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Date : 20050413

Dossier : IMM-3058-04

Référence : 2005 CF 499

Ottawa (Ontario), le 13 avril 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE von FINCKENSTEIN                                        

ENTRE :

                                                        LAM BAO QUYNH NGO

                                                                                                                                demanderesse

                                                                            et

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                 La demanderesse, Lam Bao Quynh Ngo, est citoyenne canadienne et réside àBowmanville (Ontario). Elle a demandé à parrainer sa mère ainsi que trois autres membres de sa famille, Lam Bao Quoc Ngo (date de naissance : 15 mai 1974), Lam Bao Van Ngo (date de naissance : 12 janvier 1976) et Lam Bao Toan Ngo (Toan) (date de naissance : 22 novembre 1978), tous citoyens du Vietnam.

[2]                 En octobre 2000, la demanderesse et son mari, Ken (Quang Quyen) Thang, se sont adressés au Centre de traitement des demandes (CTD) de Mississauga pour obtenir des renseignements sur la procédure de parrainage. Selon la demanderesse, on leur a dit de remplir des formulaires dans le cadre d'un projet pilote centralisant au CTD de Mississauga le traitement des demandes de parrainage concernant le Vietnam. On leur a également dit que, dans le cadre de ce projet pilote, les documents requis, dont les certificats de police et les détails des passeports, devaient être fournis avant que la demande puisse être présentée.

[3]                 En raison des règles appliquées par le gouvernement du Vietnam, les documents officiels n'ont pu être obtenus avant le 22 février 2002. Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) a accusé réception le 24 mai 2002 du formulaire de demande dûment rempli par la demanderesse ainsi que des droits afférents au traitement de la demande . Les notes du Système de traitement informatisé des dossiers d'immigration (STIDI) indiquent que le dossier a été envoyé au Haut Commissariat à Singapour, où la demande a été traitée.

[4]                La demande de parrainage des trois membres de la famille (Lam Bao Quoc Ngo, Lam Bao Van Ngo et Toan) a été rejetée le 27 février 2004. Le motif du refus était que, à la date du dépôt de la demande (soit le 21 mars 2002), aucun d'eux n'était une personne à charge car ils étaient tous âgés de plus de 22 ans et avaient cessé d'être inscrits à un établissement d'enseignement postsecondaire accrédité et de le fréquenter.

[5]                Les demandeurs soutiennent qu'on devrait considérer que leur demande (dans le cas de Toan) est datée d'octobre 2000, soit le moment auquel ils ont pris des renseignements. À l'époque, Toan n'avait pas encore 22 ans, il était inscrit à un établissement d'enseignement postsecondaire et il était donc une personne à charge. La demanderesse fait valoir que le retard est attribuable aux renseignements erronés fournis par le défendeur, qui lui aurait indiqué, à tort, qu'il n'était pas possible de présenter de demande avant que tous les documents justificatifs soient réunis.

[6]                Les deux parties conviennent que la norme de contrôle des décisions des agents des visas est celle de la décision raisonnable simpliciter (voir Yaghoubian c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2003] A.C.F. no 806, par. 23 à 33).

[7]                Les dispositions législatives applicables au parrainage sont très simples. Les paragraphes 12(1), 13(1) et 14(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (LIPR) prévoient ce qui suit :

12. (1) La sélection des étrangers de la catégorie « regroupement familial » se fait en fonction de la relation qu'ils ont avec un citoyen canadien ou un résident permanent, à titre d'époux, de conjoint de fait, d'enfant ou de père ou mère ou à titre d'autre membre de la famille prévu par règlement.

[...]

13.(1) Tout citoyen canadien et tout résident permanent peuvent, sous réserve des règlements, parrainer ltranger de la catégorie « regroupement familial » .

[...]

14. (1) Les règlements régissent l'application de la présente section et définissent, pour l'application de la présente loi, les termes qui y sont employés.


[...]

