Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20211110


Dossier : IMM-1694-20

Référence : 2021 CF 1224

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 10 novembre 2021

En présence de madame la juge Furlanetto

ENTRE :

XIUFENG SHAN

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] La demanderesse, Mme Xiufeng Shan, sollicite le contrôle judiciaire de la décision, datée du 30 janvier 2020 [la décision], par laquelle la Section d’appel de l’immigration [la SAI] a rejeté pour défaut de compétence l’appel qu’elle avait interjeté à l’encontre de deux mesures d’exclusion [les mesures d’exclusion]. La SAI a décidé qu’elle n’avait pas compétence pour instruire l’appel au titre du paragraphe 63(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés CS 2001, c 27 [la LIPR] parce que le visa de résident permanent de la demanderesse avait expiré avant que soient prises les mesures d’exclusion.

[2] Pour les motifs qui suivent, je conclus que la décision était raisonnable et qu’il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale. La demande est donc rejetée.

I. Contexte

[3] La demanderesse est une étrangère de citoyenneté chinoise. Le 24 octobre 2016, son époux a demandé à parrainer la demande de résidence permanente au Canada qu’elle avait déposée. Elle a obtenu, le 28 juin 2017, un visa de résident permanent valide pendant six mois.

[4] L’époux de la demanderesse est décédé le 3 septembre 2017, soit avant qu’elle arrive au Canada.

[5] La demanderesse est entrée au Canada le 23 novembre 2017 et a informé un agent qu’elle avait communiqué avec un bureau des visas au sujet de la mort de son mari. Elle a été admise au Canada, mais on lui a demandé de revenir le 2 décembre 2017 pour une entrevue de suivi avec un agent de l’Agence des services frontaliers du Canada. Une deuxième entrevue a ensuite eu lieu le 20 décembre 2017 afin que les agents d’immigration canadiens saisis du dossier puissent communiquer avec les bureaux des visas de Shanghai et de Hong Kong.

[6] Le 28 décembre 2017, le visa de résident permanent de la demanderesse a expiré.

[7] Le 9 janvier 2018, un premier rapport circonstancié a été établi en vertu du paragraphe 44(1) de la LIPR, sur le fondement de l’article 41 de la LIPR et en raison du défaut de se conformer à l’alinéa 51b) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [le RIPR]. À cause du décès du mari, l’agent a conclu que la demanderesse était incapable d’établir que l’engagement était toujours valide, comme l’exige l’article 127 du RIPR, ou que son époux répondait aux critères d’un parrain au sens de l’article 133 du RIPR. La demanderesse a été convoquée à une enquête au titre du paragraphe 44(2) de la LIPR.

[8] Le 17 avril 2018, un deuxième rapport a été établi en vertu du paragraphe 44(1) de la LIPR sur la base de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR. L’agent a estimé qu’il y avait des motifs raisonnables de conclure que la demanderesse était interdite de territoire pour avoir fait de fausses déclarations et omis d’informer les agents d’immigration canadiens que son parrain était décédé avant qu’elle arrive au Canada, une omission qui a fait que son visa est demeuré valide malgré que son parrainage ne l’était plus. La demanderesse a une fois de plus été convoquée à une enquête.

[9] Le 18 juin 2018, une enquête a eu lieu devant la Section de l’immigration [la SI]. Le 6 septembre 2018, la SI a conclu que la demanderesse était interdite de territoire au Canada pour les motifs énoncés dans les deux rapports établis en vertu du paragraphe 44(1). La SI a pris les mesures d’exclusion le même jour.

[10] La demanderesse a interjeté appel des mesures d’exclusion le 13 septembre 2018 et, le 12 novembre 2019, le défendeur a demandé que la demande d’appel soit rejetée pour défaut de compétence. La demande préliminaire a été rejetée et la demanderesse a été autorisée à fournir des observations écrites et orales sur la question. La SAI a rejeté l’appel pour défaut de compétence le 30 janvier 2020.

[11] Pour parvenir à sa décision, la SAI a examiné deux questions : 1) le visa était-il non valide du fait d’un « obstacle [...] ou [d’une] impossibilité de remplir une des conditions pour lesquelles il a été délivré », auquel cas il y aurait perte de crédibilité? et 2) la demanderesse a-t-elle perdu qualité pour interjeter appel du fait qu’elle n’était plus titulaire d’un visa de résident permanent valide?

