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Date : 20020611

Dossier : IMM-1851-02

Référence neutre : 2002 CFPI 662

TORONTO, ONTARIO, LE MARDI 11 JUIN 2002

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE HENEGHAN

ENTRE :                                                                                                                             

MICHAEL SMITH

                                                                                                                                                       demandeur

                                                                                 - et -

                                                                                    

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                         défendeur

                                   MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

Introduction

[1]                 La Cour est saisie d'une requête présentée par M. Michael Smith (le demandeur) en vertu des Règles de la Cour fédérale (1998) (les Règles) en vue d'obtenir une ordonnance établissant un échéancier pour accélérer l'instruction de sa demande principale. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (le défendeur) conteste la présente requête.


Les faits

[2]                 Le demandeur a introduit le 25 avril 2002 une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire d'une décision en date du 10 avril 2002 par laquelle la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a débouté le demandeur de l'appel qu'il avait interjeté de la mesure d'expulsion prise contre lui le 29 octobre 2001.

[3]                 Le demandeur est détenu en vertu des dispositions de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, modifiée (la Loi). Il a été arrêté le 18 octobre 2001 en vertu d'un mandat d'arrestation lancé contre lui le 11 octobre 2001 conformément à la Loi par suite de son défaut de se présenter le 2 avril 2001 à l'enquête dont la tenue avait été ordonnée le 13 décembre 2000 en application du paragraphe 27(3) de la Loi.

[4]                 Le demandeur est détenu depuis le 18 octobre 2001 et, en conformité avec la Loi, les motifs justifiant de prolonger sa détention ont été examinés à quelques reprises. Ces révisions des motifs de sa détention ont eu lieu en conformité avec l'article 105. En général, les arbitres chargés de se prononcer sur la question se sont dits d'avis de prolonger son incarcération au motif qu'il y avait lieu de croire qu'il ferait probablement défaut de comparaître pour son renvoi s'il était remis en liberté. Cette crainte a été exprimée à plusieurs reprises par les arbitres, qui ont par ailleurs formulé l'avis que le cautionnement offert par sa mère et, plus récemment, par sa tante, n'était pas suffisant.

[5]                 Voici un extrait des motifs de la décision rendue le 2 mai 2002 par l'arbitre à l'issue de la révision des motifs de la détention :

[TRADUCTION] La présente question sera réexaminée d'ici 30 jours si le renvoi n'est pas exécuté dans ce délai. Si tel est le cas, je demande au ministère de faire le nécessaire pour être en mesure de communiquer les renseignements les plus récents au sujet du document de voyage. Si l'on découvre qu'il est impossible d'obtenir le document exigé avant un certain temps pour une raison ou pour une autre, il y aurait alors probablement lieu de tenir compte des garanties qui ont déjà été offertes et qui pourraient suffire pour justifier la remise en liberté de l'intéressé. Une fois que l'intéressé aura été vu, la question pourra être examinée plus en profondeur si le renvoi n'est pas exécuté d'ici là.

- Dossier de la requête du défendeur, aux pages 63 et 64.

Prétentions et moyens des parties

[6]              Bien que, dans sa demande d'autorisation et de contrôle judiciaire, il ne conteste pas la légalité de son maintien en détention, le demandeur se fonde sur la prolongation de son incarcération pour affirmer que la Cour devrait ordonner que sa demande d'autorisation et de contrôle judiciaire soit instruite de façon accélérée. Il cite à cet égard les articles 3 et 385 des Règles, de même que le paragraphe 18.4(1) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, modifiée, ainsi que l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, et les Règles de la Cour fédérale de 1993 en matière d'immigration, DORS/93-22, modifiées DORS/98-235, art. 221.

[7]              Le demandeur fait valoir qu'il résulte du rapprochement de ces dispositions législatives et réglementaires qu'en cas d'urgence - ce qui est le cas lorsque quelqu'un est détenu -, on devrait faire l'impossible pour accélérer l'instruction d'une demande de contrôle judiciaire déjà en cours de façon à permettre d'apporter au litige la solution la plus expéditive et économique possible, compte tenu des limites que comportent la liberté personnelle, les ressources judiciaires et les coûts que représente pour le public la poursuite d'une longue période d'incarcération avant qu'il ne soit statué au fond sur la demande principale.

