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Date : 20210902


Dossiers : T‐653‐20

Référence : 2021 CF 843

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 2 septembre 2021

En présence de monsieur le juge Favel

ENTRE :

BRENDAN ANDERSON

demandeur

et

ALVIN FRANCIS, SHAUNA BUFFALOCALF,

WESLEY DANIEL, ROBERTA FRANCIS,

ET LA PREMIÈRE NATION DE NEKANEET

défendeurs

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Nature de l’affaire

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F‐7, à l’encontre d’une décision rendue le 26 mai 2020 [la décision] par un seul membre du tribunal d’appel de Nekaneet [le TAN] de la Première Nation de Nekaneet [Nekaneet]. Nekaneet est une bande indienne en vertu de la Loi sur les Indiens, LRC 1985, c I‐5, et elle tient ses élections conformément à la Nekaneet Constitution [la Constitution] et à la Nekaneet Governance Act [la Loi].

[2] Le TAN a rejeté l’appel concernant l’élection tenue à Nekaneet le 25 mars 2020 [l’élection] interjeté par le demandeur sans qu’il y ait d’audience. Le TAN a conclu que le demandeur n’avait pas satisfait au critère applicable pour annuler les résultats de l’élection et, par conséquent, qu’il n’avait pas établi un fondement juridique pour son appel. Le TAN a également conclu que l’appel ne contenait aucun motif qui justifierait l’appel, même si le fondement factuel pour de tels motifs était établi.

[3] Le demandeur soutient qu’on a porté atteinte à ses droits à l’équité procédurale et que la décision était déraisonnable. Par conséquent, il demande à la Cour d’annuler la décision et de renvoyer l’affaire à un autre membre du TAN.

[4] La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

II. Contexte

[5] Pendant l’élection, des restrictions relatives aux rassemblements ont été mises en œuvre en raison de la pandémie de COVID‐19. Cependant, les électeurs ont tout de même été en mesure de voter en personne en application de la Loi et les candidats, les agents électoraux et des agents de sécurité étaient présents au bureau de vote. Les bulletins de vote ont été comptés en présence des candidats et des agents électoraux. Personne n’a soulevé de préoccupations pendant le dépouillement.

[6] Le député en place, le chef Francis, a été réélu avec 111 votes, alors que le demandeur a reçu 23 votes et un troisième candidat, 55 votes.

[7] Les membres de Nekaneet peuvent interjeter appel des résultats de l’élection auprès du TAN. L’article 8.02 de la Constitution établit la nomination de personnes au TAN :

[traduction]

Un membre du tribunal d’appel de Nekaneet doit être une personne de bonne moralité et de bonne réputation, un avocat qui est un membre en règle de l’un des barreaux du Canada depuis au moins dix (10) ans, et cette exigence peut être réduite à au moins cinq (5) ans si l’avocat satisfait aux critères suivants : comprend et parle couramment la langue crie, est indépendant et impartial, n’est pas un citoyen de Nekaneet ou n’entretient aucun lien important avec Nekaneet par l’intermédiaire de la famille, d’un emploi ou d’une entreprise, n’a aucun dossier criminel et n’a jamais été radié du barreau.

[8] Le 2 mars 2020, le Conseil de bande de Nekaneet a nommé John Hill [M. Hill], Crystal Eninew et Lisa Abbott comme membres du TAN au moyen d’une résolution de conseil de bande [la RCB]. M. Hill avait déjà siégé au TAN de 2011 à 2016. En 2011, il avait loué un bureau auprès de la New Horizon First Nations Administration Inc. [New Horizon], une entité exploitante de Nekaneet dont les administrateurs sont les membres du Conseil de bande de Nekaneet. Le bail de M. Hill a expiré en septembre 2019, et des négociations se sont poursuivies entre septembre 2019 et septembre 2020, moment auquel il a signé une nouvelle convention de bail.

A. L’appel

[9] Le 22 avril 2020, le demandeur a interjeté appel des résultats de l’élection auprès du TAN. En application de l’article 19.11 de la Loi, un seul membre peut entendre un appel si l’appelant en fait le choix. Le demandeur a choisi M. Hill. Le demandeur affirme qu’au moment où l’appel a été interjeté, il ignorait que Nekaneet et M. Hill avaient conclu une convention de bail.

[10] Le demandeur a soutenu qu’il avait reçu au moins 43 votes, plutôt que les 23 votes indiqués dans les résultats de l’élection. Les documents d’appel comprenaient 33 affidavits d’électeurs, y compris celui du demandeur, chacun déclarant avoir voté pour le demandeur. Les documents d’appel comprenaient également un avis de 10 électeurs supplémentaires qui étaient prêts à témoigner du même fait. Sept des déposants indiquent que les électeurs ont voté pour le demandeur; qu’il n’y avait pas de scellés sur les boîtes de scrutin pour le chef et les conseillers; et que soit il y avait des cadenas sur les boîtes de scrutin, mais ceux‐ci n’étaient pas verrouillés, soit il n’y avait aucun cadenas. Le demandeur a également soutenu qu’Alena Louison, la présidente d’élection [la PE], a indûment empêché un autre candidat, Jordi Fourhorns [M. Fourhorns], d’être candidat à l’élection. Le demandeur a inclus un affidavit de M. Fourhorns, qui était représenté par le même conseiller juridique que le demandeur.

[11] Le 6 mai 2020, le chef Francis a présenté un avis de litige, un affidavit fortement axé sur la raison pour laquelle on a empêché M. Fourhorns d’être candidat à l’élection, et la déclaration de la PE concernant l’élection et la situation de M. Fourhorns. Les déclarations du chef Francis et de la PE expliquaient que les boîtes de scrutin étaient vides avant que les bulletins de vote y soient déposés et que les boîtes avaient été sécurisées au moyen de cadenas et de ruban. Le chef Francis et la PE ont également expliqué que les restrictions liées à la COVID‐19 exigeaient l’apport d’ajustements aux bureaux de vote pour assurer les mesures adéquates de distanciation sociale et que cela avait eu une incidence sur le nombre de personnes qui pouvaient être présentes pendant le dépouillement du scrutin.

[12] L’affidavit du chef Francis décrivait également le dépouillement des votes et indiquait que le demandeur et lui‐même étaient présents sur les lieux, et que personne ne s’est opposé au processus. Un seul bulletin de vote pour un conseiller était en litige, et les parties ont convenu qu’il serait compté. Le chef Francis a remis en question la façon dont on pouvait savoir avec certitude qui avait voté pour qui, notamment lorsque certains des électeurs qui avaient apparemment voté pour le demandeur avaient proposé d’autres candidats pour devenir chef.

[13] Le demandeur a donné deux explications possibles quant aux raisons pour lesquelles les résultats de l’élection ne reflétaient pas les votes exprimés : quelqu’un avait altéré les boîtes de scrutin ou encore c’est par négligence ou de façon délibérée que les parties avaient déclaré les bulletins de vote de manière inexacte. M. Hill a souligné que ces hypothèses n’avaient été formulées qu’à titre d’explications possibles sans preuve concrète que l’une ou l’autre s’était effectivement produite.