[12] La SAI a conclu que même si la mort de l’époux de la demanderesse rendait impossible le parrainage, le visa de cette dernière demeurait valide. Cependant, la SAI a conclu que la demanderesse n’avait plus qualité pour interjeter appel des mesures d’exclusion prises contre elle parce que son visa avait expiré avant que la SI prenne les mesures en question.

[13] La SAI s’est demandé si la période écoulée entre la date de l’arrivée de la demanderesse au Canada et la date de sa convocation à une enquête constituait un abus de procédure, mais a conclu que ce délai ne pouvait pas être attribué au défendeur.

II. Questions en litige et norme de contrôle

[14] Deux questions en litige sont soulevées dans le cadre de la présente demande :

  • a) Y a-t-il eu manquement à l’obligation d’équité procédurale?

  • b) La SAI a-t-elle commis une erreur en concluant que la demanderesse n’avait pas qualité pour interjeter appel parce que son visa avait expiré avant que soient prises les mesures d’exclusion?

[15] À l’instar du défendeur, je suis d’avis que la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable, puisque la SAI devait interpréter sa propre loi (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] aux para 25, 115 et 116; Momi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CAF 163 au para 21; Pepa c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 348 [Pepa] au para 16).

[16] La cour, lorsqu’elle applique cette norme, doit déterminer si la décision est « fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle » et est « justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, aux para 85-86); Société canadienne des postes c Syndicat des travailleuses et travailleurs des postes, 2019 CSC 67 aux para 2, 31). Une décision raisonnable doit posséder les caractéristiques suivantes : la justification, la transparence et l’intelligibilité (Vavilov, au para 99).

[17] La norme de contrôle qui convient le mieux à l’égard des questions d’équité procédurale est celle de la décision correcte, même si ces questions ne sont pas, au sens strict, soumises à une analyse relative à la norme de contrôle. Il s’agit plutôt d’établir si le processus suivi par le décideur était équitable et juste (Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 au para 54; Association canadienne des avocats en droit des réfugiés c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2020 CAF 196 au para 35; Sangha c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 95 au para 13).

III. Analyse

A. Y a-t-il eu manquement à l’obligation d’équité procédurale?

[18] La demanderesse soutient que, si son visa a expiré avant que la mesure de renvoi soit prise, c’est uniquement en raison de retards attribuables au défendeur. Elle affirme que la SAI aurait dû considérer les répercussions de ce retard comme une question d’équité procédurale plutôt que comme une question d’abus de procédure. Elle prétend par ailleurs qu’établir un abus de procédure exige de satisfaire à un critère préliminaire beaucoup plus exigeant que celui nécessaire pour établir un manquement à l’équité procédurale. Enfin, elle soutient que l’analyse ne devrait pas viser principalement à établir si l’organisme administratif a sciemment retardé le processus, mais à déterminer qui est responsable de ce retard.

[19] Dans sa décision, la SAI a conclu que le défendeur n’avait commis aucun abus de procédure, puisqu’aucun retard ne lui était attribuable. Le retard en cause était dû aux circonstances factuelles et à l’arrivée tardive de la demanderesse au Canada. Par conséquent, la SAI a examiné la question du point de vue de la demanderesse.

[20] Il convient de noter que, pour justifier l’octroi d’une réparation à l’égard d’un délai qui constituerait un abus de procédure ou un manquement à l’équité procédurale, un demandeur doit démontrer que ce délai était déraisonnable (Blencoe c Colombie-Britannique (Human Rights Commission), 2000 CSC 44 aux para 106, 115 et 121).

[21] En l’espèce, il n’a été établi ni par la demanderesse, ni au vu du dossier qu’il y avait eu un délai déraisonnable dans la rédaction des rapports en vertu du paragraphe 44(1). Je ne vois aucune erreur dans l’évaluation par la SAI du temps écoulé. Comme l’a souligné la SAI, le délai est le résultat de plusieurs facteurs : « i) la décision selon laquelle il fallait obtenir plus de renseignements, d’une part, de [la demanderesse] lors d’une seconde entrevue et, d’autre part, des bureaux des visas de Hong Kong et de Shanghai, pour que les agents d’immigration puissent [traduction] « en arriver à une conclusion juste et équitable » et ii) le fait que [la demanderesse] n’a pas pris l’avion pour le Canada avant le 23 novembre 2017, cinq semaines seulement avant l’expiration de son visa. »

[22] De plus, je suis d’accord avec le défendeur pour dire que tout argument voulant qu’il y ait eu manquement à l’équité procédurale en raison du temps écoulé avant que les rapports au titre du paragraphe 44(1) de la LIPR ne soient établis ou renvoyés concerne une étape antérieure du processus administratif. La demanderesse n’a pas demandé le contrôle judiciaire de la décision de la Section de l’immigration (SI).