L'article 2 du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés (LIPR) prévoit ce qui suit :

« enfant à charge » L'enfant qui :

                        a) d'une part, par rapport à l'un ou l'autre de ses parents :

                                    (i) soit en est l'enfant biologique et n'a pas été adopté par une personne autre que son époux ou conjoint de fait,

                                    (ii) soit en est l'enfant adoptif;

                        b) d'autre part, remplit l'une des conditions suivantes :

                                    (i) il est âgé de moins de vingt-deux ans et n'est pas un époux ou conjoint de fait,

                                    (ii) il est un étudiant âgé qui n'a pas cessé de dépendre, pour l'essentiel, du soutien financier de l'un ou l'autre de ses parents à compter du moment où il a atteint l'âge de vingt-deux ans ou est devenu, avant cet âge, un époux ou conjoint de fait et qui, à la fois :

                                                (A) n'a pas cessé d'être inscrit à un établissement d'enseignement postsecondaire accrédité par les autorités gouvernementales compétentes et de fréquenter celui-ci,

                                                (B) y suit activement à temps plein des cours de formation générale, théorique ou professionnelle,

                                    (iii) il est âgé de vingt-deux ans ou plus, n'a pas cessé de dépendre, pour l'essentiel, du soutien financier de l'un ou l'autre de ses parents à compter du moment où il a atteint l'âge de vingt-deux ans et ne peut subvenir à ses besoins du fait de son état physique ou mental.

[8]                Enfin, le Guide OP2 intitulé « Traitement des demandes présentées par des membres de la catégorie du regroupement familial » , en date du 11 février 2005, prévoit ce qui suit à la page 8 :


5.3. Quand a-t-on affaire à une demande de la catégorie du regroupement familial?

Pour les cas visés par la restructuration des opérations pour la catégorie du regroupement familial (époux, conjoints de fait, partenaires conjugaux ou enfants à charge), le CTD-M doit recevoir, pour toute demande présentée par des membres de la catégorie du recrutement familial, un IMM 1344AF [Demande de parrainage et engagement], un IMM 0008FGÉN [Demande de résidence permanente] dûment rempli et signé et le montant exact du droit de traitement. S'il manque un de ces trois éléments, le CTD retourne la demande au répondant.

Pour les autres demandes faisant partie de la catégorie du recrutement familial, le CTD-M doit recevoir le IMM 1344AF et les droits de traitement, et le bureau des visas doit recevoir le IMM 0008FGÉN dûment rempli et signé.

5.4. Date déterminant lge des enfants à charge

Lge des enfants à charge est arrêté à la date de réception de l'IMM 1344AF dûment rempli et des droits de traitement exacts au CTD-M. Les enfants à charge doivent être âgés de moins de 22 ans à la date de réception de la demande de parrainage.

[9]                 Il ressort de ce qui précède qu'un citoyen canadien peut parrainer un membre de sa famille si, au moment où la demande est déposée et où les droits sont payés, ledit membre de la famille est une personne à charge. Les demandeurs soutiennent, en se fondant sur Wong c. Canada (M.E.I.), [1986] A.C.F. no 129, et sur Choi c. Canada (M.E.I.), [1992] 1 C.F. 763, que la procédure a en fait été entamée lorsqu'ils ont pris des renseignements en octobre 2000. À l'époque, Toan n'avait pas encore 22 ans et il était inscrit à un établissement d'enseignement postsecondaire.

[10]             Ils ont attiré l'attention de la Cour sur le passage suivant de Wong:


Seul un agent des visas, qui, par définition, est un agent en poste à l'étranger, était habilité à délivrer ou à refuser de délivrer le visa. Tout examen de la demande qui incombe à l'agent des visas devait nécessairement avoir lieu à l'étranger. Il me semble toutefois qu'une demande de visa d'immigrant est présentée à partir du moment oùest engagéen bonne et due forme le processus aboutissant à la délivrance du visa ou au refus de la délivrer et non pas seulement lorsque le dossier est confiéau fonctionnaire particulier qui est autoriséà se prononcer sur la demande.

                                                                  (Non souligné dans l'original.)

[11]            Ils ont également attiré l'attention de la Cour sur le passage suivant de Choi :

13 Dans l'arrêt Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration c. Tsiafakis, [1997] 2 C.F. 216, à la page 224, le juge Le Dain a statué comme suit au nom de cette Cour:

[...]

