Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20211008


Dossier : IMM-2143-20

Référence : 2021 CF 1054

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 8 octobre 2021

En présence de monsieur le juge Diner

ENTRE :

HONG NHAN TRAN

demandeur

et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. APERÇU

[1] Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de la décision par laquelle un agent des visas fédéral (l’agent) a rejeté sa demande de résidence permanente après avoir conclu qu’il était peu probable qu’il s’établisse au Nouveau‑Brunswick. Le demandeur conteste le caractère raisonnable de cette décision principalement pour des raisons d’interprétation législative. Je conclus que l’agent a interprété et appliqué la loi de façon raisonnable et que rien ne justifie l’intervention de la Cour.

II. CONTEXTE ET DÉCISION CONTRÔLÉE

[2] Le demandeur est un citoyen du Vietnam de 43 ans. Il est marié et il a deux enfants âgés de 10 et 7 ans. Il a travaillé à titre de gestionnaire de projets et de gestionnaire de groupe dans différentes sociétés d’ingénierie après avoir terminé son baccalauréat en génie électrique industriel en 2001.

[3] En mars 2018, la demande qu’il avait présentée au titre du Programme des candidats du Nouveau-Brunswick, volet immigration des entrepreneurs, a été approuvée. Tel que requis, il a ensuite envoyé sa demande aux fins d’approbation finale au bureau des visas. Il a été convoqué à une entrevue.

[4] L’entrevue et la correspondance qui a suivi sont décrites dans les notes que l’agent a versées dans le Système mondial de gestion des cas (SMGC).

[5] Pendant l’entrevue, l’agent s’est dit préoccupé par le fait que rien dans les antécédents du demandeur ne permettait de croire qu’il possédait l’expérience ou les compétences nécessaires pour établir une ferme biologique au Canada ou qu’il souhaitait le faire. Le demandeur a répondu que les parents de sa femme et lui étaient agriculteurs et il a expliqué qu’il avait participé à des projets de technologie de production agricole. L’agent a aussi interrogé le demandeur sur la façon dont sa participation à des projets d’ingénierie de grande envergure le préparerait à exploiter une ferme biologique. Il lui a demandé s’il avait visité des fermes en vue d’un achat pendant qu’il était au Nouveau‑Brunswick et s’il avait fait faire des analyses de sol ou prévu le faire.

[6] Le demandeur a répondu que sa femme et lui avaient séjourné au Nouveau‑Brunswick pendant une semaine l’année dernière, mais qu’ils n’avaient pas visité de ferme. L’agent lui a demandé d’expliquer pourquoi ils n’y étaient jamais retournés, ce à quoi il a répondu qu’ils en avaient l’intention, mais que les circonstances, notamment le fait que leur avocat leur avait déconseillé de présenter une demande de visa temporaire pendant qu’ils attendaient la réponse à leur demande de visa de résident permanent, les en avaient empêchés. Le demandeur a produit des photos prises dans une épicerie au Nouveau‑Brunswick afin de démontrer qu’il avait réalisé une étude de marché sur le prix du bœuf au Canada et sur le prix des produits biologiques. Il a ajouté qu’il était impossible de faire analyser les sols avant d’avoir obtenu un visa.

[7] L’agent a indiqué que, selon lui, les explications du demandeur n’étaient pas crédibles, que sa demande était en instance depuis plus de deux ans, et que rien ne l’empêchait de revenir dans la province. Si le demandeur et sa femme n’étaient pas retournés au Nouveau‑Brunswick, c’était parce qu’ils ne cherchaient pas réellement à s’y établir. L’agent a également écrit que le demandeur n’avait pas démontré qu’il avait fait une véritable étude de marché ni qu’il possédait des connaissances techniques (en analyse des sols).

[8] Finalement, l’agent n’était pas convaincu que le demandeur avait vraiment l’intention de réaliser son projet de démarrer une ferme biologique au Nouveau‑Brunswick ou de vivre dans la province, comme il l’a écrit dans les notes qu’il a versées dans le SMGC :

[traduction] J’aimerais vous aviser que le programme en vertu duquel vous avez présenté votre demande est souvent utilisé par des fraudeurs. Des personnes disent vouloir démarrer une entreprise dans la province participante afin d’obtenir leur statut de résident permanent au Canada, mais elles ne donnent jamais suite à leur projet, ou encore, elles ne s’établissent jamais dans cette province. Je constate que votre demande possède les mêmes caractéristiques que ces demandes frauduleuses dans lesquelles les demandeurs déclarent vouloir démarrer une entreprise dans un domaine vaguement lié à leur travail actuel ou à une occupation antérieure pour pouvoir dire qu’ils ont un lien avec le domaine ou que le domaine les intéresse. J’ai de la difficulté à croire, étant donné vos antécédents, vos études, votre expérience professionnelle et votre statut social au Vietnam, ainsi que la façon dont vous avez parlé de vos projets aujourd’hui et des efforts que vous y avez mis, que vous avez l’intention de donner suite à votre projet de démarrer une ferme biologique au Nouveau-Brunswick. Voulez‑vous répondre avant que nous arrêtions? » (DCT, 12).

