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Date : 20211022

Dossier : IMM‑4505‑20

Référence : 2021 CF 1109

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 22 octobre 2021

En présence de madame la juge Rochester

ENTRE :

KHOSRO TORKIAN VELASHANI

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Le demandeur, Khosro Torkian Velashani, un citoyen d’Iran, sollicite le contrôle judiciaire de la décision datée du 24 août 2020 [la décision] par laquelle la Section d’appel des réfugiés [la SAR] a rejeté son appel et a confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés [la SPR] rendue le 14 juin 2019, décision selon laquelle le demandeur n’est ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger au sens des articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR].

[2] Le demandeur allègue sa crainte d’être persécuté par les autorités iraniennes en raison de sa conversion de l’islam au christianisme. La SAR a rejeté l’appel pour des motifs de crédibilité, car elle a conclu que la preuve était insuffisante pour démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur s’était sincèrement converti au christianisme et qu’il était recherché par les autorités iraniennes.

[3] Pour les motifs qui suivent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Je ne suis pas convaincue que la SAR a commis une erreur dans l’analyse qui l’a menée à ses conclusions. La décision est transparente, intelligible et justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes auxquelles le décideur était assujetti.

II. Contexte

[4] Le demandeur a déclaré dans son formulaire Fondement de la demande d’asile et lors de son témoignage devant la SPR qu’après une rupture en 2013, il avait lutté contre des pensées suicidaires et contre l’alcoolisme, et avait eu du mal à conserver un emploi. Il a aussi déclaré qu’il avait participé à des programmes de désintoxication pour alcooliques anonymes d’abord en Iran, puis plus tard au Canada.

[5] En 2016, alors que le demandeur commençait à exercer un nouvel emploi, un collègue qu’il connaissait depuis environ trois semaines l’a invité à une réunion à son appartement. Le demandeur affirme qu’on lui a remis une Bible lors de cette première réunion. Trois semaines plus tard, il se considérait comme un chrétien converti, et il a par la suite continué à participer aux réunions hebdomadaires chez son collègue. Il affirme que l’observance des pratiques du christianisme lui a permis de surmonter son alcoolisme.

[6] Le demandeur est arrivé au Canada muni d’un visa de visiteur en juillet 2018. Il avait quitté l’Iran en utilisant son propre passeport biométrique, qui comportait un visa de sortie. À l’audience devant la SPR, il a déclaré que son père l’avait appelé en août 2018 pour l’informer que les autorités iraniennes avaient fait une descente dans son domicile et y avaient découvert sa Bible en langue farsi. Peu après, en septembre 2018, il a présenté une demande d’asile fondée sur les articles 96 et 97 de la LIPR.

[7] Après l’appel qu’il dit avoir reçu de son père, le demandeur a commencé à fréquenter l’église luthérienne St. Luke à Toronto, en août 2018, et il a été baptisé le 10 mars 2019.

[8] Dans une décision datée du 14 juin 2019, la SPR, concluant que le manque de crédibilité était déterminant, a rejeté la demande. Elle a considéré que le demandeur était un homme averti qui possédait de l’expérience professionnelle, qui avait voyagé et qui comptait 12 ans de scolarité. La SPR a examiné le témoignage du demandeur, et a jugé (i) qu’il était parfois évasif et vague, qu’il répétait des renseignements fournis dans son formulaire Fondement de la demande d’asile, et (ii) qu’il éludait certaines questions posées. En ce qui concerne les allégations au cœur de l’affaire dont elle était saisie, la SPR a conclu que le demandeur n’était pas un témoin crédible et digne de foi. En particulier, elle a conclu (i) que le demandeur n’avait pas démontré qu’il se sentait personnellement lié au christianisme, (ii) qu’il n’était pas crédible lorsqu’il disait avoir observé les pratiques du christianisme en Iran, (iii) qu’il n’était pas crédible lorsqu’il affirmait que les autorités iraniennes l’avaient poursuivi après son départ d’Iran, et (iv) que la preuve documentaire était insuffisante pour établir la véracité des allégations au cœur de l’affaire ou pour annuler l’effet cumulatif des préoccupations concernant le témoignage et la preuve du demandeur.