On pourrait peut-être dire qu'un devoir corrélatif semblable existe en l'espèce[...] mais lorsque le gouvernement canadien s'engage, par l'entremise de ses agents, à fournir à ceux qui veulent immigrer des renseignements sur la façon de s'y prendre, il s'engage pour le moins à les bien renseigner. Cela ne signifie [page770] pas que les autorités canadiennes doivent faire l'exégèse détaillée de la loi et des procédures en matière d'immigration, ni fournir aux immigrants éventuels des avis juridiques sur les conséquences juridiques des choix offerts, mais il n'en reste pas moins que les autorités de l'immigration sont tenues en toute équitéde fournir les renseignements fondamentaux sur les façons de faire une demande, et de rendre disponibles les formules appropriées.

14 L'équité peut ne rien demander de plus que la présentation exacte des renseignements, mais assurément elle exige au moins cela. Pour les gouvernements tout comme pour les particuliers, l'honnêteté est la meilleure règle à suivre.                              (Non souligné dans l'original.)


[12]            Aucune de ces deux décisions ne me paraît utile. Le point de départ de la procédure, suivant Choi, précité, est la date à laquelle les documents sont présentés à CIC. En l'espèce, cela ne s'est pas produit avant le 21 mars 2002. Il est absurde de considérer que le point de départ est la date à laquelle un demandeur prend des renseignements ou celle à laquelle il reçoit les formulaires à remplir. À ce stade, aucune demande n'a encore été faite et aucun droit n'a été payé. Les gens qui reçoivent des formulaires de demande ou se renseignent ne donnent pas tous nécessairement suite à leurs démarches. Il serait impossible de faire le suivi de ceux qui ont pris des renseignements ou ont reçu des formulaires de demande et des dates auxquelles cela s'est produit. Ainsi, les demandeurs pourraient être « bloqués » dans le système en se contentant de demander un formulaire, puis pourraient décider, des années plus tard, de donner suite à leur demande.

[13]            Je ne conteste pas non plus l'affirmation selon laquelle « les autorités de l'immigration sont tenues en toute équité de fournir les renseignements fondamentaux sur les façons de faire une demande, et de rendre disponibles les formules appropriées » (voir Wong, précité). En l'espèce, les autorités de l'immigration se sont acquittées de cette obligation en remettant aux demandeurs les formulaires de demande de parrainage et en leur expliquant qu'ils devaient être remplis, signés et renvoyés avec les droits de traitement. Aucun élément de preuve n'a été produit (sauf un affidavit de la demanderesse) pour indiquer que, dans le cadre du projet pilote, les documents requis, dont les certificats de police, devaient être joints à la demande pour que celle-ci puisse être présentée. L'agent d'immigration nie catégoriquement dans son affidavit qu'une telle politique ou procédure a jamais été suivie. La demanderesse n'a produit aucune preuve écrite pour étayer son argument contraire. Le projet pilote ne concerne la procédure que lorsque la demande et les droits ont été reçus. En résumé, il n'a absolument rien à voir avec ce dont il est question en l'espèce.


[14]            Je ne peux accepter les allégations de la demanderesse voulant :

a)         que les fonctionnaires de l'immigration l'ont induite en erreur concernant l'effet du projet pilote;

b)          que, en conséquence, la présentation de la demande a été retardée de deux ans;

c)         que la demande relative à Toan devrait donc être considérée comme remontant à octobre 2000.

[15]            Ce qui est incontestable, c'est que la demande n'a pas été reçue avant le 21 mars 2002 et que Toan n'était plus une personne à charge à ce moment-là.

[16]            Par conséquent, la demande ne peut pas être accueillie.


                                                    ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE le rejet de la demande.

« Konrad von Finckenstein »

                     Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.


                                                 COUR FÉDÉRALE

                                        Avocats inscrits au dossier

DOSSIER :                            IMM-3058-04

INTITULÉ :                             LAM BAO QUYNH NGO

demanderesse

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :     TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE : LE MARDI 12 AVRIL 2005   

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE von FINCKENSTEIN

DATE DES MOTIFS :          LE MERCREDI 13 AVRIL 2005

COMPARUTIONS :

Cecil Rotenberg                     POUR LA DEMANDERESSE

Gordon Lee                            POUR LE DÉFENDEUR

                                                                                                                                   

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :    

Cecil Rotenberg

Avocat et notaire public

Toronto (Ontario)                    POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada             POUR LE DÉFENDEUR


COUR FÉDÉRALE

                                                      Date :20050412

                                           Dossier : IMM-3058-04

ENTRE :

LAM BAO QUYNH NGO

demanderesse

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

                                                                   défendeur

                                                                               

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                                               


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