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Date: 20211223


Dossier : T-1570-20

Référence : 2021 CF 1466

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 23 décembre 2021

En présence de madame la juge Pallotta

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

et

CHINEDU G. UBAH

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Le demandeur, à savoir le procureur général du Canada (PGC), introduit la présente requête au titre de l’article 40 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F-7 [la Loi] afin d’obtenir une ordonnance déclarant que le défendeur, monsieur Ubah, est un plaideur quérulent. Le PGC demande entre autres que l’ordonnance interdise à M. Ubah d’engager ou de continuer une instance devant la Cour fédérale, sauf avec l’autorisation de celle‐ci.

[2] Le PGC soutient que M. Ubah a engagé des instances répétitives et sans fondement devant notre Cour et les tribunaux de l’Alberta. La Cour du Banc de la Reine de l’Alberta l’a déclaré plaideur quérulent et lui a interdit d’engager ou de continuer des instances devant les tribunaux de l’Alberta, sauf avec l’autorisation de ceux-ci. Le PGC soutient que les activités de M. Ubah devant notre Cour ont augmenté.

[3] Le PGC fait valoir que les comportements vexatoires de M. Ubah comprennent la formulation d’allégations d’irrégularité non fondées, la dénaturation des conclusions du tribunal, la présentation fréquente de demandes de réexamen, le dépôt de requêtes inutiles, le non-respect des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 [les Règles], et l’élaboration d’actes de procédure de façon incohérente. Le PGC soutient que M. Ubah, qui n’est pas avocat, rédige des documents pour d’autres plaideurs comparaissant devant notre Cour, en contravention de l’article 119 des Règles concernant la représentation.

[4] M. Ubah s’oppose à la demande du PGC. Il fait valoir que sa participation aux dossiers d’autres demandeurs est compatible avec les Règles. M. Ubah soutient que les instances que les autres demandeurs et lui ont intentées devant la Cour fédérale sont fondées et que les litiges antérieurs sur lesquels s’appuie la présente requête du PGC pour le faire déclarer plaideur quérulent révèlent l’existence de partialité et d’un complot contre lui.

[5] Pour les motifs énoncés ci-dessous, je conclus que M. Ubah a agi de façon vexatoire au cours d’instances. Je conclus qu’il devrait être impossible pour M. Ubah d’engager ou de continuer des instances devant notre Cour, sauf avec l’autorisation de celle-ci, et que le comportement de M. Ubah justifie l’imposition d’autres restrictions. Plus importante encore, il est nécessaire de limiter la participation de M. Ubah aux instances d’autres plaideurs.

II. Faits

[6] Le PGC a donné son consentement à la présente requête le 23 décembre 2020, ce qui constitue une condition à respecter pour demander réparation au titre de l’article 40 de la Loi.

[7] M. Ubah a été déclaré plaideur quérulent en raison de ses activités antérieures devant les tribunaux de l’Alberta, et il est visé par des restrictions d’accès à ces tribunaux : Ubah v Canadian Natural Resources Limited, 2019 ABQB 692, au para 183 [Ubah ABQB]. Les antécédents de M. Ubah devant les tribunaux de l’Alberta sont résumés dans la décision Ubah ABQB.

[8] M. Ubah a interjeté appel de l’ordonnance rendue dans la décision Ubah ABQB, et la Cour d’appel de l’Alberta a supprimé deux restrictions d’accès aux tribunaux : (i) introduire, tenter d’introduire ou continuer un appel, une action, une demande ou une instance quelconque devant un tribunal à l’extérieur de l’Alberta (y compris la Cour fédérale); (ii) participer à une instance ou continuer une instance devant tout tribunal administratif du Canada : Ubah v Canadian Natural Resources Limited, 2021 ABCA 5 [Ubah ABCA].

[9] M. Ubah soutient que la Cour d’appel de l’Alberta a mal compris son argument et a supposé qu’il souhaitait uniquement faire modifier l’ordonnance rendue dans la décision Ubah ABQB. Le 25 juin 2021, M. Ubah a déposé une demande d’autorisation pour interjeter appel de la décision à la Cour suprême du Canada (dossier no 39757).

[10] En ce qui concerne les antécédents de M. Ubah devant notre Cour, selon deux affidavits signés par Charlotte Harper, une parajuriste travaillant au bureau régional d’Edmonton du ministère de la Justice Canada, son bureau a répondu à 18 instances devant la Cour fédérale touchant ou semblant toucher M. Ubah.

[11] M. Ubah était désigné à titre de plaignant ou de demandeur dans sept instances. Dans les onze autres instances, M. Ubah n’était pas une partie désignée, mais son adresse était celle indiquée aux fins de signification au Canada par les parties qui avaient introduit les instances, et M. Ubah a signé des affidavits à l’appui dans ces instances. Les parties qui ont introduit les instances sont des membres de la famille élargie de M. Ubah et les instances concernent des demandes de visa de membres de la famille. Dans quatre des onze instances, M. Ubah a demandé l’autorisation de représenter les demandeurs et sa demande a été rejetée.

[12] M. Ubah affirme qu’il a offert un emploi à trois membres de sa famille et qu’il en a parrainé d’autres afin qu’ils viennent étudier au Canada ou visiter le pays. Il a aussi agi à titre de représentant autorisé auprès d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) pour les membres de sa famille. M. Ubah soutient que presque tous les demandeurs qui l’ont désigné comme représentant auprès d’IRCC [traduction] « avaient vu leur visa retardé de façon déraisonnable et avaient donc dû s’adresser au tribunal, et IRCC allait trancher leur demande dans un délai de quelques jours », que [traduction] « la plupart [des demandeurs] avaient vu leur demande rejetée », exception faite de sa mère et de sa belle-mère, et que six demandeurs avaient [traduction] « choisi d’exercer leur droit de demander à la Cour fédérale du Canada d’examiner les décisions en matière d’immigration rendues à leur encontre » par l’entremise de demandes d’autorisation et de contrôle judiciaire.

[13] La plupart des 18 instances dont il est question dans les affidavits de Mme Harper ne sont plus actives, car elles ont été abandonnées après que les membres de la famille de M. Ubah ont obtenu l’autorisation d’entrer au Canada ou ont été réglées autrement. Les six instances qui n’ont pas été abandonnées ou réglées autrement ont été suspendues jusqu’à l’issue de la présente requête. Les voici :

  1. IMM-6798-19, Kelechi B Agbai c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration : La sœur de M. Ubah a présenté cette demande de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision du 11 novembre 2019 par laquelle sa deuxième demande de résidence permanente au Canada au titre de la catégorie des travailleurs qualifiés a été rejetée et Mme Agbai a été jugée interdite de territoire au Canada pour une période de cinq ans en raison d’une fausse déclaration relativement à son expérience de travail. La demande de résidence permanente de Mme Agbai était fondée sur une offre d’emploi de l’entreprise de M. Ubah, Gideon Energy Services Inc. Dans une procédure de contrôle judiciaire antérieure, Mme Agbai a contesté la décision du 6 septembre 2018 par laquelle un agent des visas avait rejeté sa première demande de résidence permanente. Cette demande de contrôle judiciaire a été rejetée le 3 juillet 2019 (IMM-4636-18, Agbai c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2019 CF 886). Mme Agbai a présenté une demande de prorogation du délai pour déposer une requête en réexamen de la décision rendue dans le dossier IMM-4636-18, laquelle a aussi été rejetée. Avant cette instance, M. Ubah et Mme Agbai avaient présenté une demande de mandamus afin d’obliger le ministre à rendre immédiatement une décision au sujet de la demande de résidence permanente de Mme Agbai (IMM-4275-18).

  2. IMM-1996-20, Kelechi Agbai c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration : Cette demande, déposée le 18 mars 2020, vise à obtenir une ordonnance de mandamus afin d’obliger le ministre à rendre une décision au sujet de la demande de réexamen de la décision du 6 septembre 2018, présentée par Mme Agbai, par laquelle la première demande de résidence permanente de celle-ci a été refusée (cette décision a fait l’objet d’un contrôle judiciaire dans le dossier IMM-4636-18). Comme la demande de réexamen a été rejetée le 30 juillet 2020, dans le dossier IMM-1996-20, le ministre soutient que la demande de mandamus est théorique et constitue un abus de procédure judiciaire. Le ministre fait valoir qu’il s’agissait de la troisième demande de réexamen de la décision du 6 décembre 2018 présentée par Mme Agbai – les deux premières demandes ont été rejetées le 13 septembre 2018 et le 30 novembre 2018 –, et que cette demande a été présentée après que la Cour a rejeté sa demande de contrôle judiciaire dans le dossier IMM-4636-18.

  3. T-1538-20, Kelechi Agbai c Sa Majesté la Reine : Mme Agbai a déposé une déclaration contre la Couronne, dans laquelle elle demande des dommages-intérêts et une injonction pour diffamation, conspiration, négligence et d’autres causes d’action se rapportant au rejet de ses demandes de résidence permanente.