[8]              Ainsi que je l'ai déjà signalé, le défendeur conteste le présent avis de requête. Le défendeur soutient que le demandeur tente essentiellement d'attaquer indirectement les mesures prises par les arbitres indépendants qui ont décidé de prolonger sa détention. Le défendeur affirme qu'il s'agit là de décisions distinctes qui ne sont pas contestées dans la présente instance.

[9]              Le défendeur affirme en outre que, par définition, une demande de contrôle judiciaire est une procédure sommaire et accélérée. Le demandeur n'a pas démontré pourquoi l'instruction de sa demande principale de contrôle judiciaire devrait être régie par d'autres délais que les délais de prescription habituels.


Analyse

[10]            La demande d'autorisation et de contrôle judiciaire introduite par le demandeur en l'espèce est régie par l'article 82.1 de la Loi. Les paragraphes 82.1(3), (4), (6), (7) et (8) s'appliquent à la présente requête. En voici le libellé :

(3) La demande d'autorisation doit être déposée devant la Section de première instance de la Cour fédérale et signifiée à l'autre partie dans les quinze jours suivant soit la date où le demandeur est avisé de la décision, de l'ordonnance ou de la mesure en cause, soit celle où il a eu connaissance de l'affaire en question.

(4) Sauf ordre contraire d'un juge de la Section de première instance de la Cour fédérale, il est statué sur la demande d'autorisation sans comparution en personne.

...

(6) Sous réserve du paragraphe (7), si la demande d'autorisation est accueillie, la demande de contrôle judiciaire est réputée avoir été formée et le juge de la Cour fédérale qui a accueilli la demande d'autorisation fixe la date et le lieu d'audition de la demande de contrôle judiciaire.

(7) La date fixée conformément au paragraphe (6) ne peut être postérieure de moins de trente jours, sauf convention contraire des parties, ni de plus de quatre-vingt-dix jours à la date à laquelle la demande d'autorisation a été accueillie.

(8) Le juge de la Cour fédérale statue à bref délai et selon une procédure sommaire sur la demande d'autorisation et, le cas échéant.

(3) An application under this section for leave to commence an application for judicial review shall be filed with the Federal Court -- Trial Division and served within fifteen days after the day on which the demandeur is notified of the decision or order or becomes aware of the other matter.

(4) Unless a judge of the Federal Court -- Trial Division directs otherwise, an application under this section for leave to commence an application for judicial review shall be disposed of without personal appearance.

...

(6) Subject to subsection (7), where leave to commence an application for judicial review is granted, the application for judicial review shall be deemed to have been commenced and the judge granting leave shall fix the day and place for the hearing of the application for judicial review.

(7) In fixing a day pursuant to subsection (6), the judge shall set the matter down for a day that is no sooner than thirty days, and no later than ninety days, after the day on which leave to commence the application for judicial review was granted, unless the parties agree that the matter may be set down on an earlier day.

(8) Any application for leave to commence an application for judicial review, and any application for judicial review, under this section shall be determined without delay and in a summary way.

[11]              Les articles 4 et 21 des Règles de la Cour fédérale en matière d'immigration, précitées, sont également pertinents. En voici le texte :

(Règle 4)

Sous réserve du paragraphe (3), les demandes et les appels sont régis par les parties 1, 2, 3, 6, 7, 10 et 11 et les règles 383 à 385 des Règles de la Cour fédérale (1998), sauf dans les cas où ces dispositions sont incompatibles avec la Loi ou les présentes règles.

(2) Les demandes de contrôle judiciaire d'une décision de l'agent des visas sont régies par les parties 1, 2, 3, 5, 7, 9, 10 et 11 des Règles de la Cour fédérale (1998), sauf dans les cas où ces dispositions sont incompatibles avec la Loi.

(3) La règle 133 des Règles de la Cour fédérale (1998) ne s'applique pas à la signification d'une demande aux termes de la règle 7 des présentes règles. DORS/98235, art. 2(T).

...

(Règle 21)

[Abrogée, DORS/98-235, art. 5]

(2) Les délais prévus aux présentes règles ne peuvent être modifiés que par ordonnance d'un juge ou d'un protonotaire. DORS/98-235, art. 5.

(Rule 4)

(1) Subject to subrule 3, except to the extent that they are inconsistent with the Act or these Rules, Parts 1, 2, 3, 6, 7, 10 and 11 and Rules 383 to 385 of the Federal Court Rules, 1998 apply to applications and appeals.

