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Date : 20210721


Dossier : T‑276‑21

Référence : 2021 CF 773

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 21 juillet 2021

En présence de monsieur le juge McHaffie

ENTRE :

SEISMOTECH SAFETY SYSTEMS INC.

demanderesse

et

IRADJ FOROOTAN, SMART DISASTER RESPONSE TECHNOLOGIES, INC.

défendeurs

ORDONNANCE ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Seismotech Safety Systems Inc sollicite une injonction anti‑poursuites ex parte pour empêcher Iradj Forootan d’engager ou de poursuivre des litiges concernant six brevets canadiens devant n’importe quel autre tribunal. Cette injonction vise en particulier une demande que M. Forootan a engagée en Californie le 11 mars 2021 à l’encontre de Smart Disaster Response Technologies, Inc [SDRT], une société californienne inactive et mise en suspens qui appartient à Seismotech, et de Reza (Mohammadreza) Baraty, un résident de la Colombie‑Britannique qui est le chef de la direction et l’actionnaire majoritaire de Seismotech.

[2] Pour les motifs énoncés ci‑après, je rejette la requête de Seismotech. Une injonction anti‑poursuites est un recours extraordinaire et discrétionnaire qu’il convient d’accorder dans de rares cas et avec prudence, vu son incidence sur le principe de la courtoisie judiciaire. Je ne suis pas d’avis que les circonstances que Seismotech a présentées correspondent à la norme qui s’applique à l’octroi d’une telle injonction. Plus précisément, je rejette l’idée que notre Cour a compétence exclusive sous le régime de la Loi sur les brevets, LRC 1985, c P‑4 pour trancher les questions qui sont soulevées dans le litige californien en lien avec les brevets canadiens et qu’il est nécessaire de rendre une injonction anti‑poursuites pour « protéger » cette compétence. Je n’admets pas non plus que la seule conclusion raisonnable que pourrait tirer le tribunal californien – ce que, à ce jour, on ne lui a pas demandé de faire – est que la Cour fédérale est le tribunal nettement plus approprié. Dans les circonstances, je ne puis conclure que l’on commettrait une injustice en permettant à M. Forootan de poursuivre l’instance engagée en Californie.

[3] Je ne suis pas convaincu non plus que l’octroi de l’injonction demandée éviterait une multiplicité d’instances, comme le prétend Seismotech. Au contraire, il semble que cette mesure en augmenterait davantage le nombre. Comme l’admet Seismotech, l’injonction ne mettrait pas fin au litige californien. Elle ne ferait qu’ajouter une instance canadienne parallèle qui porterait sur le même accord et la même décision judiciaire que ceux qui sont en litige en Californie.

[4] Je suis conscient des inquiétudes de Seismotech quant à l’ampleur et à la nature du litige à ce jour, mais il est toutefois possible de traiter comme il faut de ces inquiétudes en Californie. Celles‑ci ne justifient pas que notre Cour rende une ordonnance empêchant M. Forootan de faire valoir ses droits dans cet État.

[5] La requête est donc rejetée. Aucune ordonnance n’est rendue quant aux dépens.

II. Les questions en litige

[6] La question générale que soulève la requête de Seismotech consiste à savoir si la Cour devrait rendre une injonction anti‑poursuites interdisant à M. Forootan d’engager ou de poursuivre des litiges à l’extérieur du Canada en lien avec certains brevets canadiens, et ce, jusqu’à ce que la présente demande ait été tranchée. Cette question soulève plusieurs questions secondaires :

  • 1) Aurait‑il fallu donner avis à M. Forootan de la présente requête?

  • 2) Seismotech a‑t‑elle établi qu’elle répond aux exigences d’une injonction anti‑poursuites, c’est‑à‑dire :

  • a) La Cour a‑t‑elle compétence personnelle à l’égard de M. Forootan pour les besoins de l’ordonnance demandée?

  • b) Le tribunal étranger pourrait‑il raisonnablement conclure que la Cour fédérale n’est pas un tribunal nettement plus approprié?

  • c) L’injonction demandée priverait‑elle injustement M. Forootan d’un avantage juridique légitime?

  • d) Le fait que Seismotech n’a pas demandé la suspension du litige étranger fait‑il obstacle au recours demandé?

[7] Je traiterai de ces questions dans l’ordre, après avoir passé en revue les faits pertinents de même que les principes généraux qui s’appliquent aux injonctions anti‑poursuites.