[23] Une partie doit soulever une question d’équité procédurale à la première occasion (Hashim c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 676 au para 17). En l’espèce, la demanderesse n’a soulevé aucun présumé manquement à l’équité procédurale qui serait dû au délai écoulé avant le renvoi devant la SI. Elle n’est donc pas fondée à soulever la question à ce moment‑ci.

[24] De plus, le seul argument relatif à l’équité procédurale soulevé par la demanderesse devant la SAI concernait la manière dont la question de la compétence avait été traitée et le moment où elle l’avait été.

[25] À mon avis, la demanderesse a eu largement l’occasion d’aborder la question de la compétence de la SAI et celle de son droit d’appel allégué, au moyen d’observations écrites et orales. Le processus suivi pour traiter la question était équitable sur le plan procédural.

[26] La demanderesse souligne dans ses observations écrites que la SI a déclaré, dans ses motifs, que la demanderesse avait un visa de résidente permanente et qu’elle disposait toujours d’un droit d’appel devant la SAI. Compte tenu de cette déclaration, je suis d’avis que la demanderesse ne peut pas invoquer un manquement à l’équité procédurale.

[27] Le rôle de la SI se limitait à décider si la demanderesse était interdite de territoire en raison des motifs soulevés. Rien dans sa décision ne laisse croire qu’elle a été influencée par l’hypothèse que la demanderesse interjetterait appel des mesures d’exclusion.

[28] En outre, dans la mesure où la demanderesse prétend qu’il était légitime pour elle de s’attendre à ce que son appel soit entendu en raison de la déclaration de la SI (et du fait de son dépôt d’un avis d’appel), cet argument n’est pas fondé en droit. Si les attentes légitimes d’un demandeur peuvent également servir à déterminer quelles procédures l’obligation d’équité exige dans des circonstances données, elles ne peuvent toutefois pas créer de droits matériels en dehors du domaine de la procédure (Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817 à la page 840). Or, le droit de porter une décision en appel devant la SAI est un droit matériel. Dès lors que cesse d’exister un droit d’appel prévu par la loi, ce droit ne peut être créé sur la base d’une déclaration erronée de la SI ou du dépôt volontaire d’un acte de procédure.

[29] En somme, la demanderesse n’a pas démontré qu’il y avait eu manquement à l’équité procédurale.

B. La SAI a-t-elle commis une erreur en concluant que la demanderesse n’avait pas qualité pour interjeter appel parce que son visa avait expiré avant que soient prises les mesures d’exclusion?

[30] Je suis d’avis qu’il était raisonnable pour la SAI de conclure que la demanderesse n’avait pas qualité pour interjeter appel, puisque son visa de résident permanent avait expiré avant que soient prises les mesures d’exclusion. Ce raisonnement est conforme au libellé du paragraphe 63(2) de la LIPR et à la jurisprudence.

[31] Le paragraphe 63(2) de la LIPR se lit comme suit :

63(2) Le titulaire d’un visa de résident permanent peut interjeter appel de la mesure de renvoi prise en vertu du paragraphe 44(2) ou prise à l’enquête.

63(2) A foreign national who holds a permanent resident visa may appeal to the Immigration Appeal Division against a decision to make a removal order against them made under subsection 44(2) or made at an admissibility hearing.

