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Date : 20211125


Dossier : IMM-1427-20

Référence : 2021 CF 1297

Ottawa (Ontario), le 25 novembre 2021

En présence de l’honorable madame la juge Roussel

ENTRE :

RANIA KASSOU

partie demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

partie défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] La demanderesse, Rania Kassou, sollicite le contrôle judiciaire d’une décision datée du 14 février 2020 par laquelle un agent d’immigration [l’Agent] du centre de traitement des demandes d’Ottawa d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada [IRCC] rejette sa demande de résidence permanente dans la catégorie des travailleurs qualifiés. L’Agent n’est pas convaincu que la demanderesse a accumulé, de façon continue, au moins une année d’expérience de travail à temps plein, ou l’équivalent pour un travail à temps partiel, dans la profession indiquée dans sa demande.

[2] Dans sa lettre de refus, l’Agent souligne que même si la lettre de l’employeur soumise par la demanderesse confirme qu’elle a été embauchée en octobre 2016, celle-ci n’est pas datée et ne précise pas quand elle a été rédigée. Il n’est donc pas en mesure de déterminer la durée de l’emploi de la demanderesse. L’Agent conclut ainsi que la demanderesse ne satisfait pas aux critères de l’article 11.2 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 et du paragraphe 75(2) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [Règlement].

[3] La demanderesse allègue essentiellement que l’Agent a porté atteinte à son droit à l’équité procédurale en ne l’ayant pas contactée afin d’obtenir des informations relatives à sa preuve d’emploi. Elle fait valoir que la lettre confirme qu’elle a été embauchée comme agent de projet depuis le 24 octobre 2016 et qu’à ce titre, sa période de travail pour l’employeur en question atteint près de trois (3) années d’expérience. Elle ajoute que la lettre mentionne également que son contrat de travail est passé d’une durée déterminée à une durée indéterminée et qu’elle travaille à temps plein à raison de 37,5 heures par semaine.

[4] La demanderesse soutient qu’elle a échangé des courriels avec IRCC afin de connaitre l’évolution de son dossier avant la décision finale, ce à quoi on lui a répondu qu’elle serait contactée si des informations supplémentaires étaient requises. Selon elle, l’Agent responsable aurait dû lui transmettre une demande d’informations supplémentaires sur la période travaillée pour cet employeur.

[5] La demanderesse soutient également que la décision de l’Agent est déraisonnable puisqu’à la lecture des autres documents soumis, dont ses relevés bancaires, l’Agent aurait pu inférer qu’elle a travaillé pour cet employeur jusqu’au dépôt de sa demande de résidence permanente. En effet, les relevés bancaires confirment des virements mensuels de cet employeur. Elle fait valoir que tous les éléments de preuve pour soutenir sa demande de résidence permanente avaient été transmis.

[6] Lorsque la Cour examine l’équité procédurale, son rôle consiste à déterminer si la procédure était équitable eu égard à l’ensemble des circonstances (Association canadienne des avocats en droit des réfugiés c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2020 CAF 196 au para 35; Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 aux para 54-56).

[7] La norme de contrôle qui s’applique à la décision de l’Agent portant sur la demande de résidence permanente de la demanderesse est celle de la décision raisonnable (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 aux para 10, 16-17 [Vavilov]; Odufodunrin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 736 au para 4 [Odufodunrin]; Ekama c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 105 au para 14 [Ekama]). Lorsqu’elle examine une décision selon cette norme, la Cour s’intéresse « à la décision effectivement rendue par le décideur, notamment au raisonnement suivi et au résultat de la décision » (Vavilov au para 83). Elle doit se demander si la décision possède les « caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci » (Vavilov au para 99). De plus, il « incombe à la partie qui conteste la décision d’en démontrer le caractère déraisonnable » (Vavilov au para 100).

[8] Malgré la situation regrettable de la demanderesse, la Cour ne peut souscrire à ses arguments.

[9] L’Agent n’avait pas l’obligation d’informer la demanderesse que sa demande était incomplète ni de lui demander des précisions ou des éclaircissements sur la période de son emploi. Il incombait à la demanderesse de s’assurer qu’elle remplissait toutes les exigences de la loi, y compris celle de démontrer qu’elle avait accumulé l’expérience de travail déclarée dans sa demande (Ugboh v Canada (Citizenship and Immigration), 2021 FC 876 au para 23; Odufodunrin au para 18; Ekama au para 43; Joseph c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 268 au para 13; Kaur c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 180 au para 25).

[10] Rien dans le dossier n’indique que l’Agent avait des doutes quant à l’authenticité de la lettre de l’employeur ou à la crédibilité de la demanderesse. Il s’agit plutôt d’une question de la suffisance des éléments de preuve de la demanderesse. La demanderesse avait l’obligation de soumettre un dossier complet, ce qu’elle n’a malheureusement pas fait. Il n’y a donc pas eu de manquement à l’équité procédurale.

[11] La demanderesse allègue qu’il était déraisonnable pour l’Agent de rejeter sa demande de résidence permanente puisque les relevés bancaires fournis confirment qu’elle travaillait toujours pour le même employeur.

[12] La Cour reconnait que les relevés bancaires démontrent une source de revenu mensuel provenant de cet employeur. Toutefois, les relevés couvrent seulement la période entre décembre 2018 et avril 2019 et ne témoignent pas des fonctions occupées par la demanderesse ni de ses responsabilités. Ils ne permettent pas de déterminer si la demanderesse possédait l’année d’expérience de travail requise par le Règlement. La Cour n’est donc pas convaincue que la décision de l’Agent concernant son expérience de travail est déraisonnable.

[13] Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question de portée générale n’a été soumise aux fins de certification et la Cour est d’avis que cette cause n’en soulève aucune.


JUGEMENT au dossier IMM-1427-20

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée; et

  2. Aucune question de portée générale n’est certifiée.

« Sylvie E. Roussel »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-1427-20

INTITULÉ :

RANIA KASSOU c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 22 NOVEMBRE 2021

JUGEMENT ET motifs :

LA JUGE ROUSSEL

DATE DES MOTIFS :

LE 25 NOVEMBRE 2021

COMPARUTIONS :

Laurent Gryner

Pour LA PARTIE DEMANDERESSE

Simone Truong

Pour LA PARTIE DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Laurent Gryner

Avocat

Montréal (Québec)

Pour LA PARTIE DEMANDERESSE

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

Pour LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

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