[9] Le demandeur a interjeté appel de la décision de la SPR auprès de la SAR. La SAR, concluant que le demandeur n’avait pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était sincèrement chrétien, a rejeté l’appel. Elle a admis et a examiné de nouveaux éléments de preuve déposés par le demandeur, soit une lettre mise à jour rédigée par le révérend Justin D. Laughridge de l’église luthérienne St. Luke et des captures d’écran d’une réunion virtuelle que l’avocat du demandeur a décrite comme une [traduction] « réunion religieuse virtuelle ». La SAR, cependant, a conclu qu’une lettre d’un pasteur associé de l’église luthérienne St. Luke déposée par le demandeur après la mise en état de son dossier était inadmissible en preuve, parce qu’il n’avait pas démontré que cet élément de preuve satisfaisait aux exigences prévues au paragraphe 110(4) de la LIPR. En particulier, la SAR a conclu que le contenu de la lettre du pasteur associé, à l’exception de la date, était antérieur au rejet de la demande par la SPR.

[10] La SAR a constaté que la SPR avait tiré quatre conclusions en matière de crédibilité que le demandeur n’avait pas contestées en appel. Elle a conclu que les conclusions non contestées portaient sur le cœur de la demande déposée par le demandeur, soit les allégations suivantes :

(i) le demandeur a souffert d’une dépendance à l’alcool qui l’a mené à sa conversion au christianisme;

(ii) il s’est joint à une maison‑église chrétienne en Iran;

(iii) il a continué à observer les pratiques du christianisme au Canada;

(iv) les autorités iraniennes ont cherché le demandeur à son domicile après qu’il eut quitté l’Iran en utilisant son propre passeport biométrique.

[11] La SAR a jugé que les conclusions non contestées étaient déterminantes et que ce seul fondement lui permettait de rejeter l’appel. Néanmoins, elle a traité des autres arguments du demandeur.

[12] La SAR a conclu que la SPR n’avait pas commis d’erreur dans son appréciation de la preuve du demandeur selon laquelle il avait observé les pratiques du christianisme en Iran. De l’avis de la SAR, cette preuve était contredite par celle contenue dans le cartable national de documentation.

[13] Après analyse de la demande d’asile sur place présentée par le demandeur, la SAR a conclu que les motifs de la conversion de ce dernier étaient suspects. La SPR et la SAR n’ont ni l’une ni l’autre contesté que le demandeur avait fréquenté une église au Canada ou qu’il avait été baptisé. La question était plutôt de savoir si la fréquentation d’une église et le baptême par le demandeur découlaient d’une conversion sincère au christianisme. La SAR a conclu que non et que la preuve n’établissait pas que le demandeur continuerait à observer les pratiques du christianisme en Iran. La SAR a conclu que, quoi qu’il en soit, il n’avait pas été établi, selon la prépondérance des probabilités, que les autorités iraniennes seraient informées de la conversion du demandeur s’il devait retourner en Iran.

III. La question préliminaire : l’intitulé

[14] L’intitulé de la cause est par la présente modifié de façon à ce que le nom du demandeur, Khosro TORKIAN VELASHANI, soit correctement orthographié.

IV. Les questions en litige et la norme de contrôle

[15] À l’audience devant la Cour, le demandeur a contesté la décision de la SAR pour trois motifs soulevant les questions suivantes :

A. La SAR a‑t‑elle commis une erreur en refusant d’admettre tous les nouveaux éléments de preuve du demandeur?

B. La conclusion de la SAR selon laquelle le demandeur n’était pas un témoin crédible et ne s’était pas sincèrement converti au christianisme était‑elle raisonnable?

C. L’analyse et la décision de la SAR concernant la demande d’asile sur place présentée par le demandeur ainsi que son analyse connexe au regard de l’article 97 de la LIPR sont‑elles entachées d’une erreur?

[16] Les motifs ci‑dessus sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, telle qu’elle a été énoncée dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] (voir aussi Canada (Citoyenneté et Immigration) c Huruglica, 2016 CAF 93). Pour que la cour de révision intervienne, elle doit avoir été convaincue par la partie qui conteste que la décision « souffre de lacunes graves à un point tel qu’on ne peut pas dire qu’elle satisfait aux exigences de justification, d’intelligibilité et de transparence », et que ces lacunes ou insuffisances reprochées ne sont pas « simplement superficielles ou accessoires par rapport au fond de la décision » (Vavilov au para 100). De plus, selon l’arrêt Vavilov, la cour de révision ne doit pas se pencher sur la décision sous‑jacente avec l’intention de se lancer dans une « chasse au trésor, phrase par phrase, à la recherche d’une erreur » (au para 102), mais plutôt en se préoccupant de savoir si « la décision dans son ensemble est transparente, intelligible et justifiée » (au para 15). Une décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov au para 85).

