Date : 20220225
Dossier : IMM-2422-20
Référence : 2022 CF 270
[TRADUCTION FRANÇAISE]
Ottawa (Ontario), le 25 février 2022
En présence de madame la juge Kane
ENTRE :
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JASPREET KAUR
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demanderesse
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et
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LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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défendeur
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JUGEMENT ET MOTIFS
[1] La demanderesse, Mme Jaspreet Kaur, sollicite le contrôle judiciaire de la décision du 8 avril 2020 par laquelle un agent des visas du Haut-commissariat du Canada à New Delhi [l’agent] a rejeté sa demande de permis de travail ouvert. L’agent a également conclu qu’elle était interdite de territoire au Canada pour fausses déclarations conformément à l’alinéa 40(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la Loi].
[2] Pour les motifs qui suivent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie.
I.
Contexte
[3] Mme Kaur est une citoyenne de l’Inde qui a demandé un permis de travail ouvert pour venir au Canada avec ses deux enfants afin d’y rejoindre son époux, M. Jaskaran Singh, qui se trouvait au Canada à ce moment-là grâce à un permis de travail.
[4] Dans ses notes versées au Système mondial de gestion des cas [le SMGC], l’agent dit douter, après examen du formulaire de demande de Mme Kaur de la validité de son mariage avec M. Singh, car le certificat de divorce du mariage antérieur de ce dernier n’avait pas été fourni. Par conséquent, Mme Kaur a été convoquée à une entrevue.
[5] Mme Kaur a été invitée à apporter à l’entrevue [traduction] « tous les documents requis […], notamment des photos de mariage montrant les cérémonies, des photos prises après le mariage, une preuve attestant une communication régulière, une preuve du statut d’immigration de l’hôte au Canada ainsi qu’une preuve de la formation continue de l’hôte au Canada »
.
[6] L’entrevue a eu lieu le 26 novembre 2019 avec l’aide d’un interprète parlant le pendjabi. Selon les notes versées au SMGC, l’agent chargé de l’entrevue a posé des questions à Mme Kaur concernant ses mariages antérieur et actuel. Mme Kaur a entre autres expliqué qu’elle s’était mariée avec M. Singh en août 2013, mais qu’elle l’avait rencontré et avait commencé à le fréquenter en 2011.
[7] L’agent chargé de l’entrevue a également posé des questions à Mme Kaur au sujet des visas qui lui avaient déjà été refusés. Dans son formulaire de demande, Mme Kaur a indiqué ce qui suit : [traduction] « J’ai demandé un visa pour venir au Canada avec mes enfants, mais il m’a été refusé. J’ai demandé un visa pour me rendre aux États-Unis avec mes enfants, mais il m’a été refusé. »
[8] Selon les notes versées au SMGC se rapportant à l’entrevue, l’échange suivant a eu lieu :
[traduction]
Q- Vous a-t-on déjà refusé un visa canadien? Oui, en 2015.
Q : Selon mes renseignements, vos demandes de visa ont été rejetées à quatre reprises. Oui.
Q : Pourquoi ne pas me l’avoir dit avant? J’avais déposé une demande en 2015.
Q : Et en 2018? Non.
Q : Vous a-t-on déjà refusé un visa d’un autre pays? Non.
Q : Des États-Unis? Oui, en 2016.
Q : Pourquoi ne l’avez-vous pas dit avant? J’ai oublié.
Q : Combien de fois vous a-t-on refusé un visa aux États-Unis? Deux fois en 2016.
Q : Selon mes renseignements, vos demandes de visa ont été rejetées à cinq reprises. Non.
Q : Selon mes renseignements, vos demandes de visa ont été rejetées à cinq reprises. J’ai oublié.
[9] Dans le SMGC, les notes d’entrevue se concluent ainsi :
[traduction]
Sans preuve du divorce de l’hôte, je ne suis pas convaincu qu’il était libre de la marier. Je ne suis donc pas persuadé qu’ils sont mariés. Elle ne m’a pas paru crédible. Elle n’était pas honnête au sujet de ses demandes de visa qui ont été rejetées dans le passé et elle se contredisait. Je lui ai donné l’occasion de répondre. Elle a affirmé toujours dire la vérité. Des doutes subsistent.