[9] En réponse, le demandeur a confirmé qu’il avait l’intention d’exploiter une ferme au Nouveau‑Brunswick, a rappelé que la famille de sa femme et lui avaient déjà travaillé dans le domaine agricole, a fait remarquer qu’il avait de l’expérience non seulement dans la gestion de projets d’ingénierie, mais également dans la vente et la commercialisation de produits, et a expliqué qu’il avait géré certains projets de technologie agricole et qu’il espérait mettre en œuvre une nouvelle technologie agricole au Nouveau‑Brunswick.

[10] N’étant toujours pas convaincu, l’agent a envoyé une lettre de refus préalable aux autorités de l’immigration du Nouveau‑Brunswick, dans laquelle il les informait de son intention de rejeter la demande de visa du demandeur parce que, selon lui, le demandeur ne cherchait pas à s’établir au Nouveau‑Brunswick. Il leur a expliqué en détail la source de ses préoccupations, leur faisant notamment part de la conversation, reproduite ci‑dessus, qu’il avait eue avec le demandeur lors de l’entrevue. Il a conclu ce qui suit :

[traduction] De façon générale, à la lumière des antécédents des demandeurs, de leurs études, de leur expérience professionnelle, de leur statut social au Vietnam, de leurs déclarations en entrevue, ainsi que des efforts et préparatifs qu’ils ont faits à ce jour, je ne puis conclure qu’ils comptent vraiment donner suite à leur projet de démarrer une ferme biologique au Nouveau‑Brunswick. Par conséquent, je ne suis pas convaincu qu’ils cherchent réellement à s’établir au Nouveau-Brunswick.
(DCT, 5)

[11] Les responsables du Programme des candidats du Nouveau-Brunswick ont répondu à l’agent qu’ils se ralliaient à son opinion :

[traduction] Nous vous remercions du courriel détaillé que vous nous avez envoyé au sujet de ce candidat. Nous avons déjà vu des entrepreneurs de différents milieux démarrer au Nouveau‑Brunswick des entreprises dans un secteur dans lequel ils n’avaient pas d’expérience. Certains travaillent dans l’industrie des produits de la mer et, récemment, j’ai travaillé avec un demandeur qui cherchait à établir une ferme. Le demandeur en question s’y connaissait bien en analyse des sols et nous avait, de façon proactive, fourni les résultats des analyses qu’il avait réalisées. Toutefois, j’ai aussi rencontré des personnes qui ne semblaient pas avoir fait d’étude de marché adéquate et qui avaient l’air d’« ajuster » leurs réponses à mesure que l’entrevue progressait. À la lumière des renseignements contenus dans votre courriel, j’appuie la décision de rejeter la demande de ce demandeur.
(DCT, 3)

[12] L’agent a rejeté la demande, estimant que le demandeur ne cherchait pas à s’établir dans la province de désignation, en contravention de l’alinéa 87(2)b) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [le Règlement].

III. QUESTIONS EN LITIGE ET ANALYSE

[13] Bien que le demandeur ait d’abord soulevé d’autres moyens, l’essentiel de ses observations a porté sur le caractère raisonnable de la décision de rejeter sa demande, qui était fondée sur son intention de s’établir dans la province. Il a contesté l’interprétation donnée à l’alinéa 87(2)b) du Règlement, avançant qu’il n’existe qu’une seule interprétation raisonnable des exigences procédurales prévues par cette disposition, soit que la décision de l’agent doit être confirmée par un autre agent.

[14] Plus précisément, le demandeur fait valoir que, parce que l’agent n’a pas obtenu confirmation auprès d’un autre agent que le demandeur ne cherchait pas à s’établir au Nouveau‑Brunswick, sa décision est déraisonnable. Pour étayer sa position, il avance des arguments d’interprétation législative concernant la « procédure réglementaire prescrite » par les paragraphes 87(3) et (4) du Règlement que l’agent n’aurait pas, selon lui, suivie.