[17] La cour de révision doit s’abstenir d’apprécier à nouveau la preuve examinée par le décideur et, à moins de circonstances exceptionnelles, elle ne doit pas modifier les conclusions de fait (Vavilov au para 125). La cour doit se concentrer sur la décision effectivement rendue, y compris sur la justification sur laquelle elle s’appuie, et non se demander quelle décision elle aurait rendue à la place du décideur administratif (Vavilov au para 83). Néanmoins, dans l’arrêt Vavilov, la Cour suprême a affirmé qu’un décideur « doit prendre en considération la preuve versée au dossier et la trame factuelle générale qui ont une incidence sur sa décision et celle‑ci doit être raisonnable au regard de ces éléments » (au para 126). Le défaut de la part du décideur de « s’attaquer de façon significative aux questions clés ou aux arguments principaux formulés par les parties permet de se demander s’il était effectivement attentif et sensible à la question qui lui était soumise » (Vavilov au para 128).

V. Analyse

A. La SAR a‑t‑elle commis une erreur en refusant d’admettre tous les nouveaux éléments de preuve du demandeur?

[18] Le demandeur affirme que la SAR a commis une erreur en refusant d’admettre un nouvel élément de preuve dans le cadre de l’appel, à savoir une lettre datée du 21 juillet 2019 rédigée par un pasteur associé de l’église luthérienne St. Luke.

[19] Je ne suis pas convaincue que la SAR a commis une erreur susceptible de contrôle en refusant d’admettre en preuve la lettre du pasteur associé. Au paragraphe 14 de la décision Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 336, la juge Pallotta a traité de l’introduction d’une nouvelle preuve dans le cadre d’un appel devant la SAR :

[traduction]
À l’égard de cette question, l’arrêt Singh de la Cour d’appel fédérale (CAF) est l’arrêt de principe. Dans cet arrêt, la Cour a expliqué que le cadre législatif d’un appel interjeté auprès de la SAR témoigne de la volonté claire du législateur de baliser étroitement l’introduction de toute nouvelle preuve (au para 51). La règle de base veut que la SAR procède en se fondant sur le dossier de la SPR, et, comme le paragraphe 110(4) déroge de à cette règle, une interprétation restrictive s’impose (au para 35). Fait important, la Cour d’appel fédérale a conclu que les exigences explicites prévues au paragraphe 110(4) doivent être remplies : dans le cadre d’un appel devant la SAR, un demandeur ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’aurait pas normalement présentés, dans les circonstances, au moment du rejet (au para 35). La Cour a conclu que les exigences prévues au paragraphe 110(4) sont incontournables et ne laissent place à aucune discrétion de la part de la SAR (au para 35), mais que celle‑ci a le loisir d’appliquer les exigences prévues au paragraphe 110(4) avec plus ou moins de souplesse selon les circonstances propres à chaque affaire (au para 64). [Souligné dans l’original.]

[20] La SAR ne dispose pas du pouvoir discrétionnaire requis pour admettre une preuve qui ne satisfait pas aux exigences prévues au paragraphe 110(4). Ayant conclu que le contenu de la lettre, à l’exception de la date, était antérieur au rejet de la demande par la SPR, la SAR a jugé que le demandeur ne s’était pas acquitté du fardeau de démontrer que la lettre satisfaisait aux exigences prévues au paragraphe 110(4).

[21] Le demandeur admet que le contenu de la lettre du pasteur associé de l’église luthérienne St. Luke ressemble à celui de la lettre du révérend Laughridge dont avait été saisie la SPR, mais il plaide que la SAR a commis une erreur en refusant d’admettre en preuve la lettre du pasteur associé, parce que celle‑ci établit qu’il a assidûment fréquenté l’église luthérienne St. Luke. Le défendeur affirme que la lettre décrit la fréquentation par le demandeur de l’église luthérienne St. Luke à compter de 2018 ainsi que son baptême, qui a été célébré le 10 mars 2019 et pour lequel le pasteur associé et le révérend Laughridge ont signé le baptistaire. La lettre du pasteur associé aurait donc pu être fournie avant que la SPR rende sa décision datée du 14 juin 2019.