[14] Le 26 mai 2020, M. Hill a rejeté l’appel du demandeur sans tenir une audience en application de l’article 19.06 de la Loi. Cet article est libellé ainsi :

[traduction]

Le tribunal d’appel de Nekaneet doit donner aux parties la possibilité de présenter leur preuve respective dans le cadre d’une audience du tribunal d’appel de Nekaneet, sauf si la nature de la demande telle que divulguée de prime abord dans l’avis de demande ne révèle aucun fondement juridique pour la demande ou ne contient aucun motif qui justifierait la demande si le fondement factuel pour de tels motifs était établi.

III. La décision

[15] Dans sa décision de six pages, M. Hill a conclu que l’appel n’avait pas réussi à établir un fondement juridique ou des motifs pour justifier la tenue d’une audience. M. Hill a passé en revue les allégations selon lesquelles la PE n’a pas verrouillé ni scellé les boîtes de scrutin et n’a pas adéquatement dépouillé les bulletins de vote. Il s’est également penché sur l’allégation du demandeur selon laquelle un plus grand nombre de personnes avaient voté pour lui que ce qu’indiquaient les résultats officiels. M. Hill a examiné le pouvoir qui lui est conféré en vertu de l’article 19.06 de la Loi et a passé en revue la jurisprudence fournie par le demandeur, plus particulièrement la décision de notre Cour dans Papequash c Brass, 2018 CF 325, confirmée par 2019 CAF 245 [Papequash].

[16] M. Hill a formulé son raisonnement au paragraphe 11 de la décision :

[traduction]

Pour déterminer si la demande exige la tenue d’une audience en application de l’article 19.06 de la Loi, j’examinerai les allégations et la nature des éléments de preuve déposés. Aux fins de l’examen de la demande du défendeur concernant une décision en application de l’article 19.06, je supposerai que les éléments de preuve déposés peuvent être établis. Même si j’accepte les éléments de preuve déposés, je dois déterminer s’ils révèlent un fondement juridique pour la demande ou s’ils contiennent des motifs pour justifier la demande.

[17] En appliquant les principes énoncés dans la décision Papequash, M. Hill a conclu que les allégations signalaient des irrégularités techniques plutôt que des allégations de fraude ou de corruption. Le paragraphe 13 de la décision soulignait également que la décision rendue dans l’affaire Papequash souscrivait aux principes énoncés par la Cour suprême du Canada dans Opitz c Wrzesnewskyj, 2012 CSC 55 [Opitz]. Dans l’arrêt Opitz, les juges majoritaires de la Cour suprême ont expliqué ce qui suit :

[23] Pour décider s’il y a lieu d’annuler une élection, il faut tenir compte d’une considération importante, soit celle de savoir si le nombre de votes contestés est suffisant pour jeter un doute sur l’identité du véritable vainqueur de l’élection ou si les irrégularités sont telles qu’elles mettent en question l’intégrité du processus électoral. Puisque les électeurs canadiens votent par scrutin secret, cette analyse ne peut porter sur le choix qu’ils ont réellement fait. Si le tribunal est convaincu que le rejet de certains votes laisse planer un doute sur la victoire du candidat élu, il serait déraisonnable que le tribunal n’annule pas l’élection.

[18] Conformément aux décisions rendues dans l’affaire Papequash et dans l’arrêt Opitz, M. Hill a tiré la conclusion suivante :

[traduction]

[19] Cette approche mathématique semble fonctionner lorsqu’il existe des irrégularités lors du scrutin, par exemple des différends concernant les bulletins de vote annulés, et que les votes en faveur des candidats peuvent être déterminés. Bien que je sois d’avis que le fondement juridique pour une demande ne comporterait pas une évaluation de ce qu’auraient pu être les choix réels des électeurs après le fait, je donnerai suite à l’analyse mathématique aux fins de ma décision en application de l’art. 19.06.

[19] M. Hill a appliqué l’approche mathématique pour évaluer si les résultats de l’élection devaient être annulés. Il a conclu que, même si tous les votes contestés étaient attribués au demandeur, le chef Francis aurait tout de même remporté l’élection.

[20] M. Hill s’est ensuite penché sur la question de savoir si l’élection était entachée par la fraude ou la corruption de façon à remettre en question l’intégrité du processus électoral. Il a examiné les deux explications possibles du demandeur quant à la raison pour laquelle les résultats de l’élection ne reflétaient pas les votes exprimés. Il a constaté qu’il n’y avait aucune allégation selon laquelle une personne avait effectivement altéré les boîtes de scrutin. En outre, il a souligné qu’il n’y avait aucun élément de preuve selon lequel la PE avait incorrectement observé et signalé les marques sur les bulletins de vote, par négligence ou de façon délibérée. Les deux allégations, selon M. Hill, n’étaient que de simples possibilités comme il est indiqué dans les observations écrites du demandeur. Par conséquent, M. Hill a rejeté l’appel sans tenir d’audience.

IV. Avis d’opposition et ordonnance de la juge Aylen responsable de la gestion d’instance

[21] Après avoir présenté une demande de contrôle judiciaire, le demandeur a cherché à obtenir des renseignements auprès de M. Hill concernant ses relations d’affaires avec Nekaneet. Le demandeur a également demandé les communications entre M. Hill et les membres de Nekaneet depuis sa nomination jusqu’à la décision. M. Hill a produit un avis d’opposition, et le demandeur a présenté une requête afin de rejeter l’avis d’opposition et a demandé des dépens.

[22] Le 25 août 2020, la juge Aylen, responsable de la gestion d’instance, a accueilli la requête en partie, ordonnant uniquement la production d’un bail entre M. Hill et New Horizon, et réservant la question des dépens au juge saisi de la demande. Le 31 août 2020, M. Hill a déposé un affidavit auprès de la Cour annexant le bail avec New Horizon, ainsi que des copies des paiements de bail.

V. Les questions en litige et la norme de contrôle

A. Questions en litige

[23] D’après les observations des parties, les questions en litige sont les suivantes :

(1) M. Hill a‐t‐il bien exercé sa compétence?

(2) La décision était‐elle équitable sur le plan de la procédure?

a) A‐t‐on porté atteinte au droit à un décideur impartial?

b) Y a‐t‐il eu un manquement au droit d’être entendu?

(3) La décision était‐elle raisonnable?

B. Norme de contrôle

[24] Dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], la Cour suprême du Canada a conclu que la norme de la décision raisonnable est présumée s’appliquer chaque fois qu’une cour contrôle une décision administrative (para 16, 23 et 25). Comme l’a affirmé la juge Strickland dans Blois c Nation crie Onion Lake, 2020 CF 953 [Blois] au paragraphe 20, cette présomption peut être réfutée dans deux types de situations :

La première situation est celle où le législateur a prescrit la norme de contrôle ou a prévu un mécanisme d’appel, indiquant ainsi son intention que les normes applicables en appel devraient s’appliquer (Vavilov, aux para 7, 33). La deuxième est celle où la primauté du droit commande l’application de la norme de la décision correcte. C’est le cas pour certaines catégories de questions : les questions constitutionnelles, les questions de droit générales d’importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et les questions liées aux délimitations des compétences respectives d’organismes administratifs (Vavilov, aux para 17, 53).

