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Date : 20211229


Dossier : IMM-478-21

Référence : 2021 CF 1478

Ottawa (Ontario), le 29 décembre 2021

En présence de l'honorable monsieur le juge Bell

ENTRE :

PABLO GARCIA CUEVAS

RAQUEL GARCIA ATRISCO

JUAN MARIANO GARCIA GARCIA

ALEXA GARCIA GARCIA

MARELI GARCIA GARCIA

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Nature de l’affaire

[1] Les demandeurs se pourvoient en contrôle judiciaire, en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch. 27 [« LIPR »], à l’encontre de la décision rendue le 31 décembre 2020 par la Section d’appel des réfugiés (« SAR »), division de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, rejetant leur demande d’asile. Dans sa décision, la SAR confirme la décision de la Section de protection des réfugiés (« SPR »), qui avait rejeté la demande d’asile en raison de l’existence d’une possibilité de refuge interne (« PRI ») au Mexique. Un problème de crédibilité a également été soulevé par la SPR et confirmé par la SAR, mais ceci n’est pas pertinent aux fins du présent contrôle.

II. Faits pertinents et décision de la SPR

[2] Monsieur Pablo Garcia Cuevas (le « demandeur principal »), madame Raquel Garcia Atrisco (la « codemanderesse ») et leurs deux enfants (les « demandeurs mineurs ») (collectivement « les demandeurs ») sont des citoyens du Mexique.

[3] Le demandeur principal est agriculteur. Un dénommé monsieur Perez lui a demandé de cultiver une plante destinée à la production de l’opium. Le demandeur principal a refusé. En septembre 2017, suite à ce refus, des hommes se sont présentés à la résidence des demandeurs pour menacer le demandeur principal. Un an plus tard, en septembre 2018, le demandeur principal a quitté le Mexique pour le Canada.

[4] Le 25 mars 2019, la codemanderesse prétend, dans son récit, que des hommes sont venus à sa résidence et ont demandé de voir le demandeur principal. Elle aurait dit qu’ils étaient séparés. Les hommes l’auraient alors menacé. Ces allégations ont toutefois été jugées comme non crédibles par la SPR et la SAR.

[5] Les demandes d’asile des demandeurs mineurs sont basées sur les craintes du demandeur principal et de la codemanderesse.

[6] La codemanderesse et les demandeurs mineurs ont quittés le Mexique pour le Canada en juin 2019. Les demandeurs ont déposé des demandes d’asile, qui ont été déférées le 12 juin 2019. La SPR a rejeté la demande, concluant qu’il existe une PRI pour les demandeurs dans les villes de Mérida et de Saltillo au Mexique.

[7] Quant au premier volet de l’analyse relative à la PRI, la SPR a déterminé que le demandeur principal n’a pas démontré que monsieur Perez ou ses hommes auraient l’intérêt ou la motivation de rechercher les demandeurs dans les PRI proposées. La SPR a également conclu que le demandeur principal n’a pas établi que monsieur Perez et ses hommes auraient même la capacité de les retrouvés dans les PRI proposées. La SPR a noté que le demandeur principal n’avait pas établi que monsieur Perez était membre d’un des grands cartels présents au Mexique ou que ses activités s’étendaient aux États où se trouvent Saltillo et Mérida.

[8] Quant au deuxième volet de l’analyse relative à la PRI, la SPR a conclu que les demandeurs n’ont pas démontré que les PRI proposées seraient objectivement déraisonnables, en tenant compte de toutes les circonstances. La SPR souligne notamment que le demandeur principal a déjà réussi à obtenir un emploi ailleurs que dans son village d’Oxtocapa, soit à Acapulco, même si le demandeur principal a allégué que les villes proposées « sont pour les gens qui ont des études » et qu’il ne pourrait se trouver d’emploi, car il n’avait pas de diplôme ni de référence.

[9] Tel que mentionné précédemment, la SPR n’a pas cru la codemanderesse au sujet de l’incident allégué du 25 mars 2019. La SPR a relevé des contradictions importantes entre son témoignage à l’audience et le récit de son formulaire Fondement de la demande d’asile (« FDA »), contradictions qu’elle n’a pas été en mesure d’expliquer.

III. Décision faisant l’objet du contrôle judiciaire

[10] La décision faisant l’objet du présent contrôle judiciaire est celle rendue le 31 décembre 2020 : la SAR confirme la décision de la SPR rejetant la demande d’asile au motif qu’il existe une PRI pour les demandeurs.

[11] Quant au premier volet de son analyse de la PRI, la SAR a confirmé la décision de la SPR selon laquelle les demandeurs n’ont pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, l’intérêt et la capacité de monsieur Perez de les retrouver dans les villes proposées.