[22] La SAR a souligné que le demandeur n’avait produit aucune preuve et n’avait avancé aucun motif expliquant pourquoi la lettre du pasteur n’aurait pas pu être fournie plus tôt. Je conclus qu’il était raisonnable de la part de la SAR de juger que la lettre du pasteur associé était donc inadmissible.

B. La conclusion de la SAR selon laquelle le demandeur n’était pas un témoin crédible et ne s’était pas sincèrement converti au christianisme était‑elle raisonnable?

[23] La crédibilité était la question déterminante sur laquelle la SPR et la SAR devaient statuer. Les conclusions non contestées en matière de crédibilité, à savoir (i) que le demandeur avait souffert d’une dépendance à l’alcool qui l’avait mené à sa conversion au christianisme, (ii) qu’il s’était joint à une maison‑église chrétienne en Iran, (iii) qu’il avait continué à observer les pratiques du christianisme au Canada, et (iv) que les autorités iraniennes l’avaient cherché à son domicile après qu’il avait quitté l’Iran en utilisant son propre passeport biométrique, étaient, de l’avis de la SAR, suffisantes pour justifier le rejet de l’appel.

[24] Le demandeur plaide que le traitement des éléments de preuve auquel a procédé la SAR, en particulier la lettre mise à jour rédigée par le révérend Laughridge et les captures d’écran de la réunion religieuse virtuelle, était erroné et constitue une erreur susceptible de contrôle. Il affirme que la preuve documentaire démontre que sa foi est sincère. À la fois dans ses observations écrites et de vive voix à l’audience, il a affirmé que la preuve déposée était probante et que la SAR aurait dû y accorder plus de poids lors de l’examen de la question de la sincérité de sa foi.

[25] Le défendeur affirme que les arguments du demandeur sont en fait une invitation à apprécier à nouveau la preuve dont disposait la SAR. Je partage l’avis du défendeur. À moins de circonstances exceptionnelles, le rôle de la Cour siégeant dans le cadre d’un contrôle judiciaire n’est pas d’apprécier à nouveau la preuve examinée par la SAR (Vavilov au para 125).

[26] Je conclus que la SAR a effectué une analyse minutieuse de la preuve du demandeur et qu’elle a pris en considération les arguments avancés par ce dernier dans le cadre de l’appel et qu’elle y a répondu, ce dont témoignent ses motifs. Compte tenu de ce qui précède, la SAR pouvait, après examen de la preuve dont elle disposait, accorder peu de poids à celle‑ci et, en fin de compte, conclure que le demandeur n’avait pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était un chrétien sincère, ou conclure que la preuve produite ne l’emportait pas sur sa conclusion concernant la crédibilité du demandeur. Le caractère raisonnable d’une décision peut être compromis si le décideur s’est fondamentalement mépris sur la preuve qui lui a été soumise ou n’en a pas tenu compte (Vavilov au para 126), mais ce n’est pas le cas dans l’affaire dont je suis saisie.

[27] Le demandeur, s’appuyant sur les paragraphes 41 à 45 de la décision Asri c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 303 [Asri], affirme que la SAR a analysé la question de la sincérité de sa foi de façon problématique et erronée. Dans le cadre de l’affaire Asri, le témoignage d’un pasteur de l’église St. Luke à Toronto a été fourni relativement à l’engagement religieux du demandeur. La SAR, toujours dans le cadre de l’affaire Asri, a accordé peu de poids à la lettre du pasteur, à son témoignage et au baptistaire. La Cour a jugé que les conclusions de la SAR concernant la sincérité de la foi du demandeur étaient déraisonnables.