[25] Je conclus que la norme de la décision raisonnable est présumée s’appliquer à la première et à la troisième questions. En ce qui concerne la première question de compétence, la Loi a délégué le pouvoir au TAN de trancher les appels en matière d’élection et aucun de ces types de situation n’existe pour réfuter la présomption d’application de la norme de la décision raisonnable en cas de contrôle judiciaire (Blois aux para 22 à 24).

[26] La troisième question porte sur le bien‐fondé de la décision, et elle est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable. La Cour suprême du Canada a aussi conclu qu’« [a]fin de remplir la promesse formulée dans l’arrêt Dunsmuir d’assurer “la légalité, la rationalité et l’équité du processus administratif et de la décision rendue”, le contrôle selon la norme de la décision raisonnable [devait] comporter une évaluation sensible et respectueuse, mais aussi rigoureuse, des décisions administratives » (Vavilov, au para 12 citant Dunsmuir c Nouveau‐Brunswick, 2008 CSC 9 au para 28).

[27] La Cour ne modifiera pas une décision si elle est jugée intrinsèquement cohérente, comprend une analyse rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles (Vavilov au para 85). Dans l’évaluation du caractère raisonnable d’une décision, on doit éviter de soupeser et d’apprécier à nouveau la preuve (Commission canadienne des droits de la personne) c Canada (Procureur général), 2018 CSC 31, au para 55).

[28] La deuxième question, qui porte sur l’équité procédurale, appelle l’application de la norme de contrôle de la décision correcte (Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général)), 2018 CAF 69, aux para 49 à 56; Établissement de Mission c Khela, 2014 CSC 24, au para 79). Cependant, l’obligation d’équité procédurale est souple et variable, et repose sur une appréciation du contexte de la loi particulière et des droits visés (Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 1999 CSC 699, au para 22). En outre, mon collègue, la juge Strickland, a récemment confirmé que la norme de contrôle des questions relatives à l’équité procédurale est la norme de la décision correcte dans Première Nation de Taykwa Tagamou c Linklater, 2020 CF 220, aux paragraphes 41 et 42 [Taykwa Tagamou].

C. Question préliminaire

[29] La PE n’a produit aucun affidavit devant le TAN, et le demandeur affirme que l’affidavit de la PE déposé dans la présente demande est inadmissible dans son intégralité. Bien que je sois en désaccord pour dire qu’il devrait être rejeté dans son intégralité, je conclus que la demande en l’espèce peut être tranchée sans examen de l’affidavit de la PE.

[30] Il est bien établi qu’une demande de contrôle judiciaire doit être tranchée en fonction du dossier dont disposait le décideur, sauf en cas d’exceptions bien définies (Chin Quee c Teamsters Local #938, 2017 CAF 62, au para 5; Association des universités et collèges du Canada c Canadian Copyright Licensing Agency, 2012 CAF 22, au para 20).

[31] De telles exceptions comprennent les renseignements généraux susceptibles d’aider le tribunal à comprendre les questions pertinentes pour le contrôle judiciaire ou qui portent les vices de procédure à l’attention du tribunal et qui ne peuvent être trouvés dans le dossier de preuve du décideur administratif (Keeprite Workers’ Independent Union v Keeprite Products Ltd (1980), 114 DLR (3d) 162, 29 OR (2d) 513; Kelley (Succession) c Canada (Procureur général), 2011 CF 1335, aux para 26 et 27).

[32] Bien que l’affidavit de la PE ne relève pas d’une catégorie d’exemption susmentionnée et que je convienne avec le demandeur qu’il pose certains problèmes, je conclus que rien ne repose sur le contenu de l’affidavit. L’affidavit comprend principalement une énumération des faits qui figurent déjà dans le dossier du demandeur, à l’exception des paragraphes ci‐après.

[33] Le paragraphe trois comprend des renseignements qui ne figurent pas dans le dossier. Toutefois, je conclus qu’ils n’ont aucune incidence sur la question, hormis fournir le contexte quant à l’identité de la déposante :

[traduction]

3. J’ai agi en qualité de directrice générale des élections lors de cinq élections pour les postes de chef et de membres du Conseil pour trois Premières Nations, dont la Première Nation de Nekaneet, et j’ai agi en qualité de présidente d’élection adjointe dans plus de 40 élections pour les postes de chef et de membres du Conseil au cours des 20 dernières années. Services aux Autochtones Canada conserve mon nom en qualité de personne pouvant être nommée à titre de présidente d’élection ou de présidente d’élection adjointe pour l’élection aux postes de chef et de membres du Conseil menée par des Premières Nations.

[34] Les paragraphes ci‐après sont exclus au motif qu’ils portent sur le bien‐fondé de l’appel. Je souligne toutefois qu’ils ne comprennent aucun renseignement qui aurait une incidence sur ma décision concernant ces questions :

[traduction]

8. En ce qui concerne les bulletins de vote, je les avais commandés auprès de Allied Printers, à Regina, en Saskatchewan. Tous les bulletins de vote avaient la même taille et étaient imprimés sur du papier de couleur. Avant d’être remis aux électeurs, les bulletins de vote étaient estampillés à la main au moyen d’un timbre unique comportant mes initiales. Le timbre était apposé sur le bulletin de vote de façon à ce que, une fois celui‐ci plié, l’estampille puisse être visible sans voir comment le bulletin de vote avait été marqué par l’électeur. Enfin, les bulletins de vote étaient pliés d’une façon précise, de façon à éviter de montrer comment ils avaient été marqués avant leur dépôt dans la boîte de scrutin.

[...]

11. Tous les bulletins de vote marqués par les électeurs ont été placés dans les boîtes de scrutin. Les bulletins de vote ont été pliés de façon à ce que les marques sur le bulletin de vote ne soient pas visibles. Les bulletins de vote ont été vérifiés pour veiller à ce qu’ils portent mon estampille et ils étaient ensuite déposés dans les boîtes de scrutin sans regarder comment les votes avaient été exprimés. Nous avons effectué le rapprochement du nombre de bulletins de vote remis avec la liste des personnes qui avaient voté pendant la journée pour que le nombre de votes exprimés corresponde au nombre de bulletins de vote qui avaient été remis.

[...]

13. À la fermeture du scrutin, les boîtes de scrutin ont été déverrouillées et le ruban a été retiré. J’ai conservé le ruban des boîtes de scrutin et je l’ai placé dans une enveloppe, qui a ensuite été retournée à la boîte de scrutin.

[35] Le demandeur soutient que, puisque les défendeurs ont refusé de retirer l’affidavit de la PE, il a été tenu de procéder à un long contre‐interrogatoire pour assurer un dossier équilibré devant notre Cour. Il affirme que la conduite des défendeurs a des répercussions quant aux dépens. Après avoir examiné cet affidavit, j’estime qu’il ne contient rien qui justifiait autant de temps. Je conclus que l’affidavit demeurera au dossier, à l’exception des paragraphes 8, 11 et 13. De toute façon, tel que susmentionné, la demande de contrôle judiciaire peut être tranchée sans tenir compte de l’affidavit de la PE.

