police qui a commis une infraction visée au code :

a) soit est passible de congédiement;

b) soit peut‑être contraint de démissionner sur‑le‑champ ou à la date précisée dans la décision.

[57] Le juge en chef McRuer a décidé que l’ordre de démissionner avait pour effet de préserver les droits à pension qui seraient perdus en cas de congédiement. De l’avis du juge en chef, l’agent congédié [traduction] « perdrait ses droits à pension », ce qui ne serait pas le cas autrement :

[traduction]
Je mets en italique les mots « contraint de démissionner sur‑le‑champ ». Le code comporte d’autres dispositions concernant la rétrogradation, la réduction de la solde, la suppression de congé, etc. C’est en vertu de ces autres dispositions que le chef du service de police a imposé la peine à Thompson. La peine infligée à Ruelens devait être la peine visée à l’alinéa b), mais quoi qu’il en soit, la peine était une obligation de démissionner. Il est difficile de savoir avec précision ce qui arrivera si une personne ne démissionne pas alors qu’elle est tenue de le faire, mais je suppose que d’autres procédures seraient engagées et que l’agent serait accusé de ne pas avoir obéi à l’ordre de démissionner qu’il a reçu et qu’il serait congédié, ce qui serait en définitive un résultat peu probable, car l’agent perdrait ainsi ses droits à pension; un homme sensé ne choisirait pas cette option, si injuste que lui semble la peine.

[58] Il convient de souligner que le juge en chef McRuer est l’auteur du Report of the Royal Commission Inquiry into Civil Rights, rapport no 1 (Toronto, Imprimeur de la Reine, 1968), dans lequel il recommandait qu’en matière de contrôle de l’action administrative par les tribunaux, les anciens brefs de prérogative soient remplacés par le recours moderne que constitue la demande de contrôle judiciaire. Cette recommandation a été mise en œuvre un peu partout au Canada, notamment ici même à la Cour fédérale au moyen de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F‑7 (il y a lieu de comparer cette disposition avec l’ancien article 18 concernant les brefs de prohibition, de certiorari, de mandamus, de quo warranto, etc.).

[59] La décision Thompson a été citée et appliquée à 64 occasions, mais pas sur ce point. Les parties contestent sa pertinence aujourd’hui. Il me semble révélateur que le défendeur ne propose aucune décision ayant pour effet de contredire cette décision de longue date rendue par ce juriste respecté ou d’en affaiblir la portée. À mon avis, la décision Thompson demeure un guide utile pour l’interprétation des dispositions des textes de loi régissant la police qui permettent aux autorités chargées d’imposer des sanctions disciplinaires aux agents de police de prendre des décisions sommant un agent de démissionner à l’intérieur d’un certain délai, faute de quoi il sera congédié. La décision Thompson est également une contrainte juridique qui s’applique au Centre des pensions lors de la détermination des droits à pension du demandeur, ainsi qu’une contrainte du type reconnu dans l’arrêt Vavilov aux para 31‑33, 86 et 104‑105. Étant donné que le Centre des pensions n’a pas exercé ses pouvoirs en tenant compte de cette contrainte juridique, il a rendu une décision qui était déraisonnable. Il s’agit à mon avis d’un autre motif pour lequel la demande de contrôle judiciaire doit être accueillie.

[60] Je reviens à nouveau au paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite, que j’examine dans le contexte d’un autre argument que le demandeur a soulevé. Voici le libellé de cette disposition :

11(4) Un contributeur qui est obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour motif d’inconduite a droit :

a) soit à un remboursement de contributions;

b) soit, selon la discrétion du Conseil du Trésor, à la totalité ou à une partie spécifiée par le Conseil du Trésor de toute prestation à laquelle il aurait eu droit selon le présent article, si :

(i) dans le cas d’un contributeur qui, à la date de sa retraite, avait atteint l’âge de retraite, il avait cessé d’être membre de la Gendarmerie pour quelque motif autre que l’invalidité ou l’inconduite,

(ii) dans le cas d’un contributeur qui, à la date de sa retraite, n’avait pas atteint l’âge de retraite, il avait été obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour favoriser l’économie ou l’efficacité à cause d’une réduction du nombre total des membres de la Gendarmerie,

sauf que, dans aucun cas, la valeur capitalisée de cette prestation ne peut être inférieure au montant du remboursement de contributions, mentionné à l’alinéa a).