[10] L’agent chargé de l’entrevue a renvoyé l’affaire à un autre agent (le gestionnaire de l’unité), qui a rendu la décision.
II.
La décision faisant l’objet du contrôle
[11] Dans une lettre non signée du Haut-commissariat du Canada à New Delhi datée du 8 avril 2020, l’agent a rejeté la demande de Mme Kaur au motif qu’il n’était pas convaincu qu’elle avait répondu honnêtement à toutes les questions et l’a informée qu’elle avait été déclarée interdite de territoire au Canada conformément à l’alinéa 40(1)a).
[12] Dans les notes du SMGC, qui comprennent les motifs et la lettre, l’agent a cité la conclusion de l’agent chargé de l’entrevue, à savoir que Mme Kaur n’avait pas divulgué les refus de visa antérieurs pour le Canada et les États-Unis. L’agent a indiqué que Mme Kaur n’avait pas réussi à dissiper les doutes qu’il entretenait. L’agent a conclu ce qui suit :
[traduction]
À mon avis, selon la prépondérance des probabilités, le demandeur n’a pas été honnête dans son formulaire de demande et n’a pas divulgué qu’il avait déjà présenté des demandes au Canada et aux États-Unis. Cette situation aurait pu entraîner une erreur dans l’application de la Loi et du Règlement puisqu’un agent aurait pu être convaincu que le demandeur satisfaisait aux exigences de la Loi quant à l’existence d’un véritable motif pour vouloir séjourner au Canada de façon temporaire et qu’il respecterait les conditions d’entrée au Canada.
III.
Les observations de la demanderesse
[13] Mme Kaur soutient que l’agent a manqué à l’obligation d’équité procédurale en ne l’informant pas des doutes concernant son mariage et, surtout, en ne lui demandant pas expressément d’apporter le certificat de divorce de son mari à l’entrevue, alors qu’il l’avait fait pour d’autres documents.
[14] Mme Kaur soutient également que l’agent a manqué à l’obligation d’équité procédurale en ne l’avisant pas des doutes concernant les demandes de visa qui ont été rejetées dans le passé.
[15] Mme Kaur est d’avis que la décision est déraisonnable. Selon elle, rien ne justifiait que l’agent chargé de l’entrevue remette en doute la validité de son mariage à la lumière de la preuve dont il disposait. Elle soutient également que l’agent n’a pas tenu compte de tous les éléments de preuve liés aux refus de visa antérieurs et que toute conclusion de fausses représentations en raison de ces refus est injustifiée. Elle fait remarquer qu’elle avait clairement indiqué dans sa demande qu’elle s’était déjà vu refuser des visas au Canada et aux États-Unis. Mme Kaur soutient que l’agent a simplement accepté la recommandation de l’agent chargé de l’entrevue.
IV.
Les observations du défendeur
[16] Le défendeur fait valoir qu’en l’espèce, il n’y a pas eu manquement à l’équité procédurale, car Mme Kaur avait reçu la directive d’apporter à l’entrevue tous les documents requis, y compris certains documents liés à son mariage, ce qui aurait dû la prévenir des doutes à cet égard. Elle a eu amplement l’occasion de répondre aux questions de l’agent chargé de l’entrevue au sujet de son mariage et des autres aspects de sa demande.
[17] Quant à l’argument de Mme Kaur selon lequel l’agent n’a pas procédé à un examen approfondi de sa demande avant de rendre sa décision, le défendeur fait valoir qu’un agent est présumé avoir tenu compte de tous les éléments de preuve, à moins que le contraire ne soit établi.
[18] Le défendeur soutient qu’il était raisonnable pour l’agent de conclure que Mme Kaur avait fait de fausses représentations puisqu’elle avait omis de divulguer plusieurs refus de visa antérieurs et qu’elle avait été malhonnête lors de l’entrevue.
V.
Questions en litige et norme de contrôle
[19] Mme Kaur soulève deux questions :
- L’agent a-t-il manqué à l’obligation d’équité procédurale en ne l’avisant pas des doutes concernant la validité de son mariage ou le rejet de ses demandes de visa antérieures?
- La décision est-elle raisonnable, et la conclusion de fausses représentations est-elle justifiée?