III. Analyse

A. Le contexte factuel

1) La cession d’une technologie et de brevets de Seismotech à SDRT

[8] Au centre du présent litige, il y a deux personnes et deux entreprises. Reza Baraty est un résident de la Colombie‑Britannique qui est et a toujours été l’actionnaire majoritaire (directement ou indirectement) de Seismotech, une entreprise de la Colombie‑Britannique. Iradj Forootan est un résident de la Californie. Il a fondé SDRT et en était autrefois un actionnaire ainsi que son président et chef de la direction, notamment. Seismotech est aujourd’hui le propriétaire majoritaire de SDRT, quoique cette entreprise soit en suspens.

[9] Les litiges mettant en cause ces quatre parties découlent d’une convention d’achat et de vente [CAV] qu’elles ont toutes signée en janvier 2003. La CAV avait trait à ce qui était appelé les « SUMS Technologies », une technologie particulière de gestion de catastrophes et de services d’utilité publique, inventée par M. Baraty. Les SUMS Technologies comportaient les demandes de brevet et les brevets connexes qui suivent :

  • le brevet canadien no 2,199,189 [le brevet 189], qui a été délivré en 1999 et qui, depuis lors, est expiré;

  • une demande de brevet canadienne qui a donné lieu à la délivrance ultérieure de cinq autres brevets canadiens, soit les brevets canadiens portant les nos 2,364,081, 2,551,847, 2,551,854, 2,552,603 et 2,621,287 (de pair avec le brevet 189, ces six brevets constituent les « brevets canadiens » qui sont en litige dans la présente requête);

  • le brevet américain no 6,266,579;

  • une demande de brevet américaine qui, présume la Cour, a donné lieu de la même façon aux cinq autres brevets américains qui sont mentionnés dans les documents : les brevets américains nos 6,842,706, 7,353,121, 7,729,993, 7,774,282 et 7,711,651 (j’appellerai ces six brevets les « brevets américains »);

  • des demandes de brevet européennes et japonaises apparemment liées au brevet 189.

[10] M. Baraty est l’unique inventeur des brevets canadiens et américains.

[11] À l’époque de la signature de la CAV, Seismotech possédait les SUMS Technologies et M. Baraty était propriétaire en grande partie de Seismotech, et il en était le président et chef de la direction. M. Forootan était actionnaire et président de SDRT. Il était apparemment prévu que M. Forootan pouvait aider à mobiliser des capitaux en vue de financer la commercialisation des SUMS Technologies. Aux termes de la CAV, Seismotech a cédé à SDRT les SUMS Technologies, y compris les brevets et les demandes. M. Forootan était censé mobiliser la somme de 2 000 000 $ en financement d’immobilisations dans les 12 mois suivant la signature de la CAV de façon à pouvoir mettre au point les SUMS Technologies. Si les fonds n’étaient pas mobilisés, M. Forootan devait transférer à Seismotech 10 % de ses actions de SDRT, plus une tranche supplémentaire de 10 % pour chaque période de six mois pendant laquelle la somme de 2 000 000 $ n’était pas obtenue. Dans la CAV, Seismotech désigne cette obligation sous le nom de [TRADUCTION] « promesse de capitaux ».

[12] Par suite de la cession prévue par la CAV, SDRT est actuellement la propriétaire inscrite des brevets canadiens autres que le brevet 189. M. Baraty est le propriétaire inscrit du brevet 189, plutôt que SDRT, car une cession de M. Baraty en faveur de Seismotech n’avait pas été consignée à l’époque où les transferts de Seismotech à SDRT ont été déposés auprès de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC).

[13] La CAV comporte une clause attributive de compétence, qui indique que la convention [TRADUCTION] « est régie et interprétée conformément aux lois du Canada, sans donner effet à aucun principe de conflit de lois ». Elle a été signée par M. Baraty, en son nom personnel et en celui de Seismotech, en Colombie‑Britannique. Elle a été signée par M. Forootan, en son nom personnel et en celui de SDRT, dans le comté d’Orange, en Californie.