  4. IMM-1925-19, Ngozi Joy Uba c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration : La belle-sœur de M. Ubah a présenté cette demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision du 19 mars 2019 par laquelle sa demande de permis de travail, qui s’appuyait sur une offre d’emploi de gardienne pour les enfants de M. Ubah, a été refusée, tout comme la demande de visa de résident temporaire pour la fille de Mme Uba en tant que mineure accompagnant celle-ci (ses fils avaient été parrainés par M. Ubah et étudiaient au Canada). Bien que Mme Uba ait abandonné la demande IMM-1925-19 après que le ministre a accepté de faire réexaminer l’affaire par un autre agent (qui a rejeté la demande de permis de travail le 21 novembre 2019), elle cherche à rouvrir le dossier IMM-1925-19. Mme Uba a déposé une requête visant à annuler l’avis de désistement, au motif que le ministre a conclu une entente frauduleuse et a en violé les prescriptions. Elle soutient que l’entente de règlement prévoyait que l’agent qui avait rejeté la demande de permis de travail en mars 2019 [traduction] « ne toucherait plus à [sa] demande ». Mme Uba voulait faire réexaminer la décision rendue à la suite du nouvel examen le 21 novembre 2019, et l’agent qui a rejeté cette demande de réexamen était le même qui avait rejeté sa demande de permis de travail en mars 2019. Mme Uba a introduit une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire afin de contester la décision de refus de réexamen du 19 novembre 2020 (voir le dossier IMM-6148-20 ci-dessous).

  5. IMM-3944-20, Ngozi Uba c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration : Il s’agit d’une demande visant à obtenir une ordonnance de mandamus afin d’obliger le ministre à rendre une décision au sujet de la demande de réexamen de la nouvelle décision du 21 novembre 2019, présentée par Mme Uba, par laquelle sa demande de permis de travail a été rejetée. Notre Cour a déjà refusé l’autorisation de contester la nouvelle décision rendue le 21 novembre 2019 (IMM-7263-19) et a rejeté la requête en réexamen présentée par Mme Uba portant sur la décision par laquelle notre Cour a refusé l’autorisation.

  6. IMM-3944-20, Ngozi Uba c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration : Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire de la décision du 19 novembre 2020 par laquelle [traduction] « la demande de permis de travail de Mme Uba a été rejetée ». Plus précisément, comme je le mentionne plus haut, la décision du 19 novembre 2020 a rejeté la demande de réexamen du 15 octobre 2020, présentée par Mme Uba, qui portait sur la nouvelle décision rendue le 21 novembre 2019. Comme je l’indique aussi plus haut, l’agent qui a rejeté cette demande de réexamen de Mme Uba était le même qui avait rejeté la demande de permis de travail de celle-ci en mars 2019.

[14] L’annexe A du présent jugement et des présents motifs comprend un tableau énumérant les instances décrites ci-dessus, ainsi que les autres instances mentionnées dans les affidavits de Mme Harper, et résume certaines étapes de ces instances. Ce tableau n’est pas exhaustif et ne comprend pas de nombreux points dont j’ai tenu compte pour rendre mes conclusions, après avoir examiné le dossier volumineux comptant près de 5 000 pages se rapportant à la présente requête.

[15] Dans le tableau se trouvant à l’annexe A, j’ai ajouté 2 instances aux 18 mentionnées dans les affidavits de Mme Harper : T-627-21, Chinedu Ubah c Gendarmerie royale du Canada et T-991-21, Chinedu G Ubah c Conseil canadien de la magistrature. J’ai ajouté ces instances, car elles ont été intentées après que Mme Harper a signé ses affidavits, et ces deux instances ont été suspendues jusqu’à l’issue de la présente requête.

III. Questions préliminaires

[16] M. Ubah soulève deux questions préliminaires. Premièrement, M. Ubah soutient que je ne devrais pas tenir compte de la décision de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta Ubah ABQB pour décider s’il convient d’imposer des restrictions d’accès aux tribunaux, car le juge Peter Annis a déjà conclu que la question de savoir si la décision de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta justifie des restrictions d’accès semblables à notre Cour est théorique, et notre Cour ne peut pas éliminer le caractère théorique d’une question théorique. Deuxièmement, M. Ubah soutient que les affidavits de Charlotte Harper déposés par le PGC à l’appui de la présente requête sont inadmissibles parce qu’elle a commis un parjure.

[17] En ce qui concerne la première question préliminaire, le 14 décembre 2020, le juge Annis a délivré une directive dans la décision IMM-6798-19, Kelechi B Agbai c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, dans laquelle il demande aux parties de présenter des observations sur la question de savoir si la décision Ubah ABQB et les éléments de preuve de la décision IMM-6798-19 justifient d’imposer à M. Ubah des restrictions d’accès à la Cour fédérale. Bien que M. Ubah ne soit pas une partie désignée dans le dossier IMM-6798-19, il semble qu’il s’occupait de ce litige.

[18] Le 24 décembre 2020, le PGC a déposé l’avis de requête qui a donné lieu à la présente requête fondée sur l’article 40 de la Loi. Par conséquent, le juge Annis a déclaré que sa directive était théorique et a suspendu l’instance dans le dossier IMM-6798-19 jusqu’à l’issue de la présente requête.

[19] Le juge Annis a déclaré que sa directive était théorique, car la question était visée par une autre instance. Le juge Annis n’a pas conclu que la question soulevée dans sa directive – à savoir si la décision de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta justifiait l’imposition de restrictions d’accès semblables à notre Cour – était théorique.

[20] Dans les arrêts Canada c Olumide, 2017 CAF 42, aux paragraphes 37-38 [Olumide] et Simon c Canada (Procureur général), 2019 CAF 28, aux paragraphes 20 et 25 [Simon], la Cour d’appel fédérale a conclu que notre Cour peut accorder un poids important à une déclaration de plaideur quérulent d’un autre tribunal lorsqu’elle est saisie d’une demande de même nature. Je dois déterminer le poids que j’accorde à la déclaration de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta. La décision du juge Annis au sujet de la directive qu’il avait donnée n’a pas tranché cette question et ne m’empêche pas d’en tenir compte dans la présente requête.

[21] En ce qui concerne la deuxième question préliminaire, M. Ubah fait valoir que Mme Harper a soumis des affidavits mensongers; il soutient qu’une déclaration se trouvant dans l’un de ses affidavits relativement à la présente requête [traduction] « s’écarte clairement » de son affidavit utilisé dans l’instance devant la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta. Dans l’affidavit soumis à la Cour du Banc de la Reine, Mme Harper a affirmé que M. Ubah avait introduit huit demandes devant la Cour fédérale au nom de différents membres de sa famille, tandis que dans les affidavits déposés à l’appui de la présente requête, elle affirme que les dossiers de la Cour fédérale [traduction] « touchent ou semblent toucher M. Ubah », ce qui indique qu’elle est incertaine quant à l’ampleur de la participation de M. Ubah. Je ne suis pas de cet avis.

[22] Aucune preuve n’a été présentée pour établir que Mme Harper avait tenté d’embellir le dossier soumis à la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta en utilisant une formulation qui n’est pas nécessairement représentative des faits. Les déclarations ne sont pas incompatibles, M. Ubah n’a pas contre-interrogé Mme Harper et il n’a pas présenté de motif valable de douter de la véracité des affidavits de celle-ci.

IV. Questions en litige

[23] Les questions en litige soulevées dans la présente requête consistent à savoir si M. Ubah devrait être déclaré plaideur quérulent, et le cas échéant, quelles restrictions sont appropriées.

V. Analyse

A. M. Ubah est-il un plaideur quérulent?

[24] Le raisonnement derrière l’article 40 de la Loi repose sur le fait que les Cours fédérales sont un bien collectif dont la mission est de servir tout un chacun, et non une ressource privée qui peut être exploitée à tort pour promouvoir les intérêts d’une personne : Olumide, aux para 17-19; Simon, au para 9. L’article 40 de la Loi permet à la Cour d’établir des limites supplémentaires au besoin pour empêcher un plaideur de gaspiller les ressources judiciaires en raison d’instances faisant double emploi, de litiges inutiles, du genre de litiges ou de la manière dont ils les gèrent, de leurs motivations, de leurs intentions, de leurs attitudes et de leurs capacités pendant les litiges ou de toute combinaison de ces éléments : Simon, aux para 15-16.

[25] La « conduite vexatoire » n’a pas de sens précis (Olumide, au para 31) :

La conduite vexatoire est un concept qui tire principalement son sens de l’objet de l’article 40. Lorsque la réglementation de l’accès continu du plaideur aux cours de justice au titre de l’article 40 est appuyée par l’objet de cet article, la réparation doit être accordée. En d’autres mots, la réparation prévue doit être accordée lorsque l’accès continu et illimité d’un plaideur aux cours de justice sape l’objet de l’article 40. [...]

