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Date : 20020830

Dossier : T-687-02

Référence neutre : 2002 CFPI 924

                   ACTION RÉELLE ET PERSONNELLE EN MATIÈRE D'AMIRAUTÉ

ENTRE :

                                                  M. ET MME STEPHEN STRIEBEL

                                                                                                                                                   demandeurs

                                                                                   et

                                              SOVEREIGN YACHTS (CANADA) INC.,

LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES

AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE CHAIRMAN, également connu

sous le nom de SOVEREIGN HULL NUMBER 7644

                                                                                                                                                     défendeurs

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE HARGRAVE

        Les présents motifs découlent de la requête des demandeurs visant le réexamen de l'ordonnance que j'ai rendue le 27 août 2002, dans laquelle j'ai établi le montant de la garantie pour la mainlevée du navire des demandeurs, le Chairman, à 1 million $ (US). À titre d'explication, le navire a été construit par Sovereign Yachts (Canada) Inc. (Sovereign), saisi par les demandeurs en leur qualité de créanciers hypothécaires et propriétaires éventuels alors qu'il se trouvait sur le chantier du constructeur, Sovereign, et ensuite fait l'objet d'un caveat inscrit par Sovereign. Les demandeurs soutiennent que j'ai commis une erreur par inadvertance ou que j'ai mal interprété les éléments de preuve et que la garantie stipulée en faveur de Sovereign aurait dû être fixée à 1 million $ (Can).


        La défenderesse Sovereign allègue que le changement dans la désignation de devises constitue une modification, un changement d'opinion, et non pas une simple correction d'erreur.

ANALYSE

        Le droit est bien établi : je ne peux pas réexaminer un jugement et le modifier afin de refléter un changement d'opinion, mais je peux le rectifier pour qu'il corresponde à ce qu'il aurait dû être ou ce qu'il était censé être : Polylock Corporation c. Montreal Fast Print (1975) Ltd., [1984] 1 C.F. 713, aux pages 720 et 721, motifs du juge en chef Thurrow.

        Dans Maligne Building Ltd. c. La Reine, [1983] 2 C.F. 301, M. le juge Dubé a formulé le concept de façon légèrement différente en se reportant à la règle 337(5), qui a précédé la présente règle de l'omission, la règle 397, et en établissant que lorsqu'un juge omet de statuer sur une question, c'est-à-dire qu'il y a une omission relative à une question technique, la Cour peut prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation : voir page 304.

        Les défendeurs invoquent une jurisprudence bien établie, en l'occurrence l'affaire Kun Shoulder Rest Inc. c. Joseph Kun Violin & Bow Maker Inc. (1999), 172 F.T.R. 149, selon laquelle le réexamen d'une conclusion tirée de la preuve ne constitue pas un fondement approprié aux fins d'un réexamen fondé sur la règle 397. Voir de même Keleher c. Canada, une décision inédite dans l'action T-1981-87 en date du 27 juin 1989, portant sur le réexamen d'une décision publiée antérieurement; cette décision étaye la proposition selon laquelle la Cour ne peut réexaminer les conclusions qu'elle a tirées de la preuve, ce réexamen devant être effectué dans le cadre d'un appel.


        Ces deux décisions énoncent des propositions tout à fait valables. D'une part, des erreurs ou des omissions par inadvertance peuvent être corrigées afin d'atteindre un résultat visé et, d'autre part, le pouvoir prévu à la règle 397 de corriger des erreurs ne s'étend pas au réexamen de conclusions tirées de la preuve. Il s'agit d'une distinction naturelle et logique, car seule la première instance décisionnelle peut connaître le but visé et remédier à une telle omission par inadvertance, alors qu'il appartient à une cour siégeant en appel d'examiner de nouveau la preuve et de peut-être arriver à une conclusion différente.

        En l'espèce, il y a eu une omission relative à une question technique, une erreur de lecture et de transcription de la preuve et de la plaidoirie en raison des montants désignés tant en devises canadiennes qu'en devises américaines; de temps à autre, les deux parties se référaient notamment aux mêmes montants en devises différentes dans les actes de procédure, dans les affidavits et dans les plaidoiries. Par exemple, dans sa demande reconventionnelle, Sovereign réclame des dommages-intérêts de [traduction] « 1 850 000 $ US » , moins une déduction en dollars américains, alors que le même manque à gagner en vertu du contrat s'établissait à [traduction] « plus de 1,8 million $ » dans la plaidoirie et se chiffrait à [traduction] « environ 1 810 815 $ » dans la preuve par affidavit de Sovereign. Il existe d'autres incohérences de cette nature.


        J'ai par inadvertance considéré que Sovereign réclamait un montant de 1 810 815 $ (US), assorti d'une demande de garantie de 2 millions $ (US). J'ai conclu que la garantie était exorbitante à ce chapitre et que des circonstances particulières justifiaient une diminution du montant. En recourant à une approche pragmatique, car je ne peux trancher l'affaire en fixant une garantie, j'ai diminué la garantie de moitié. Je voulais ainsi que la garantie imposée ne soit pas excessive, mais qu'elle reflète raisonnablement le montant de la réclamation, compte tenu des circonstances particulières, et la valeur la plus raisonnable de la cause. J'ai commis une erreur en désignant le montant en dollars américains, plutôt qu'en dollars canadiens comme l'ont fait les parties dans leur affidavit et dans leur plaidoirie, parce que mon but était que la garantie reflète à la fois les circonstances particulières et la réclamation dans sa valeur la plus raisonnable de la cause. Un simple changement mécanique dans la désignation de devises suffit à corriger l'erreur. Si l'une ou l'autre des parties souhaite que la preuve soit réexaminée, cela pourrait se faire par voie d'appel.

        La requête en réexamen est accueillie. L'ordonnance en date du 27 août 2002 est modifiée conformément à la règle 397, pour remplacer « US » par « Can » à deux endroits au paragraphe 1 et pour supprimer, à la première ligne, les mots redondants [TRADUCTION] « l'équivalent de » lorsqu'il est fait référence à la garantie concernant North West Delta Yacht Services Inc.

      Les dépens seront adjugés en faveur des demandeurs à l'issue de la cause.

                                                                                                                                     « John A. Hargrave »            

                                                                                                                                                    Protonotaire                   

Vancouver (Colombie-Britannique)

30 août 2002

Traduction certifiée conforme

Yvan Tardif, B.A., LL.L.


                                                    COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                               SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                                 AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                  T-687-02

INTITULÉ :                                                 M. et Mme Stephen Striebel c.

Sovereign Yachts (Canada) Inc.

LIEU DE L'AUDIENCE :                         Requête par écrit

DATE DE L'AUDIENCE :                       -

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :         LE PROTONOTAIRE HARGRAVE

DATE DE L'ORDONNANCE :              le 30 août 2002

COMPARUTIONS :

-                                                                                                       POUR LES DEMANDEURS

-                                                                                                       POUR LA DÉFENDERESSE Sovereign Yachts (Canada) Inc.

-                                                                                                      POUR LA DÉFENDERESSE

North West Delta Yacht Services

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

McEwen, Schmitt & Co.                                                               POUR LES DEMANDEURS

Vancouver (Colombie-Britannique)

Nathanson Schachter & Thompson                                               POUR LA DÉFENDERESSE

Vancouver (Colombie-Britannique)                                              Sovereign Yachts (Canada) Inc.

Ottho Law Group                                                                           POUR LA DÉFENDERESSE

Vancouver (Colombie-Britannique)                                               North West Delta Yacht Services

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