[36] En plus de la PE, le demandeur et le chef Francis ont été contre‐interrogés au sujet des affidavits qu’ils avaient déposés relativement à la demande en l’espèce. Après avoir examiné les transcriptions des contre‐interrogatoires du demandeur et du chef Francis, je conclus que leur témoignage n’aide pas à trancher la demande en l’espèce.

[37] Le demandeur a également produit un affidavit caviardé de M. Fourhorns, lequel présente principalement le contexte de la nomination du TAN pendant la période où M. Fourhorns siégeait au Conseil de bande. Après avoir examiné le contenu, je conclus que rien dans cet affidavit n’aide à trancher la demande en l’espèce.

[38] En dehors du demandeur et de M. Fourhorns, aucune des personnes ayant signé des affidavits devant le TAN à l’appui du demandeur n’a produit d’affidavit dans la demande en l’espèce.

VI. Positions des parties

(1) M. Hill a‐t‐il bien exercé sa compétence?

[39] Le demandeur soutient que M. Hill a outrepassé sa compétence en procédant à un examen qui allait au‐delà de l’avis d’appel. Il affirme que M. Hill a incorrectement soupesé et apprécié la preuve des défendeurs, et qu’il s’est appuyé sur ses connaissances personnelles. Plus particulièrement, le demandeur affirme que, dans six paragraphes de la décision, M. Hill a décrit les restrictions liées à la COVID‐19, les ajustements apportés aux bureaux de scrutin et les répercussions sur le nombre de personnes qui pouvaient être présentes pendant le dépouillement du scrutin.

[40] Bien que certains des faits généraux du demandeur, ainsi que l’affidavit de M. Fourhorn, renvoient au moment ou à la procédure de nomination du TAN, la validité de la nomination du TAN n’est pas remise en question dans la demande en l’espèce.

[41] Les observations des défendeurs sont axées uniquement sur la compétence de notre Cour pour entendre l’affaire. Les parties conviennent, en fin de compte, que notre Cour est compétente.

(2) La décision était‐elle équitable sur le plan de la procédure?

a) Le droit à un décideur impartial

[42] Le demandeur affirme que M. Hill n’était ni impartial ni indépendant, et qu’il y a une crainte raisonnable de partialité, étant donné que M. Hill dépendait de Nekaneet pour sa subsistance. Cela contrevient à l’article 8.02 de la Constitution, comme il est établi au paragraphe 7 ci‐dessus.

[43] Le demandeur soutient que Nekaneet a récompensé M. Hill pour avoir rejeté l’appel au moyen de taux de location préférentiels qui sont incompatibles avec sa convention de bail antérieure. Il conteste aussi les dettes en souffrance pour le loyer d’une somme approximative de 2 500 $ que M. Hill ne semble pas avoir payé à Nekaneet ou à New Horizon.

[44] De plus, le demandeur soutient que M. Hill était conseiller juridique pour le compte de Nekaneet et d’un comité de la Fédération des nations autochtones souveraines [la FSIN], au sein duquel le chef Francis représentait Nekaneet et que, par conséquent, il n’était ni indépendant ni impartial. Il affirme que M. Hill était dans l’obligation de divulguer cette relation. Enfin, en examinant les factures de M. Hill pour Nekaneet, le demandeur affirme que les montants dépassent la rémunération adéquate qui lui était due pour son rôle au sein du TAN.

[45] Les défendeurs soutiennent qu’il incombe au demandeur d’établir la partialité et que le critère reconnu correspond à la conclusion que tirerait une personne bien renseignée qui étudierait la question de façon réaliste et pratique. Les défendeurs soutiennent que M. Hill satisfaisait aux qualités prescrites par l’article 8.02 de la Constitution, notamment celle voulant qu’il n’entretienne aucun [traduction] « lien important avec Nekaneet par l’intermédiaire de la famille, d’un emploi ou d’une entreprise », bien que le degré d’importance de ce lien ne soit pas défini dans la Loi. Ils affirment qu’il n’y a aucune partialité.

[46] Les défendeurs soutiennent que le demandeur a choisi M. Hill comme seul membre du TAN pour entendre son appel et qu’aucune question concernant sa capacité d’entendre l’appel n’a été soulevée avant la décision. Ils affirment que, bien qu’un bail écrit n’ait pas été signé avant septembre 2020, le bail de M. Hill avait été renouvelé en 2019. Selon les défendeurs, même si le chef Francis siégeait au conseil d’administration de New Horizon et qu’il avait signé l’entente de renouvellement, il n’y a aucune preuve d’intervention directe de sa part ou de la part du Conseil de bande pour l’établissement du bail, puisque cette tâche est confiée à un tiers.

[47] Les défendeurs soutiennent que M. Hill n’a pas agi en qualité de conseiller juridique pour le compte de Nekaneet, mais qu’il rendait plutôt des comptes à titre de membre du TAN, ce qui est autorisé.

[48] Les défendeurs signalent que, dans ses observations, le demandeur a fait abstraction du fait que New Horizon avait tardé sept mois avant le dépôt de l’appel pour exécuter la convention de bail et qu’il existait déjà une offre en vue de prolonger le bail selon les mêmes modalités financières lors de son expiration en 2019.

[49] En ce qui concerne l’absence de divulgation d’un conflit d’intérêts potentiel, les défendeurs affirment que c’est le demandeur qui a choisi M. Hill comme seul membre du tribunal. De plus, le conseiller juridique du demandeur représentait une autre partie qui avait interjeté un appel concernant M. Hill, et son conseiller juridique était au fait de la convention de location, mais n’a formulé aucune allégation de partialité dans cette affaire antérieure.

b) Le droit d’être entendu

[50] Le demandeur soutient qu’en application de l’article 19.06 de la Loi, énoncé ci‐dessus au paragraphe 14, son appel justifiait un degré élevé d’équité procédurale, y compris la tenue d’une audience, ce qui ne lui a jamais été accordé.

[51] Les défendeurs affirment que M. Hill a attentivement examiné les faits et les allégations dont il était saisi et qu’il a adéquatement exercé le pouvoir qui lui était conféré en vertu de l’article 19.08 de la Loi en décidant de ne pas tenir d’audience. Cet article est ainsi libellé :

[traduction]

Le tribunal d’appel de Nekaneet n’est pas lié par les règles de preuve ou toute autre loi applicable aux procédures judiciaires, et il a le pouvoir de déterminer l’admissibilité, la pertinence et le poids de tout élément de preuve. Le tribunal d’appel de Nekaneet peut déterminer la façon dont les témoignages sous serment seront admis.

(3) Le caractère raisonnable de la décision

[52] Le demandeur affirme que M. Hill a omis de tenir compte des observations et de la jurisprudence citées dans l’avis d’appel. Étant donné que ces documents étaient au cœur de sa demande, le demandeur affirme que toute décision quant au manque de fiabilité ou de pertinence justifiait une explication. Le manquement de M. Hill à cet égard a donné lieu à une décision déraisonnable.