[32] La Cour a conclu que le paragraphe est rédigé au présent et s’applique à une personne qui est « titulaire » d’un visa. L’objet de la disposition est de donner un droit d’appel aux titulaires d’un visa valide (Zhang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 593 aux para 10-14). Le paragraphe 63(2) de la LIPR précise que seule une personne qui est « titulaire » d’un visa valide a le droit d’interjeter appel. L’arrivée à un point d’entrée ne constitue pas une limite au-delà de laquelle la validité d’un visa de résident permanent ne peut être évaluée. À ce titre, je renvoie aux paragraphes 19 et 20 de la décision Ismail c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 338 [Ismail], auxquels la SI a en partie fait référence :

[19] Je conviens donc avec la SAI que les étrangers qui sont déclarés interdits de territoire au point d’entrée ou lors d’un contrôle reporté auront un droit d’appel auprès de ce tribunal uniquement lorsque leur interdiction de territoire n’a pas trait à une absence de visa de résident permanent. Tel sera le cas lorsqu’il y aura eu un changement dans la situation depuis que le visa a été délivré, par exemple, si l’intéressé fait l’objet d’une déclaration de culpabilité ou s’il contracte une nouvelle maladie. Dans ces circonstances, une mesure d’exclusion sera susceptible d’appel auprès de la SAI, et des facteurs d’ordre humanitaire pourront alors être pris en compte. Toutefois, lorsque l’interdiction de territoire a trait à l’absence d’un visa de résident permanent (soit qu’un visa de résident permanent n’a jamais été délivré ou qu’il a été révoqué), le seul recours sera une demande de contrôle judiciaire devant la Cour.

[20] Il va sans dire que les agents des visas et les agents d’immigration sont présumés agir de bonne foi. Dans l’hypothèse improbable où un visa aurait été révoqué pour contrevenir à l’intention du législateur et pour exclure la possibilité d’un appel légitime en vertu du paragraphe 63(2), il pourrait être demandé à la Cour d’intervenir par voie de contrôle judiciaire, et la Cour pourrait alors annuler la décision de révoquer un visa pour des motifs illégitimes ou illicites.

[33] La demanderesse affirme que la décision Ismail ne s’applique pas en l’espèce parce qu’elle repose sur des faits différents : contrairement au visa dans l’affaire Ismail, son visa à elle n’était pas sujet à révocation. Toutefois, comme il est précisé aux paragraphes 14 à 19 de la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration ) c Hundal, [1995] 3 CF 32 [1995] ACF No 918 (QL) [Hundal], il existe quatre exceptions à la présomption de validité d’un visa :

  • a) lorsqu’il y a obstacle à ou impossibilité de remplir une des conditions pour lesquelles il a été délivré;

  • b) lorsqu’il y a défaut de remplir une des conditions attachées à l’octroi du visa lui-même avant qu’il ne soit délivré;

  • c) lorsqu’il atteint sa date d’expiration; et,

  • d) lorsqu’il a été révoqué ou annulé par un agent des visas.

[34] Pour déterminer si un demandeur détient un visa de résident permanent valide, il ne suffit pas de savoir si le visa a été révoqué; il faut aussi vérifier s’il a expiré. Comme le souligne la SAI, c’est la troisième exception énoncée dans la décision Hundal qui s’applique en l’espèce.

[35] La SAI a renvoyé à la décision Far c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2016 CanLII 90984 (CA CISR) [Far], qui s’appuyait sur la décision Ismail. Dans l’affaire Far, la SAI avait conclu que lorsqu’un visa de résident permanent arrive à expiration avant que la SI prenne une mesure de renvoi, le demandeur n’a aucun droit d’appel. Ainsi que la Cour l’a souligné aux paragraphes 56-58 de la décision Far :

[56] La Cour fédérale ne s’est pas penchée expressément sur la possibilité que les agents d’immigration appliquent une politique officieuse d’admission en exigeant que des personnes fassent l’objet d’un contrôle et en faisant en sorte que leur visa arrive à expiration avant le contrôle, mais elle a abordé l’esprit de cet argument au paragraphe 20 de la décision Ismail, cité ci-dessus [...].

[57] En appliquant le raisonnement suivi dans la décision Ismail selon lequel le bureau des visas peut révoquer un visa de résident permanent après qu’un étranger muni d’un visa de résident permanent a présenté au PDE une demande pour entrer au Canada, j’estime qu’un visa de résident permanent peut expirer après qu’un étranger muni d’un visa de résident permanent a présenté au PDE une demande afin d’entrer au Canada [...].

