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Date : 20220216


Dossier : IMM-1975-20

Référence : 2022 CF 204

[TRADUCTION FRANÇAISE RÉVISÉE PAR L’AUTEUR]

Ottawa (Ontario), le 16 février 2022

En présence de monsieur le juge Sébastien Grammond

ENTRE :

BALKAR SINGH

JEET KAUR

PRINCE KUMAR

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

(rendus à l’audience le 16 février 2022, à Ottawa (Ontario))

[1] M. Singh, sa femme [Mme Kaur] et leur fils [M. Kumar] ont demandé le contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Section d’appel des réfugiés [la SAR] a conclu qu’ils n’ont pas qualité de réfugiés au sens de la Convention. Ils soutiennent que la police de l’État du Haryana, en Inde, leur pays d’origine, a torturé M. Singh et Mme Kaur en raison de supposés liens avec le mouvement pro-Khalistan. La Section de la protection des réfugiés [la SPR] a rejeté leur demande d’asile. Elle a conclu que M. Singh n’était pas un témoin crédible et a tiré dix conclusions défavorables à cet égard. La SAR a jugé que sept des dix conclusions de la SPR quant à la crédibilité étaient inexactes. Néanmoins, elle a conclu que les trois autres conclusions défavorables quant à la crédibilité étaient exactes et suffisantes pour rejeter la demande.

[2] Dans le cadre du contrôle judiciaire, les demandeurs s’en prennent seulement à l’une de ces conclusions. M. Singh a été emmené à l’hôpital après avoir été relâché par la police. Selon le rapport médical, M. Singh était alors inconscient. Interrogé au sujet de ses blessures, M. Singh n’a rien dit dans son témoignage concernant sa tête ni son état d’inconscience. À la question de savoir s’il avait été capable de parler au médecin, M. Singh a répondu qu’il n’avait pas pu, car il était très troublé, notamment parce qu’il avait su ce que les policiers avaient fait à sa femme.

[3] La SPR n’était pas convaincue de l’explication donnée par M. Singh concernant l’apparente contradiction. Pour sa part, la SAR a reconnu que la SPR avait peut-être mal compris l’une des réponses de M. Singh. La SAR a tout de même conclu que la description faite par M. Singh de ses blessures ne concordait pas avec le fait qu’il était inconscient à son arrivée à l’hôpital.

[4] Les demandeurs font valoir que cette conclusion est déraisonnable. De plus, ils soutiennent que la SAR aurait dû renvoyer l’affaire à la SPR.

[5] Je ne suis pas d’accord. L’appréciation de la crédibilité est au cœur de la mission de la SAR. La Cour n’intervient que si les conclusions de la SAR ne peuvent être étayées par la preuve. La conclusion de la SAR selon laquelle le témoignage de M. Singh et le rapport médical se contredisent n’a rien d’irrationnel ni de déraisonnable. Il ne m’appartient pas de lui substituer ma propre conclusion. De plus, le dossier dont je dispose ne contient aucune transcription de l’audience de la SPR. Sans transcription, il m’est difficile d’évaluer si la SAR a mal compris le témoignage de M. Singh. Il incombe toutefois aux demandeurs d’établir que la décision contestée est déraisonnable. En l’espèce, ils n’y sont pas parvenus.

[6] Les demandeurs soutiennent que le fait que les conclusions de la SPR à cet égard étaient fondées sur une erreur factuelle sape la conclusion finale de la SAR. Cependant, je constate que, pour conclure à l’existence d’une contradiction, la SAR ne s’est pas fondée sur l’erreur factuelle de la SPR. Bien que les demandeurs m’invitent à soupeser les facteurs négatifs et positifs concernant la crédibilité de M. Singh et à tirer une conclusion différente de celle de la SAR, ils reconnaissent également qu’une seule conclusion défavorable quant à la crédibilité portant sur un élément central est suffisante pour entraîner le rejet de la demande : Garay Moscol c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 657 au paragraphe 21. C’est précisément ce qu’a fait la SAR en l’espèce.

[7] Les demandeurs ont également fait valoir que la SAR aurait dû renvoyer l’affaire à la SPR en vertu de l’alinéa 111(1)(c) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27. Toutefois, selon l’alinéa 111(2)b), la SAR ne peut exercer ce pouvoir que lorsqu’elle estime qu’elle ne peut pas rendre une décision sans entendre de témoins. En l’espèce, la SAR était manifestement d’avis qu’elle pouvait rendre une décision après avoir écouté l’enregistrement audio de l’audience devant la SPR et examiné la preuve documentaire. Elle peut tirer sa propre conclusion quant à la crédibilité sans renvoyer l’affaire à la SPR. Rien dans l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c Huruglica, 2016 CAF 93, [2016] 4 RCF 157, ni dans la décision Ogbonna c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 180, n’exige que la SAR renvoie l’affaire à la SPR lorsqu’elle conclut que cette dernière a commis une erreur de fait, même lorsque cette erreur concerne la crédibilité.

[8] Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.


JUGEMENT dans le dossier IMM-1975-20

LA COUR STATUE :

1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2. Aucune question n’est certifiée.

« Sébastien Grammond »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-1975-20

INTITULÉ :

BALKAR SINGH, JEET KAUR, PRINCE KUMAR c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 16 FÉVRIER 2022

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE GRAMMOND

DATE DES MOTIFS :

LE 16 FÉVRIER 2022

COMPARUTIONS :

Felipe Morales

POUR LES DEMANDEURS

 

Suzanne Trudel

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Semperlex

Avocats Lawyers Abogados

Montréal (Québec)

POUR LES DEMANDEURS

 

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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