[26] Il existe différents indices de l’existence d’un plaideur quérulent, y compris être sermonné par divers tribunaux pour avoir eu un comportement vexatoire, intenter des poursuites frivoles (requêtes, demandes, actions en justice ou appels), faire des allégations scandaleuses et non fondées contre les parties adverses, remettre en litige des questions ayant déjà été tranchées, interjeter appel de décisions sans succès, faire fi des règles et des ordonnances des tribunaux, ainsi que des dépens adjugés : Olumide c Canada, 2016 CF 1106, aux para 9-10, conf par Olumide (CAF). Ces indices ne sont pas contraignants, mais ils peuvent être utiles pour autant que nous gardions à l’esprit l’objet de l’article 40 : Olumide, aux para 32 et 34.

[27] M. Ubah affirme qu’il ressort du dossier que la demande du PGC constitue un abus dans l’application de l’article 40 de la Loi. En ce qui concerne les tribunaux de l’Alberta, M. Ubah soutient que le PGC travaillait en secret avec le juge de l’Alberta qui a imposé les restrictions d’accès aux tribunaux dans la décision Ubah ABQB. Il s’oppose au fait que le PGC s’appuie sur une décision qu’il considère comme douteuse pour obtenir une déclaration semblable de la part de la Cour fédérale. M. Ubah fait valoir que notre Cour ne devrait pas s’appuyer sur la déclaration de plaideur quérulent rendue par la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta ni sur les commentaires formulés par le juge Annis, qui dénotent tous deux une partialité.

[28] À mon avis, il est inutile de se pencher sur les allégations de M. Ubah concernant les instances en Alberta. Il n’est pas nécessaire de s’appuyer sur la déclaration rendue dans la décision Ubah ABQB, car l’historique des instances devant notre Cour présente suffisamment d’indices témoignant d’un comportement vexatoire pour justifier l’imposition de restrictions d’accès aux tribunaux. C’est pourquoi je n’accorde pas de poids à la conduite de M. Ubah devant les tribunaux de l’Alberta ni à la déclaration rendue dans la décision Ubah ABQB.

[29] En ce qui concerne l’historique des litiges de M. Ubah devant notre Cour, le PGC fait valoir que la conduite de M. Ubah présente des indices témoignant d’un comportement vexatoire.

[30] Le PGC soutient que M. Ubah prend part à des litiges par le ministère d’un représentant. Bien qu’il ne soit pas avocat, il tente de représenter des plaideurs dans des instances auxquelles il n’est pas partie. Le PGC fait valoir que la participation de M. Ubah aux litiges des membres de sa famille éclipse les droits des plaideurs et sa conduite dans ces instances présente des indices témoignant d’un comportement vexatoire.

[31] Le PGC soutient que les indices témoignant d’un comportement vexatoire comprennent l’incapacité à élaborer des actes de procédure de façon cohérente, la tendance à faire valoir des motifs et des questions identiques d’une instance à une autre, l’ignorance des règles ou des directives du tribunal, la présentation de requêtes compliquant les choses inutilement, les demandes visant à infirmer des décisions bien établies ou visant à demander au tribunal de réexaminer des demandes rejetées, la dénaturation des conclusions du tribunal, ainsi que la formulation d’allégations générales et non fondées de conspiration et d’irrégularité à l’endroit des défendeurs, des avocats et des tribunaux.

[32] M. Ubah soutient qu’il ne peut pas être un plaideur quérulent, car il n’est pas le plaideur qui a engagé des instances dans [traduction] « 14 des 15 dossiers de la Cour fédérale » que Mme Harper a mentionnés dans son premier affidavit. Cela est inexact. Outre les actions qu’il a intentées en son propre nom (T-756-20, T-627-21 et T-991-21), M. Ubah était, du moins pour une certaine période, désigné comme demandeur ou co-demandeur dans six instances mettant en cause des membres de sa famille. Il a participé aux démarches de contestation des requêtes des défendeurs visant à le retirer des parties, ainsi qu’à la présentation de requêtes visant à le joindre personnellement, ou à joindre son entreprise, comme partie aux instances (et à l’autoriser à représenter son entreprise) et à lui permettre de représenter des membres de sa famille devant notre Cour.

[33] Lorsque M. Ubah s’est vu refuser l’autorisation de représenter les membres de sa famille, certains d’entre eux ont tenté de faire en sorte que leur demande de contrôle judiciaire soit tranchée sur la base d’observations écrites seulement. Cela a soulevé des préoccupations quant au degré de participation des plaideurs au dossier et quant à la question de savoir s’ils comprenaient pleinement les arguments avancés et les conséquences des mesures prises. Par exemple, Mme Agbai a été jugée interdite de territoire au Canada pour cinq ans, mais préfère tout de même renoncer à une plaidoirie et faire en sorte que sa demande de contestation de cette décision soit tranchée sur la base d’observations écrites seulement. Elle a présenté une requête en vue de joindre M. Ubah comme partie à la demande, qui a été rejetée, tout comme sa requête subséquente visant à autoriser M. Ubah à la représenter devant notre Cour.

[34] M. Ubah soutient qu’il est un citoyen canadien qui n’a aucun dossier actif avec IRCC. Il affirme qu’il est ingénieur, et non avocat, et qu’il a participé de façon limitée et légitime aux dossiers des membres de sa famille : il a uniquement donné son adresse aux fins de signification (car une adresse canadienne aux fins de signification est exigée aux termes de l’alinéa 5(1)k) des Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22 [les Règles en matière de CIPR], il a contribué au paiement des frais de dépôt au tribunal, a veillé à ce que les documents soient signifiés à temps et a fourni des affidavits dans les situations où il avait une connaissance directe des faits. Au surplus, M. Ubah fait valoir que les membres de sa famille ont le droit de se faire représenter, que notre Cour a permis que le représentant soit un membre de la famille (Clement c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2019 CF 703, au para 2) et que rien n’empêche un demandeur d’utiliser [traduction] « tout outil à sa disposition pour peaufiner sa demande d’autorisation et de contrôle judiciaire ».

[35] M. Ubah a raison de dire que les demandeurs doivent utiliser une adresse aux fins de signification au Canada et qu’ils ont le droit de s’appuyer sur un affidavit que M. Ubah a signé s’il est en mesure de fournir des éléments de preuve pertinents à l’appui de leur demande. Cependant, j’estime que M. Ubah minimise sa participation à ces dossiers. Je dénote des tendances qui concordent avec une participation approfondie et je conclus que M. Ubah fournit des conseils et s’occupe des instances – elles comportent des étapes procédurales semblables, des arguments semblables et des formulations semblables, y compris en comparaison avec des documents que M. Ubah a signés. Des allégations générales utilisées dans une instance sont répétées dans d’autres instances, même si elles concernent des membres de la famille différents. Les instances comportent des allégations d’irrégularité concernant le comportement du défendeur par rapport à M. Ubah, et non aux demandeurs eux-mêmes. Par exemple, dans les dossiers IMM-7486-19, IMM-7489-19 et IMM-1996-20, les demandeurs désignés soutiennent que les autorités d’immigration ont agi de mauvaise foi et de façon trompeuse dans leurs interactions avec M. Ubah. M. Ubah semble intervenir tout au long des instances.

[36] L’article 119 des Règles prévoit qu’une personne physique peut agir seule ou se faire représenter par un avocat dans toute instance. Les Règles ne précisent pas qu’une personne physique peut se faire représenter par un ami ou un membre de sa famille. Je conclus que M. Ubah s’occupe du litige dans des instances auxquelles il n’est pas partie qui concernent des membres de sa famille. Il est fort probable que M. Ubah rédige la correspondance déposée auprès de la Cour, ainsi que les plaidoiries et les arguments. Par conséquent, M. Ubah contrevient aux dispositions des Règles concernant la représentation. En fait, des éléments de preuve indiquent que M. Ubah a envoyé des courriels à partir de l’adresse courriel de membres de sa famille. Comme le PGC le souligne, un courriel transmis à l’avocate du défendeur à partir de l’adresse Gmail de Mme Agbai portait la signature [traduction] « Salutations cordiales, M. Ubah », et lorsque l’avocate a répondu qu’elle ne pouvait pas discuter du dossier avec M. Ubah, elle a reçu la réponse [traduction] « Désolée pour la coquille ».