[12] La SAR a noté qu’il ressortait du formulaire FDA du demandeur principal que d’autres agriculteurs du village avaient accepté de cultiver la plante que monsieur Perez voulait utiliser pour faire de l’opium. Elle a aussi noté que le demandeur principal est demeuré dans son village pendant 8 mois après qu’il a reçu des menaces, sans rétribution. La SAR note aussi que le demandeur principal a pu travailler dans d’autres villages suite aux menaces et qu’il n’a pas été importuné par monsieur Perez et ses hommes. Elle note finalement qu’il ne ressort pas de la preuve que monsieur Perez fait partie d’un groupe qui a beaucoup d’influence au Mexique.

[13] Pour les mêmes raisons que la SPR, la SAR a déterminé, dans son analyse du deuxième volet de la PRI, que les demandeurs n’ont pas démontré qu’il serait objectivement déraisonnable pour eux de se relocaliser dans l’une ou l’autre des villes proposées. Quant à l’allégation du demandeur principal qu’il ne savait pas s’il pourrait se trouver un logement dans les villes proposées puisqu’il « n’avait personne là-bas », la SAR a indiqué que l’absence de famille ou de relations dans les PRI ne rend pas la situation déraisonnable.

[14] La SAR a également confirmé la conclusion de la SPR selon laquelle l’allégation de la codemanderesse concernant les incidents du 25 mars 2019 n’était pas crédible.

IV. Disposition pertinentes

[15] Les dispositions pertinentes en l’espèce sont les articles 96 et 97 de la LIPR, reproduites ci-après :

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27

Immigration and Refugee Protection Act, S.C. 2001, c. 27

Définition de réfugié

Convention Refugee

96 A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

96 A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

Personne à protéger

Person in need of protection

97 (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

97 (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

V. Question en litige

[16] Cette affaire soulève une seule question : la décision de la SAR relative à la possibilité de refuge interne pour les demandeurs est-elle raisonnable ?

VI. Analyse

A. Norme de contrôle applicable

[17] Les parties s’entendent sur le fait que la norme applicable à la révision de la décision de la SAR est celle de la raisonnabilité. Je suis d’accord (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, 441 DLR (4th) 1 [« Vavilov »] au para 25).

B. Caractère raisonnable de la décision relative à la PRI

[18] Les demandeurs soutiennent que la SAR a erré dans son analyse du premier volet relatif à la PRI, en ce qui a trait à l’intérêt de monsieur Perez de retracer le demandeur principal. Spécifiquement, ils prétendent que la SAR a erré en concluant que monsieur Perez n’avait pas de motif pour cibler le demandeur principal en raison du fait que d’autres agriculteurs avaient accepté de faire la culture de la plante destinée à la production de drogue.

[19] Selon les demandeurs, en concluant ainsi, la SAR retient une raison périphérique afin de minimiser l’intérêt de leur persécuteur et ne tient pas compte « des situations capitales non contredites ». Les demandeurs ajoutent qu’une erreur dans l’appréciation de l’intérêt de l’agent de persécution conduit généralement à une erreur quant à la possibilité d’un demandeur de se rétablir dans son pays d’origine (Mendoza Velez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 132 au para 29).

[20] En deuxième lieu, les demandeurs soutiennent que la SAR a également erré dans son analyse du deuxième volet relatif à la PRI. Ils soutiennent que la SAR n’a pas tenu compte du fait que le demandeur principal ait mentionné à l’audience devant la SPR qu’il ne pourrait trouver d’emploi dans les villes proposées puisqu’il n’a pas d’éducation et que dans ces villes, seuls des gens avec des diplômes sont engagés. Les demandeurs soumettent que le défaut pour la SAR de considérer cette information rend sa décision relative au second volet de la PRI déraisonnable.

[21] Au soutien de cet argument, les demandeurs stipulent que la SAR n’a pas tenu compte de deux des facteurs qu’elle devait prendre en considération lors de son analyse du second volet, soit l’existence d’obstacles pouvant se dresser entre un demandeur et la ville/région proposée, et l’existence de caractéristiques particulières d’un demandeur qui font qu’il n’est pas raisonnable de penser qu’il puisse se réinstaller dans la ville/région proposée. (Cardenas c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1194 [« Cardenas »] aux paras 19 et 21 ; Olivares Sanchez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 443 au para 17.) Les demandeurs sont d’avis que la SAR n’a pas tenu compte de l’absence de scolarité du demandeur principal, une de ses caractéristiques personnelles, et de l’obstacle que cette absence de scolarité représentera lors de la recherche d’un emploi dans les villes proposées.