[61] Le demandeur formule les observations suivantes, auxquelles je souscris :

[traduction]
36. En ce qui a trait au texte examiné sous l’angle de ce contexte et de cet objet, le paragraphe 11(4) de la
Loi sur la pension de retraite de la GRC débute par les mots suivants :

11(4) Un contributeur qui est obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour motif d’inconduite a droit…

37. Le mot crucial du passage « qui est obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour motif d’inconduite » est le verbe « est ». L’emploi du verbe « est » au par. 11(4) signifie qu’une intervention est requise de la part d’un tiers pour déclencher une retraite. Ainsi, si la GRC congédiait le demandeur pour motif d’inconduite, cette situation serait visée par le par. 11(4) de la Loi. Dans la même veine, lorsque le commissaire (ou un délégué) licencie un membre de la GRC au titre de l’alinéa 20.2(1)g) de la Loi sur la GRC et de l’alinéa 6a) des Consignes du commissaire (exigences d’emploi) — c.‑à‑d. qu’il licencie un membre en raison d’une déficience — cette situation est visée par le paragraphe 11(2) de la Loi sur la pension de retraite de la GRC, qui comporte les mots semblables « est obligatoirement retraité de la Gendarmerie du fait qu’il est devenu invalide ». Un autre exemple est le cas où le commissaire licencie un membre par mesure d’économie au titre de l’alinéa 20.2(1)j) de la Loi sur la GRC, laquelle situation est visée par le paragraphe 11(3) de la Loi sur la pension de retraite de la GRC, où figurent les mots « est obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour favoriser l’économie ».

38. Dans tous ces cas, le législateur a rédigé la Loi sur la pension de retraite de la GRC de façon que la retraite doive survenir par suite de la libération de service de la part de l’employeur. En d’autres termes, le fait d’être obligatoirement retraité au sens de ces dispositions dépend uniquement de la GRC. Dans la présente affaire, en revanche, il est vrai que le demandeur a démissionné parce qu’il a reçu l’ordre de le faire en raison de son inconduite, mais il s’agissait néanmoins d’une démission.

[62] Cette interprétation repose d’abord et avant tout sur les mots employés. Le verbe « est » indique qu’une personne autre que le demandeur a pris une mesure par suite de laquelle le membre est devenu « obligatoirement retraité ». Dans la présente affaire, le demandeur n’a pas été congédié; il a démissionné. À mon avis, en raison de sa démission, il n’était pas visé par le paragraphe 11(4), eu égard à la contrainte juridique applicable, soit la décision Thompson.

[63] Je prends acte de l’argument du défendeur selon lequel le Centre des pensions a décidé de manière raisonnable que le paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite s’appliquait, parce que l’emploi du demandeur a pris fin en raison de l’inconduite de celui‑ci, ce qui mène à la conclusion que le membre qui reçoit l’ordre de démissionner parce qu’il a contrevenu au code de déontologie est un contributeur qui est obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour motif d’inconduite. De plus, le paragraphe 45(4) de la Loi sur la GRC est ainsi libellé : « Si […] un membre a contrevenu à l’une des dispositions du code de déontologie, [le comité de déontologie] prend à son égard une ou plusieurs des mesures disciplinaires suivantes », laquelle situation peut raisonnablement être assimilée à celle d’un membre qui s’est rendu coupable d’inconduite.

[64] Le problème que soulève cette approche, c’est qu’elle élimine la distinction de longue date entre la démission, même sous la contrainte, et le congédiement, ce qui va à l’encontre de la décision judiciaire contraignante qu’est la décision Thompson.

C. Le Centre des pensions a‑t‑il refusé de manière déraisonnable de transmettre au Conseil du Trésor la demande du demandeur, qui souhaitait que le Conseil exerce son pouvoir discrétionnaire de façon à lui accorder une prestation de pension majorée en vertu de l’alinéa 11(4)b) de la Loi sur la pension de retraite?