[37] En plus de contrevenir aux règles régissant la représentation, M. Ubah semble utiliser les instances concernant les demandes de visa des membres de sa famille pour faire avancer sa propre cause et pour remettre en litige des allégations d’irrégularité à l’endroit du gouvernement. Selon l’affidavit de M. Ubah déposé aux fins de la présente requête, les visas des membres de sa famille ont été refusés et les membres de sa famille [traduction] « ont intentionnellement été maltraités et victimes d’oppression de la part d’IRCC dans une attaque indirecte en raison de [leurs] liens familiaux, du fait qu’ils [l]’avaient choisi pour être leur représentant auprès d’IRCC, ce qui [lui] permet de poser des questions en leur nom, du fait [qu’il a] des enfants dont il faut s’occuper, du fait [qu’il] exploite une entreprise comme un citoyen canadien, mais selon IRCC, pas un véritable citoyen canadien, mais plutôt un citoyen naturalisé, etc., y compris en raison du travail au noir, dans l’objectif de faire en sorte que la Cour de l’Alberta [le] déclare plaideur quérulent ». Il soutient que les procédures judiciaires sont nécessaires pour contester les mesures prises par le gouvernement et tenir celui-ci responsable de ce qu’il a fait et de ce qu’il continue de faire, non seulement à lui-même, mais à des [traduction] « millions » d’autres citoyens naturalisés canadiens et demandeurs de visa.

[38] Compte tenu de la preuve versée au dossier, je conclus que M. Ubah s’occupe de litiges qui concernent des membres de sa famille. Je conclus également que le degré de participation de M. Ubah est important, et sa conduite dans ces instances présente des indices témoignant d’un comportement vexatoire.

[39] Le PGC a établi des indices témoignant d’un comportement vexatoire, y compris le fait que M. Ubah fait des allégations non fondées d’irrégularité et de conspiration, gaspille des ressources juridiques en tentant de remettre en litige des questions ayant déjà été tranchées et fait fi des Règles régissant la représentation d’autres plaideurs. En voici quelques exemples :

  • Dans le dossier 18-T-21, M. Ubah a tenté d’être dispensé du paiement des droits de dépôt d’une demande de contrôle judiciaire au motif que la décision par laquelle le ministre défendeur avait accepté de renvoyer la décision d’un agent d’immigration à une personne différente en vue d’un nouvel examen était un stratagème et une tactique dilatoire visant à contrecarrer les efforts déployés par le demandeur. M. Ubah a formulé des allégations non fondées selon lesquelles le ministre défendeur était impitoyable, l’avait induit en erreur et avait intentionnellement retardé des procédures judiciaires dans l’objectif de faire valoir qu’il devrait être dispensé de l’obligation de payer des droits de dépôt pour introduire une deuxième demande de contrôle judiciaire. Ces allégations ne découlaient pas des faits allégués, à savoir que le réexamen d’une demande de visa de résident temporaire d’un enfant mineur était renvoyé au même bureau qui avait initialement refusé la demande, donnant lieu à la même erreur qu’auparavant. La requête dans le dossier 18-T-21 a été rejetée en mars 2018.

  • M. Ubah réitère son allégation selon laquelle le gouvernement fait partie d’une conspiration contre lui ou les membres de sa famille depuis le début de son historique en matière de litige. Dans son instance contre Sa Majesté, T-756-20, M. Ubah soutient qu’il est victime de diffamation et d’oppression de la part d’IRCC, qu’IRCC conclut des [traduction] « ententes secrètes » avec des tiers, y compris un juge, et [traduction] « interfère dans les processus d’immigration et entrave ceux-ci dans l’objectif de rejeter les demandes, d’opprimer les demandeurs et de les empêcher de travailler pour [M. Ubah] et son entreprise ».

  • M. Ubah a été sermonné pour ce comportement. Des suites de la réception de lettres signées Maxwell Uba a/s de Chinedu Ubah, dans une directive du 8 décembre 2020, le juge Shirzad Ahmed s’est exprimé en ces termes dans le dossier IMM-5567-20 : [traduction] « Il est inapproprié et inacceptable d’accuser l’avocat de la partie adverse de mentir ou d’agir de mauvaise foi. J’estime que l’allégation des demandeurs selon laquelle le défendeur s’immisce dans le processus décisionnel d’IRCC et induit notre Cour en erreur est troublante, d’autant plus qu’il est inapproprié pour les demandeurs de mettre en cause l’intégrité du défendeur pour de tels motifs. » Une autre lettre comprenant des allégations d’irrégularité contre le ministre défendeur a été déposée plus tard, le même jour que la directive a été rendue. Cette lettre indiquait à tort que dans les dossiers IMM-7486-19 et IMM-7489-19, la Cour avait trouvé des éléments de preuve témoignant d’une conduite oppressive qualifiée de [traduction] « répugnante ».

  • M. Ubah a présenté, en vain, de nombreuses demandes de réexamen, y compris dans les dossiers IMM-1206-19, IMM-3282-18, IMM-4626-18 et IMM-7263-18. M. Ubah a même continué à plaider des affaires tranchées en faveur du demandeur. Après que la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire a été accueillie sur consentement dans le dossier IMM-7486-19, une lettre signée Maxwell Uba a/s de Chinedu Ubah envoyée à la Cour contenait des allégations voulant que le défendeur ait menti. La Cour a rendu une directive indiquant qu’elle n’était plus saisie de l’affaire et n’accepterait aucune autre correspondance à ce sujet. Une lettre semblable contenant des allégations d’irrégularité a été envoyée après que la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire a été accueillie sur consentement dans le dossier IMM-7489-19.

[40] Les instances touchant M. Ubah ou les membres de sa famille dénotent une tendance à formuler des allégations inexactes et non fondées, une tendance qui ressort encore une fois de la réponse de M. Ubah à la présente requête. Par exemple, M. Ubah fait valoir que des membres de sa famille ont présenté des demandes à notre Cour, car le PGC influence de façon illégale et oppressive les décisions des agents des visas à l’étranger dans une croisade visant à l’intimider, le PGC agit de façon douteuse et criminelle pour induire la Cour en erreur, il existe des [traduction] « éléments de preuve incontestables » indiquant que les offres de règlement présentées par les défendeurs dans les instances dont la Cour est saisie [traduction] « étaient fallacieuses ou frauduleuses », notre Cour a qualifié d’oppressive ou de répugnante la conduite du gouvernement, IRCC a embauché des [traduction] « policiers corrompus » pour accuser à tort Kelechi Agbai de fraude, une agente d’immigration affectée au dossier d’un membre de sa famille a avoué que le PGC modifiait et influençait son affidavit, et le ministre défendeur a frauduleusement fourni des dossiers du tribunal différents à la Cour et à Mme Agbai dans une des instances la concernant dans l’espoir que la Cour en vienne à la conclusion que Mme Agbai, qui n’est pas représentée par un avocat, est délirante, car la Cour ne dispose pas du même contenu qu’elle.

[41] Les avocats de la partie adverse et notre Cour doivent consacrer des ressources pour répondre aux allégations répétées et non fondées de M. Ubah et à la façon dont il dénature les faits. Compte tenu des allégations non fondées et inexactes qu’il a formulées en réponse à la présente requête, l’examen du dossier, déjà coûteux en temps, a été encore plus long. M. Ubah formule des allégations d’irrégularité non fondées, même après avoir reçu un avertissement de notre Cour l’informant que ces allégations étaient inappropriées.

[42] Le dossier dénote une tendance à répéter des motifs et des questions identiques d’une instance à une autre, la présentation de requêtes compliquant les choses inutilement et la présentation fréquente de demandes de réexamen ou de remise en litige. Non seulement le dossier dénote la tendance de M. Ubah à refuser d’accepter le caractère définitif des décisions, mais il comprend des exemples de situations dans lesquelles M. Ubah a demandé réparation à la Cour même lorsque l’instance avait été tranchée en faveur des demandeurs. Par exemple, en septembre 2020, soit deux ans après l’arrivée du beau-frère de M. Ubah au Canada, M. Ubah a tenté de faire rouvrir le dossier IMM-3282-18, car les défendeurs auraient [traduction] « agi de façon trompeuse et fait de fausses déclarations ». Les défendeurs avaient déposé une lettre à la Cour le 31 juillet 2018 indiquant qu’aucune décision n’avait été rendue, alors qu’en fait, la demande de résidence permanente du beau-frère de M. Ubah avait été accueillie quatre jours plus tôt, soit le 27 juillet 2018. M. Ubah a demandé à la Cour de se pencher sur cette tromperie, car les défendeurs [traduction] « continuent d’agir de façon douteuse pour tromper la cour, car ils s’en sortent toujours ».