[22] Troisièmement, les demandeurs soutiennent que la SAR a omis de considérer un élément clé dans son analyse relative à la PRI, soit la qualité de la protection fournie à un demandeur dans la ville/région proposée. Ils prétendent que la documentation utilisée par la SPR pour la sélection des villes proposées comme PRI ne peuvent aider à mesurer le niveau de risque auquel s’expose une personne qui a eu des problèmes avec des membres d’une organisation criminelle au Mexique. Ils ajoutent que certains documents du cartable national démontrent l’ampleur des ratés des autorités mexicaines en matière de protection de tels individus.

[23] Finalement, les demandeurs prétendent que la SAR s’est contentée de confirmer l’analyse de la SPR au sujet de la PRI, alors qu’elle avait le devoir de faire sa propre analyse (Eng c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 711 au para 24, citant Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), 1998 837 (CSC), [1998] 1 RCS 27). Selon les demandeurs, la SAR a fait défaut de procéder à une analyse indépendante de la PRI qui tient compte de la qualité de la protection offerte dans les villes proposées par la PRI, rendant sa décision déraisonnable.

[24] Le défendeur soutient que la SAR n’a commis aucune erreur en concluant que les demandeurs ont une PRI à Mérida et Saltillo, se basant sur la preuve au dossier pour choisir ces deux endroits. Le défendeur ajoute que la SAR a correctement appliqué le test à deux volets défini dans les arrêts Rasaratnam c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 CF 706 (CA) [« Rasaratnam »] et Thirunavukkarasu c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 1 RCF 589 (CA) [« Thirunavukkarasu »].

[25] Selon la norme de la raisonnabilité, cette Cour doit contrôler la décision administrative afin de déterminer si elle possède les attributs d’une décision raisonnable, soit une décision fondée sur une « analyse intrinsèquement cohérente » et justifiée « au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti ». (Vavilov, au para 85.)

[26] L’existence d’une PRI viable rend irrecevable une demande d’asile présentée au titre des articles 96 et 97 de la LIPR. (Barragan Gonzalez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 502 aux paras 45‑46) Le test à remplir pour un demandeur d’asile souhaitant prouver qu’il n’existe aucune PRI raisonnable dans son État de nationalité en est un en deux étapes. D’une part, le décideur doit être convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur risque d’être persécuté dans la partie du pays où il existe une possibilité de refuge. D’autre part, la situation dans cette partie du pays doit être telle qu’il serait déraisonnable pour le demandeur d’y chercher refuge, compte tenu de toutes les circonstances, incluant celles qui lui sont propres. (Rasaratnam ; Thirunavukkarasu ; Castillo Garcia c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 347 au para 26).

[27] Je rejette la prétention des demandeurs que la SAR a erré dans son analyse du premier volet de ce test lorsqu’elle a conclu que monsieur Perez n’avait pas de motif pour retracer le demandeur puisque d’autres agriculteurs ont accepté de collaborer avec lui. Il ressort de la décision de la SAR que le fait que d’autres agriculteurs aient acceptés de collaborer avec monsieur Perez ne constitue que l’une des plusieurs raisons pourquoi elle a conclu à l’absence de motivation et d’intérêt à retracer le demandeur principal. La SAR tient effectivement compte de plusieurs « situations capitales » dans son analyse, telles que le défaut pour le demandeur principal de prouver que monsieur Perez était toujours à sa recherche, le fait que les demandeurs ont pu habiter au Mexique pendant une longue période suite aux menaces initiales et ce, sans problème, ainsi que l’absence de pouvoir et d’influence de monsieur Perez à travers le Mexique.

[28] Il est important de rappeler qu’un décideur administratif est présumé avoir considéré et soupesé l’ensemble de la preuve devant lui (Florea. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 598 (C.A.) [« Florea »] au para 1 ; Boulos c Canada (Alliance de la fonction publique), 2012 CAF 193, [2012] ACF No 832 [« Boulos »] au para 11 ; Gill c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 934 [« Gill »] au para 39), et que le rôle de la Cour de révision n’est pas de réévaluer la preuve dont disposait le décideur (Vavilov au para 125; Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c Canada (Procureur général), 2018 CSC 31, [2018] 2 R.C.S. 230 au para 55 ; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339 au para 64).