[53] Le demandeur soutient que M. Hill a omis d’examiner la question de savoir si les pratiques électorales contrevenaient à la Loi et si cela avait eu des répercussions sur les résultats de l’élection. De plus, M. Hill a indûment exercé son pouvoir discrétionnaire sur la question de savoir si l’élection devait être annulée. Le demandeur soutient que son appel énonçait de manière concise les irrégularités qui remettaient en question l’intégrité de l’élection, ce que M. Hill a omis d’évaluer. Au lieu de cela, M. Hill a incorrectement examiné la question de savoir si le nombre de votes en litige était suffisant pour avoir une incidence sur le gagnant de l’élection.

[54] Les défendeurs affirment que, même si M. Hill était tenu de supposer que les faits allégués par le demandeur pouvaient être prouvés en application de l’article 19.06 de la Loi, il n’était pas tenu d’accepter les arguments juridiques. M. Hill a conclu qu’il n’y avait aucune allégation de fraude et que les allégations du demandeur portant sur la mise sous scellés et le verrouillage des boîtes de scrutin étaient de nature technique, ne justifiaient pas une évaluation du dépouillement des votes et n’exigeaient pas l’annulation des résultats de l’élection.

VII. Analyse

(1) M. Hill a‐t‐il bien exercé sa compétence?

[55] Le demandeur, citant Felix Sr. c Sturgeon Lake First Nation, 2011 CF 1139 [Felix], soutient que M. Hill a outrepassé sa compétence. Dans l’affaire Felix, la Cour a analysé les dispositions législatives relatives à l’élection selon les coutumes et a souligné qu’il y existait une procédure d’appel en deux étapes que le tribunal d’appel devait suivre. La première étape consistait à déterminer si l’appel est étayé par une preuve suffisante justifiant la tenue d’une audience. La Cour a conclu qu’au moment de déterminer si la preuve était suffisante pour passer à la deuxième étape de la procédure d’appel, le tribunal est allé au‐delà de la preuve mentionnée dans les documents de l’appel. Ce faisant, le tribunal aurait dû donner au demandeur la possibilité de réfuter la preuve contraire dans le cadre d’une audience (Felix, aux para 39 et 40).

[56] Les articles ci‐après, en plus des articles 19.06 et 19.08 de la Loi cités ci‐dessus, établissent également les limites de la compétence du TAN :

[traduction]

Le tribunal d’appel de Nekaneet a compétence pour entendre et résoudre tout conflit ou litige concernant une question régie par une loi de Nekaneet ou pour traiter des manquements à une loi de Nekaneet au moyen de recours et de procédures justes et équitables, conformément aux lois de Nekaneet [Constitution, article 8.08].

Le tribunal d’appel de Nekaneet doit être assujetti aux règles et aux procédures décrites dans les lois de Nekaneet régissant le tribunal d’appel de Nekaneet et, en l’absence de telles lois, le tribunal d’appel de Nekaneet, usant de son pouvoir discrétionnaire absolu, déterminera les règles et les procédures qui sont économiques, rapides et efficaces, pour que les questions soient réglées d’une manière juste et équitable ainsi que dans le respect de la justice naturelle et de l’équité procédurale [Constitution, article 8.10].

[57] Les articles 19.06 et 19.08 de la Loi ainsi que les dispositions susmentionnées n’imposent aucune limite quant au pouvoir du TAN ou à l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. En examinant la décision, la Constitution et la Loi, je conclus que rien n’appuie l’affirmation du demandeur selon laquelle M. Hill a outrepassé sa compétence. Comme je l’ai indiqué au paragraphe 16 ci‐dessus, M. Hill a examiné le pouvoir qui lui est conféré en vertu de l’article 19.06 de la Loi, puis a répondu aux allégations et aux possibilités formulées dans les documents du demandeur. Il a souligné que les allégations figurant dans les documents d’affidavit n’abordaient aucune des deux possibilités qui, selon le demandeur, étaient susceptibles de se produire.

[58] Le demandeur a relevé six paragraphes qui illustraient prétendument les points de vue personnels de M. Hill. Les circonstances décrites dans ces paragraphes figurent dans l’affidavit du chef Francis ainsi que dans la déclaration de la PE qui était annexée comme pièce à l’affidavit du chef Francis. Par conséquent, on ne saurait affirmer qu’il s’agissait des points de vue personnels de M. Hill.

[59] En conséquence, je conclus que M. Hill n’a commis aucune erreur dans l’interprétation de sa compétence en qualité de membre du TAN. M. Hill a expliqué de manière raisonnable ce qui était attendu de lui aux termes de l’article 19.06 de la Loi. M. Hill n’a commis aucune erreur dans la façon dont il a répondu à la preuve et aux observations du demandeur. L’interprétation de M. Hill de la Loi et la portée de sa compétence étaient raisonnables.

(2) La décision était‐elle équitable sur le plan de la procédure?

a) Le droit à un décideur impartial

[60] Le critère permettant d’établir une crainte raisonnable de partialité a été énoncé par la Cour suprême dans l’arrêt Committee for Justice and Liberty c Canada (Office national de l’énergie) (1976), [1978] 1 RCS 369, au paragraphe 40 :

[40] La Cour d’appel a défini avec justesse le critère applicable dans une affaire de ce genre. Selon le passage précité, la crainte de partialité doit être raisonnable et le fait d’une personne sensée et raisonnable qui se poserait elle‐même la question et prendrait les renseignements nécessaires à ce sujet. Selon les termes de la Cour d’appel, ce critère consiste à se demander « à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. Croirait‐elle que, selon toute vraisemblance, M. Crowe, consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste? »

[61] Le seuil à franchir pour conclure à une crainte raisonnable de partialité est élevé, la preuve d’une affirmation incombant à la personne qui la fait (Oleynik c Canada (Procureur général), 2020 CAF 5, au para 57; Sturgeon Lake Cree Nation c Hamelin, 2015 CSC 25, aux para 25 et 26). De plus, l’impartialité et l’indépendance sont liées à la question de partialité et la forte présomption d’impartialité n’est pas facilement réfutable (Grey c Première Nation de Whitefish Lake no 459, 2020 CF 949, au para 23).

[62] Le demandeur soutient que le critère de la crainte raisonnable de partialité est satisfait. Il appuie son argument sur le bail entre M. Hill et New Horizon ainsi que sur le fait que le rejet de l’appel a donné lieu à des taux de location préférentiels. La preuve avancée par le demandeur est que, en raison de cette relation de bail, les moyens de subsistance de M. Hill dépendent de Nekaneet, ce qui va à l’encontre de l’article 8.02 de la Loi. Le demandeur signale le contre‐interrogatoire du chef Francis, dans lequel il a décrit M. Hill comme un partenaire d’affaires et pendant lequel il a concédé que les négociations de bail constituaient une opération commerciale.

