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Date : 20020226

Dossier : T-1059-99

Référence neutre : 2002 CFPI 215

Ottawa (Ontario), le 26 février 2002

EN PRÉSENCE DE M. LE JUGE PELLETIER

ENTRE :

TIME WARNER ENTERTAINMENT COMPANY, L.P.

demanderesse

- et -

MADAME UNE TELLE et AUTRES

défendeurs

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]    La demanderesse sollicite un jugement par défaut contre Thi Lee et Van Nguyen Le. Il semble qu'au moment de l'exécution de l'ordonnance Anton Piller, Thi Lee était âgée de 14 ans. Il semble aussi que l'éventaire où le document fut signifié à Mme Lee était inscrit au nom de Van Nguyen Le, même si Mme Lee a prétendu être la propriétaire de l'éventaire. La directrice du marché aux puces a confirmé au représentant de la demanderesse que le marché aux puces n'avait aucune relation avec Mme Lee.


[2]    La seule preuve de signification à M. Le est la signification à Mme Lee. L'affidavit produit au soutien d'une ordonnance ratifiant l'exécution de l'ordonnance prévoit que, après avoir conféré avec Mme Lee, la directrice du marché aux puces a dit qu'elle était « persuadée que le marché aux puces n'avait pas de lien contractuel avec Mme Lee, et que l'autorisation avait été donnée de procéder à la perquisition et à la saisie. La défenderesse a nié avoir fabriqué les articles contrefaits, mais nous avons vu et saisi de faux transferts, qui étaient dissimulés près du Hot Stamp Press » . On ne sait pas d'emblée par qui a été donné le consentement à la procédure, car aucune partie à la conversation ne semblait avoir le pouvoir de consentir à l'exécution de l'ordonnance.

[3]    On voudrait aujourd'hui conclure cette affaire en obtenant un jugement par défaut contre une personne qui était âgée de 14 ans au moment de la signification. Il s'agissait donc d'une personne inhabile. Selon la règle 129, la signification à une personne physique qui n'a pas la capacité d'ester en justice s'effectue selon le mode qu'ordonne la Cour. Aucune ordonnance n'était en vigueur au moment de la signification, et aucune requête n'a été produite après la signification en vue d'obtenir des directives nunc pro tunc. S'il y a eu signification à M. Le, alors la signification a été effectuée par signification à une personne mineure qui a déclaré qu'elle vivait avec lui.


[4]                 L'ordonnance qui a été signifiée au moment de l'exécution prévoit qu'elle peut être signifiée par remise de l'ordonnance à la personne apparemment responsable des lieux. Cette expression n'a jamais englobé une personne mineure. En droit, une personne mineure est inhabile à consentir à une perquisition et à une saisie sur les biens d'une autre personne. La question de savoir si un adulte a dans les mêmes circonstances le pouvoir requis est une question de fait.

[5]                 Une ordonnance a été rendue qui examine l'exécution de l'ordonnance Anton Piller et qui fait de l'injonction provisoire une injonction interlocutoire. Elle doit être considérée comme une ordonnance qui dispose de la question de la signification aux fins de l'injonction accordée. Il n'appartient pas à un juge de la Cour d'examiner les tenants et aboutissants d'une ordonnance rendue par un autre juge de la Cour. Il n'est pas non plus souhaitable de dire qu'une ordonnance est contraignante à certaines fins, mais non à d'autres, de telle sorte que l'on doive accepter que la signification a été prouvée également aux fins d'un jugement par défaut.


[6]                 Si la signification est prouvée, alors, pour avoir droit à jugement, la demanderesse doit uniquement montrer que les défendeurs ont porté atteinte à ses droits de propriété intellectuelle. En l'espèce, la preuve révèle que Mme Lee, qui a prétendu être la propriétaire de l'éventaire, était présente lorsque certaines marchandises censément contrefaites étaient vendues. Il existe une preuve par ouï-dire selon laquelle l'éventaire était loué à M. Le. La preuve de contrefaçon est le même genre de preuve de contrefaçon acceptée par la Cour au moment de l'exécution de l'ordonnance. Abstraction faite de la preuve par ouï-dire de la propriété de l'éventaire, il n'est pas établi que M. Le avait connaissance de l'atteinte portée aux droits de la demanderesse, ni qu'il y a participé. Reste uniquement la question de savoir si une personne âgée de 14 ans est apte à comprendre la nature de l'atteinte ainsi portée, et les conséquences d'une telle conduite. Il ne s'agit pas d'introduire dans des procédures de contrefaçon l'obligation de prouver la mens rea, mais il s'agit de se demander si une personne mineure a la capacité d'être rendue responsable d'une contrefaçon, avec les dommages-intérêts qui s'attachent à une telle responsabilité. En l'absence d'un précédent qui m'obligerait à dire qu'une personne mineure a la capacité de se livrer à des actes de contrefaçon de nature à engager sa responsabilité, je me refuse à le faire.

IL EST ORDONNÉ CE QUI SUIT :

La demande de jugement par défaut est rejetée.

                                                                               « J.D. Denis Pelletier »         

                                                                                                             Juge                       

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                        T-1059-99

INTITULÉ :                       TIME WARNER ENTERTAINMENT COMPANY, L.P. c. MADEMOISELLE UNE TELLE ET AUTRES

REQUÊTE JUGÉE SUR PIÈCES, SANS LA COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE : M. LE JUGE PELLETIER

DATE DES MOTIFS :     LE 26 FÉVRIER 2002

OBSERVATIONS ÉCRITES :

COLLEEN SPRING ZIMMERMAN              POUR LA DEMANDERESSE

MAY M. CHENG                                                           

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

FASKEN MARTINEAU DuMOULIN LLP     POUR LA DEMANDERESSE

TORONTO

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