[43] La question à se poser pour prononcer une déclaration de plaideur quérulent consiste à savoir si le plaideur est incontrôlable ou nuisible au système judiciaire et à ses participants au point qu’il est justifié de lui imposer l’obligation d’obtenir une autorisation pour exercer tout nouveau recours : Simon, aux para 14-18. La conduite de M. Ubah est à la fois incontrôlable ou nuisible et justifie de lui imposer l’obligation d’obtenir une autorisation pour exercer tout nouveau recours. Les allégations et les arguments de M. Ubah sont soumis à répétition à notre Cour, dans des instances auxquelles M. Ubah ou des membres de sa famille sont parties. Je suis convaincue que des restrictions sont nécessaires pour veiller à ce que la participation de M. Ubah à ces dossiers soit gérable et pour permettre à la Cour d’encadrer la façon dont il utilise les ressources judiciaires. En outre, une déclaration de plaideur quérulent peut être avantageuse pour les demandeurs, qui sont les membres de la famille de M. Ubah. M. Ubah et les membres de sa famille ne semblent pas comprendre les conséquences négatives pouvant découler de la participation de M. Ubah à leurs litiges. À mon avis, il serait avantageux pour les membres de la famille de M. Ubah de retenir les services d’un avocat afin que celui-ci les conseille et les représente, mais s’ils décident de ne pas le faire, ils peuvent défendre leur propre cause devant notre Cour. Quoi qu’il en soit, une déclaration de plaideur quérulent vise entre autres à éviter que ces demandeurs subissent les conséquences des actes de M. Ubah devant notre Cour, qui ne sont pas les leurs.

B. Quelles restrictions sont appropriées?

[44] Le PGC soutient qu’une restriction typique consiste à demander à la Cour l’autorisation d’engager une instance en vertu du paragraphe 40(3) de la Loi. La Cour dispose du pouvoir absolu d’imposer d’autres exigences au besoin (Olumide, au para 23), et le PGC soutient que d’autres restrictions sont nécessaires en l’espèce.

[45] À cet égard, le PGC demande une ordonnance par laquelle M. Ubah serait tenu de demander la permission d’introduire une demande au titre du paragraphe 40(3) de la Loi par l’entremise d’une requête préliminaire par écrit : Wilson c Canada (Agence du revenu du Canada), 2017 CF 817, aux para 64-65, 70-77 [Wilson].

[46] Le PGC sollicite aussi une ordonnance interdisant à M. Ubah de préparer des documents dans le but de les déposer devant la Cour fédérale pour toute personne autre que lui‐même, et de déposer des documents auprès de la Cour ou de communiquer avec la Cour, sauf en son nom. Le PGC soutient que par l’entremise de la déclaration de plaideur quérulent, le greffe devrait recevoir la directive de refuser le dépôt de tout document provenant de M. Ubah (y compris un affidavit de signification) ou de tout autre document qui comprend la mention « aux soins de » M. Ubah ou son adresse postale, sauf si ce document se rapporte à une instance engagée ou continuée en son nom (c.-à-d. M. Ubah est une partie désignée dans l’instance).

[47] Dans l’arrêt Canada (Procureur général) c Fabrikant, 2019 CAF 198 [Fabrikant], le juge Stratas a formulé les observations suivantes sur les types de restrictions pouvant être imposées dans une déclaration de plaideur quérulent :

[44] Il est possible de prononcer divers types d’ordonnances visant un plaideur quérulent. Il faut rédiger soigneusement l’ordonnance de façon à protéger le droit légitime du plaideur quérulent d’ester en justice tout en protégeant le plus possible la Cour et ses justiciables : voir les objectifs examinés dans l’arrêt Olumide, aux paragraphes 17 à 34.

[45] Dans les cas semblables à l’espèce, une déclaration de plaideur quérulent doit viser les objectifs suivants :

Interdire au plaideur quérulent d’intenter une poursuite en personne ou par le ministère d’un représentant et d’aider un autre plaideur.

Décider s’il y a lieu de mettre fin aux autres instances du plaideur quérulent; si c’est le cas, exposer la façon par laquelle il sera possible de les faire revivre et instruire.

Éviter que le greffe perde son temps en communications inutiles et à traiter des actes de procédure irrecevables.

Permettre d’ester devant la Cour sur autorisation, uniquement dans les circonstances restreintes permises par loi lorsque c’est nécessaire et que le défendeur a respecté les règles de procédure et les ordonnances antérieures de la Cour, auquel cas, il faut veiller à ce que les intéressés aient la possibilité de présenter leurs observations.

Donner au greffe le pouvoir de prendre rapidement des mesures administrativement simples pour la protection du greffe, de la Cour et des autres justiciables contre les comportements vexatoires.

Protéger le pouvoir de la Cour d’apporter des modifications ultérieures à l’ordonnance s’il y a lieu, mais seulement en conformité avec les principes d’équité procédurale.

Veiller à ce que les autres jugements, ordonnances et directives demeurent applicables, dans la mesure où ils ne sont pas incompatibles avec l’ordonnance.

[46] Il peut être difficile et long d’atteindre tous ces objectifs par le truchement d’un seul jugement ou d’une seule ordonnance, surtout si on en rédige le texte pour la première fois. L’expérience démontre que certains plaideurs quérulents feront de leur mieux pour contourner l’ordonnance déclaratoire : voir notamment l’arrêt Virgo c. Canada (Procureur général), 2019 CAF 167. La Cour qui rend une telle ordonnance doit anticiper et prévenir toutes les voies illégitimes. En outre, la faculté de la Cour de durcir son ordonnance au besoin et de punir les manquements tout en préservant les droits issus de l’équité procédurale doit être protégée.

[48] Je suis convaincue qu’en plus de l’ordonnance habituelle interdisant à M. Ubah d’engager ou de continuer une instance devant notre Cour sans autorisation, d’autres restrictions sont nécessaires.

[49] Compte tenu de la tendance de M. Ubah à remettre des questions en litige, je conclus qu’il est raisonnable d’imposer une procédure préliminaire semblable à celle énoncée dans la décision Wilson, par laquelle il devra obtenir au préalable l’autorisation de signifier et de déposer une demande d’autorisation complète au titre du paragraphe 40(3) de la Loi.

[50] Je suis aussi d’accord avec le PGC pour dire qu’il est essentiel de mettre en œuvre des restrictions empêchant M. Ubah de prendre part à des litiges par le ministère d’un représentant – l’une des principales raisons pour lesquelles la conduite de M. Ubah est nuisible et incontrôlable. M. Ubah n’est pas avocat. Il n’est pas lié par les règles en matière de déontologie ou de responsabilité. Pourtant, sa conduite dans ces affaires ressemble à celle d’un avocat.

[51] L’interdiction de prendre part à des litiges par le ministère d’un représentant est l’un des objectifs d’une déclaration de plaideur quérulent, comme l’indique le paragraphe 45 de l’arrêt Fabrikant. Ainsi, conformément aux restrictions imposées en la matière, les instances auxquelles M. Ubah semble prendre part par le ministère d’un représentant ne devront pas continuer, sauf avec l’autorisation de la Cour. En outre, M. Ubah devra clairement indiquer sa participation et utiliser en tout temps son nom complet, à savoir Chinedu Gideon Ubah, dans toutes les communications avec la Cour.

[52] À mon avis, les restrictions énoncées ci-dessus devraient s’appliquer à toutes les instances, nouvelles ou en cours, concernant M. Ubah, y compris toutes les instances énumérées à l’annexe A du présent jugement et des présents motifs, exception faite du dossier T-756-20. Ce litige est visé par la gestion de l’instance et le PGC a déjà déposé une requête en radiation de la déclaration. Cette requête a été accueillie, avec autorisation de la modifier. M. Ubah a déposé une déclaration modifiée, mais aucune autre activité n’a été enregistrée, car l’instance a été suspendue. Si la déclaration modifiée de M. Ubah dans le dossier T-756-20 n’est pas radiée et si l’instance peut se poursuivre en totalité ou en partie, la Cour peut déterminer si, outre la gestion de l’instance, cette instance devrait être assujettie aux modalités de la présente déclaration ou si d’autres restrictions devraient être imposées, selon ce qui lui paraît justifié.

VI. Conclusion

[53] M. Ubah est un plaideur quérulent. Il a adopté une conduite incontrôlable et nuisible, comme l’illustre le dossier, y compris en prenant part à des litiges par le ministère d’un représentant, en dénaturant les faits, en formulant des allégations d’irrégularité non fondées et en remettant en litige des questions ayant déjà été tranchées.

[54] Le PGC propose des restrictions appropriées, que j’estime justifiées, qui sont prises en compte dans l’ordonnance énoncée ci-dessous.

[55] Le PGC demande une ordonnance quant aux dépens de 1 500 $. Généralement, les dépens sont adjugés à la partie qui a obtenu gain de cause. La Cour possède un pouvoir discrétionnaire absolu en ce qui concerne l’adjudication de dépens, qui est régie par les articles 400 à 422 des Règles. Le montant demandé est modeste et tout à fait raisonnable. J’adjuge les dépens demandés au PGC.


JUGEMENT dans le DOSSIER T-1570-20

LA COUR ORDONNE :

  1. M. Ubah est déclaré plaideur quérulent.

  2. Exception faite du dossier de la Cour T-756-20, il est interdit à M. Ubah d’engager ou de continuer des instances devant la Cour fédérale, sauf avec autorisation. Cela comprend les instances en son propre nom, individuellement ou conjointement avec d’autres personnes, et les instances dans lesquelles il agit directement ou indirectement au nom d’autrui.