2) Les différends et le litige de 2015 en Californie

[14] Seismotech allègue que M. Forootan et SDRT n’ont pas rempli la [TRADUCTION] « promesse de capitaux », car M. Forootan n’a pas mobilisé les 2 000 000 $ requis. M. Forootan, allègue, quant à lui, avoir prêté des sommes importantes à SDRT en vue d’obtenir les brevets. Il allègue également que M. Baraty a indûment [TRADUCTION] « agi de connivence et comploté » contre SDRT et M. Forootan, qu’il a contrefait les brevets en litige et qu’il a formulé des plans d’affaires frauduleux. Il ressort clairement du dossier restreint qui m’a été soumis que, entre la CAV de 2003 et le début des années 2010, des difficultés ont surgi dans la relation d’affaires.

[15] En 2015, M. Forootan a déposé une plainte devant la Cour supérieure de l’État de la Californie, dans le comté d’Orange [la Cour de l’État de la Californie], sous le numéro de dossier 30‑2015‑00788310‑CU‑BT‑CJC [l’action californienne de 2015]. La plainte dont il est question dans l’action californienne de 2015 ne figure pas dans le dossier, mais, d’après des documents déposés plus tard, elle alléguait un manquement à une obligation fiduciaire, une rupture de contrat et une fraude. M. Forootan a engagé l’action en son nom personnel et, sous la forme d’une action oblique, au nom de SDRT à l’encontre de SDRT et de M. Baraty, de même que d’une série de 100 défendeurs « Doe » [Untel], non désignés nommément.

[16] L’action californienne de 2015 a été réglée en 2017. M. Forootan, M. Baraty et SDRT ont signé une « Stipulation for Settlement » [accord de règlement], prévoyant que l’affaire était considérée comme réglée, sous réserve de certaines conditions. Les obligations prévues dans l’accord de règlement étant contestées, je m’abstiendrai de faire des commentaires détaillés sur sa teneur. Toutefois, j’en reproduis ici les passages suivants :

[traduction]

1. La défenderesse SDRT est tenue de payer au demandeur Iradj Forootan, ou au cabinet d’avocats le représentant, Ulwelling Siddiqui LLP, la somme totale de 1 380 000 $ (un million trois cent quatre‑vingt mille dollars) (dollars US) (voir le calendrier de paiement ci‑après), en règlement complet de la présente action et en libération et en exonération de toute réclamation et cause d’action formulées dans le cadre de la présente action, ainsi qu’en libération et en exonération de toute demande et cause d’action découlant des faits ou des incidents mentionnés dans les actes de procédure relatifs à la présente action.

[…]

8. Les parties conviennent par la présente que la Cour supérieure du comté d’Orange demeurera compétente à l’égard de l’action à toutes fins utiles en vue de faire appliquer les conditions du présent Accord, conformément à l’article 664.6 du California Code of Civil Procedure.

9. Les parties conviennent par la présente que les défendeurs SDRT et Baraty signeront un jugement prescrit, aux termes duquel, en cas de défaut de la part des défendeurs de l’un des paiements énumérés ci‑dessus, après préavis et délai de 10 jours civils pour remédier à la situation, et ensuite, sur demande ex parte de la part des avocats, jugement sera rendu et inscrit à l’encontre des défendeurs SDRT à l’égard du paiement du montant total à payer aux termes du présent Accord, soit la somme de 1 380 000 $ (un million trois cent quatre‑vingt mille dollars US), moins tout montant déjà payé conformément à l’Accord.

10. Les parties conviennent par la présente que le demandeur FOROOTAN aura le droit exclusif d’interdire toute vente des brevets de SDRT et d’éléments de propriété intellectuelle connexes, sauf si cette vente permettrait d’acquitter entièrement et complètement le solde impayé qui serait dû au défendeur FOROOTAN aux termes du présent Accord ET si le produit de cette vente est versé au demandeur FOROOTAN pour couvrir le solde dû. Les brevets visés par la présente condition comprennent, notamment, les suivants : [liste de brevets comprenant les brevets américains et les brevets canadiens].

11. Le demandeur Forootan est tenu de céder la totalité des actions de SDRT qui sont sous son contrôle, y compris, sans restriction, 6 050 000 actions, et de céder les droits et les titres de propriété qui s’y rattachent.

12. Indépendamment des dispositions des articles 1115 ‑ 1128 du Evidence Code, le présent Accord peut être exécuté par n’importe quelle partie à la présente au moyen d’une requête déposée en vertu de l’article 664.6 du Code of Civil Procedure ou de toute autre procédure autorisée par la loi devant la Cour supérieure du comté d’orange.