[20] En ce qui a trait aux questions d’équité procédurale, la Cour doit se demander si la procédure suivie par le décideur est équitable eu égard à l’ensemble des circonstances, ce qui s’apparente à la norme de la décision correcte : Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 au para 54 [CCP]. En l’espèce, la portée de l’obligation d’équité procédurale est variable et tributaire de plusieurs facteurs (Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817 au para 21 [Baker]). Lorsqu’il y a manquement à l’équité procédurale, il n’est pas nécessaire de faire preuve de déférence.
[21] Le norme de contrôle applicable au rejet d’une demande de permis de travail ou à une conclusion d’interdiction de territoire au titre de l’alinéa 40(1)a) – ce qui est une conclusion de fait – est celle de la décision raisonnable : Bains c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 57 au para 49 [Bains]; Lin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1284 au para 23 [Lin].
[22] Une décision raisonnable doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 aux para 85, 102, 105-107 [Vavilov]). Une décision ne devrait être infirmée que si elle « souffre de lacunes graves […] à un point tel qu’on ne peut pas dire qu’elle satisfait aux exigences de justification, d’intelligibilité et de transparence »
(Vavilov, au para 100).
[23] Les motifs ne doivent pas être jugés au regard d’une norme de perfection (Vavilov, au para 91). Dans le contexte de décisions concernant des permis de travail et des demandes similaires, il est entendu que les motifs sont brefs (Patel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 77 au para 17 [Patel]). Ils doivent néanmoins permettre à la Cour de comprendre pourquoi la demande a été rejetée et de déterminer si la conclusion appartient aux issues raisonnables.
VI.
Il n’y a pas eu manquement à l’équité procédurale
[24] Pour les demandes de permis de travail, l’obligation d’équité procédurale demeure habituellement minimale. Lorsque le rejet d’une demande de permis de travail est assorti d’une conclusion de fausses représentations et donc d’une période d’interdiction de territoire de cinq ans au Canada, la jurisprudence est divisée sur la question de savoir si un degré plus élevé d’équité procédurale est requis. Mme Kaur affirme avoir droit à un degré élevé d’équité procédurale (Likhi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 171 au para 27; Lin, aux para 24-25).
[25] La Cour s’est penchée sur les principes fondamentaux liés à la portée de l’obligation d’équité procédurale. Dans l’arrêt Baker, la Cour suprême du Canada a souligné que la portée de l’obligation d’équité procédurale est variable et tributaire du contexte particulier de chaque cas. Les facteurs qui servent à définir la portée de l’obligation sont notamment la nature de la décision, la nature du régime législatif, l’importance de la décision pour les personnes visées, les attentes légitimes de ces personnes et le choix de procédure que le décideur fait.
[26] Dans l’arrêt Baker, la Cour suprême du Canada a réitéré que l’obligation d’équité procédurale relève du principe selon lequel les personnes visées doivent avoir la possibilité de présenter leur position et ont droit à ce que les décisions touchant leurs droits et intérêts soient prises à la suite d’un processus équitable, impartial et ouvert, « adapté au contexte légal, institutionnel et social de la décision »
(Baker, au para 28).
[27] Je ne suis pas d’accord avec Mme Kaur qu’un degré « élevé »
d’équité procédurale lui était dû. Cependant, je reconnais, tout comme le défendeur, que compte tenu de l’importance de la décision et des conséquences d’une conclusion de fausses représentations, dans ces circonstances particulières, un degré plus élevé – c.-à-d. plus que le minimum – d’équité procédurale lui était dû (Baker, au para 25).
[28] La question fondamentale est celle de savoir « si le demandeur connaissait la preuve à réfuter et s’il a eu la possibilité complète et équitable d’y répondre »
: CCP, au para 56. En l’espèce, Mme Kaur connaissait la preuve à réfuter. Elle devait répondre à toutes les questions posées dans le formulaire de demande et a été prévenue d’y répondre honnêtement. Elle a ensuite été convoquée à une entrevue et a été invitée à apporter des documents, plus particulièrement des documents liés à son mariage. L’entrevue lui a permis de tenter de dissiper les doutes de l’agent concernant son mariage et le rejet de ses demandes de visa antérieures.