[58] Le raisonnement exposé dans la décision Ismail en ce qui a trait à un visa révoqué devrait s’appliquer à un visa expiré dans le cas où le visa est arrivé à expiration après que l’appelant a été tenu de subir un contrôle complémentaire; l’appelant n’était pas titulaire d’un visa de résident permanent valide « au moment où la mesure d’exclusion est prise » puisque le visa était arrivé à expiration [...]. Les décisions Hundal et Ismail illustrent le principe selon lequel le contrôle au PDE permet l’évaluation de la validité du visa de résident permanent à la lumière des quatre exceptions énoncées dans la décision Hundal [...].

[36] Le même raisonnement a récemment été suivi dans la décision Pepa, qui a été publiée par la suite. Aux paragraphes 52 et 53 de la décision Pepa, la juge Roussel, s’appuyant sur le jugement rendu dans Ismail, a conclu que le fait qu’un demandeur ait déjà été titulaire d’un visa de résident permanent ne signifie pas qu’il en est toujours « titulaire » s’il expire avant que soit prise la mesure de renvoi :

[52] [...] Selon moi, la décision Ismail confirme que, peu importe que la mesure d’exclusion soit prise lors d’un contrôle ou par la SI à l’issue d’une enquête sur l’interdiction de territoire, pour que la demanderesse ait le droit de faire appel devant la SAI, son visa doit être valide au moment où la mesure d’exclusion est prise.

[53] Le paragraphe 63(2) de la LIPR ne s’applique qu’aux « titulaires » d’un visa de résident permanent. Comme l’a énoncé notre Cour dans la décision Zhang c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 593 [Zhang], le paragraphe 63(2) de la LIPR est rédigé au présent et, par conséquent, le fait que le demandeur a déjà été titulaire d’un visa de résident permanent ne le fait pas tomber sous le coup de cette disposition (Zhang, aux para 11, 16). La SAI pouvait raisonnablement conclure qu’elle n’avait pas compétence pour instruire l’appel étant donné que le visa de la demanderesse avait expiré le 16 septembre 2018 et que la mesure d’exclusion avait été prise le 16 octobre 2018.

[37] En l’espèce, comme l’a souligné la SAI, le visa de résident permanent de la demanderesse avait expiré le 28 décembre 2017, soit avant l’établissement des rapports au titre du paragraphe 44(1) de la LIPR et bien avant l’enquête de la SI et la prise des mesures d’exclusion. Comme son visa n’était plus valide au moment où les mesures d’exclusion qu’elle souhaitait porter en appel ont été prises, la demanderesse n’avait pas qualité pour interjeter appel. À mon sens, la SAI n’a pas commis d’erreur en concluant qu’elle n’avait pas compétence pour entendre l’appel de la demanderesse.

[38] Pour tous les motifs exposés ci-dessus, j’estime que la décision était raisonnable, et la demande sera donc rejetée.

[39] Les parties n’ont proposé aucune question à certifier. Soulignons qu’une question avait été certifiée dans la décision Pepa, où un avis d’appel avait été déposé en lien avec la question certifiée suivante :

Pour déterminer si elle a compétence pour instruire un appel fondé sur l’article 63(2) de la LIPR, la SAI devrait‑elle évaluer la validité du visa de résident permanent au moment de l’arrivée au Canada, au moment où le rapport visé au paragraphe 44(1) est rédigé, au moment où il est renvoyé à la SI, selon le cas, ou au moment où la mesure d’exclusion est prise?

[40] En l’espèce, le visa de la demanderesse était expiré au moment où les rapports visés au paragraphe 44(1) de la LIPR ont été rédigés. Compte tenu des observations présentées par les avocats et de l’argument exposé par la demanderesse, j’estime que la présente affaire ne soulève aucune question à certifier.


JUGEMENT dans le dossier IMM-1694-20

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Aucune question de portée générale n’est certifiée.

« Angela Furlanetto »

juge

Traduction certifiée conforme

Julie-Marie Bissonnette, traductrice agréée


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-1694-20

 

INTITULÉ :

XIUFENG SHAN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 14 septembre 2021

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

juge FURLANETTO

 

DATE DES MOTIFS ET DU JUGEMENT :

Le 10 novembre 2021

 

COMPARUTIONS :

Peter Lulic

 

Pour la demanderesse

 

Kareena Wilding

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Peter Lulic

Avocat

Toronto (Ontario)

 

Pour la demanderesse

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.