[…]

[17] Les parties ont signé une modification à l’accord de règlement en juin 2018. Cette modification précisait certains aspects de cet accord, reportait la date du premier paiement et joignait un projet conjoint de « Stipulation for Entry of Judgment » [stipulation pour inscription d’un jugement), de « Stipulation for Dismissal » [stipulation pour rejet »), ainsi que d’autres documents.

[18] Le 4 mars 2019, M. Forootan a obtenu de la Cour de l’État de la Californie une ordonnance intitulée « Order re Plaintiff’s Ex Parte Application for Enforcement of Stipulation for Entry of Judgment Under CCP § 664.6 and Award of Attorneys’ Fees » [l’ordonnance californienne de 2019]. Le paragraphe 2 de cette ordonnance indique : [TRADUCTION] « La Cour rendra jugement en faveur des demandeurs, d’un montant de 1 380 000 $, conformément à la stipulation pour inscription d’un jugement des parties ». Des dépens de 2 235 $ ont également été accordés.

[19] Un jugement a été rendu le 14 mai 2019 [le jugement californien de 2019] aux termes de l’ordonnance californienne de 2019. Ce jugement indique qu’il est rendu en faveur de M. Forootan, d’un montant de 1 382 235 $, à la fois contre SDRT et M. Baraty.

3) Le litige devant la Cour de district de Californie, la Cour suprême de la Colombie‑Britannique et notre Cour

[20] Le 23 janvier 2020, M. Forootan a déposé une plainte devant la United States District Court for the Central District of California, Southern Division [la Cour de district de la Californie, Division du Sud] contre SDRT et M. Baraty, ainsi que contre 10 défendeurs « Doe » [Untel] non désignés nommément, sous le numéro de dossier 8:20‑cv‑00146‑JLS‑DFM [l’action devant la Cour de district de 2020]. Dans cette action, il était allégué que, aux termes de l’accord de règlement, SDRT et M. Baraty avaient convenu de payer la somme de 1 380 000 $ à M. Forootan, et qu’aucun paiement n’avait été fait. Il y était également allégué que le jugement californien de 2019 condamnait les deux défendeurs.

[21] L’action devant la Cour de district de 2020 comportait deux éléments. Premièrement, une allégation de rupture de contrat, pour défaut des défendeurs de se conformer à l’accord de règlement. Pour ce qui était de cette allégation, M. Forootan sollicitait principalement des dommages‑intérêts pécuniaires et des dépens. Deuxièmement, l’action comprenait une demande de [TRADUCTION] « jugement déclaratoire » comportant des déclarations au sujet des obligations qu’avaient les parties aux termes de l’accord de règlement. Pour ce qui était de ce second élément, M. Forootan sollicitait : i) une déclaration lui conférant la totalité des droits et des titres de propriété afférents aux « brevets » (définis de manière à inclure les brevets américains et les brevets canadiens), ii) une déclaration transférant les brevets à M. Forootan, et iii) une déclaration et une ordonnance à l’intention du United States Patent and Trademark Office (USPTO) en vue du transfert à M. Forootan de la propriété des brevets.

[22] Environ cinq mois plus tard, soit le 9 juillet 2020, Seismotech a engagé une action contre SDRT et M. Forootan devant la Cour suprême de la Colombie‑Britannique, sous le numéro de dossier NEW‑S‑S‑228726 [l’action de la C.‑B. de 2020]. Par cette action, elle sollicite une déclaration portant que le transfert des « Seismotech Technologies » (c.‑à‑d., les SUMS Technologies) à SDRT aux termes de la CAV de 2003 initiale était ou est invalide pour défaut d’avoir honoré la promesse de capitaux. D’après les définitions figurant dans l’avis d’une action civile qui fait partie de l’action de la C.‑B. de 2020, la déclaration que sollicite Seismotech vise à la fois les brevets canadiens et les brevets américains. M. Forootan a, semble‑t‑il, déposé une demande de contestation de la compétence de la Cour suprême de la Colombie‑Britannique; cette demande devait être entendue en février 2020, mais il n’y a pas été donné suite parce que M. Forootan n’a pas déposé les documents nécessaires.