[15] De plus, le demandeur soutient que la décision de l’agent était déraisonnable parce que celui-ci a fait abstraction de la clause 4.14 de l’annexe A de l’Accord Canada-Nouveau-Brunswick sur l’immigration [l’Accord], qui lui imposait de respecter la décision des autorités provinciales, car il est à présumer qu’elles se sont assurées que le candidat apportera un avantage économique au Nouveau‑Brunswick et qu’il répond aux critères du Programme des candidats de cette province.

A. Norme de contrôle

[16] Les parties conviennent que la norme de contrôle applicable à la décision d’un agent des visas sur une demande de résidence permanente présentée au titre du programme des candidats des provinces est celle de la décision raisonnable. Rien dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] ne justifie de s’écarter de la norme de la décision raisonnable appliquée dans la jurisprudence : Tran c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 721 [Tran] aux para 16, 18; Bano c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 568 [Bano] au para 13.

[17] Une cour qui procède au contrôle selon la norme de la décision raisonnable vérifie si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci : Vavilov, au para 99. Le raisonnement suivi tout comme le résultat obtenu doivent être raisonnables : Vavilov, au para 83.

[18] En l’espèce, le demandeur se concentre sur les arguments d’interprétation législative qui étayent sa position. Les cours de révision ont l’habitude de faire leurs propres analyses indépendantes et de tirer leurs propres conclusions sur les questions d’interprétation de la loi.

[19] Or, les questions d’interprétation législative sont traitées différemment dans un contrôle selon la norme de la décision raisonnable; la cour de révision ne procède pas à une analyse indépendante afin de déterminer ce qu’aurait été la décision correcte. Elle examine plutôt la décision administrative dans son ensemble, y compris les motifs fournis par le décideur et le résultat obtenu, et, lorsque le contrôle porte sur une question d’interprétation de la loi, elle tient pour acquis que le décideur a effectué cet exercice conformément au « principe moderne » d’interprétation des lois : Vavilov, aux para 115-118; Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 RCS 27 [Rizzo] au para 21.

[20] Le décideur administratif n’est pas tenu de procéder à une interprétation formaliste de la disposition contestée. Sa tâche est d’interpréter la disposition d’une manière qui cadre avec le texte, le contexte et l’objet. Tout précédent sur la même disposition aura pour effet de circonscrire l’éventail des issues raisonnables, et le décideur qui déroge à un précédent contraignant doit justifier sa décision : Vavilov, aux para 112, 119-121.

B. Dispositions législatives et réglementaires pertinentes

[21] Voir l’annexe A ci-dessous pour les dispositions législatives et réglementaires pertinentes.

C. Analyse

(1) Interprétation législative

[22] Le demandeur affirme qu’en ne demandant pas à un autre agent de confirmer sa conclusion que le demandeur ne cherchait pas à s’établir au Nouveau‑Brunswick, l’agent, de façon déraisonnable, n’a pas suivi la procédure réglementaire « prescrite » et a fait abstraction d’un mécanisme de contrôle prévu par la loi habilitante.

[23] À l’appui de son argument, le demandeur propose sa propre interprétation de l’article 87 du Règlement. Selon lui, il n’existe qu’une seule interprétation claire de l’article 87 : la décision sur l’établissement économique d’un étranger qu’un agent peut substituer, après consultation auprès de la province et confirmation par un autre agent, conformément aux paragraphes 87(3) et 87(4) du Règlement, s’entend notamment de l’appréciation qu’il fait de l’intention qu’a l’étranger de s’établir dans la province qui a délivré le certificat de désignation au titre de l’alinéa 87(2)b).

[24] Le demandeur tire cette conclusion parce qu’il considère essentiellement que l’intention (de s’établir) est un élément composite de l’établissement économique visé au paragraphe 87(1). Il s’ensuit que, puisque l’agent examinateur n’était pas convaincu de son intention de s’établir, il avait l’obligation d’obtenir la confirmation exigée par le paragraphe 87(4) du Règlement. Autrement dit, suivant l’interprétation que propose le demandeur, sur le fondement d’une analyse textuelle et contextuelle, l’appréciation de la capacité d’une personne à réussir son établissement économique doit tenir compte de facteurs non économiques, notamment l’intention de s’établir.

[25] Afin d’étayer cette interprétation, le demandeur présente une analyse détaillée des objectifs et des dispositions connexes de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [Loi], de l’Accord, d‘extraits du Guide opérationnel – Traitement des demandes à l’étranger 7-B – Candidats des provinces (OP-7) d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, ainsi que du Résumé de l’étude d’impact de la réglementation (Gazette du Canada, DORS/2002-227, partie II, édition spéciale, vol. 136, no 9, aux pp 234 à 236) publié avec le Règlement. Selon lui, toutes ces sources démontrent que le Canada joue un rôle de soutien dans le programme des candidats des provinces et qu’il convient de reconnaître le rôle principal que joue Nouveau‑Brunswick dans ce programme. Le demandeur invite la Cour à faire sienne l’interprétation qu’il propose et, ce faisant, à conclure que l’interprétation de l’agent est erronée.