(2) Except to the extent that they are inconsistent with the Act, Parts 1, 2, 3, 5, 7, 9, 10 and 11 of the Federal Court Rules, 1998 apply to applications for judicial review of a decision of a visa officer.

(3) Rule 133 of the Federal Court Rules, 1998 does not apply to service of an application under Rule 7. SOR/98-235, s. 2(T).

...

(Rule 21)

[Repealed, SOR/98-235, s. 5]

(2) No time limit prescribed by these Rules may be varied except by order of a judge or prothonotary. SOR/98-235, s. 5.

[12]            L'article 4 des Règles de la Cour fédérale en matière d'immigration, précité, incorpore par renvoi certaines dispositions des Règles et notamment celles qui ont trait aux instances à gestion spéciale. Le principe fondamental en ce qui concerne l'application des Règles est celui qui est posé à l'article 3 des Règles, en l'occurrence celui de la solution au litige la plus juste et la plus expéditive et économique possible. Ce principe s'accorde tout à fait avec le paragraphe 82.1(8) de la Loi et avec les Règles de la Cour fédérale en matière d'immigration en ce qui concerne le délai dans lequel le demandeur et le défendeur doivent déposer leur dossier respectif de demande.


[13]            L'ordonnance soustrayant une instance aux délais habituels suppose l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire, que cette ordonnance soit prononcée en vertu des Règles ou en application de l'article 21 des Règles de la Cour fédérale en matière d'immigration. À mon avis, l'exercice du pouvoir discrétionnaire doit, dans le cas qui nous occupe, se rapporter à une raison sérieuse découlant de l'instance en cause.

[14]            En l'espèce, l'instance en cause est une demande de contrôle judiciaire d'une décision défavorable de la Section d'appel. La demande sous-jacente de contrôle judiciaire ne conteste pas l'ordonnance de détention, la révision de l'ordonnance de détention ou toute mesure de renvoi. D'ailleurs, l'avocat du demandeur a précisé au dossier que la légalité de l'ordonnance de détention n'était pas contestée.

[15]            Dans le cas qui nous occupe, le demandeur a déposé son dossier de demande. La date limite à laquelle le défendeur doit produire son dossier de demande est le 17 juin 2001 et l'avocate du défendeur a elle aussi précisé au dossier que le dossier serait déposé à temps. Les Règles de la Cour fédérale en matière d'immigration offrent au demandeur la possibilité de déposer une réponse dans les dix jours de la réception du dossier de la demande du défendeur et, s'il choisit de le faire, la demande sous-jacente d'autorisation et de contrôle judiciaire sera mise en état au plus tard le 27 juin 2002. Elle sera alors présentée à un juge pour qu'il se prononce sur la question de l'autorisation.

[16]            Je ne vois aucune raison de faire droit à la présente requête introduite par le demandeur en vue d'obtenir que la Cour établisse un échéancier pour accélérer l'instruction de la présente demande. La requête sera rejetée sous réserve toutefois du droit du demandeur de présenter une nouvelle requête visant à obtenir une instruction accélérée s'il obtient l'autorisation de présenter sa demande de contrôle judiciaire.

                                                                     ORDONNANCE

La requête est rejetée, sous réserve du droit du demandeur de présenter une nouvelle requête visant à obtenir une instruction accélérée s'il obtient l'autorisation de présenter sa demande de contrôle judiciaire.

   « E. Heneghan »

ligne

                                                                              Juge                          

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                                                          COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

  

DOSSIER :                                           IMM-1851-02

INTITULÉ :                                        MICHAEL SMITH

                                                                                                                                                      demandeur

- et -

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                        défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :              LE LUNDI 10 JUIN 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS :                      LE MARDI 11 JUIN 2002

  

COMPARUTIONS :

Me Avi J. Sirlin                                                                               pour le demandeur

Me Kareena Wilding                                                                       pour le défendeur

  

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Avi J. Sirlin, avocat                                                                  pour le demandeur

425, avenue University, bureau 500

Toronto (Ontario)    M5G 1T6

M. Morris Rosenberg                                                                     pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada


COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

                       Date : 20020611

      Dossier : IMM-1851-02

ENTRE :

MICHAEL SMITH

                                  demandeur

- et -

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                  défendeur

                                                                                      

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE

                                                                                     

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