[23] Le 1er février 2021, après avoir rendu une ordonnance de justification, la Cour de district de la Californie a rejeté l’action devant la Cour de district de 2020 pour défaut de compétence en la matière. Essentiellement, elle a estimé que l’affaire était liée à l’exécution de l’accord de règlement, ce qui relevait des tribunaux étatiques. Elle a décrété : [TRADUCTION] « Le demandeur cherche à faire valoir ses prétendus droits à divers brevets en application des conditions de l’accord de règlement, mais de telles allégations ne peuvent être formulées en vertu du droit des brevets » [non souligné dans l’original]. Elle a donc rejeté l’action sous réserve du droit de présenter une nouvelle demande devant un tribunal étatique. M. Baraty réclamait les dépens de cette action (y compris ceux de sa propre requête relative à la compétence, qui n’a pas été tranchée), soit un montant d’environ 25 800 $. Cependant, étant donné que la majeure partie des dépens réclamés étaient fondés sur une disposition de l’accord de règlement, à l’égard duquel la Cour de district de la Californie n’avait pas compétence, cette dernière n’a adjugé que des dépens de 327,48 $ le 6 juillet 2021.

[24] Après le rejet de l’action devant la Cour de district de 2020, mais avant que M. Forootan introduise une instance devant une cour étatique, Seismotech a déposé la demande dont il est question en l’espèce devant la Cour fédérale du Canada le 16 février 2021. Cette demande ne concerne que les brevets canadiens. Elle vise à obtenir des déclarations semblables à celles demandées dans l’action de la C.‑B. de 2020, à savoir que la cession des brevets canadiens en faveur de SDRT est nulle ou annulable. Elle vise aussi à obtenir, en vertu de l’article 52 de la Loi sur les brevets, une ordonnance prescrivant au commissaire aux brevets de modifier les inscriptions faites dans les registres du Bureau des brevets (c’est‑à‑dire l’OPIC) en vue d’y consigner Seismotech à titre de propriétaire inscrite des brevets canadiens. De plus, ou subsidiairement, elle sollicite une déclaration portant que le paragraphe 10 de l’accord de règlement, lequel est reproduit au paragraphe [16] des présentes, n’est pas opposable à SDRT, à Seismotech ou aux brevets canadiens, et n’empêche pas SDRT de céder les brevets canadiens à Seismotech ou de les lui rétrocéder sous licence.

[25] Seismotech admet que la présente demande vise à obtenir un recours qui recoupe celui qui était demandé dans l’action de la C.‑B. de 2020. Elle déclare que cela est dû à la conclusion que la Cour d’appel fédérale a tirée dans l’arrêt SALT Canada Inc. c Baker, 2020 CAF 127, lequel a été rendu quelques semaines après le début de l’action de la C.‑B. de 2020. Cet arrêt a confirmé que la compétence dont jouit la Cour fédérale aux termes de l’article 52 de la Loi sur les brevets, soit celle d’« ordonner que toute inscription dans les registres du Bureau des brevets concernant le titre à un brevet soit modifiée ou radiée », englobe celle de trancher les problèmes de titres de propriété de brevets qui obligent à interpréter des accords ou d’autres instruments commerciaux : SALT, aux para 8‑14, 47. Avant l’arrêt SALT, il y avait des doutes que notre Cour ne pouvait pas interpréter d’accords, même s’ils se rapportaient au titre de propriété d’un brevet, ce qui explique pourquoi Seismotech avait introduit son action devant la Cour suprême de la Colombie‑Britannique, car elle obligeait à interpréter la CAV. Seismotech dit qu’en raison de la présente demande devant notre Cour, l’action de la C.‑B. de 2020 est maintenant [TRADUCTION] « en veilleuse ». Cela, semble‑t‑il, signifie seulement que Seismotech ne prend actuellement aucune mesure. L’instance n’a pas été abandonnée, et aucune suspension ou autre ordonnance n’a été demandée à la Cour suprême de la Colombie‑Britannique.

4) La demande contestée devant la Cour de l’État de la Californie

[26] Le 11 mars 2021 – trois semaines après l’introduction de la présente demande et environ cinq semaines après que la Cour de district de la Californie eut rejeté l’action devant la Cour de district de 2020, sous réserve du droit de présenter une nouvelle demande devant une cour étatique – M. Forootan a déposé une plainte auprès de la Cour de l’État de la Californie, sous le numéro de dossier 30‑2021‑01188996‑CU‑BC‑CJC [l’action californienne de 2021]. L’action californienne de 2021 est essentiellement la même que l’action devant la Cour de district de 2020. Une bonne partie de cette action reproduit textuellement les allégations évoquées en premier (devant la mauvaise cour) dans le cadre de l’action devant la Cour de district de 2020. Elle définit les « brevets » de la même façon, de manière à englober les brevets américains et les brevets canadiens.

