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Date : 20040309

Dossier : IMM-2542-03

Référence : 2004 CF 348

Ottawa (Ontario), le 9 mars 2004

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'REILLY

ENTRE :

                                                                     ZHOU HUI

                                                                                                                                    demanderesse

                                                                             et

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                         MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]                Mme Hui Zhou est arrivée au Canada en provenance de Chine en novembre 2001. Elle a demandé l'asile au Canada au motif qu'elle était persécutée par les autorités de l'État, qui prenaient des mesures pour réprimer le mouvement du Falun Gong. Elle n'est pas une adhérente du Falun Gong, mais elle explique qu'elle vendait des articles et des publications aux partisans de ce mouvement dans sa petite boutique d'Anshan. Un tribunal de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a rejeté sa demande en 2003. La Commission n'a pas cru bon nombre des allégations formulées par Mme Zhou, notamment son affirmation qu'elle avait été détenue pendant plusieurs mois. Le tribunal a également jugé invraisemblables les allégations de la demanderesse au sujet de la conduite des autorités de l'État.


[2]                Le principal argument de Mme Zhou était que la Commission avait commis une erreur en écartant son allégation que les forces de sécurité l'avaient condamnée à plusieurs reprises à des amendes pour avoir distribué des articles et des publications du Falun Gong sans aller jusqu'à la forcer à fermer son commerce. La Commission a estimé peu probable que les autorités lui laisse une aussi grande latitude, vu leur forte antipathie envers le Falun Gong. La Commission a cité des éléments de preuve documentaires qui tendaient à démontrer qu'il était davantage probable que les autorités ferment un commerce qui distribuait des produits du Falun Gong au lieu de tolérer un tel commerce.

[3]                Je ne trouve rien à reprocher à l'analyse que la Commission a faite de la preuve et je dois donc rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

I. Question en litige


[4]                Mme Zhou affirme que la Commission a accordé une importance exagérée à certains éléments de preuve documentaire et qu'elle en a tiré des conclusions injustifiées. Les éléments de preuve en question portaient sur la question de savoir s'il arrivait fréquemment que les forces de sécurité obligent des entreprises qui appuyaient le Falun Gong à fermer leurs portes. Suivant l'analyse de la Commission, ces éléments de preuve contredisaient les affirmations de la demanderesse suivant lesquelles elle avait simplement été condamnée à plusieurs reprises à des amendes en raison de ses activités.

II. Analyse

[5]                C'est dans une large mesure à la Commission qu'il incombe de se prononcer sur la crédibilité d'un demandeur d'asile. La Cour ne peut intervenir pour modifier les conclusions de la Commission que si celles-ci sont manifestement contraires à la preuve dont elle disposait ou si la Commission ne les a pas suffisamment motivées. Toutefois, lorsque la Commission conclut qu'un scénario proposé par un demandeur d'asile est invraisemblable, la Cour peut examiner cette conclusion de façon plus attentive. Dans bien des cas, la Cour est aussi bien placée que la Commission pour décider si un scénario déterminé ou une série d'événements relatés par le demandeur d'asile pouvaient raisonnablement se produire (Divsalar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) 2002 CFPI 653, [2002] A.C.F. no 875 (QL) (C.F. 1re inst.)).


[6]                Dans le cas qui nous occupe, Mme Zhou a dit à la Commission qu'elle avait reçu une série d'avis d'amendes en 2000 et 2001 pour avoir distribué des publications du Falun Gong et ce, même si elle avait arrêté d'en vendre en 1999. Ces accusations expliquent selon elle pourquoi les partisans du Falun Gong l'ont désignée comme étant une personne qui distribuait leurs produits. La Commission a conclu qu'il était peu probable que les autorités se contentent de la condamner à des amendes au lieu de [TRADUCTION] « prendre la mesure qu'il leur était parfaitement loisible de prendre, en l'occurrence lui retirer son permis commercial, annuler le bail qu'elle avait signé avec un des services de la ville et ordonner la fermeture de la boutique » .

[7]                Pour en arriver à cette conclusion, la Commission a cité deux documents de recherche. Dans le premier, il était précisé que les autorités chinoises avaient fermé [TRADUCTION] « plusieurs éditeurs, grossistes et détaillants » dans la foulée des mesures de répression qu'elles avaient prises contre le Falun Gong. Le second document était un avis rédigé par un avocat chinois qui affirmait que les autorités pouvaient fort bien annuler le permis d'une imprimerie qui violerait la loi en produisant des articles et publications de contrebande.

[8]                La Commission a conclu de ces documents que les autorités avaient le pouvoir d'ordonner la fermeture du commerce de Mme Zhou et que, dans ces conditions, elles l'auraient probablement fait. Elle a conclu qu'il était invraisemblable que Mme Zhou [TRADUCTION] « puisse continuer à exercer ses activités malgré ces accusations et les peines auxquelles elle avait été condamnée » .

[9]                J'ai examiné les documents sur lesquels la Commission s'est fondée et je ne trouve rien à lui reprocher en ce qui concerne les conclusions qu'elle en a tirées.


[10]            Dans le même ordre d'idées, Mme Zhou a également soutenu que la Commission n'a pas tenu compte de son affirmation qu'elle avait arrêté de vendre des produits et des publications du Falun Gong en 1999. De toute évidence, la Commission a rejeté son témoignage sur cette question. La Commission a estimé qu'à première vue, les avis envoyés par la police semblaient renvoyer à des faits qui s'étaient produits à la même époque que les violations de la loi qu'on lui reprochait et non pas à des violations antérieures. Comme elle n'a pas cru que la boutique de la demanderesse pouvait demeurer ouverte après un nombre aussi élevé de violations, la Commission a conclu que les avis d'amendes étaient des faux. Là encore, je ne puis affirmer que la conclusion que la Commission a tirée sur cette question était déraisonnable ou qu'elle était contraire à la preuve.

[11]            Je dois donc rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune des deux parties ne m'a soumis de question de portée générale à certifier et aucune n'est donc formulée.

                                                                   JUGEMENT

LA COUR :

1.          REJETTE la demande de contrôle judiciaire;

2.          NE FORMULE aucune question de portée générale.

                                                                                                                          « James W. O'Reilly »                

Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                                                                  COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                        IMM-2542-03

INTITULÉ :                                       ZHOU HUI c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                             

LIEU DE L'AUDIENCE :                VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

DATE DE L'AUDIENCE :               LE 3 DÉCEMBRE 2003

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                             LE JUGE O'REILLY

DATE DES MOTIFS :                     LE 9 MARS 2004

COMPARUTIONS :

Nora Ng                                                                                   POUR LA DEMANDERESSE

Kim Shane                                                                                POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

ELGIN, CANNON & ASSOCIATES                                     POUR LA DEMANDERESSE

Vancouver (Colombie-Britannique)

MORRIS ROSENBERG                                                          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


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