[65] À titre plus subsidiaire encore, le demandeur soutient que le Centre des pensions a refusé de manière déraisonnable d’envisager d’exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confère l’alinéa 11(4)b) de la Loi sur la pension de retraite, en vertu duquel le Conseil du Trésor peut, selon sa discrétion, verser une pension complète à un membre de la GRC qui a été congédié pour inconduite :

11(4) Un contributeur qui est obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour motif d’inconduite a droit :

a) soit à un remboursement de contributions;

b) soit, selon la discrétion du Conseil du Trésor, à la totalité ou à une partie spécifiée par le Conseil du Trésor de toute prestation à laquelle il aurait eu droit selon le présent article, si :

(i) dans le cas d’un contributeur qui, à la date de sa retraite, avait atteint l’âge de retraite, il avait cessé d’être membre de la Gendarmerie pour quelque motif autre que l’invalidité ou l’inconduite,

(ii) dans le cas d’un contributeur qui, à la date de sa retraite, n’avait pas atteint l’âge de retraite, il avait été obligatoirement retraité de la Gendarmerie pour favoriser l’économie ou l’efficacité à cause d’une réduction du nombre total des membres de la Gendarmerie,

sauf que, dans aucun cas, la valeur capitalisée de cette prestation ne peut être inférieure au montant du remboursement de contributions, mentionné à l’alinéa a).

[66] Le Centre des pensions a décidé que, étant donné que le demandeur avait signé en bonne et due forme un formulaire sur lequel il avait choisi un remboursement de contributions, il ne pouvait demander au Conseil du Trésor d’exercer son pouvoir discrétionnaire en vertu de l’alinéa 11(4)b) de la Loi sur la pension de retraite, même si on lui avait dit au départ qu’il aurait droit à la valeur de transfert plutôt qu’à un remboursement de ses contributions.

[67] Le demandeur soutient que la décision du Centre des pensions est déraisonnable à deux égards :

[traduction]

  • En premier lieu, le demandeur devait recevoir automatiquement le remboursement de ses contributions, ce qui s’est effectivement produit. Même si le demandeur n’a pas immédiatement demandé au Conseil du Trésor d’exercer son pouvoir discrétionnaire en mars 2021, il l’a fait en juin 2021. Le Centre des pensions a interprété de façon déraisonnable l’alinéa 11(4)b) de la Loi sur la pension de retraite en y interpolant une obligation pour le demandeur de faire un choix au sujet du paiement de sa pension et en interpolant de façon déraisonnable à l’al. 11(4)b) l’idée selon laquelle ce choix était irrévocable et ne pouvait être visé par un nouvel exercice du pouvoir discrétionnaire.

  • En second lieu, même si le Centre des pensions a interprété de manière raisonnable l’alinéa 11(4)b) de la Loi sur la pension de retraite comme une disposition prévoyant un « choix », il n’a pas tenu compte des répercussions de l’avis erroné qu’il avait lui‑même donné au demandeur en décembre 2020. Le 10 décembre 2020, le Centre des pensions a fait savoir au demandeur que celui‑ci avait droit à une prestation de valeur de transfert. Se fondant sur cet avis, le demandeur s’est désisté de son appel à l’égard de la décision du comité de déontologie.

[68] Le demandeur soutient que l’alinéa 14(1)a) du Règlement sur la pension de retraite permet au contributeur de révoquer un choix exercé au titre de l’alinéa 9(4) de la Loi sur la pension de retraite lorsque le Centre des pensions a donné un avis erroné. En toute déférence, je ne vois pas en quoi ces dispositions peuvent s’appliquer dans la présente affaire – le Centre des pensions a rendu une décision déraisonnable au titre du paragraphe 11(4) de la Loi sur la pension de retraite et non du paragraphe 9(4) de cette même loi. Néanmoins, le demandeur soutient qu’il a reçu, le 10 décembre 2020, un avis erroné sur lequel il s’est fondé à son détriment. Confronté à la question, le demandeur affirme que le Centre des pensions a omis déraisonnablement de chercher à savoir si cet avis erroné avait déclenché l’application du paragraphe 14(1) du Règlement sur la pension de retraite, qui permet au demandeur de révoquer le choix qu’il a fait et de demander au Conseil du Trésor d’exercer son pouvoir discrétionnaire en vertu de l’alinéa 11(4)b) de la Loi sur la pension de retraite.