[26] La méthode d’interprétation proposée entre en conflit avec les indications données par la Cour suprême dans l’arrêt Vavilov, et ce, à deux égards. Premièrement, et comme je l’ai souligné précédemment, la Cour ne doit pas se livrer à un nouvel exercice d’interprétation de la loi, puis comparer la décision de l’agent au résultat auquel elle arrive, puisque ce faire équivaudrait à assujettir la décision de l’agent à la norme de la décision correcte : Canada (Citoyenneté et Immigration) c Mason, 2021 CAF 156 au para 12; Delios c Canada (Procureur général), 2015 CAF 117 au para 28.

[27] Plutôt, et contrairement à la démarche proposée par le demandeur, la Cour doit examiner la décision administrative dans son ensemble et, ce faisant, elle doit tenir pour acquis que l’agent chargé d’interpréter la loi l’a fait en respectant le principe moderne d’interprétation : Vavilov, aux para 116-118. Voici le principe moderne d’interprétation des lois proposé par Driedger :

[traduction] « [I]l faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur. »
Rizzo, au para 21

[28] Ainsi, il incombe au décideur administratif d’interpréter la disposition contestée d’une manière qui cadre avec le texte, le contexte et l’objet du Règlement et de discerner le sens de la disposition et l’intention du législateur. L’agent n’est pas tenu de procéder à une interprétation formaliste de la loi, ni de fournir des motifs écrits qui s’apparentent à ceux d’une cour de justice : Vavilov, aux para 119-121.

[29] Un examen global de la décision de l’agent, y compris les notes détaillées du SMGC, révèle que l’agent n’a pas fondé sa décision sur la question de savoir si le demandeur possédait la capacité nécessaire pour réussir son établissement économique au Canada. On voit plutôt que l’agent n’était pas convaincu que le demandeur avait l’intention de s’établir au Nouveau‑Brunswick. Il ressort clairement de la lettre de refus et de la transcription de l’entrevue que l’agent n’était pas sûr que le demandeur entendait donner suite à son projet de s’établir dans la province, le seul critère prévu à l’alinéa 87(2)b).

[30] J’arrive à la même conclusion si je considère le soutien que la province a apporté à la décision de l’agent. Dans la lettre qu’il a fait parvenir aux autorités du Nouveau‑Brunswick, l’agent explique clairement qu’il doute de l’intention du demandeur et renvoie à cet égard à l’alinéa 87(2)b). La réponse écrite que les autorités lui ont envoyée montre clairement les raisons pour lesquelles, après avoir examiné l’explication donnée par l’agent fédéral, elles ont changé d’opinion sur l’intention du demandeur de s’établir au Nouveau-Brunswick et non sur sa capacité à réussir son établissement économique.

[31] Compte tenu des raisons ainsi données, que j’estime claires, et du raisonnement qui les sous‑tend, je ne suis pas d’accord pour dire que l’agent a confondu l’intention de s’établir prévue au paragraphe 87(2) et l’établissement économique dont il est question aux paragraphes 87(1), (3) et (4). Si tel avait été le cas, cette erreur aurait pu faire l’objet d’un contrôle, comme elle l’a été dans d’autres circonstances (voir, par exemple, la décision récente Thuy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 522 [Thuy]).

[32] Puisque l’agent a plutôt tiré ses conclusions en se fondant exclusivement sur le critère prévu au paragraphe 87(2), son interprétation, selon laquelle il n’avait pas besoin de faire confirmer sa décision par un autre agent des visas, est entièrement justifiée au regard de la loi. J’estime que cette interprétation du libellé de la disposition est raisonnable et respecte la cohérence interne de la loi.

[33] Non seulement la façon dont l’agent a interprété le Règlement me semble raisonnable, mais (et c’est là le deuxième problème avec l’interprétation proposée par le demandeur) la Cour a récemment examiné cette interprétation du paragraphe 87 et elle y a souscrit trois fois, dont deux dans les trois derniers mois : Ngo v Canada (Citizenship and Immigration), 2021 FC 665 [Ngo] aux para 40-50; Tran, aux para 36-49; voir aussi Ransanz c Canada (Sécurité publique et de la Protection civile), 2015 CF 1109 [Ransanz] au para 25.