[29] Contrairement à ce qu’affirme Mme Kaur, à savoir qu’elle aurait dû être informée des doutes de l’agent chargé de l’entrevue concernant le rejet de ses demandes de visa antérieures, les agents des visas ne sont pas tenus d’informer les demandeurs des doutes découlant des exigences de la Loi (Hassani c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2006 CF 1283 au para 24; Hamza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 264 aux para 21-24; Patel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 573 au para 20).
[30] Le fait que l’agent qui a rendu la décision n’était pas celui chargé de l’entrevue ne démontre pas un manquement à l’équité procédurale. Cette façon de faire semble être une mesure de protection : l’agent chargé de l’entrevue renvoie le dossier à un autre agent, en l’espèce, le gestionnaire de l’unité (comme il est indiqué dans les notes du SMGC), avant qu’une conclusion de fausses représentations soit rendue. L’argument de Mme Kaur selon lequel la décision de l’agent a été rendue sans tenir compte des éléments de preuve se rapporte au caractère raisonnable de la décision.
VII.
La décision n’est pas raisonnable
[31] Dans ses motifs – la lettre de décision et les notes versées dans le SMGC –, l’agent n’indique pas clairement si sa décision reposait sur le fait que Mme Kaur avait été jugée non crédible par l’agent chargé de l’entrevue en raison de ses doutes initiaux quant à la validité de son mariage ou en raison de ses doutes ultérieurs résultant des réponses qu’elle a fournies concernant le rejet de ses demandes de visa antérieures, ou les deux.
[32] L’agent chargé de l’entrevue a mentionné les deux à la fin de l’entrevue. Dans le SMGC, l’agent note ce qui suit : [traduction] « [a]ucune preuve du divorce de l’hôte […]. Je ne suis donc pas convaincu qu’ils sont mariés. Elle ne m’a pas paru crédible. Elle n’était pas honnête au sujet de ses demandes de visa qui ont été rejetées dans le passé et elle se contredisait. »
Ces notes donnent à penser que l’agent chargé de l’entrevue a tiré une conclusion au sujet de la crédibilité générale de Mme Kaur en s’appuyant sur l’état de son mariage et le rejet de ses demandes de visa antérieures.
[33] Les doutes de l’agent chargé de l’entrevue concernant la validité du mariage de Mme Kaur étaient hypothétiques et injustifiés compte tenu des documents (notamment son certificat de mariage et son passeport) et des réponses qu’elle avait fournis à l’entrevue. De plus, Mme Kaur a remis le certificat de divorce de son mari peu de temps après l’entrevue et bien avant que la décision soit rendue le 8 avril 2020. Toute conclusion selon laquelle Mme Kaur n’était pas crédible au sujet de l’état de son mariage ou de l’objet de sa demande de visa (qui était de visiter son mari au Canada) n’est pas raisonnable.
[34] En outre, lors du renvoi de l’affaire au gestionnaire de l’unité, l’agent chargé de l’entrevue a indiqué que Mme Kaur [traduction] « s’était donné beaucoup de mal pour cacher le rejet de ses demandes de visa antérieures »
. Les notes versées dans le SMGC n’étayent pas une telle affirmation. Ses réponses étaient manifestement incohérentes, mais seules quelques questions de ce type étaient consignées, ce qui ne reflète pas le fait de se donner « beaucoup de mal »
.
[35] Dans les notes versées au SMGC, selon l’agent qui a rendu la décision, [traduction] « au cours de l’examen de la demande, [il] a constaté que la demanderesse avait demandé des VISAS au Canada et aux États-Unis, ce qui n’a pas été divulgué. La cliente a été convoquée en entrevue et a été informée des doutes ainsi que des conséquences d’une conclusion fondée sur l’article 40 de la Loi. […] La demanderesse n’a pas dissipé les doutes soulevés par l’agent. »
[36] Comme l’a mentionné Mme Kaur, il ne s’agit pas d’une description juste des événements. L’entrevue a eu lieu en raison des doutes initiaux au sujet de son mariage, et non des refus de visa antérieurs.