[63] Le demandeur soutient également que M. Hill agit à titre de conseiller juridique pour Nekaneet et, par conséquent, qu’il n’est pas un arbitre indépendant et impartial. De plus, le demandeur affirme que les montants facturés par M. Hill à Nekaneet dépassaient la rémunération adéquate qui devait lui être versée pour son rôle en tant que membre du TAN.

[64] L’argument selon lequel la convention de bail a donné lieu à des taux de location préférentiels, ce qui aurait entaché M. Hill de partialité, est une allégation grave qui doit s’appuyer sur des éléments de preuve. En me penchant d’abord sur la relation de location, je ne tire pas la conclusion qu’une relation de location de longue date, même pour une petite partie de l’ensemble de la zone de location, puisse atteindre un niveau d’impartialité justifiant une conclusion de partialité. Comme le signalent les défendeurs, le délai de New Horizon associé à l’exécution d’une nouvelle convention de bail a commencé sept mois avant le dépôt de l’appel. En outre, il y avait déjà une offre en vue de prolonger le bail selon les mêmes modalités financières lors de son expiration en 2019. Je conclus que les éléments de preuve sont insuffisants pour établir un lien entre les négociations du bail et le rejet de l’appel. Compte tenu du manque d’éléments de preuve, une personne renseignée ne tirerait pas la conclusion que M. Hill était partial. Les arguments du demandeur se résument à de simples conjectures, ce qui ne suffit pas pour obtenir gain de cause sur ce point.

[65] Je suis tout aussi peu convaincu que les moyens de subsistance de M. Hill dépendent de Nekaneet. Il est un peu exagéré de laisser entendre que les moyens de subsistance de M. Hill en tant qu’avocat seraient touchés par la résiliation ou l’annulation d’un bail avec New Horizon. L’argument selon lequel les moyens de subsistance de M. Hill dépendent de la rémunération reçue en qualité de membre du TAN est également sans fondement. Si cela était vrai, on pourrait considérer que les moyens de subsistance de chaque membre du TAN dépendent de Nekaneet.

[66] Je suis convaincu par l’argument des défendeurs selon lequel M. Hill n’a pas agi en qualité de conseiller juridique pour le compte de Nekaneet, mais qu’il rendait plutôt des comptes à titre de membre du TAN. Je retiens le point du demandeur voulant que la RCB ait établi la rémunération des membres du TAN à 1 000 $ par jour, en plus des indemnités de déplacement et des dépenses, et que M. Hill a facturé un montant plus important que celui‐ci. Ces circonstances peuvent indiquer que Nekaneet, par inadvertance, a payé M. Hill plus que ce qui était établi dans la RCB ou cela pourrait signifier que les parties ont convenu d’une rémunération plus élevée. Il n’existe aucune preuve expliquant l’existence de cet écart et, de toute façon, la réception d’une rémunération plus importante que celle qui devait être versée par Nekaneet ne permet pas en soi d’établir la partialité.

[67] Le demandeur soutient que M. Hill a agi à titre de conseiller juridique pour la commission de la FSIN, dont le membre représentant Nekaneet est le chef Francis. Je ne suis pas convaincu que cela crée une relation directe établissant la partialité de M. Hill. Rien n’indique que la commission de la FSIN est directement contrôlée par Nekaneet, et rien n’indique que le chef Francis est l’esprit directeur derrière cette commission.

[68] Pour ces motifs, je ne tire aucune conclusion selon laquelle la relation entre les parties s’élève au niveau atteignant le seuil d’importance requis pour réussir à prouver la partialité.

b) Le droit d’être entendu

[69] Le demandeur signale l’article 19.06 de la Loi à l’appui de son argument selon lequel M. Hill l’ait indûment privé de son droit d’être entendu. Il est ainsi libellé :

[traduction]

Le tribunal d’appel de Nekaneet doit donner aux parties la possibilité de présenter leur preuve respective dans le cadre d’une audience du tribunal d’appel de Nekaneet, sauf si la nature de la demande telle que divulguée de prime abord dans l’avis de demande ne révèle aucun fondement juridique pour la demande ou ne contient aucun motif qui justifierait la demande si le fondement factuel pour de tels motifs était établi.

[Non souligné dans l’original.]

[70] L’arrêt Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 RCS 27 [Rizzo] est l’arrêt de principe sur l’interprétation des lois. Le juge Iacobucci écrivait au paragraphe 21 :

[21] Bien que l’interprétation législative ait fait couler beaucoup d’encre (voir par ex. Ruth Sullivan, Statutory Interpretation (1997); Ruth Sullivan, Driedger on the Construction of Statutes (3e éd. 1994) (ci‐après « Construction of Statutes »); Pierre‐André Côté, Interprétation des lois (2e éd. 1990)), Elmer Driedger dans son ouvrage intitulé Construction of Statutes (2e éd. 1983) résume le mieux la méthode que je privilégie. Il reconnaît que l’interprétation législative ne peut pas être fondée sur le seul libellé du texte de loi. À la p. 87, il dit :

[traduction] Aujourd’hui il n’y a qu’un seul principe ou solution : il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur.

Parmi les arrêts récents qui ont cité le passage ci‐dessus en l’approuvant, mentionnons : R. c. Hydro‐Québec (R.C.S.); Banque Royale du Canada c. Sparrow Electric Corp. (R.C.S.); Verdun c. Banque Toronto‐Dominion (R.C.S.); Friesen c. Canada (R.C.S.).

[71] Selon l’arrêt Rizzo, lorsque le libellé d’une disposition est clair et sans ambiguïté, le sens qui en découle naturellement devrait avoir une grande importance dans le processus d’interprétation. Pour réfuter un tel sens, il faudra une preuve considérable que le sens ordinaire ne peut pas s’harmoniser avec le texte législatif en question, à moins que la Cour n’adopte un sens différent. La Cour d’appel fédérale a jugé que les codes électoraux coutumiers adoptés par les Premières Nations doivent être interprétés selon cette approche : Boucher c Fitzpatrick, 2012 CAF 212, au para 25.

[72] En appliquant les règles de l’interprétation des lois à la disposition ci‐dessus, je conclus qu’il n’existe aucune confusion concernant la nature discrétionnaire de la décision de tenir une audience ou non. Il n’est pas nécessaire de tenir une audience a) lorsqu’il y a une incapacité d’établir le fondement juridique d’une demande ou b) lorsqu’il n’y a aucun motif qui justifierait une demande même [traduction] « si le fondement factuel pour de tels motifs était établi ». La seule exigence relative à la tenue d’une audience est lorsqu’aucun de ces deux éléments n’est établi. Un examen de la décision montre que M. Hill s’est penché sur ces facteurs et a conclu qu’aucun de ceux‐ci n’était présent.

[73] Le demandeur cite l’affaire Papequash pour affirmer que M. Hill a utilisé le mauvais critère lorsqu’il a appliqué l’approche mathématique par opposition au critère portant sur l’« intégrité du processus électoral ». Je conclus que l’affaire Papequash se distingue de l’affaire en l’espèce. Dans l’affaire Papequash, il y avait une importante preuve non controversée qu’une fraude électorale avait été commise, contrairement à la présente affaire. Dans l’affaire Papequash, les conclusions de fraude électorale ou de corruption ont mené à la conclusion que l’intégrité de l’élection était compromise, ce qui a poussé la Cour à infirmer ou à annuler l’élection. Dans la présente affaire, il y avait des allégations selon lesquelles les cadenas et les scellés n’avaient pas été apposés; cependant, la preuve n’était pas claire ou non controversée.

