Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20211022

Dossier : IMM-5962-20

Référence : 2021 CF 1124

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 22 octobre 2021

En présence de monsieur le juge Bell

ENTRE :

KAI HOU LIN

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Kai Hou Lin (Mme Lin) sollicite le contrôle judiciaire, au titre du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (LIPR), de la décision rendue le 8 octobre 2020 par un agent des visas au consulat général du Canada à Hong Kong. L’agent des visas a rejeté la demande de permis d’études de Mme Lin et l’a déclarée interdite de territoire au Canada pendant cinq ans pour fausses déclarations, au titre de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR.

[2] Pour les motifs qui suivent, je rejette la demande de contrôle judiciaire.

II. Faits pertinents

[3] Mme Lin est une citoyenne de Taïwan. Le 6 mars 2020, elle a reçu une lettre de l’Université Concordia, qui confirmait son admission à la maîtrise en sciences de l’éducation.

[4] En mai ou autour de mai 2020, Mme Lin a retenu les services de YANG Jingci (Yang), un consultant réglementé en immigration canadienne, pour qu’il l’aide à préparer sa demande de permis d’études (la demande). Sur le formulaire « Recours aux services d’un représentant », signé par la demanderesse le ou vers le 24 mai 2020, il est précisé ce qui suit :

Je déclare avoir fourni des réponses exactes et complètes aux questions du présent formulaire et sur toute autre demande jointe (le cas échéant);

Aussi, je déclare avoir lu et compris tous les énoncés du présent formulaire, ayant demandé et obtenu des explications pour chaque point qui n’était pas clair.

[5] Le ou vers le 1er juin 2020, Yang a présenté la demande, datée du 27 mai 2020, à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC). Mme Lin, par l’intermédiaire de son agent, a répondu « non » à l’énoncé suivant : « On vous a refusé un visa ou un permis, interdit l’entrée ou demandé de quitter le territoire canadien ou celui d’un autre pays. » (la question pertinente).

[6] Le 2 juin 2020 ou autour de cette date, IRCC a reçu la demande de Mme Lin. L’agent des visas qui a examiné la demande a remarqué que Mme Lin avait répondu « non » à la question pertinente. Cette réponse contredisait l’information dont disposait IRCC, soit que la demanderesse avait déjà été renvoyée des États-Unis et qu’elle s’était vu refuser l’entrée aux États-Unis et à Guam, un territoire de ce pays.

[7] Le 11 juin 2020, IRCC a envoyé une lettre d’équité procédurale à Mme Lin pour lui faire part de ses doutes quant à la véracité des réponses qu’elle avait données dans sa demande, en lui signalant ses démêlés avec les autorités de l’immigration américaines. IRCC lui offrait également l’occasion de répondre aux préoccupations soulevées et de soumettre d’autres éléments de preuve au besoin. L’extrait pertinent tiré de la lettre d’équité procédurale se lit comme suit :

[traduction]

Je crains que vous ne répondiez pas aux critères relatifs à l’obtention d’un permis d’études.

Plus précisément, je ne suis pas convaincu que vous satisfassiez aux exigences du paragraphe 16(1) de la LIPR. Vous avez omis de déclarer vos antécédents de voyage et vos démêlés avec les autorités de l’immigration américaines. Selon les renseignements à notre disposition, il semble que vous ayez été renvoyée des États-Unis.

J’aimerais par la présente vous donner la possibilité d’apporter des éclaircissements. Votre réponse, ainsi que tout document à l’appui, doit nous parvenir dans les 90 jours suivant la date de la présente lettre.

[8] Le 18 août 2020, dans la réponse qu’elle a fait parvenir à IRCC par l’intermédiaire de son avocat, Mme Lin a admis avoir eu des démêlés avec les douanes américaines et a affirmé que son consultant en immigration, Yang, avait accidentellement oublié d’en faire mention. D’ailleurs, Yang avait déclaré son omission dès le 8 juillet 2020, comme suit :

[traduction]

À l’énoncé « On vous a refusé un visa ou un permis, interdit l’entrée ou demandé de quitter le territoire canadien ou celui d’un autre pays. », j’ai coché « non » sans vérifier auprès de la demanderesse et sans lui faire passer en revue le formulaire avant de l’envoyer. J’admets avoir commis une bêtise en ne demandant pas confirmation à la demanderesse et je n’ai jamais eu l’intention, directement ou indirectement, de cacher de l’information à IRCC.