[28] Dans la décision Sadeghi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 604 [Sadeghi], qui portait sur une autre affaire concernant des citoyens iraniens qui disaient craindre d’être persécutés en raison de leur conversion au christianisme, la Cour a conclu que la SAR avait indûment écarté la lettre et le témoignage d’un pasteur. Au paragraphe 32 de la décision Sadeghi, la Cour a affirmé ce qui suit : « Les demandeurs ont fourni des observations détaillées, faisant référence aux motifs de la SPR et à des segments de l’enregistrement audio du témoignage du pasteur, expliquant pourquoi ils estimaient que ce dernier avait fourni une preuve authentique, franche et corroborant leur témoignage ainsi que la pratique de leur foi au Canada. » La Cour, dans la décision Sadeghi, a conclu que la SAR n’avait pas abordé ce point clé, c’est‑à‑dire les raisons pour lesquelles le pasteur croyait que les demandeurs s’étaient sincèrement convertis au christianisme.

[29] Dans la décision Hassankiadeh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1284, que le demandeur invoque aussi, la Cour a conclu qu’il était déraisonnable de la part de l’agent, dans le contexte d’un examen des risques avant renvoi, de simplement rejeter sans y accorder le moindre poids l’affidavit d’un pasteur que la SPR, après avoir entendu son témoignage, avait jugé crédible.

[30] À mon avis, les affaires susmentionnées diffèrent. Dans les affaires Sadeghi, Hassankiadeh et Asri, le pasteur concerné avait fourni, en plus de sa lettre et du baptistaire, un témoignage sous serment que le décideur administratif a rejeté ou écarté, ou auquel il n’a accordé aucun poids. En l’espèce, le pasteur de l’église luthérienne St. Luke n’a pas fourni de témoignage sous serment, et tant la SPR que la SAR ont jugé que ses lettres avaient un caractère général et manquaient de détails. La SAR a pris en considération la preuve, puis elle a souligné le fait que la SPR avait conclu qu’un poids moindre devait être accordé aux documents, parce qu’ils manquaient de détails et que le pasteur n’avait pas comparu comme témoin. Le demandeur n’a pas démontré que l’analyse de la SAR n’était pas transparente, intelligible et justifiée.

C. L’analyse et la décision de la SAR concernant la demande d’asile sur place présentée par le demandeur ainsi que son analyse connexe au regard de l’article 97 de la LIPR sont‑elles entachées d’une erreur

[31] La SAR a considéré que le manque de crédibilité du demandeur était déterminant. La SAR a conclu que le demandeur ne s’était pas sincèrement converti au christianisme, et il s’ensuit que la preuve ne démontre pas que le demandeur continuerait d’observer les pratiques du christianisme en Iran s’il devait y retourner. La SAR a examiné si le baptême du demandeur, même insincère, l’exposait à un risque en Iran. La SAR a conclu que le demandeur n’avait pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, que les autorités iraniennes seraient informées de son baptême et de sa fréquentation d’une église au Canada.

[32] Compte tenu du dossier de la preuve dont disposait la SAR, je conclus que l’évaluation de la demande d’asile sur place qu’elle a effectuée était raisonnable. Lors de l’audience, le demandeur s’est appuyé sur des documents contenus dans le cartable national de documentation portant sur des chrétiens en Iran, dont des chrétiens iraniens qui y sont retournés après avoir été baptisés à l’étranger. Ces documents étaient à la disposition de la SAR, qui a pris en compte la situation du demandeur. En définitive, la SAR a rejeté la demande d’asile sur place, et le demandeur n’a pas démontré qu’une erreur susceptible de contrôle avait été commise.

VI. Question certifiée

[33] Lors de l’audience, à la question de savoir s’il y avait des questions à certifier, les avocats des deux parties ont répondu qu’il n’y en avait aucune. Je conviens que l’affaire n’en soulève pas.

VII. Conclusion

[34] Pour les motifs qui précèdent, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑4505‑20

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire du demandeur est rejetée;

  2. Il n’y a aucune question à certifier;

  3. L’intitulé est modifié de façon à ce que le nom du demandeur soit Khosro TORKIAN VELASHANI.

« Vanessa Rochester »

Juge

Traduction certifiée conforme

M. Deslippes


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑4505‑20

INTITULÉ :

KHOSRO TORKIAN VELASHANI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 14 septembre 2021

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE ROCHESTER

DATE DES MOTIFS :

LE 22 octobre 2021

COMPARUTIONS :

Mme Aparna Das

POUR LE DEMANDEUR

Alex C. Kam

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Cintosun & Associates

North York (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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