[74] M. Hill n’était saisi d’aucune preuve de fraude électorale qui rendrait l’affaire Papequash instructive pour la présente affaire, à l’exception des principes juridiques dont il a été question. Il n’y avait qu’une affirmation sans fondement selon laquelle, puisque les cadenas et les scellés n’avaient pas été apposés sur les boîtes de scrutin, les boîtes de scrutin auraient pu être altérées. Plusieurs électeurs ont signé des affidavits qui laissaient entendre que les cadenas étaient manquants ou n’étaient pas bien verrouillés, alors que le chef Francis a affirmé que des cadenas et des scellés avaient été apposés sur les boîtes de scrutin.

[75] De manière similaire, les affidavits de Clarence Anderson et de Barry Buffalocalf, inclus dans les documents d’appel et mis en évidence par le demandeur aux paragraphes 23 et 24 de son mémoire des arguments, sont également incohérents en ce qui a trait aux cadenas. Au paragraphe 7 de son affidavit, Clarence Anderson a affirmé [traduction] « [qu’]il n’y avait aucun cadenas sur l’un ou l’autre des boîtes de scrutin ». Au paragraphe 8 de son affidavit, Barry Buffalocalf a affirmé que [traduction] « [b]ien qu’il y ait eu un cadenas sur le moraillon de la boîte de scrutin pour le poste de chef, ce cadenas n’était pas verrouillé lorsque j’ai remis mes bulletins de vote aux fonctionnaires électoraux pour les déposer dans les boîtes de scrutin ». Les autres personnes nommées au paragraphe 22 du mémoire des arguments du demandeur ont également affirmé qu’il n’y avait pas de scellés ou qu’il n’y avait pas de cadenas sur les boîtes de scrutin.

[76] Tel que susmentionné, la preuve n’est pas non controversée et il n’y a pas de preuve de l’altération alléguée. Au lieu de cela, on ne peut conjecturer qu’une altération aurait pu avoir lieu.

[77] Compte tenu de ce dont M. Hill était saisi, je ne relève aucune erreur dans la décision de M. Hill selon laquelle aucune audience n’était nécessaire selon l’application de l’article 19.06 de la Loi. Par conséquent, il n’y a pas eu de manquement à l’équité procédurale. Que M. Hill ait commis une erreur en concluant que le demandeur n’a établi aucun fondement juridique ou motif relève du caractère raisonnable de la décision dont il est question ci‐après.

(3) La décision était‐elle raisonnable?

[78] Le demandeur soutient que la décision était déraisonnable, car M. Hill a appliqué le mauvais critère pour l’annulation d’une élection. Le demandeur s’appuie sur l’affaire Papequash, dans laquelle la Cour a affirmé ceci au paragraphe 34 :

Ce ne sont pas tous les manquements à la Loi ou au Règlement qui justifient l’annulation d’une élection au sein d’une bande. Il n’est pas rare qu’une distinction soit faite entre les causes impliquant des irrégularités procédurales de nature technique et les causes qui traitent de fraude ou de corruption. Dans la première situation, il est possible qu’une approche mathématique prudente (p. ex. le critère du nombre magique inversé) soit nécessaire pour établir la probabilité qu’un résultat différent soit obtenu. Cependant, lorsque le résultat d’une élection a été faussé par une fraude au point de remettre en question l’intégrité du processus électoral, une annulation peut être justifiée, peu importe le nombre de votes valides prouvé. L’une des raisons de l’adoption d’une approche plus rigoureuse en cas de corruption électorale est qu’il pourrait être impossible de confirmer l’ampleur exacte de l’inconduite, ou il se peut que la conduite soit mal interprétée. Cela est particulièrement vrai lorsque des allégations d’achat de votes sont soulevées et lorsque les deux parties à l’opération sont coupables et ont souvent tendance à agir secrètement : voir Gadwa c. Kehewin First Nation, 2016 CF 597, [2016] ACF no 569 (QL).

[79] Le demandeur soutient qu’au regard de l’avis de demande dont M. Hill était saisi, il a expressément plaidé que l’intégrité du processus électoral était remise en question.

[80] L’annulation des résultats de l’élection est un recours discrétionnaire, même en cas de fraude soupçonnée (affaire Papequash, au para 34). La Cour, dans l’affaire McEwing c Canada (Procureur général), 2013 CF 525, au paragraphe 82 s’exprime en ces termes : « [L]a Cour ne devrait exercer son pouvoir discrétionnaire de façon à annuler une élection que lorsqu’il existe une raison sérieuse de croire que les résultats auraient été différents si la fraude n’avait pas été commise ou lorsqu’un candidat ou son agent officiel a participé à la fraude. »

[81] Étant donné que M. Hill n’était saisi d’aucune allégation de fraude, au‐delà de la pure conjecture qu’une telle fraude avait été commise, il a déterminé que l’approche mathématique était requise à l’étape initiale.

[82] Je ne suis pas d’avis que M. Hill a consulté la preuve dont il était saisi de manière déraisonnable ou qu’il a commis une erreur dans son application du critère approprié. Il y a une différence entre le fait de plaider que l’intégrité du processus électoral est remise en question et le fait de présenter des preuves selon lesquelles elle est remise en question.

[83] Le demandeur a présenté deux explications possibles concernant ce qui aurait pu se produire lors du dépouillement des votes de l’élection. Cependant, il n’y avait aucune preuve directe pour soutenir expressément une conclusion selon laquelle l’intégrité de l’élection était compromise par cette altération alléguée des boîtes de scrutin. L’altération des boîtes de scrutin a été soulevée comme une possibilité, mais il n’y avait aucune preuve que cela s’était effectivement produit. Ce manque de preuve distingue la présente espèce de l’affaire Papequash, comme il en a été question ci‐dessus. Bien que, selon la preuve dont M. Hill était saisi, un résultat différent ait été possible, il ne s’agit pas d’un critère pour l’évaluation du caractère raisonnable d’une décision. Pour tirer une autre conclusion, il faudrait soupeser à nouveau la preuve, ce que notre Cour n’est pas en mesure de faire dans le cadre d’un contrôle judiciaire.

[84] Dans l’avis de demande, le demandeur a également présenté le fondement juridique à l’appui de sa position selon laquelle le défaut de sceller les boîtes de scrutin pourrait donner lieu à une annulation d’élection (St Mary’s (District) (Re), 2017 NSSC 8, au para 17 [St Mary’s]; Frobisher Bay Municipal Election Re, [1986] NWTR 183, aux para 46, 49, 56, 59 [Frobisher Bay]). Il affirme que M. Hill n’a pas mentionné cette jurisprudence dans la décision. Je conclus que le fait de ne pas avoir fait référence aux affaires St Mary’s et Frobisher Bay ne rend pas la décision de M. Hill déraisonnable.