[34] Dans la décision Tran, le juge Ahmed était saisi d’une demande remarquablement semblable, sur le plan des faits et du fond : celle d’une ressortissante vietnamienne désignée en vertu du Programme des candidats du Nouveau-Brunswick qui s’était vu refuser sa demande de résidence permanente au motif que le décideur n’était pas convaincu qu’elle cherchait à s’établir dans la province de désignation. Comme dans la présente affaire, l’agent n’avait pas consulté un autre agent avant de rendre sa décision, que la demanderesse a contestée, elle aussi, en vertu du paragraphe 87(4) du Règlement.

[35] Le juge Ahmed a estimé que la conclusion de l’agent constituait une interprétation justifiée de l’article 87 du Règlement, appuyée par la jurisprudence, selon laquelle l’intention d’un étranger de s’établir dans une province de désignation est distincte de sa capacité à réussir son établissement économique : Tran, aux para 40-41; Kikeshian c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 658 [Kikeshian] au para 17.

[36] Le juge Ahmed a également cité la décision Ransanz, dans laquelle le juge Martineau a conclu que les paragraphes 87(3) et 87(4) étaient analogues aux dispositions en litige en l’espèce, et s’est dit d’avis que les obligations de consulter et d’obtenir confirmation ne s’appliquaient pas à l’appréciation de l’intention qu’a le demandeur de s’établir dans la province de désignation au titre de l’alinéa 87(2)b), qui est un critère distinct de celui relatif au certificat de désignation provincial prévu à l’alinéa 87(2)a). Au paragraphe 42 de la décision Tran, le juge Ahmed cite la partie pertinente de la décision Ransanz :

[25] Le paragraphe 87(3) du Règlement accorde expressément aux fonctionnaires fédéraux le pouvoir discrétionnaire de substituer leur appréciation de la capacité du demandeur à réussir son établissement économique au Canada, pourvu qu’ils consultent le gouvernement qui a délivré le certificat et qu’ils obtiennent confirmation d’un autre agent (paragraphes 87(3) et 87(4)). Cependant, il est crucial que ces obligations de consulter et de confirmer s’appliquent seulement et expressément à la première condition prévue au paragraphe 87(2), à savoir aux considérations relatives à la probabilité que le demandeur ait la capacité à réussir son établissement au Canada, conformément au critère d’obtention du certificat de désignation provincial visé à l’alinéa 87(2)a). L’intention du demandeur de résider dans la province qui lui a délivré le certificat (alinéa 87(2)b)) est une condition distincte, qui est exempte de l’obligation de consulter et de confirmer et qui s’ajoute à la délivrance du certificat de sélection ou à la désignation des candidats des provinces.

[37] Le juge Ahmed a ensuite examiné le libellé du paragraphe 87(3) et a reconnu que, même s’il semblait à première vue englober les deux critères du paragraphe 87(2), comme l’avocat l’a soutenu devant la Cour, il était limité par le fait qu’il ne portait que sur la délivrance d’un certificat de désignation provinciale prévue à l’alinéa 87(2)a) : Tran, au para 46.

[38] Je souscris aux motifs énoncés par le juge Ahmed aux paragraphes 36 à 49 de la décision Tran. Je conclus que, même si une interprétation différente de l’article 87 du Règlement pourrait être raisonnable, une telle possibilité ne rend pas déraisonnable l’interprétation adoptée par l’agent en l’espèce, d’autant plus qu’elle trouve appui dans la jurisprudence. Le demandeur ne s’est pas acquitté du fardeau qui lui incombait.

[39] Le demandeur soutient que les décisions Bano, Sran c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 791, Begum c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 162 [Begum] et Wai c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 780, appuient son interprétation de l’article 87.

[40] Je ne suis pas d’accord. Aucune de ces quatre décisions ne traite directement de la question de savoir si l’intention de s’établir que requiert l’alinéa 87(2)b) est un critère distinct de celui qui exige des provinces qu’elles évaluent la capacité du demandeur à réussir son établissement économique au titre de l’alinéa 87(2)a). Faute d’une telle analyse, les décisions citées permettent seulement d’affirmer que l’établissement économique est basé sur des facteurs économiques et non économiques, et que la décision qui va à l’encontre de celle prise par la province qui a délivré un certificat de désignation sur la foi de ce critère doit être confirmée, ce que personne ne conteste en l’espèce. Aucune des quatre décisions citées n’appuie l’argument voulant que la décision sur l’intention de s’établir prise en vertu de l’alinéa 87(2)b) doive être confirmée par un autre agent lorsqu’un fonctionnaire fédéral examine une demande de résidence permanente.