[9] Mme Lin a admis qu’elle avait été renvoyée des États-Unis le 29 mars 2008 parce qu’elle n’était pas en possession des bons documents, et qu’en conséquence, elle avait été interdite de territoire pendant cinq ans. De plus, Mme Lin a reconnu qu’en novembre 2013, sa demande de visa américain avait été rejetée parce qu’elle avait essayé de se rendre à Guam, un territoire des États-Unis, en novembre 2011. Mme Lin a exprimé des regrets et s’est excusée pour son [traduction] « omission de bonne foi ». Les extraits pertinents de la réponse de Mme Lin se lisent comme suit :

[traduction]

J’ai été renvoyée des États-Unis le 29 mars 2008 pour inobservation de la [US Immigration and Nationality Act]. J’ai par la suite été interdite de territoire pendant cinq ans, soit jusqu’en mars 2013 […].

En novembre 2011, j’ai voulu visiter Guam. J’ignorais à ce moment que l’interdiction de séjour aux États-Unis s’étendait aussi à cette île. […]

Malheureusement, à cause de cet incident, la demande de visa que j’ai présentée en novembre 2013 depuis Hong Kong a été refusée.

Je suis profondément désolée d’avoir omis de divulguer cette information. Ma demande de permis d’études avait été remplie par mon ancien représentant, qui n’avait pas validé l’information avec moi. Je n’avais aucune intention de cacher les renseignements ci-dessus. Malheureusement, mon représentant ne m’avait pas demandé de vérifier la demande avant de la soumettre en mon nom.

III. Décision faisant l’objet du contrôle

[10] Le ou vers le 8 octobre 2020, un agent des visas a examiné la réponse de Mme Lin à la lettre d’équité procédurale. L’agent des visas a tenu compte de la prétention de Mme Lin que la fausse déclaration n’était qu’une erreur de bonne foi commise par son ancien représentant. L’agent des visas a toutefois rejeté cette prétention. Il a conclu qu’il était déraisonnable de la part de la demanderesse de ne pas revoir sa demande avant qu’elle soit transmise. De plus, il a estimé qu’il était déraisonnable d’imaginer qu’une personne ayant auparavant été sous le coup d’une interdiction de territoire pendant cinq ans puisse [traduction] « oublier pour une raison ou pour une autre de divulguer » cette information dans sa demande. Il a rappelé les autres démêlés de Mme Lin avec l’immigration, notamment sa déportation des États-Unis et le refus de lui accorder l’entrée à Guam en 2011, puis aux États-Unis, en 2013. À l’issue de son analyse, l’agent des visas a établi que Mme Lin avait intentionnellement fait une présentation erronée d’un fait important qui aurait pu mener à une erreur dans l’administration de la LIPR.

IV. Dispositions pertinentes

[11] Les dispositions pertinentes, présentées en annexe, sont les paragraphes 11(1), 16(1) et 40(2) de même que l’alinéa 40(1)a) de la LIPR.

V. Questions en litige

[12] Mme Lin affirme qu’elle est la victime d’un manquement à l’équité procédurale. Le ministre soutient pour sa part que la question du prétendu manquement à l’équité procédurale n’a pas été soulevée dans la demande d’autorisation de contrôle judiciaire et qu’elle ne doit pas être entendue. La Cour doit décider si la question de l’équité procédurale constitue une « nouvelle question », si elle doit permettre qu’une telle question soit soulevée en l’espèce et, le cas échéant, si l’agent des visas a effectivement manqué à l’équité procédurale.

[13] Mme Lin prétend également que la décision de l’agent des visas est déraisonnable et allègue qu’il existe une preuve que son omission de divulguer ses démêlés antérieurs avec les autorités de l’immigration américaines était la conséquence d’une erreur de bonne foi commise par son représentant. La Cour doit décider si l’exception fondée sur la déclaration inexacte faite de bonne foi s’applique dans la présente affaire, et si la conclusion de l’agent des visas, à savoir que Mme Lin a intentionnellement fait une fausse déclaration, est raisonnable.

VI. Analyse

A. Norme de contrôle

[14] Mme Lin et le ministre conviennent que la norme de contrôle applicable à la décision de l’agent des visas est celle de la décision raisonnable (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, 441 DLR (4th) 1 au para 25).

[15] Or, les questions d’équité procédurale sont assujetties à la norme de la décision correcte. Le tribunal doit décider si le processus suivi par le décideur satisfait en tout point aux critères d’équité (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339 au para 43).

