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Date : 20010626

Dossier : IMM-2494-00

Ottawa (Ontario), le mardi 26 juin 2001

EN PRÉSENCE DE :             MONSIEUR LE JUGE GIBSON

ENTRE :

     ALMASY, ZOLTAN

    KESZLER, EDIT

demandeurs

             - et -

                   LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

            ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

ORDONNANCE

La présente demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision de la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié à l'étude est annulée et la revendication du statut de réfugié des demandeurs est renvoyée à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié afin qu'un tribunal autrement constitué procède à une nouvelle audition et rende une nouvelle décision.

Aucune question n'est certifiée.

Frederick E. GIBSON

Juge

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


Date : 20010626

Dossier : IMM-2494-00

Référence neutre : 2001 CFPI 701

ENTRE :

     ALMASY, ZOLTAN

    KESZLER, EDIT

demandeurs

             - et -

                   LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

            ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE GIBSON

[1]                 Les présents motifs découlent d'une demande de contrôle judiciaire de la décision dans laquelle la Section du statut de réfugié (la SSR) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a décidé que les demandeurs n'étaient pas des réfugiés au sens de la Convention, au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration[1]. La décision de la SSR est datée du 18 avril 2000.


[2]                 Les demandeurs se sont mariés après leur arrivée au Canada pour revendiquer le statut de réfugié. Ils sont tous deux citoyens hongrois. Le demandeur est d'origine tzigane. La demanderesse est d'origine hongroise. La revendication du demandeur s'appuie sur son origine ethnique. La demanderesse fonde sa revendication sur son mariage avec un Rom.

[3]                 Dans son exposé circonstancié faisant partie de son Formulaire de renseignements personnels, le demandeur décrit brièvement la litanie des actes de discrimination dont il a fait l'objet en raison de son origine ethnique durant la période de ses études, lorsqu'il a essayé de trouver un emploi, dans son milieu de travail et durant son service militaire. Il parle aussi de la désapprobation exprimée avec vigueur par les parents de la demanderesse quand ils ont appris les fiançailles des demandeurs, ce qui donné lieu à des menaces, à tout le moins dans le cas du demandeur, y compris des menaces de violence physique.

[4]                 Dans ses motifs très brefs, la SSR a déclaré :

Ils [les revendicateurs] n'ont pas réussi à établir qu'il existe une possibilité sérieuse qu'ils soient persécutés en Hongrie. Ils n'ont pas fourni de preuve claire et convaincante que la Hongrie ne pouvait ou ne voulait assurer leur protection. La Hongrie fait de sérieux efforts pour protéger les minorités ethniques et autres.

Aucun élément de preuve documentaire n'est mentionné à l'appui de la dernière phrase de la citation.

[5]    La SSR a poursuivi ainsi :


Cependant, le tribunal ne trouve pas crédibles les allégations et le témoignage des revendicateurs à l'effet qu'ils ont été victimes de préjudices graves ou d'actes de harcèlement et de discrimination cumulés équivalant à de la persécution.

Le revendicateur a affirmé que personnellement, il n'avait été victime que d'un ou deux incidents déplaisants.

[6]                 À mon avis, la première phrase de la citation qui précède est équivoque. Je ne sais pas avec certitude si la SSR juge non crédibles les allégations et le témoignage des revendicateurs portant qu'ils ont été victimes de préjudices graves et d'actes de harcèlement cumulés, et si elle juge non crédible la prétention des demandeurs selon laquelle les préjudices graves et les actes de harcèlement et de discrimination cumulés dont ils ont été victimes équivalent à de la persécution. Je préfère la première interprétation puisque la SSR explique pourquoi elle a jugé non crédibles les allégations et le témoignage des demandeurs selon lesquels ils ont reçu des menaces de préjudice grave. Cela étant dit, la SSR n'explique aucunement pourquoi elle a jugé non crédibles les allégations et le témoignage portant qu'il y a eu des actes de harcèlement et de discrimination cumulés.

[7]                 Dans l'arrêt Hilo c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration)[2], la Cour d'appel a écrit au paragraphe 6 de ses motifs :

Selon moi, la Commission se trouvait dans l'obligation de justifier, en termes clairs et explicites, pourquoi elle doutait de la crédibilité de l'appelant. L'évaluation (précitée) que la Commission a faite au sujet de la crédibilité de l'appelant est lacunaire parce qu'elle est exposée en termes vagues et généraux.


En l'espèce, la SSR n'a tout simplement pas justifié pourquoi elle doutait de la crédibilité des demandeurs en ce qui a trait aux actes de harcèlement et de discrimination dont a été victime le demandeur. Pour ce seul motif, la présente demande de contrôle judiciaire sera accueillie.

[8]                 En outre, l'indication dans la seconde phrase de la citation qui précède selon laquelle le demandeur a été victime « que d'un ou deux incidents déplaisants » , présumément mis à part les menaces que lui ont faites les parents de la revendicatrice, est, à mon avis, tout à fait incompatible avec la preuve dont était saisie la SSR. Comme nous l'avons indiqué précédemment, le Formulaire de renseignements personnels du demandeur expose, bien qu'en termes plutôt vagues et généraux, la litanie d'actes de harcèlement et de discrimination dont le demandeur a été victime. Je peux uniquement conclure que la SSR a tout simplement tenu aucun compte, à tout le moins sous cet aspect particulier de ses motifs, d'éléments de preuve dont elle était clairement saisie et dont elle semble avoir pris acte dans la citation qui précède.

[9]                 Comme nous l'avons mentionné précédemment, les motifs de décision de la SSR en l'espèce étaient brefs. Cela ne constitue pas en soi une faute. En réalité, il faut encourager l'exposé de motifs brefs lorsque les motifs reflètent une bonne compréhension de la preuve devant la SSR et une analyse adéquate de la preuve au regard de la jurisprudence, des dispositions législatives et des dispositions réglementaires applicables. En l'espèce, les motifs de la SSR ne reflètent pas une compréhension adéquate de l'ensemble des éléments de preuve dont elle était saisie et une analyse satisfaisante de l'incidence du droit applicable sur ces éléments de preuve.


[10]            En conséquence, la présente demande de contrôle judiciaire sera accueillie, la décision de la SSR à l'étude sera annulée et la revendication du statut de réfugié des demandeurs sera renvoyée à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié afin qu'un tribunal autrement constitué procède à une nouvelle audition et rende une nouvelle décision.

[11]            Aucun des avocats n'a recommandé la certification d'une question. Aucune question ne sera certifiée.

Frederick E. GIBSON

Juge

Ottawa (Ontario)

Le 26 juin 2001

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                             IMM-2494-00

INTITULÉ :                         Zoltan Almasy et autre c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                      le 21 juin 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :               monsieur le juge Gibson

DATE DES MOTIFS :                      le 26 juin 2001

COMPARUTIONS:

Elizabeth Jaszi                                    POUR LES DEMANDEURS

Martin Anderson                                               POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Elizabeth Jaszi                                    POUR LES DEMANDEURS

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada



[1]          L.R.C. (1985), ch. I-2.

[2]         (1991), 15 Imm. L.R. (2d) 199 (C.A.F.).

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