(2) L’agent n’a pas écarté la présomption de déférence qui s’applique à l’égard des autorités provinciales

[41] Le demandeur fait également valoir que la décision de l’agent est déraisonnable parce qu’il n’a pas tenu compte de la présomption énoncée à la clause 4.14 de l’annexe A de l’Accord, qui dispose :

4.14 Le Canada doit considérer la désignation faite par le Nouveau-Brunswick comme la preuve que la province a exercé sa diligence raisonnable pour s’assurer que le candidat apportera un avantage économique au Nouveau-Brunswick et répond aux critères du Programme des candidats des provinces du Nouveau-Brunswick.

[Non souligné dans l’original.]

 

4.14 Canada shall consider Nouveau-Brunswick's nomination as evidence that Nouveau-Brunswick has carried out its due diligence determining that an applicant will be of economic benefit to Nouveau-Brunswick and has met the requirements of New Brunswick's Provincial Nominee Program.

[42] Le demandeur soutient que, selon le cadre juridique applicable, notamment la disposition ci-dessus, il convient de faire preuve de retenue à l’égard de la conclusion des autorités de la province du Nouveau‑Brunswick, selon laquelle il apportera un avantage économique à la province et répond aux critères du programme des candidats . Comme il n’a pas tenu compte du cadre juridique applicable, l’agent a commis une erreur déraisonnable.

[43] Pour étayer son argument, le demandeur invoque les décisions Hassan c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2019 CF 1096 [Hassan] et Begum. Dans chacune de ces deux affaires, un agent fédéral de l’immigration avait rejeté une demande de résidence permanente parce que l’étranger qui l’avait présentée ne maîtrisait pas suffisamment bien l’anglais pour réussir son établissement économique. Dans les deux cas, l’étranger avait été désigné dans le cadre du programme des candidats de la province concernée.

[44] Le demandeur prétend qu’en ne tenant pas compte, comme dans les décisions invoquées, de l’évaluation par la province du Nouveau‑Brunswick de son admissibilité, l’agent n’a pas fait preuve de la retenue que commandent les décisions prises par la province en matière d’admissibilité et de désignation.

[45] À mon avis, l’agent n’a pas commis une telle erreur : l’agent n’a pas contesté l’évaluation par le Nouveau-Brunswick de l’admissibilité du demandeur au programme des candidats. Il a plutôt conclu que le demandeur n’avait pas vraiment l’intention de s’établir dans la province. Je répète que l’agent a expliqué son point de vue aux autorités provinciales. Celles‑ci ont souscrit à cette opinion, au vu de l’explication logique et fondée sur la preuve donnée par l’agent quant à cet autre motif de résidence, et sont revenues sur leur position initiale.

[46] L’argument du demandeur ne tient pas parce qu’il est fondé sur la même interprétation de l’article 87 du Règlement qu’il invoque ci-dessus, selon laquelle l’intention de s’établir n’est pas un critère distinct de la capacité d’un étranger à réussir son établissement économique, mais plutôt un élément de ce critère. J’ai déjà confirmé qu’il était raisonnable pour l’agent d’avoir interprété les concepts de l’établissement économique et de l’intention de s’établir de façon distincte, plutôt que d’appliquer une démarche globale comme le demandeur le préconise. Dans la décision Tran, le juge Ahmed a examiné le même argument concernant l’application du principe de retenue à l’égard d’une décision prise par la province du Nouveau‑Brunswick (au para 29) :

[29] Je conclus que les décisions Hassan et Begum se distinguent toutes deux de la présente affaire. Ces décisions permettent d’affirmer que si un étranger est désigné par une province au titre du PCP, il est présumé que cet étranger à la capacité à réussir son établissement économique au Canada (Hassan, aux para 20-24; Begum, aux para 26-28; voir aussi Bano, au para 19). En l’espèce, l’agent ne conteste pas que la demanderesse a la capacité à réussir son établissement économique au Canada. Il conclut plutôt qu’elle ne cherche pas à s’établir au Nouveau‑Brunswick. Comme je l’explique en détail ci-dessous, je ne suis pas convaincu par l’argument de la demanderesse selon lequel ces décisions sont mutuellement inclusives.

[47] En fait, le concept en question peut inclure l’autre, mais pas nécessairement. Bien que la loi ne définisse pas le terme « établissement économique », une personne ou une entité peut réussir son établissement économique sans être physiquement présente. Ainsi, une personne pourrait décider de ne pas s’établir à l’endroit où se trouve son entreprise. Nombreux sont ceux qui exploitent des entreprises à distance, souvent avec l’aide d’une équipe de gestion et des employés sur place, et la technologie a beaucoup simplifié la réalisation à distance d’un grand nombre d’activités.