[27] À l’instar de l’action devant la Cour de district de 2020, la plainte formulée dans le cadre de l’action californienne de 2021 comporte deux éléments : une allégation de rupture de contrat et une demande de jugement déclaratoire. Là encore, tout en affirmant que le jugement californien de 2019 a été obtenu à l’encontre de SDRT ainsi que de M. Baraty, l’action californienne de 2021, telle qu’elle a été ébauchée, est principalement fondée sur l’accord de règlement sous‑jacent, plutôt que sur le jugement californien de 2019. Elle vise également à obtenir la même réparation déclaratoire et pécuniaire qui est fondée sur l’accord de règlement, y compris sur la propriété des brevets, ainsi qu’une ordonnance prescrivant à l’USPTO de transférer la propriété des brevets à M. Forootan.

[28] Le 4 mai 2021, la Cour de l’État de la Californie a rendu une ordonnance de justification à l’endroit de M. Forootan pour non‑respect des règles de signification. Le 1er juillet 2021, M. Forootan a déposé une déclaration indiquant que M. Baraty et SDRT avaient reçu signification par courriel le 29 juin. L’avocat de Seismotech a indiqué à l’audition de la présente demande que M. Baraty (qu’il représente également) conteste la validité de cette signification, mais qu’il s’agit manifestement d’une question qui relève de la Cour de l’État de la Californie et non de notre Cour. Seismotech invoque l’ordonnance de justification et la signification dilatoire comme preuves de la nature tactique du litige engagé par M. Forootan contre M. Baraty et SDRT.

5) La requête en annulation de M. Baraty

[29] Dans l’intervalle, le 9 avril 2021, M. Baraty a déposé une requête dans le cadre de l’action californienne de 2015 en vue de faire annuler le jugement californien de 2019 ou l’ordonnance californienne de 2019 pour cause d’erreur administrative, de nullité du jugement ou d’une réparation en equity résultant d’une fraude ou d’une erreur extrinsèque. Essentiellement, la requête en annulation fait valoir que : i) aux termes du paragraphe premier de l’accord de règlement, reproduit au paragraphe [16] des présentes, seule SDRT est tenue de payer le montant du règlement, pas M. Baraty, ii) la « Stipulation for Entry of Judgment » des parties prévoyait également qu’un jugement serait rendu à l’encontre de SDRT seulement, iii) l’ordonnance californienne de 2019 indiquait que le jugement devait être rendu conformément à la « Stipulation for Entry of Judgment » des parties, et iv) la référence faite, dans le jugement californien de 2019, à un jugement rendu contre M. Baraty était donc une erreur, causée par M. Forootan.

[30] Il est prévu d’entendre la requête en annulation le 10 août 2021. Les avocats indiquent que la requête n’a pas pu être inscrite au rôle plus tôt à cause d’un arriéré de dates d’audition disponibles. Ils ont émis l’avis que si la requête est fructueuse, une bonne part du litige, dont au moins l’action californienne de 2021 qui est fondée sur le jugement californien de 2019, deviendra caduque.

[31] En résumé, voici une chronologie des principaux faits qui ont mené au dépôt de la présente requête :

Janvier 2003

Les parties signent la CAV.

18 mai 2015

M. Forootan engage l’action californienne de 2015.

19 mai 2017

M. Forootan, M. Baraty et SDRT signent l’accord de règlement, qui règle l’action californienne de 2015.

4 mars 2019

Ordonnance californienne de 2019

14 mai 2019

Jugement californien de 2019

23 janvier 2020

M. Forootan engage l’action devant la Cour de district de 2020.

9 juillet 2020

Seismotech engage l’action de la C.‑B. de 2020.

1er février 2021

La Cour de district de Californie rejette l’action devant la Cour de district de 2020.

16 février 2021

Seismotech dépose la présente demande auprès de la Cour fédérale.

11 mars 2021

M. Forootan engage l’action californienne de 2021.

9 avril 2021

M. Baraty présente une requête en annulation de l’ordonnance californienne de 2019 et du jugement californien de 2019, requête qui sera censément entendue le 10 août 2021.

8 juillet 2021

Seismotech dépose la présente requête en vue d’obtenir une injonction anti‑poursuites.

[32] C’est sur cette toile de fond que je vais maintenant traiter des principaux généraux qui s’appliquent aux injonctions anti‑poursuites, et les appliquer ensuite aux faits et aux circonstances de l’espèce.