[85] Je souligne que les motifs du décideur ne sont pas jugés au regard d’une norme de perfection. Le fait qu’un décideur ne fasse pas référence à tous les arguments, dispositions législatives, précédents ou autres détails que le juge siégeant en révision aurait voulu y lire ne constitue pas un fondement justifiant à lui seul d’infirmer une décision (Vavilov, au para 91).

[86] De toute façon, je conclus que l’affaire St Mary’s se distingue de la présente espèce. Dans cette affaire, il y avait un exposé conjoint des faits et il était incontesté qu’il y avait des irrégularités s’écartant de la loi en question (St Mary’s, aux para 11 et 12). Je conclus également que l’affaire Frobisher Bay se distingue de la présente espèce. Dans l’affaire Frobisher Bay, il y avait une preuve de pratique électorale corrompue comportant la contrefaçon des initiales d’un membre du personnel de scrutin sur 85 bulletins de vote (Frobisher Bay, au para 56). Comme dans l’affaire Frobisher Bay, le demandeur signale l’absence de scellés ou de cadenas appropriés. Cependant, dans cette affaire, la Cour n’a pas conclu que les scellés ou les cadenas en cause suffisaient en soi à infirmer l’élection (Frobisher Bay, au para 46). À mon avis, la Cour dans l’affaire Frobisher Bay a été saisie d’une preuve non conjecturale selon laquelle on s’était livré à une pratique électorale corrompue, contrairement à la présente espèce.

[87] Je conclus que la décision est intrinsèquement cohérente, comprend une analyse rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles (Vavilov, au para 85).

VIII. Conclusion

[88] Pour tous les motifs qui précèdent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

A. Dépens

[89] Le demandeur sollicite l’autorisation de présenter un mémoire d’honoraires émanant d’un avocat d’une somme de 45 000 $. S’il est débouté, il maintient sa demande de dépens contre Nekaneet ou, subsidiairement, qu’aucune ordonnance de dépens ne soit rendue. Le demandeur soutient que la présente espèce en est une d’intérêt public et que ce facteur penche en sa faveur.

[90] Les défendeurs demandent que des dépens leur soient adjugés en application du paragraphe 400(3) des Règles des Cours fédérales.

[91] Mon collègue, le juge Sébastien Grammond, a résumé les principes relatifs à l’adjudication des dépens dans la décision Whalen c Première Nation Fort McMurray no 468, 2019 CF 1119 [Whalen]. Il s’est appuyé sur l’arrêt Colombie‐Britannique (Ministre des Forêts) c Bande indienne d’Okanagan, 2003 CSC 71 [Okanagan] pour établir les principes suivants relatifs à l’adjudication des dépens, aux paragraphes 3 à 5 :

Le premier objectif et le plus traditionnel en matière d’adjudication de dépens est l’indemnisation de la partie ayant gain de cause. [...]

Ainsi, de diverses manières, l’adjudication des dépens incite les parties à utiliser rationnellement les ressources judiciaires limitées. [...] De même, on dit que l’adjudication des dépens décourage les poursuites frivoles ou vexatoires, car les plaideurs qui intentent de telles poursuites savent qu’ils devront indemniser l’autre partie.

En troisième lieu, l’adjudication des dépens peut contribuer à faciliter l’accès à la justice.

[92] En plus de ces principes, les articles 400 à 422 des Règles des Cours fédérales s’appliquent également. Le paragraphe 400(1) prévoit que le juge de première instance a le pouvoir discrétionnaire d’adjuger les dépens. Ce pouvoir discrétionnaire doit être exercé judiciairement. De plus, le mécanisme par défaut pour l’adjudication des dépens est un tarif (Whalen, au para 8).

[93] Les autres outils dont dispose la Cour sont les « dépens avocat‐client », habituellement utilisés pour sanctionner la conduite répréhensible d’une partie dans une instance, ainsi que les sommes globales, prévues au paragraphe 400(4) des Règles des Cours fédérales (Whalen, aux para 10 et 11).

[94] Comme l’a affirmé mon collègue, le juge Luc Martineau, dans la décision Eurocopter c Bell Helicopter Textron Canada Limitée, 2012 CF 842 [Eurocopter], au paragraphe 9 : « [L]a taxation des dépens comporte inévitablement un risque d’arbitraire et de justice approximative de la part de la Cour. »

[95] Un autre principe est énoncé dans la décision Knebush c Maynard, 2014 CF 1247, dans laquelle la Cour a affirmé que, si un contrôle judiciaire traite adéquatement une question de droit des Premières Nations, il s’agit d’une question d’intérêt public, car la Première Nation a bénéficié de la clarté et du règlement de la question (au para 60). À ce titre, les particuliers pourraient avoir droit à des dépens. Dans les décisions Coutlee c Première nation Lower Nicola, 2015 CF 1305, et Strawberry c Première nation O’Chiese, 2017 CF 869, la Cour a appliqué un raisonnement similaire.

[96] J’exerce mon pouvoir discrétionnaire afin d’adjuger une somme forfaitaire à titre de dépens au défendeur. Je ne suis pas d’avis qu’il s’agissait d’une nouvelle question ou que celle‐ci aidera la communauté de par sa clarté ou son aide future dans son processus électoral. Je conclus également que les actions du demandeur en l’espèce ont considérablement augmenté les dépenses pour l’ensemble des parties concernées. Le demandeur a mené un long contre‐interrogatoire (selon sa propre description) à l’égard d’un affidavit qui ne contenait aucun document qui aurait eu une incidence sur l’analyse de notre Cour. De plus, le demandeur a déposé un volume important de documents qui n’avait aucune incidence directe sur le contrôle judiciaire en l’espèce. En outre, la formulation d’une grave allégation de partialité pour des motifs relevant de la conjecture justifie l’adjudication de dépens à l’encontre du demandeur.

[97] Les défendeurs se voient adjuger une somme forfaitaire de 5 000 $, somme qui comprend les taxes et les débours, à titre de dépens.


JUGEMENT dans le dossier T‐653‐20

LA COUR STATUE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. La somme de 5 000 $ est adjugée aux défendeurs à titre de dépens.

« Paul Favel »

Juge

Traduction certifiée conforme

Caroline Tardif


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‐653‐20

INTITULÉ :

BRENDAN ANDERSON c ALVIN FRANCIS, SHAUNA BUFFALOCALF, WESLEY DANIEL, ROBERTA FRANCIS et PREMIÈRE NATION DE NEKANEET

LIEU DE L’AUDIENCE :

Tenue par vidéoconférence

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 16 février 2021

JUGEMENT ET MOTIFS :

Le juge FAVEL

DATE DES MOTIFS :

Le 2 septembre 2021

COMPARUTIONS :

Nathan Phillips

Pour le demandeur

 

Thomas Waller, c.r.

Pour les défendeurs

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Nathan Phillips

Phillips & Co.

Avocats

Regina, Saskatchewan

Pour le demandeur

 

Thomas Waller

Olive Waller Zinkhan & Waller LLP

Avocats

Regina, Saskatchewan

Pour les défendeurs

 

 

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