[69] Je conviens avec le défendeur que l’argument du demandeur selon lequel il a fondé son choix sur un « avis erroné » est sans fondement dans les circonstances, parce que, le 11 mars 2021, le Centre des pensions était revenu sur sa position précédente. Il a téléphoné au demandeur pour l’informer que la valeur de transfert n’était plus une option. Il a ensuite fait parvenir au demandeur une nouvelle trousse d’information dans laquelle il expliquait le raisonnement sous‑jacent à cette décision et décrivait les options qui s’offraient au demandeur aux termes du paragraphe 11(4). Le demandeur a reconnu avoir eu la possibilité d’obtenir des conseils juridiques et financiers indépendants avant de signer le formulaire sur lequel il a fait son choix. En conséquence, il était à mon humble avis raisonnable de la part du Centre des pensions de ne pas modifier sa décision par suite du changement de position du demandeur lors du désistement de l’appel. En fait, le demandeur a soulevé la question pour la première fois auprès du Centre des pensions dans sa lettre du 2 juin 2021, soit trois mois après avoir appris que le Centre des pensions était revenu sur sa position et deux mois après avoir reçu en bonne et due forme un remboursement de contributions.

[70] Le défendeur ajoute que la pratique qui consiste à demander aux membres de faire un choix est raisonnable, parce que l’exercice par le Conseil du Trésor de son pouvoir discrétionnaire dans tous les cas, sans que le contributeur ait fait un choix, entraînerait un gaspillage des ressources. En toute déférence, je conviens qu’il était raisonnable, dans l’ensemble, de la part du Centre des pensions de refuser de renvoyer l’affaire au Conseil du Trésor, parce que le demandeur avait déjà choisi formellement d’abandonner une annuité possible en remplacement du remboursement immédiat de ses contributions. En conséquence, je conclus que la décision du Centre des pensions à cet égard était raisonnable.

D. Réparation

[71] Si la Cour fédérale convient avec lui que l’article 12.1 de la Loi sur la pension de retraite lui accorde un droit à une prestation de valeur de transfert indépendamment de la raison de son départ de la GRC, le demandeur sollicite une ordonnance contraignant le Centre des pensions à lui verser cette prestation et renvoyant l’affaire au Centre des pensions uniquement pour qu’il établisse la valeur précise de cette prestation. Étant donné que le défendeur accepte la description par le demandeur des réparations pouvant être accordées si la Cour conclut que le Centre des pensions a commis une erreur susceptible de contrôle, une ordonnance en ce sens sera rendue.

VIII. Conclusion

[72] À mon humble avis, la décision n’est pas justifiée au regard des faits et des contraintes juridiques et doit donc être annulée. La réparation convenue sera donc accordée, de sorte que le Centre des pensions versera au demandeur la prestation de valeur de transfert, et l’affaire est renvoyée au Centre des pensions dans le seul but qu’il établisse la valeur précise de cette prestation.

IX. Dépens

[73] Les parties conviennent que les dépens, qui s’élèvent à la somme globale de 2 500 $, devraient être adjugés à la partie ayant gain de cause et, en conséquence, j’ordonne au défendeur de payer au demandeur la somme globale de 2 500 $ au titre des dépens.


JUGEMENT dans le dossier T‑1269‑21

LA COUR ORDONNE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie.

  2. La décision est annulée.

  3. Le Centre des pensions doit verser au demandeur la prestation de valeur de transfert.

  4. L’affaire est renvoyée au Centre des pensions dans le seul but qu’il établisse la valeur précise de la prestation.

  5. Le défendeur est condamné à payer les dépens du demandeur, qui s’élèvent à la somme globale de 2 500 $.

« Henry S. Brown »

Juge

Traduction certifiée conforme

M. Deslippes.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑1269‑21

 

INTITULÉ :

JASON GIRARD c PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 11 AVRIL 2022

JUGEMENTS ET MOTIFS :

LE JUGE BROWN

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 21 AVRIL 2022

COMPARUTIONS :

Christopher Rootham

POUR LE DEMANDEUR

Jennifer Lee

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Nelligan O’Brien Payne s.r.l.

Avocats

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Edmonton (Alberta)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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