  3. Sauf si une ordonnance de la Cour lui donne expressément l’autorisation, il est interdit à M. Ubah de préparer des documents dans le but de les déposer devant la Cour fédérale pour toute personne autre que lui‐même, et de déposer des documents auprès de la Cour fédérale ou de communiquer avec la Cour fédérale, sauf en son nom.

  4. Dans toutes les communications avec la Cour, M. Ubah doit s’identifier et utiliser son nom complet, à savoir Chinedu Gideon Ubah.

  5. Le greffe de la Cour fédérale peut refuser le dépôt de tout document qui comprend la mention « aux soins de » M. Ubah ou son adresse postale, sauf si ce document se rapporte à une instance engagée ou continuée en son nom.

  6. Avant d’engager toute nouvelle instance ou de continuer toute instance déjà engagée devant la Cour fédérale en son nom (y compris une instance visant à modifier ou à annuler le présent jugement), M. Ubah doit en obtenir l’autorisation après avoir présenté une demande au titre du paragraphe 40(3) de la Loi sur les Cours fédérales. Cependant, pour présenter une demande d’autorisation aux termes de ce paragraphe, il doit d’abord en obtenir l’autorisation conformément à la procédure suivante :

    1. M. Ubah doit présenter par écrit une requête afin d’obtenir l’autorisation de déposer une demande au titre du paragraphe 40(3) de la Loi sur les Cours fédérales. Cette requête doit souligner le bien-fondé de l’instance proposée ou de l’étape proposée d’une instance déjà engagée, et doit comprendre une copie du présent jugement;

    2. les documents de la requête préliminaire doivent respecter les Règles des Cours fédérales (y compris les exigences en matière de formatage), l’affidavit accompagnant la requête doit compter au plus cinq pages, et les observations écrites doivent en compter au plus dix, sans quoi les documents seront jugés irrecevables.

  7. Les instances dans les dossiers IMM-6798-19, IMM-1996-20, T-1538-20, IMM-1925-19, IMM-3944-20, IMM-6148-20 et les instances d’autres demandeurs dans lesquelles l’adresse personnelle de M. Ubah est indiquée aux fins de signification sont suspendues et nécessitent l’autorisation de la Cour pour continuer. Les conditions suivantes s’appliquent :

    1. les demandeurs doivent fournir une adresse aux fins de signification qui n’est pas l’adresse de M. Ubah;

    2. toute demande d’autorisation doit comprendre une copie du présent jugement;

    3. si l’autorisation est accordée, en plus de respecter toutes les conditions imposées dans l’ordonnance accordant l’autorisation, les demandeurs doivent continuer d’utiliser une adresse aux fins de signification qui n’est pas celle de M. Ubah, sauf si l’ordonnance en question leur permet expressément d’utiliser l’adresse de celui-ci.

  8. Les dépens de la présente requête, qui sont fixés à 1 500 $, sont adjugés au PGC.

« Christine M. Pallotta »

Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc


ANNEXE A

Résumé des dossiers de la Cour fédérale qui touchent ou semblent toucher M. Ubah

* Symbole indiquant que M. Ubah était désigné comme un demandeur ou un plaignant dans le dossier.

Symbole indiquant que le dossier a été suspendu jusqu’à l’issue de la présente requête visant à ce que M. Ubah soit déclaré plaideur quérulent.

 

Numéro de dossier

Intitulé

Résumé

1

* IMM-4311-17

Chinedu Ubah c Ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada

Le 10 octobre 2017, M. Ubah a déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision du 6 octobre 2017 par laquelle la demande de visa de résident temporaire de son neveu, David Chinedu Victor, un mineur, a été rejetée. Le père de David Chinedu Victor (voir le dossier IMM-3282-18 ci-dessous) avait une demande de résidence permanente en suspens.

Selon l’affidavit de M. Ubah, le contexte est le suivant. David Chinedu Victor était au Canada avec sa mère entre 2013 et 2014. Sa sœur cadette est née au Canada pendant ce séjour. Les deux enfants devaient retourner au Canada pour aller à l’école. La sœur de David Chinedu Victor n’avait pas besoin de visa, car elle était née au Canada. M. Ubah a rempli et présenté la demande de David Chinedu Victor, et a agi en tant que répondant et représentant de celui-ci devant IRCC. IRCC a rejeté la demande et a exigé une preuve de la garde d’un enfant. M. Ubah a obtenu des ordonnances de tutelle du tribunal de la famille de l’Alberta et d’un tribunal nigérian. Cependant, IRCC a rejeté la demande encore une fois et M. Ubah a engagé le dossier IMM-4311-17.

Le dossier IMM-4311-17 a été abandonné conformément à une entente de consentement conclue avec le défendeur, selon laquelle la décision du 6 octobre 2017 serait annulée et la demande de visa de résident temporaire serait renvoyée à un autre agent pour nouvel examen.

2

*18-T-21

Chinedu Ubah c Ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada

Le 23 février 2018, M. Ubah a déposé un avis de requête en vue d’être dispensé de l’exigence de payer des droits de dépôt d’une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision du 29 janvier 2018 par laquelle la demande de visa de résident temporaire de son neveu, David Chinedu Victor, un mineur, a été rejetée. M. Ubah a demandé une ordonnance le dispensant de l’exigence de payer des droits de dépôt au motif que le règlement sur consentement du défendeur dans le dossier IMM-4311-17 était un stratagème et que l’agent qui a réexaminé la demande de visa de résident temporaire avait répété l’erreur commise dans la décision du 6 octobre 2017. La requête a été rejetée.

3

*IMM-1206-18

Chinedu Ubah c Ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada

M. Ubah a déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision du 29 janvier 2018 par laquelle la demande de visa de résident temporaire de son neveu, David Chinedu Victor, un mineur, a été rejetée. Le défendeur s’est opposé à ce que M. Ubah représente le demandeur mineur et le juge a été saisi de cette question compte tenu de la demande d’autorisation. Le juge a mentionné cette question, mais ne s’est pas penché sur celle-ci, car la demande d’autorisation a été rejetée. M. Ubah a déposé une requête visant à demander à la Cour de réexaminer la décision de rejeter la demande d’autorisation. La requête a été rejetée.

Même si la demande d’autorisation a été rejetée, M. Ubah affirme dans son affidavit que David Chinedu Victor est au Canada depuis 2018 et que cela n’aurait pas été possible sans la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire présentée à la Cour fédérale.

4

*IMM-3282-18

Chinedu Ubah et Okechuku Victor Ikoro c Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et Ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada

Le 13 juillet 2018, M. Ubah et son beau-frère, Okechuku Victor Ikoro (le père de David Chinedu Victor), ont déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire visant à obtenir une ordonnance de mandamus afin d’obliger le défendeur à traiter la demande de résidence permanente de M. Ikoro. Les demandeurs n’ont pas déposé de dossier de demande et la demande d’autorisation a été rejetée le 8 novembre 2018.

Le 2 septembre 2020, M. Ubah a déposé une lettre demandant la réouverture du dossier IMM-3282-18, car les défendeurs auraient [traduction] « agi de façon trompeuse et fait de fausses déclarations ». M. Ubah a soutenu que les défendeurs avaient déposé une lettre à la Cour le 31 juillet 2018 indiquant qu’aucune décision n’avait été rendue, alors qu’en fait, la demande de résidence permanente de M. Ikoro avait été accueillie quatre jours plus tôt, soit le 27 juillet 2018 (M. Ikoro était au Canada depuis septembre 2018). M. Ubah a fait valoir, d’une part, que les défendeurs avaient intentionnellement menti à la Cour et l’avaient induite en erreur afin que celle-ci rejette la demande, et d’autre part, que les défendeurs avaient également menti à un juge de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta en affirmant que le dossier IMM-3282-18 avait été rejeté.

Les défendeurs ont fait valoir que la lettre du 31 juillet 2018 avait été envoyée en raison d’une erreur administrative et que la lettre du 2 septembre 2020 rédigée par M. Ubah constituait une demande de réexamen inappropriée.

M. Ubah a ensuite déposé une réponse dans laquelle il faisait valoir, entre autres, que [traduction] « l’excuse de l’erreur administrative est sans défense et déraisonnable » et fait partie d’un arrangement avec un juge de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta pour [traduction] « donner une image négative de lui » et le faire déclarer plaideur quérulent. M. Ubah a demandé à notre Cour de se pencher sur cette tromperie, car [traduction] « ils s’en sortent toujours ».

La Cour a traité cette demande comme une requête informelle de réexamen de la décision par laquelle l’autorisation a été rejetée. La Cour a rejeté la requête au motif que l’ordonnance refusant l’autorisation ne comportait aucune erreur ni omission, et que les allégations des demandeurs étaient sans fondement.