[37] Les notes versées dans le SMGC présentent ensuite la conclusion de l’agent :
[traduction]
À mon avis, selon la prépondérance des probabilités, le demandeur n’a pas été honnête dans son formulaire de demande et n’a pas divulgué qu’il avait déjà présenté des demandes au Canada et aux États-Unis. Cette situation aurait pu entraîner une erreur dans l’application de la Loi et du Règlement puisqu’un agent aurait pu être convaincu que le demandeur satisfaisait aux exigences de la Loi quant à l’existence d’un véritable motif pour vouloir séjourner au Canada de façon temporaire et qu’il respecterait les conditions d’entrée au Canada.
[Non souligné dans l’original.]
[38] L’agent qui a rendu la décision semble avoir suivi la recommandation de l’agent chargé de l’entrevue, notamment en ce qui a trait à la crédibilité, sans examiner la preuve, compte tenu de son utilisation des mots « demandeur »
et « il »
et du renvoi à la question de savoir si Mme Kaur avait un « motif raisonnable pour vouloir séjourner au Canada »
. Le but de son voyage n’avait pas soulevé de doute, puisque la demande de la demanderesse visait à lui permettre de venir au Canada pour rendre visite à son mari, qui travaillait au Canada à l’époque. La conclusion de l’agent reflète, au pire, un exemple de « copier-coller »
à partir d’une autre décision ou, au mieux, un manque d’attention à l’égard de la demande de Mme Kaur. Quoi qu’il en soit, elle ne satisfait pas à la norme de la décision raisonnable.
[39] Comme l’a mentionné le juge Diner au paragraphe 15 de la décision Patel, bien que les motifs des agents des visas soient nécessairement brefs, ils doivent être adaptés aux questions et préoccupations soulevées par la preuve, conformément aux principes établis dans l’arrêt Vavilov. Au paragraphe 17, le juge Diner ajoute ce qui suit :
Encore une fois, s’il est vrai que les bureaux des visas et les agents qui y travaillent sont soumis à des contraintes opérationnelles importantes et qu’ils doivent composer avec des ressources limitées à cause des quantités énormes de demandes à traiter, ils ne sauraient être dispensés de rendre des décisions adaptées à la trame factuelle qui leur est présentée. Renoncer à ce que ces décisions soient fondamentalement adaptées à la preuve enlèverait à l’examen du caractère raisonnable l’élément de rigueur exigé par l’arrêt Vavilov, aux para 13, 67 et 72. « Caractère raisonnable » n’est pas synonyme de « motifs abondants » : une justification simple et concise fera l’affaire.
[40] Bien que les motifs ne doivent pas être jugés au regard d’une norme de perfection, la lettre de décision et les notes versées dans le SMGC de l’agent qui a rendu la décision ne dénotent pas suffisamment une analyse rationnelle qui mène à une conclusion qui est justifiée au regard des faits et du droit.
[41] Ma conclusion selon laquelle la décision n’est pas raisonnable ne porte pas atteinte à l’importance de la finalité de l’article 40 de la Loi, qui est de dissuader les fausses déclarations, ni à l’importance de la sincérité en tant qu’exigence légale et principe fondamental, ce qui a été souligné à plusieurs reprises dans la jurisprudence.
JUGEMENT dans le dossier IMM-2422-20
LA COUR STATUE :
La demande de contrôle judiciaire est accueillie.
Il n’y a aucune question à certifier.
« Catherine M. Kane »
Juge
Traduction certifiée conforme
Sophie Reid-Triantafyllos
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
|
IMM-2422-20
|
INTITULÉ :
|
JASPREET KAUR c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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LIEU DE L’AUDIENCE :
|
TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE
|
DATE DE L’AUDIENCE :
|
LE 17 FÉVRIER 2022
|
JUGEMENT ET MOTIFS :
|
LA JUGE KANE
|
DATE DES MOTIFS :
|
LE 25 FÉVRIER 2022
|
COMPARUTIONS :
Ravneet Rakhra
|
POUR LA DEMANDERESSE
|
Edward Burnet
|
POUR LE DÉFENDEUR
|
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
MTC Law
Avocats
Vancouver (Colombie‑Britannique)
|
POUR LA DEMANDERESSE
|
Procureur général du Canada
Vancouver (Colombie-Britannique)
|
POUR LE DÉFENDEUR
|