B. L’allégation de manquement à l’équité procédurale soulève-t-elle une nouvelle question?

[16] Mme Lin prétend qu’elle n’avait pas été informée des préoccupations soulevées dans la lettre d’équité procédurale relativement à une présentation erronée au sens de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR ni des conséquences d’un tel manquement. Elle affirme qu’elle n’a pas eu de véritable possibilité de répondre aux doutes que l’agent des visas avait exprimés dans ses notes. Elle soutient par ailleurs qu’une conclusion de fausses déclarations, qui non seulement la prive d’un visa, mais l’empêche d’entrer au Canada pendant cinq ans, exige un degré plus strict d’équité procédurale (Asanova c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 1173 [Asanova] au para 30).

[17] Mme Lin s’appuie sur la décision Ge c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 594, dans laquelle la Cour concluait que si un agent a des craintes quant à une possible inobservation, par un demandeur, de l’obligation de répondre de manière véridique, il doit lui donner la possibilité de s’expliquer avant de rejeter sa demande et de le déclarer interdit de territoire au Canada.

[18] Le ministre affirme que la question de l’équité procédurale constitue une nouvelle question soulevée par Mme°Lin dans son mémoire supplémentaire. Il soutient que cette nouvelle question ne pouvait raisonnablement être prévue, puisque ni l’avis de demande de contrôle judiciaire de la demanderesse, ni les affidavits à l’appui ni le mémoire n’en faisaient mention.

[19] Au paragraphe 12 de la décision Al Mansuri c Canada (Sécurité publique et de la Protection civile), 2007 CF 22, 315 FTR 1 [Al Mansuri], la Cour établit une liste non exhaustive des facteurs à prendre en compte dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire de décider s’il y a lieu de permettre « que des arguments soient invoqués pour la première fois dans l’exposé complémentaire des faits et du droit présenté par une partie » :

  1. Les faits et éléments intéressant les nouveaux arguments étaient‑ils tous connus (ou raisonnablement accessibles) à l’époque où la demande d’autorisation fut déposée?

  2. Est‑il possible que la partie adverse subisse un préjudice si les nouveaux arguments sont étudiés?

  3. Le dossier révèle‑t‑il tous les faits à l’origine des nouveaux arguments?

  4. Les nouveaux arguments sont‑ils apparentés à ceux au regard desquels fut accordée l’autorisation?

  5. Quelle est la force apparente des nouveaux arguments?

  6. Le fait de permettre que les nouveaux arguments soient invoqués retardera‑t‑il indûment l’audition de la demande?

[20] Je conclus donc que le prétendu manquement à l’équité procédurale constitue une nouvelle question, car il n’en a pas été fait mention dans la demande d’autorisation ou dans les observations relatives à cette demande. Le juge qui a instruit la demande d’autorisation ne pouvait accueillir celle-ci que sur la foi des renseignements et arguments qu’elle contenait. Cependant, si je tiens compte du critère établi dans la décision Mansuri, je ne vois pas pourquoi je ne pourrais exercer mon pouvoir discrétionnaire de manière à permettre que la question de l’équité procédurale soit soulevée. Tous les faits nécessaires pour trancher la question se trouvent dans le dossier certifié du tribunal. La Cour est souvent saisie de cette même question en lien avec des demandes de contrôle judiciaire telles que la présente. À mon avis, le ministre ne sera pas lésé, et il a eu amplement l’occasion de répondre aux allégations de la demanderesse. Enfin, permettre que la nouvelle question soit instruite ne retardera pas l’audition de l’affaire ni l’issue de celle-ci.

C. L’agent des visas a-t-il manqué à l’équité procédurale?

[21] Le ministre affirme que l’obligation d’équité procédurale due à un demandeur de permis d’études se situe vers l’extrémité inférieure du registre, même si des préoccupations de fausses représentations ont été soulevées lors du traitement de la demande (Tuiran c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 324 [Tuiran] aux para 14, 19). Pour les motifs exposés ci-dessous, je suis convaincu que les exigences de l’équité procédurale ont été respectées dans les circonstances de l’espèce, peu importe que l’on considère qu’un degré plus strict d’équité doit s’appliquer à l’égard de la demanderesse (Asanova, au para 30) ou que cette obligation se trouve à l’extrémité inférieure du registre (Tuiran, au para 14).