[29] En ce qui concerne le deuxième argument des demandeurs que « seuls des gens avec des diplômes sont engagés » dans les PRI proposées et que la SAR a omis de tenir compte des caractéristiques personnelles du demandeur principal, je note qu’il n’y a rien dans les documents du cartable national qui appuie cette thèse. C’est au demandeur que revient le fardeau de démontrer l’existence de conditions qui rendraient déraisonnable sa relocalisation dans la vile/région proposée comme PRI ; ce fardeau est élevé, il faut de la preuve réelle et concrète (Ranganathan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] 2 C.F. 164, [2000] ACF No 2118 [« Ranganathan »] au para 15 ; Sharma c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 545 au para 32). Aucune preuve réelle et concrète n’a été présentée par les demandeurs. Qui plus est, il ressort de la décision de la SAR qu’elle a effectivement tenu compte du niveau d'’éducation du demandeur principal dans son analyse du deuxième volet du test (au para 16).

[30] En réponse à l’argument des demandeurs que la SAR a fait défaut de faire une analyse indépendante de la PRI, je répondrais seulement que les décideurs administratifs sont présumés avoir considéré et soupesé l’ensemble de la preuve dont ils disposaient afin de rendre leur décision (Florea ; Boulos ; Gill). De plus, il est bien établi que les cours de révision ne peuvent s’attendre à ce que les décideurs administratifs répondent à tous les arguments des parties ou tirent une conclusion explicite sur chaque élément ayant mené à leur décision finale. (Vavilov au para 128 ; Newfoundland and Labrador Nurses' Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] 3 RCS 708 aux paras 16 et 25.) Cette Cour ne doit intervenir que lorsqu’une décision est entachée d’une lacune grave, à un point tel qu’elle amène à perdre confiance au résultat obtenu. (Vavilov, au para 100.). De surplus, la SAR peut très bien, comme elle l’a fait en l’espèce, conclure qu’elle accepte l’analyse de la SPR. Après tout, il est important de se rappeler qu’un appel devant la SAR n’est pas un appel de novo (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Huruglica, 2016 CAF 93, [2016] 4 RCF 157 au para 79).

[31] Les demandeurs réfèrent à un document du cartable national, à l’onglet 9.5, qui, selon eux, présente des informations abondantes sur les ratés des autorités mexicaines en matière de protection des citoyens. Je répète qu’un décideur administratif est présumé avoir considéré l’ensemble de la preuve au dossier et que le défaut de mentionner un document en particulier n’est pas un motif d’intervention. Ce n’est que lorsque l’élément de preuve qui n’est pas mentionné contredit la conclusion à laquelle est arrivée le décideur que la cour de révision pourra inférer que l’ensemble de la preuve n’a pas été considérée (Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 1 CF 53, 157 FTR 35 au para 17). Le document en question ne contredit pas la conclusion que les villes de Merida et Saltillo sont endroits où il ne serait pas déraisonnable pour les demandeurs de s’y relocaliser, compte tenant de toutes les circonstances, incluant celles qui leur sont propres. Le document fait état de conditions générales au Mexique. Les conditions générales d’une région d’une PRI ou du pays ne rendent pas en soi une PRI déraisonnable (Arabambi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 98 aux paras 38, 40-42).

[32] Au surplus, même si la SAR n’a pas traité explicitement le niveau de protection des autorités dans les villes proposées comme PRI, elle s’est dit d’accord avec les conclusions de la SPR; cela ne signifie pas qu’elle n’a pas fait sa propre analyse (Kayitankore c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1030, [2016] FCJ No 1034 au para 23).

VII. Conclusion

[33] Pour les motifs exposés ci-dessus, je suis d’avis que les demandeurs n’ont pas réussi à démontrer en quoi la décision de la SAR est déraisonnable. Je suis d’opinion que la décision, dans son ensemble, possède les attributs d’une décision raisonnable, soit une décision fondée sur une « analyse intrinsèquement cohérente » et justifiée « au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti ». (Vavilov, au para 85.)


JUGEMENT dans le IMM-478-21

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée, sans frais. Aucune question n’est certifiée aux fins d’examen par la Cour d’appel fédérale.

« B. Richard Bell »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-478-21

 

INTITULÉ :

PABLO GARCIA CUEVAS, RAQUEL GARCIA ATRISCO, JUAN MARIANO GARCIA GARCIA, ALEXA GARCIA GARCIA, MARELI GARCIA GARCIA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 20 octobre 2021

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BELL

 

DATE DES MOTIFS :

LE 29 décembre 2021

 

COMPARUTIONS

Me Francisco Alejandro Saenz Garay

 

Pour les demandeurs

 

Me Chantal Chatmajian

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Francisco Alejandro Saenz Garay

Montréal (Québec)

 

Pour les demandeurs

 

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

Pour le défendeur

 

 

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