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Date : 20210316


Dossier : IMM-1426-21

Référence : 2022 CF 359

[TRADUCTION FRANÇAISE]

St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador), le 16 mars 2022

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

PETER HORVATH

ANGELIKA ARANKA HORVATH

KATRINE HORVATH

DIANA HORVATH

EVA LAKATOS

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS ET JUGEMENT

[1] M. Peter Horvath (le demandeur principal), sa conjointe de fait, Eva Lakatos, et leurs enfants Katrin Horvath, Diana Horvath et Angelika Aranka Horvath (collectivement, les demandeurs) sollicitent le contrôle judiciaire d’une décision de la Section d’appel des réfugiés (la SAR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Dans cette décision, la SAR a rejeté l’appel de la décision par laquelle la Section de la protection des réfugiés (la SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié avait conclu qu’ils n’étaient pas des réfugiés au sens de la Convention ni des personnes à protéger au sens de l’article 96 et du paragraphe 97(1), respectivement, de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi).

[2] Les demandeurs sont citoyens de la Hongrie. Ils ont demandé l’asile au Canada en invoquant avoir été pris pour cible en Hongrie par des membres de la population, des néonazis et des membres du Mouvement d’autodéfense hongrois Magyar Önvédelmi Mozgalom (MÖM) entre 2007 et 2015, car ils sont Roms. Les demandeurs ont également soutenu qu’ils n’avaient pas eu droit à des soins prénataux et que la police avait refusé de les protéger.

[3] La question déterminante pour la SPR était la crédibilité, tant celle du demandeur principal que celle de sa conjointe de fait.

[4] La SAR a également tiré des conclusions défavorables quant à la crédibilité, mais elle a tout de même examiné la question de la possibilité pour les demandeurs d’obtenir une protection de l’État s’ils étaient renvoyés en Hongrie. Elle a expressément reconnu le statut des demandeurs en tant que Roms hongrois et s’est référée à des points du cartable national de documentation pour la Hongrie pour tenter d’établir s’ils seraient confrontés aux circonstances décrites à l’article 96 et au paragraphe 97(1) de la Loi, c’est-à-dire :

[s’]ils seraient exposés à une possibilité sérieuse de persécution en raison de leur ethnicité, ou si, selon la prépondérance des probabilités, ils sont exposés à une menace à leur vie ou au risque de subir des traitements ou peines cruels et inusités s’ils retournent en Hongrie.

[5] La décision de la SAR est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable; voir l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, 441 DLR (4th) 1. Cette norme oblige la Cour à se demander si la décision faisant l’objet du contrôle « possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci ».

[6] Les demandeurs font valoir que la décision de la SAR est déraisonnable, tant en ce qui concerne ses conclusions quant à la crédibilité que sa conclusion quant à la protection de l’État.

[7] Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le défendeur) soutient que la décision satisfait à la norme de la décision raisonnable.

[8] Il n’est pas nécessaire que j’examine les arguments relatifs aux conclusions quant à la crédibilité, puisque je suis convaincue que la SAR n’a pas raisonnablement évalué la protection offerte par l’État.

[9] Je souscris en grande partie aux observations des demandeurs selon lesquelles la SAR a commis une erreur en se concentrant sur les efforts déployés par la communauté rom hongroise pour se protéger, sans tenir compte des efforts déployés par l’État hongrois pour lui offrir une protection. Selon l’arrêt Ward c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] 2 RCS 689, rendu par la Cour suprême du Canada, un citoyen a le droit de réclamer la protection de son État d’origine. À mon avis, le fait qu’une protection soit accordée contre un groupe ethnique particulier n’équivaut pas à la protection de l’État. La conclusion de la SAR à cet égard n’est pas raisonnable.

[10] Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de la SAR est annulée et l’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la SAR pour nouvel examen. Il n’y a aucune question à certifier.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-1426-21

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est accueillie, que la décision de la Section d’appel des réfugiés est annulée et que l’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Section d’appel des réfugiés pour nouvel examen. Il n’y a aucune question à certifier.

« E. Henegan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Noémie Pellerin Desjarlais


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-1426-21

 

INTITULÉ :

PETER HORVATH, ANGELIKA ARANKA HORVATH, KATRIN HORVATH, DIANA HORVATH, EVA LAKATOS c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE ENTRE TORONTO (ONTARIO) ET ST. JOHN’S (TERRE-NEUVE-ET-LABRADOR)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

15 MARS 2022

MOTIFS ET JUGEMENT :

LA JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS :

16 MARS 2022

COMPARUTIONS :

Alison Pridham

POUR LES DEMANDEURS

Kevin Spykerman

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lewis & Associates

Cabinet d’avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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