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Date : 20211014


Dossier : IMM‑5134‑20

Référence : 2021 CF 1069

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 14 octobre 2021

En présence de madame la juge Simpson

ENTRE :

TOLANI OMOLABAKE FASOYIN

TOLUWALASE ANJOLAOLUWA FASOYIN

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

(Rendus oralement à l’audience par téléconférence

à Ottawa (Ontario), le 27 septembre 2021)

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par la Section d’appel des réfugiés [la SAR], qui a confirmé le rejet par la Section de la protection des réfugiés [la SPR] de la demande d’asile de Tolani Omolabake Fasoyin, la demanderesse principale, et de son fils, le demandeur mineur, au motif qu’ils avaient une possibilité de refuge intérieur [PRI] viable à Port Harcourt, au Nigéria.

[2] La demanderesse principale et son fils sont citoyens du Nigéria. L’époux de la demanderesse principale a aussi la nationalité nigériane. Il est médecin et travaille à Lagos. La demande d’asile des demandeurs était fondée sur la crainte que la belle‑famille de la demanderesse principale, en particulier sa belle‑mère, s’en prenne au demandeur mineur.

[3] Après le décès du grand‑père du demandeur mineur, ce dernier a été choisi pour devenir le prochain grand prêtre. Bien que la demanderesse principale et son époux se soient opposés à la nomination de leur fils, les parents de l’époux ont procédé à la première cérémonie d’initiation sans le consentement des parents du demandeur mineur. À l’époque, le demandeur mineur était âgé de 12 ans. Aucune agression n’a été commise durant cette cérémonie.

[4] Cependant, la deuxième cérémonie d’initiation devait avoir lieu en janvier 2018. Au cours de cette cérémonie [la deuxième cérémonie], on ferait 201 entailles sur le pénis du demandeur mineur.

[5] La demanderesse principale et le demandeur mineur se sont enfuis au Canada en décembre 2017 pour éviter de devoir prendre part à la deuxième cérémonie. L’époux de la demanderesse principale est resté à Lagos, mais il soutient les efforts de son épouse pour tenter de sauver leur fils. Pour cette raison, l’époux a été ostracisé par sa famille.

I. LA DÉCISION DE LA SAR

[6] Les demandeurs ont fait valoir que Port Harcourt ne constitue pas une PRI viable, car la belle‑mère de la demanderesse principale s’y rend pour des raisons politiques et religieuses. À cet égard, ils ont présenté à la SAR six reçus manuscrits pour trois voyages aller‑retour entre Lagos et Port Harcourt datés de 2014 et de 2017 [les reçus] à titre de nouveaux éléments de preuve.

[7] La SAR a conclu que les reçus étaient inadmissibles. Compte tenu de la date à laquelle ils ont été émis, la SAR a jugé qu’ils auraient dû être présentés à l’audience de la SPR et que les demandeurs n’ont pas expliqué pourquoi ils n’ont pas été produits à ce moment‑là. De plus, la SAR a jugé que les reçus étaient peu crédibles parce que les demandeurs n’ont pas révélé comment ils les avaient obtenus. Étant donné que les demandeurs avaient peur de la mère de l’époux de la demanderesse principale et que ce dernier avait été ostracisé par sa famille, il semblait peu probable que les demandeurs aient pu obtenir les reçus.

[8] La SAR a reconnu que la SPR a commis plusieurs erreurs, mais elle a néanmoins conclu qu’il existait une PRI viable pour les demandeurs à Port Harcourt.

[9] Les questions en litige sont les suivantes :

  1. La SAR a‑t‑elle commis une erreur en refusant d’admettre les reçus comme nouveaux éléments de preuve?
  2. La SAR a‑t‑elle manqué aux règles de l’équité procédurale en n’informant pas la demanderesse principale qu’elle doutait de la crédibilité des reçus?
  3. La SAR a‑t‑elle commis une erreur en concluant qu’aucun obstacle important n’empêchait la demanderesse principale de s’installer à Port Harcourt?

II. ANALYSE

PREMIÈRE ET DEUXIÈME QUESTIONS EN LITIGE

[10] La SAR a refusé d’admettre les reçus comme éléments de preuve parce qu’ils étaient antérieurs à la date de l’audience devant la SPR et qu’aucune explication n’a été fournie par les demandeurs quant à la raison pour laquelle ils n’ont pas été produits à leur audience. Dans ces circonstances, les commentaires de la SAR relativement à la crédibilité des reçus constituaient une opinion incidente. Ainsi, sans admettre que les règles de l’équité procédurale exigeaient que la SAR informe les demandeurs de ses doutes concernant la crédibilité des reçus, j’estime que son défaut de le faire est sans importance.

TROISIÈME QUESTION EN LITIGE

[11] Le droit est clair : devoir repartir à neuf et avoir de la difficulté à se trouver un emploi ne sont pas des obstacles importants qui rendent une PRI déraisonnable. La SAR a fait remarquer que le niveau de scolarité et les compétences linguistiques de la demanderesse principale, ainsi que son expérience professionnelle au sein du gouvernement local de Lagos, atténuaient ses inquiétudes à cet égard.

[12] Il ressortait également de la preuve que la belle‑mère de la demanderesse principale ne se rendait pas fréquemment à Port Harcourt. De plus, comme les demandeurs ne font pas partie des groupes politiques ou religieux auxquels la belle‑mère appartient, rien ne permettait de croire qu’ils la rencontreraient à Port Harcourt.

[13] À mon avis, compte tenu de la situation de la demanderesse principale, il était raisonnable de la part de la SAR de conclure qu’aucun obstacle important ne l’empêchait de se réinstaller à Port Harcourt.

III. QUESTION À CERTIFIER

[14] Aucune question n’a été proposée aux fins de certification en vue d’un appel.

IV. CONCLUSION

[15] La demande de contrôle judiciaire est rejetée.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM‑5134‑20

LA COUR STATUE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est par les présentes rejetée.

« Sandra J. Simpson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Caroline Tardif


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑5134‑20

 

INTITULÉ :

TOLANI OMOLABAKE FASOYIN ET TOLUWALASE ANJOLAOLUWA FASOYIN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

PAR TÉLÉCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

le 27 septembre 2021

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

la juge SIMPSON

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

le 14 octobre 2021

 

COMPARUTIONS :

Naga Obazee

 

pour les demandeurs

 

Amina Riaz

 

pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Avocat

North York (Ontario)

 

pour les demandeurs

 

Procureur général du Canada

Ministère de la Justice du Canada

pour le défendeur

 

 

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