[22] La lettre d’équité procédurale explicitait clairement la préoccupation de l’agent des visas selon laquelle Mme Lin avait manqué à l’obligation prévue à l’article 16 de la LIPR. L’agent des visas y a expressément nommé les réserves qu’il avait à l’égard des démêlés que Mme Lin avait eus avec les autorités de l’immigration américaines par le passé. Qu’il n’y ait pas fait mention de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR, lequel porte sur les conséquences possibles de faire une présentation erronée, ne constitue pas de sa part une inobservation du droit à l’équité procédurale de la demanderesse. Dans sa lettre, l’agent exposait ses inquiétudes et informait Mme Lin de la preuve qui pesait contre elle. Par ailleurs, la demanderesse cite, dans sa réponse à la lettre d’équité procédurale, la décision Koo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 931, [2009] 3 RCF 446 [Koo]. Dans l’affaire Koo, la demande de visa de résident permanent du demandeur avait été rejetée « parce qu’il avait fait de fausses déclarations ou omis de déclarer des faits importants au sens de l’alinéa 40(1)a) de la [LIPR] ». À l’instar de Mme Lin, M. Koo avait retenu les services d’un consultant pour qu’il l’aide à préparer, puis à soumettre sa demande. L’agent des visas craignait que le demandeur ait omis de divulguer des faits importants. Par conséquent, la demande de visa de résident permanent de M. Koo avait été refusée, et ce dernier avait été interdit de territoire au Canada pendant cinq ans. Étant donné sa réponse à la lettre d’équité procédurale et son renvoi à la décision Koo, il est clair que Mme Lin savait ou aurait dû savoir quelles étaient les conséquences de faire une présentation erronée au sens de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR. Je suis donc convaincu qu’il n’y a pas eu manquement à l’équité procédurale.

D. Caractère raisonnable de la décision de l’agent des visas

[23] Mme Lin soutient que l’agent des visas n’a donné aucun motif rationnel pour étayer sa conclusion que l’[traduction] « erreur de bonne foi » qu’elle avait commise était en fait intentionnelle. Selon elle, le fait que la demande n’était pas signée et que son consultant ait admis avoir soumis cette dernière sans lui donner l’occasion de valider les renseignements prouve qu’elle n’a pas sciemment fait de fausses déclarations.

[24] Au paragraphe 19 de la décision Alkhaldi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 584, la Cour définit comme suit les deux critères applicables à l’exception relative à l’erreur de bonne foi :

  1. un critère subjectif dans le cadre duquel le décideur doit se demander si la personne croyait sincèrement qu’elle ne faisait pas une présentation erronée;

  2. un critère objectif dans le cadre duquel le décideur doit se demander s’il était raisonnable de supposer, selon les faits, que la personne croyait qu’elle ne faisait pas une présentation erronée.

[25] Certes, Mme Lin a admis avoir fait une fausse déclaration — quoique pas de manière intentionnelle — mais elle n’a guère expliqué l’origine de l’erreur ni pourquoi elle n’avait pas passé en revue sa demande. L’agent des visas n’a pas cru que la demanderesse avait [traduction] « juste oublié de divulguer ses antécédents de voyage » et a conclu qu’elle avait la responsabilité de vérifier les renseignements indiqués dans sa demande, même si un consultant devait par la suite s’occuper de l’envoyer. De plus, selon l’agent des visas, il n’était pas objectivement raisonnable de penser que Mme Lin pouvait croire qu’elle ne faisait pas une fausse déclaration.

[26] La décision de l’agent des visas est conforme à la jurisprudence portant sur les fausses déclarations et l’exception relative aux fausses déclarations faites de bonne foi. La Cour a affirmé à maintes reprises qu’un demandeur a une obligation de franchise et qu’il doit fournir des renseignements complets, fidèles et véridiques lorsqu’il présente une demande d’entrée au Canada (Kazzi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 153 au para 38; Goudarzi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 425 au para 40). La Cour a par ailleurs conclu que lorsqu’une personne fait une représentation erronée par le biais d’une tierce personne, le paragraphe 40(1) de la LIPR continue de s’appliquer (Wang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 647 au para 25). Un demandeur étant tenu responsable du contenu de la demande qu’il signe, on ne peut considérer qu’il croyait raisonnablement ne pas avoir présenté faussement un fait d’importance s’il a omis de revoir sa demande et de vérifier qu’elle était complète et exacte (Goburdhun c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 971, 439 FTR 210 au para 28; Haque v Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 315 au para 16).

[27] L’exception relative à l’erreur de bonne foi est très restreinte et ne s’applique dans des circonstances véritablement exceptionnelles. Un demandeur doit démontrer qu’il croyait honnêtement et raisonnablement qu’il ne faisait pas une fausse déclaration sur un fait important et qu’il ne s’agissait pas d’un renseignement dont la connaissance échappait à sa volonté (Patel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 401 au para 64; Ahmed c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 107 au para 32).