5

*IMM-4275-18

Chinedu Ubah et Kelechi B Agbai c Ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada

M. Ubah et sa sœur, Mme Agbai, ont déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire visant à obtenir une ordonnance de mandamus afin d’obliger le défendeur à rendre une décision au sujet de la demande de résidence permanente de Mme Agbai. Les demandeurs n’ont pas déposé de dossier de demande. La demande d’autorisation a été rejetée.

6

*IMM-4636-18

Gideon Ubah et Kelechi B Agbai c Ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada

Gideon Ubah renvoie à M. Ubah. M. Ubah et Mme Agbai ont déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire afin de contester la décision du 6 septembre 2018 par laquelle la demande de résidence permanente de Mme Agbai a été rejetée. En vertu d’une ordonnance rendue le 28 décembre 2018, la Cour a accueilli la requête du défendeur visant à retirer M. Ubah en tant que partie à l’instance. La Cour a rejeté une requête visant, d’une part, à joindre l’entreprise de M. Ubah, Gideon Energy Services Inc., comme partie au motif qu’il avait proposé un emploi à Mme Agbai, et d’autre part, à permettre à M. Ubah de représenter l’entreprise.

L’autorisation a été accordée le 21 mars 2019. Mme Agbai a déposé une requête visant à obtenir une ordonnance permettant à M. Ubah de la représenter relativement à sa demande d’autorisation et de contrôle judiciaire, et cette requête a été rejetée. Elle a ensuite déposé une requête pour faire en sorte que sa demande d’autorisation et de contrôle judiciaire soit tranchée sur la base d’observations écrites seulement, et cette requête a elle aussi été rejetée. On a ordonné à Mme Agbai de faire tous les efforts raisonnables pour être en mesure de participer à l’audience par téléphone.

La Cour a rejeté la demande de contrôle judiciaire. Mme Agbai a présenté une demande de prorogation du délai pour déposer une requête en réexamen. La Cour s’est appuyée sur différentes conclusions pour rejeter cette demande de prorogation du délai, y compris sur le fait que Mme Agbai n’avait pas établi le fondement de sa requête en réexamen.

7

‡IMM-1925-19

Ngozi Joy Uba c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration

La belle-sœur de M. Ubah, Ngozi Joy Uba, a présenté une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision du 22 mars 2019 par laquelle sa demande de permis de travail a été refusée. L’adresse aux fins de signification est celle de M. Ubah. Mme Uba a déposé une requête visant à obtenir une ordonnance permettant à M. Ubah de la représenter. La Cour a refusé de rendre l’ordonnance demandée, mais a accueilli une demande visant à faire en sorte que la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire soit tranchée seulement sur la base d’observations écrites des parties. La demande a été abandonnée conformément à une entente de consentement conclue avec le défendeur, selon laquelle la demande de permis de travail serait réexaminée.

Le 8 janvier 2021, Mme Uba a déposé une requête visant à annuler le désistement. Cette requête n’a pas été entendue, car le dossier IMM-1925-19 a été suspendu.

8

IMM-3036-19

Chisom R Uba et Uchehi Uba c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration

Le neveu de M. Ubah, Chisom Uba, et le beau-frère de M. Ubah, Uchehi Uba (le père de Chisom Uba; appelé Uchechi Uba dans le dossier IMM-7489-19 ci-dessous), ont déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision du 13 mai 2019 par laquelle la demande de permis d’études de Chisom Uba a été refusée. L’adresse aux fins de signification inscrite sur la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire est celle de M. Ubah.

Les demandeurs ont déposé une requête visant à obtenir une ordonnance permettant à Uchehi Uba ou à M. Ubah de représenter le demandeur mineur. La Cour a ordonné qu’Uchehi Uba puisse représenter son fils uniquement à l’étape de l’autorisation, et dans l’éventualité où l’autorisation était accordée, les services d’un avocat devraient être retenus pour le représenter. La demande d’autorisation a été rejetée.

9

‡IMM-6798-19

 

Kelechi B Agbai c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration

La sœur de M. Ubah, Kelechi Agbai, a déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision du 11 novembre 2019 par laquelle sa deuxième demande de résidence permanente au Canada a été rejetée et Mme Agbai a été jugée interdite de territoire au Canada pour une période de cinq ans en raison d’une fausse déclaration. L’adresse aux fins de signification est celle de M. Ubah. M. Ubah a déposé un affidavit à l’appui dans une requête visant à obtenir une ordonnance pour être ajoutée en tant que partie à l’instance. La requête a été rejetée. La Cour a également rejeté une requête visant à permettre à M. Ubah de représenter Mme Agbai.

L’autorisation a été accordée.

Le 14 décembre 2020, le juge Annis a délivré une directive dans laquelle il demande des observations sur la question de savoir si la Cour fédérale peut s’appuyer sur la décision Ubah ABQB et les éléments de preuve de la décision IMM-6798-19 pour imposer à M. Ubah des restrictions d’accès aux tribunaux.

Le 8 janvier 2021, le juge Annis a délivré une autre directive selon laquelle sa directive du 14 décembre 2020 était théorique compte tenu de la présente requête visant à ce que M. Ubah soit déclaré plaideur quérulent.

10

IMM-7263-19

Ngozi Joy Uba c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration

La belle-sœur de M. Ubah, Ngozi Joy Uba, a présenté une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision du 21 novembre 2019 par laquelle sa demande de permis de travail et une demande de visa de résident temporaire pour une mineure l’accompagnant (la fille de Mme Uba) ont été rejetées. Il s’agissait de la nouvelle décision rendue sur consentement à la suite du désistement dans le dossier IMM-1925-19. L’adresse aux fins de signification inscrite sur la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire est celle de M. Ubah.

La demande d’autorisation a été rejetée. La demanderesse a demandé un nouvel examen (et a utiliser l’adresse de M. Ubah pour la requête et la réponse). La requête a été rejetée.

11

IMM-7486-19

Maxwell Uba c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration

Le frère de M. Ubah, Maxwell Uba, a présenté une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire en vue d’annuler la décision du 14 novembre 2019 par laquelle sa demande de visa de résident temporaire et une demande de permis d’études pour un mineur l’accompagnant ont été rejetées. Le mineur l’accompagnant est Chisom Ubah (le neveu de M. Ubah et de Maxwell Uba, le fils d’Uchechi Uba – voir les dossiers IMM-7489-19 et IMM-5567-20). L’adresse aux fins de signification est celle de M. Ubah.

Selon l’affidavit de M. Ubah, Maxwell Uba est marié à Ngozi Uba (voir les dossiers IMM-1925-19, IMM-3944-20 et IMM-6148-20). Leurs deux fils mineurs sont au Canada en vertu de permis d’études. Maxwell Uba veut obtenir un visa de résident temporaire pour rendre visite à ses fils, à ses frères et sœurs et à sa mère au Canada.

Le défendeur a consenti à ce que l’affaire soit réexaminée, mais selon l’affidavit de M. Ubah, le demandeur ne voulait pas parvenir à un règlement en raison des [traduction] « antécédents » du défendeur. Le demandeur a plutôt demandé à la Cour de rendre une décision ou de donner à l’agent la directive d’approuver la demande. Le demandeur a aussi demandé des dépens en raison de la façon [traduction] « oppressive et répugnante » dont le défendeur aurait agi.

Le 23 avril 2020, la Cour a renvoyé l’affaire à un autre agent pour nouvelle décision. La Cour a refusé de rendre une décision ou de donner une directive à l’agent au sujet de la décision à prendre, et a refusé d’adjuger des dépens.

En mai 2020, le demandeur a déposé de la correspondance en utilisant l’adresse de M. Ubah dans l’objectif de rouvrir le dossier IMM-7486-19 en raison d’un retard touchant la nouvelle décision. La Cour a refusé de donner une directive.

En août et en septembre 2020, le demandeur a déposé d’autres lettres et a téléphoné au greffe, là encore pour soulever la question du retard touchant la nouvelle décision. La Cour a donné une directive verbale indiquant qu’elle n’était plus saisie de l’affaire et que le greffe accepterait uniquement les demandes respectant les exigences de l’avis rendu par la Cour le 25 août 2017 au sujet des demandes informelles en redressement interlocutoire.

12

IMM-7489-19

Chisom Uba et Uchechi Uba c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration

Le neveu de M. Ubah, Chisom Uba, et Uchechi Uba (le père de Chisom) ont déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire en vue de faire annuler la décision du 14 novembre 2020 par laquelle la demande de permis d’études de Chisom Uba a été refusée (dont il est question ci-dessus dans le dossier IMM-7486-19). L’adresse aux fins de signification est celle de M. Ubah.

Le défendeur a consenti à ce que l’affaire soit réexaminée, mais les demandeurs voulaient que la Cour rende une décision ou donne à l’agent la directive d’approuver la demande. Les demandeurs ont aussi demandé des dépens en raison de la façon [traduction] « oppressive et répugnante » dont le défendeur aurait agi.