[48] La présence physique est un concept complètement différent, et diverses lois définissent l’exigence d’une présence effective en fonction de leurs objectifs (y compris les lois en matière d’immigration), habituellement en établissant un nombre de jours à passer dans un ressort donné.

[49] Ainsi, une personne pourrait être capable de réussir son établissement économique, mais ne pas avoir l’intention d’être physiquement présente pour le faire. Si ces concepts peuvent être complémentaires ou mutuellement inclusifs dans certains cas, il n’est certainement pas nécessaire qu’ils le soient dans tous les cas.

[50] L’intention de s’établir, après tout, est une notion très subjective, et l’évaluation d’une telle intention peut tenir compte de tous les indices, y compris le comportement antérieur, les circonstances présentes et les plans futurs : Dhaliwal c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 131 au para 31; voir également Ngo, aux para 51-53; Tran, au para 33.

[51] Le demandeur avance qu’en traitant les alinéas 87(2)a) et 87(2)b) distinctement, les fonctionnaires fédéraux disposeraient d’une échappatoire par laquelle ils pourraient rejeter arbitrairement une demande sous le couvert d’une absence d’intention de s’établir.

[52] Je ne suis pas d’accord. Toute décision doit posséder les caractéristiques d’une décision raisonnable pour pouvoir résister à un contrôle judiciaire. Dans le cas où la notion de l’intention de s’établir serait dissimulée sous celle de l’établissement économique, la décision pourrait bien être renvoyée pour nouvel examen.

[53] C’est ce qui est arrivé récemment dans l’affaire Thuy. Dans cette affaire, le raisonnement sur lequel reposait la décision de l’agent des visas de rejeter la demande de résidence permanente présentée au titre du programme des candidats des provinces, apparemment sur le fondement de l’intention de s’établir, reposait en fait entièrement sur une évaluation insuffisante de la capacité de l’étranger à réussir son établissement économique au Canada. Ce raisonnement lacunaire, qui relevait de la tautologie et présentait des erreurs de logique, a entaché la décision et l’a rendue déraisonnable.

[54] Par contraste, l’agent a, en l’espèce, expliqué sa conclusion en détail dans ses motifs, et il a tenu compte des [traduction] « antécédents des demandeurs, de leurs études, de leur expérience professionnelle, de leur statut social au Vietnam, de leurs déclarations en entrevue, ainsi que des efforts et préparatifs qu’ils ont faits à ce jour » (notes du SMGC, DCT, 5). Ses motifs ne laissent voir aucune confusion, et sa décision n’est pas fondée sur des questions fondamentalement liées à l’établissement économique comme c’était le cas dans les autres décisions mentionnées ci-dessus.

[55] Je souligne en terminant que le demandeur n’a pas expressément contesté le caractère raisonnable de la conclusion tirée par l’agent, selon laquelle il ne cherchait pas à s’établir au Nouveau‑Brunswick, mais il a plutôt simplement allégué que l’agent n’avait pas respecté la procédure en ne demandant pas à un autre agent des visas de confirmer sa décision. En bref, je conviens qu’aucun argument remettant en cause le bien‑fondé de la conclusion tirée par l’agent ne saurait être retenu, étant donné les motifs que celui‑ci a donnés et la transparence dont il a fait preuve en les expliquant à la province de désignation et en obtenant de fait son assentiment.

IV. DEMANDE DE CERTIFICATION D’UNE QUESTION

[56] À l’audience, le demandeur a proposé que la même question que celle soulevée dans la décision Tran (au para 59) soit certifiée : « [l]a décision d’un agent d’immigration fédéral de rejeter une demande de résidence permanente au titre de l’alinéa 87(2)b) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés fait elle en sorte qu’il est nécessaire d’obtenir la confirmation d’un autre agent comme le prévoit le paragraphe 87(4)? ». Le défendeur s’oppose à la certification de cette question au motif qu’elle a été présentée en retard et que la Cour l’a déjà rejetée (dans la décision Tran).

[57] Je reconnais que les avocats doivent tenter de soumettre toutes les questions à certifier conformément à la politique de la Cour, qui figure dans les Lignes directrices sur la pratique, publiées le 5 novembre 2018 sur la page Avis du site Web de la Cour fédérale :

On s’attend à ce que les parties formulent des observations écrites au sujet de l’alinéa 74a) dans leurs observations écrites ou oralement à l’audience sur le fond. Si une partie entend proposer une question à certifier, la partie opposée doit en être informée au moins cinq (5) jours avant l’audience, dans le but de s’entendre sur le libellé de la question proposée.