[28] Mme Lin a signé le formulaire « Recours aux services d’un représentant » et déclaré ce faisant que les renseignements contenus dans celui-ci et dans toute demande jointe étaient exacts. Dans ce cas-ci, il s’agissait d’une demande de permis d’études. Comme elle avait rempli le formulaire susmentionné, la demanderesse avait un devoir élevé d’assurer l’exactitude de son contenu. Par ailleurs, compte tenu du fait qu’elle avait antérieurement pu entrer aux États-Unis, qu’elle en avait été renvoyée, puis qu’elle y avait été interdite de territoire, elle savait ou aurait dû savoir qu’elle était tenue à une obligation stricte de franchise envers les autorités de l’immigration. Je suis convaincu que les critères de l’exception à l’article 40 fondée sur l’erreur de bonne foi ne s’appliquent pas et que la décision est par conséquent raisonnable. La conclusion de l’agent des visas, à savoir que Mme Lin n’a pas démontré qu’elle croyait honnêtement et raisonnablement qu’elle n’avait pas fait une fausse déclaration sur un fait important ou qu’il s’agissait d’un renseignement dont la connaissance échappait à sa volonté, est raisonnable.

[29] L’analyse de l’agent des visas possède toutes les caractéristiques de la raisonnabilité, notamment celles énoncées au paragraphe 85 de Vavilov, de même qu’aux paragraphes 47 à 49 de l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190. Plus précisément, la décision est « fondée sur un raisonnement intrinsèquement cohérent et justifiée à la lumière des contraintes juridiques et factuelles qui ont une incidence sur la décision ». Je suis aussi d’avis que la décision est transparente et intelligible et qu’elle appartient « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Dans les circonstances, une cour de révision doit faire preuve de déférence envers la décision rendue par le décideur administratif.

[30] Je rejette par conséquent la demande de contrôle judiciaire.

VII. Conclusion

[31] La demande de contrôle judiciaire est rejetée sans dépens. J’ai demandé aux parties si l’une d’entre elles souhaitait présenter une question à certifier aux fins d’examen par la Cour d’appel fédérale, mais ni l’une ni l’autre n’a formulé une telle question. Je conclus qu’il n’existe aucune question grave de portée générale qui serait déterminante si la présente affaire faisait l’objet d’un appel (alinéa 74d) de la LIPR; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Zazai, 2004 CAF 89, 318 NR 365 au para 11). Par conséquent, aucune question n’est certifiée aux fins d’examen par la Cour d’appel fédérale.


JUGEMENT dans le dossier IMM-5962-20

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée, sans dépens. Aucune question n’est certifiée aux fins d’examen par la Cour d’appel fédérale.

« B. Richard Bell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Julie-Marie Bissonnette, traductrice agréée


Annexe

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27

Immigration and Refugee Protection Act, S.C. 2001, c. 27

Visa et documents

Application before entering Canada

11 (1) L’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visa et autres documents requis par règlement. L’agent peut les délivrer sur preuve, à la suite d’un contrôle, que l’étranger n’est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

11 (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document may be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

Obligation du demandeur

Obligation — answer truthfully

16 (1) L’auteur d’une demande au titre de la présente loi doit répondre véridiquement aux questions qui lui sont posées lors du contrôle, donner les renseignements et tous éléments de preuve pertinents et présenter les visa et documents requis.

16 (1) A person who makes an application must answer truthfully all questions put to them for the purpose of the examination and must produce a visa and all relevant evidence and documents that the officer reasonably requires.

Fausses déclarations

Misrepresentation

40 (1) Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants :

40 (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible for misrepresentation

a) directement ou indirectement, faire une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la présente loi;

[…]

(a) for directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter that induces or could induce an error in the administration of this Act;

[…]

Application

Application

(2) Les dispositions suivantes s’appliquent au paragraphe (1):

(2) The following provisions govern subsection (1):

a) l’interdiction de territoire court pour les cinq ans suivant la décision la constatant en dernier ressort, si le résident permanent ou l’étranger n’est pas au pays, ou suivant l’exécution de la mesure de renvoi;

(a) the permanent resident or the foreign national continues to be inadmissible for misrepresentation for a period of five years following, in the case of a determination outside Canada, a final determination of inadmissibility under subsection (1) or, in the case of a determination in Canada, the date the removal order is enforced; et

b) l’alinéa (1)b) ne s’applique que si le ministre est convaincu que les faits en cause justifient l’interdiction.

(b) paragraph (1)(b) does not apply unless the Minister is satisfied that the facts of the case justify the inadmissibility.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5962-20

 

INTITULÉ :

KAI HOU LIN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 7 juin 2021

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BELL

 

DATE DES MOTIFS ET DU JUGEMENT :

Le 22 octOBRE 2021

 

COMPARUTIONS :

Robert Leong

 

Pour la demanderesse

 

Erica Louie

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lowe and Company

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Pour la demanderesse

 

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Pour le défendeur

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.