Le 23 avril 2020, la Cour a renvoyé l’affaire à un autre agent pour nouvelle décision. La Cour a refusé de rendre une décision ou de donner une directive à l’agent au sujet de la décision à prendre. La Cour a aussi refusé d’adjuger des dépens.

En mai 2020, les demandeurs ont déposé de la correspondance en utilisant l’adresse de M. Ubah dans l’objectif de rouvrir le dossier IMM-7489-19 en raison d’un retard touchant la nouvelle décision. La Cour a refusé de donner une directive.

En août et en septembre 2020, les demandeurs ont déposé d’autres lettres et ont téléphoné au greffe, là encore pour soulever la question du retard touchant la nouvelle décision. La Cour a donné une directive verbale le 16 septembre 2020 indiquant qu’elle n’était plus saisie de l’affaire et que le greffe accepterait uniquement les demandes respectant les exigences de l’avis du 25 août 2017 au sujet des demandes informelles en redressement interlocutoire.

Les demandeurs ont tenté de déposer une requête le 1er octobre 2020, qui a été rejetée en application de la directive du 16 septembre 2020.

13

‡IMM-1996-20

Kelechi Agbai c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration

La sœur de M. Ubah, Kelechi Agbai, a déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire visant à obtenir une ordonnance de mandamus afin d’obliger le défendeur à réexaminer sa demande de résidence permanente. L’adresse aux fins de signification est celle de M. Ubah. Selon le défendeur, il s’agissait de la troisième demande de réexamen de Mme Agbai relativement au refus du 6 septembre 2018.

La demanderesse n’était pas satisfaite de la réponse du défendeur ou d’autres réponses en application de l’article 9 des Règles en matière de CIPR. La demanderesse a déposé une lettre du 30 juillet 2020 qui avait comme objet [traduction] « IMM-1996-20 Agbai c MCI : Avis concernant les activités trompeuses, illégales et oppressives du défendeur visant à influencer et à manipuler l’honorable Cour ». Cette lettre porte sur [traduction] « la dernière attaque du défendeur visant ma demande, et indirectement mon représentant, qui avait comme objectif de contourner la Cour et sa directive du 27 juillet 2020 ». Le représentant était M. Ubah.

Le 10 août 2020, la Cour a ordonné que les réponses données conformément à l’article 9 des Règles en matière de CIPR soient complètes.

La Cour a accueilli la demande de la demanderesse visant à ce que la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire soit tranchée sur la base d’observations écrites seulement. Cependant, cette demande a été suspendue.

14

*‡T-756-20

Chinedu G Ubah c Sa Majesté la Reine

M. Ubah a intenté une poursuite contre la Couronne le 16 juillet 2020. La déclaration comprend des allégations concernant de nombreux actes répréhensibles. En guise de réparation, M. Ubah demande entre autres des dommages-intérêts, des excuses et le nouvel examen de différentes demandes.

La requête en radiation de la déclaration présentée par le défendeur a été accueillie, avec autorisation de modification. M. Ubah a déposé une déclaration modifiée, mais aucune autre mesure n’a été prise, car le dossier T-756-20 a été suspendu.

15

‡IMM-3944-20

Ngozi Uba c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration

La belle-sœur de M. Ubah, Ngozi Uba, a présenté une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire visant à obtenir une ordonnance de mandamus afin d’obliger le défendeur à prendre une décision concernant une demande de réexamen de la nouvelle décision du 21 novembre 2019 portant sur sa demande de permis de travail. L’adresse aux fins de signification est celle de M. Ubah.

La demanderesse a tenté de déposer une demande d’obtention de documents en la possession du défendeur au titre de l’article 317 des Règles; la Cour a donné au greffe la directive de rejeter le dépôt de cette demande au motif que l’article 317 des Règles ne s’applique pas. La demanderesse a déposé une lettre dans laquelle elle demandait des précisions, et la Cour a donné une autre directive indiquant qu’aucune précision n’était nécessaire. La demanderesse a présenté une requête en vue d’obtenir une ordonnance formelle énonçant le contenu de la directive. Cette requête a été rejetée le 21 janvier 2021 au motif qu’elle n’aurait aucune fin utile, car la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés interdit les appels contre des ordonnances interlocutoires. La demanderesse a alors déposé une requête visant à interjeter appel de l’ordonnance du 21 janvier 2021.

La demande a été suspendue.

16

IMM-5567-20

Maxwell Uba et Chisom Uba c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration

Le frère et le neveu de M. Ubah, respectivement Maxwell Uba et Chisom Uba, ont présenté une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire visant à obtenir une ordonnance de mandamus afin d’obliger le défendeur à accueillir la demande de résidence permanente de Maxwell et la demande de permis d’études de Chisom. L’adresse aux fins de signification est celle de M. Ubah.

Les demandeurs ont déposé des lettres à la Cour qui comprenaient des allégations selon lesquelles le défendeur avait commis des actes répréhensibles et n’avait pas fourni de réponse complète conformément à l’article 9 des Règles en matière de CIPR. Le juge Ahmed a donné une directive indiquant que jusqu’à ce qu’une décision soit prise, il n’y avait aucune décision à soumettre, et que la réponse du défendeur au titre de l’article 9 des Règles en matière de CIPR était exacte. Le juge Ahmed a rendu une autre directive dans laquelle il s’est exprimé en ces termes : [traduction] « Je m’en voudrais de ne pas mentionner le langage que les demandeurs ont utilisé dans leurs lettres, les deux datées du 4 décembre 2020. Il est inapproprié et inacceptable d’accuser l’avocat de la partie adverse de mentir ou d’agir de mauvaise foi. J’estime que l’allégation des demandeurs selon laquelle le défendeur s’immisce dans le processus décisionnel d’IRCC et induit notre Cour en erreur est troublante, d’autant plus qu’il est inapproprié pour les demandeurs de mettre en cause l’intégrité du défendeur pour de tels motifs. »

Les demandeurs ont abandonné la demande après avoir reçu les visas demandés.

17

‡IMM-6148-20

Ngozi Uba c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration

La belle-sœur de M. Ubah, Ngozi Uba, a présenté une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision du 19 novembre 2020 par laquelle sa demande de permis de travail et une demande de visa de résident temporaire pour une personne mineure l’accompagnant ont été rejetées. Plus précisément, la décision du 19 novembre 2020 est un refus (accompagné de motifs) de réexaminer la nouvelle décision rendue un an plus tôt (le 21 novembre 2019), par laquelle la demande de Mme Uba de travailler au Canada en tant que gardienne des enfants de M. Ubah a été rejetée; cette demande faisait l’objet du contrôle judiciaire sous-jacent dans le dossier IMM-7263-19. L’adresse aux fins de signification inscrite sur la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire est celle de M. Ubah.

En vertu d’une ordonnance du 2 mars 2021, la demande a été suspendue.

18

‡T-1538-20

Kelechi Agbai c Sa Majesté la Reine

La sœur de M. Ubah, Kelechi Agbai, a déposé une déclaration contre la Couronne, dans laquelle elle demande des dommages-intérêts et une injonction pour diffamation, conspiration, négligence et d’autres causes d’action se rapportant au rejet de ses demandes de résidence permanente fondées sur une offre d’emploi de l’entreprise de M. Ubah, Gideon Energy Services Inc. L’adresse inscrite sur la déclaration est celle de M. Ubah.

En vertu d’une ordonnance du 23 février 2021, l’action a été suspendue en attendant qu’une décision définitive soit rendue au sujet de la présente requête. La demanderesse a déposé un avis d’appel le 24 février 2021.

19

*‡T-627-21

Chinedu Ubah c Gendarmerie royale du Canada

Le 15 avril 2021, M. Ubah a déposé une demande de contrôle judiciaire en vue d’annuler une décision de ne pas faire enquête sur [traduction] « les actions des agents d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada violant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et contrevenant à celle-ci » qu’il a relevées.

La demande a été suspendue en vertu d’une ordonnance du 6 mai 2021.

20

*‡T-991-21

Chinedu G Ubah c Conseil canadien de la magistrature

Le 18 juin 2021, M. Ubah a déposé une demande de contrôle judiciaire [traduction] « à l’encontre de la décision par laquelle le Conseil canadien de la magistrature (CCM) a décidé de ne pas faire enquête sur ma plainte concernant l’inconduite du juge de nomination fédérale [...], l’honorable juge John D. Rooke, juge en chef adjoint de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta [...] ».

En vertu d’une ordonnance du 5 août 2021, la demande a été suspendue.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

t-1570-20

 

INTITULÉ :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA c CHINEDU G UBAH

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 22 JUILLET 2021

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE PALLOTTA

 

DATE DES MOTIFS :

LE 23 DÉCEMBRE 2021

 

COMPARUTIONS :

Aminollah Sabzevari

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Chinedu G. Ubah

 

LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Edmonton (Alberta)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

 

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