[58] Bien que l’avocat n’ait pas soumis la question avant que la Cour lui demande à l’audience s’il avait des questions à proposer aux fins de certifications, ce qui a mis l’autre partie dans une position difficile, je ne la rejetterai pas même si elle a été présentée en retard.

[59] Je la rejetterai plutôt parce qu’elle ne satisfait pas au critère applicable en matière de certification, pour les raisons énoncées dans la décision Tran, dans laquelle la Cour est arrivée à la même conclusion (aux para 60-61).

V. CONCLUSION

[60] Pour les motifs exposés ci-dessus, je conclus que la décision de l’agent était raisonnable et je rejette la demande de contrôle judiciaire.


JUGEMENT dans le dossier IMM-2143-20

LA COUR STATUE :

  1. La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Il n’y a aucune question à certifier.

  3. Aucuns dépens ne seront adjugés.

« Alan S. Diner »

Juge

Traduction certifiée conforme

Édith Malo


Annexe « A » – Dispositions législatives et réglementaires pertinentes

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27

12(2) Immigration économique

La sélection des étrangers de la catégorie « immigration économique » se fait en fonction de leur capacité à réussir leur établissement économique au Canada.

12(2) Economic immigration

A foreign national may be selected as a member of the economic class on the basis of their ability to become economically established in Canada

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227

87 (1) Pour l’application du paragraphe 12(2) de la Loi, la catégorie des candidats des provinces est une catégorie réglementaire de personnes qui peuvent devenir résidents permanents du fait de leur capacité à réussir leur établissement économique au Canada.

Qualité

(2) Fait partie de la catégorie des candidats des provinces l’étranger qui satisfait aux critères suivants :

a) sous réserve du paragraphe (5), il est visé par un certificat de désignation délivré par le gouvernement provincial concerné conformément à l’accord concernant les candidats des provinces que la province en cause a conclu avec le ministre;

b) il cherche à s’établir dans la province qui a délivré le certificat de désignation.

Substitution d’appréciation

(3) Si le fait que l’étranger est visé par le certificat de désignation mentionné à l’alinéa (2)a) n’est pas un indicateur suffisant de l’aptitude à réussir son établissement économique au Canada, l’agent peut, après consultation auprès du gouvernement qui a délivré le certificat, substituer son appréciation aux critères prévus au paragraphe (2).

Confirmation

(4) Toute décision de l’agent au titre du paragraphe (3) doit être confirmée par un autre agent.

87 (1) For the purposes of subsection 12(2) of the Act, the provincial nominee class is hereby prescribed as a class of persons who may become permanent residents on the basis of their ability to become economically established in Canada.

Member of the class

(2) A foreign national is a member of the provincial nominee class if

(a) subject to subsection (5), they are named in a nomination certificate issued by the government of a province under a provincial nomination agreement between that province and the Minister; and

(b) they intend to reside in the province that has nominated them.

Substitution of evaluation

(3) If the fact that the foreign national is named in a certificate referred to in paragraph (2)(a) is not a sufficient indicator of whether they may become economically established in Canada and an officer has consulted the government that issued the certificate, the officer may substitute for the criteria set out in subsection (2) their evaluation of the likelihood of the ability of the foreign national to become economically established in Canada.

Concurrence

(4) An evaluation made under subsection (3) requires the concurrence of a second officer.

Annexe A de l’Accord Canada-Nouveau-Brunswick sur l’immigration

4.14 Le Canada doit considérer la désignation faite par le Nouveau-Brunswick comme la preuve que la province a exercé sa diligence raisonnable pour s’assurer que le candidat apportera un avantage économique au Nouveau-Brunswick et répond aux critères du Programme des candidats des provinces du Nouveau-Brunswick.

4.14 Canada shall consider Nouveau-Brunswick's nomination as evidence that Nouveau-Brunswick has carried out its due diligence determining that an applicant will be of economic benefit to Nouveau-Brunswick and has met the requirements of Nouveau-Brunswick's Programme des candidats des provinces.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2143-20

 

INTITULÉ :

HONG NHAN TRAN c MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

St. John's (TERRE-NEUVE-ET-Labrador

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 9 SeptembRE 2021

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

LE JUGE DINER

 

DATE DES MOTIFS :

LE 8 OctobrE 2021

 

COMPARUTIONS :

Chera-Lee Gomez

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Amy Smeltzer

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

McInnes Cooper

Avocats

Charlottetown (Île‑du‑Prince‑Édouard)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Procureur général du Canada

Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.