B. Les injonctions anti‑poursuites : les principes applicables

[33] Une injonction anti‑poursuites ordonne à une partie soumise à la compétence de la Cour de mettre fin à des procédures judiciaires engagées dans un ressort différent. Elle ne vise pas à ordonner directement à l’autre tribunal judiciaire ou administratif de faire quoi que ce soit. Cependant, l’effet sur les procédures engagées dans un autre ressort, ainsi que sur l’autre tribunal, pour ce qui est de contrôler ses procédures, est évident. Comme l’a décrit la Cour d’appel fédérale, une injonction anti‑poursuites est « une mesure de redressement vindicative, et contraire à la courtoisie judiciaire » : Apotex Inc. c AstraZeneca Canada Inc., 2003 CAF 235 au para 13.

[34] Les principes qui s’appliquent aux injonctions anti‑poursuites au Canada demeurent ceux qu’a fixés le juge Sopinka, au nom de la Cour suprême du Canada, dans l’arrêt Amchem Products Incorporated c Colombie‑Britannique (Workers’ Compensation Board), [1993] 1 RCS 897. Le fait d’évaluer s’il convient de rendre une telle injonction comporte une analyse à deux volets. Premièrement, le tribunal canadien doit décider si le tribunal étranger a présumé qu’il était compétent sur un fondement incompatible avec les principes liés au forum non conveniens (ou : forum peu propice). Deuxièmement, si c’est le cas, le tribunal canadien doit évaluer si l’injonction demandée privera injustement le demandeur devant le tribunal étranger d’un avantage juridique : Amchem, aux p 931‑933; Li c Rao, 2019 BCCA 264 aux para 46, 48‑77.

[35] Outre ces deux étapes, le juge Sopinka a fait référence à plusieurs « questions préliminaires de procédure ». Comme on peut le voir, le premier volet de l’analyse de l’arrêt Amchem tient bel et bien pour acquis que le tribunal étranger s’est prononcé sur sa compétence. Vu l’importance des principes de la courtoisie judiciaire, un tribunal canadien ne doit généralement pas instruire une demande d’injonction anti‑poursuites qui n’est que théorique parce qu’il n’existe aucune instance étrangère en attente, et qu’il est « préférable » d’avoir tenté d’obtenir, sans succès toutefois, une suspension ou une réparation semblable auprès du tribunal étranger : Amchem, aux p 930‑931. Ces aspects préliminaires sont parfois scindés dans le cadre d’une formulation en cinq parties des exigences de l’arrêt Amchem qui s’appliquent à une injonction anti‑poursuites : Bell’O International LLC c Flooring & Lumber Co, [2001] OJ no 1871 (CSJ) au para 9; Precious Metal Capital Corp c Smith, 2008 CanLII 64008 (C.S. Ont.) au para 18.

[36] De plus, étant donné qu’une injonction anti‑poursuites vise un justiciable particulier plutôt qu’un tribunal étranger, le tribunal canadien doit exercer une compétence personnelle (compétence in personam) sur ce justiciable pour pouvoir rendre l’ordonnance : Amchem, à la p 913; Veritas Investment Research Corporation et al c Indiabulls Real Estate Limited et al, 2015 ONSC 6040 au para 43; Google Inc. c Equustek Solutions Inc., 2017 CSC 34 au para 38. La compétence personnelle sur une partie étrangère peut exister de trois façons : elle peut reposer sur la présence en un lieu (la présence physique du non‑résident), elle peut être fondée sur le consentement (par soumission, par acquiescement ou par entente préalable), ou il peut s’agir d’une compétence présumée qui repose sur le critère du « lien réel et substantiel » : Chevron Corp. c Yaiguaje, 2015 CSC 42 au para 82, citant Club Resorts Ltd c Van Breda, 2012 CSC 17 (voir le para 79) et Muscutt c Courcelles, 2002 CanLII 44957 (CA ON) au para 19.

[37] Le critère du lien réel et substantiel a pour but d’évaluer si un tribunal canadien a compétence sur une action en prenant en compte des facteurs objectifs qui lient le litige à la compétence du tribunal. Ce critère est éclairé par des préoccupations entourant l’équité, la souplesse et la cohérence du processus de règlement des problèmes que posent les conflits de lois : Van Breda, au para 66.

[38] Bien que l’arrêt Van Breda soit axé sur les principes qui concernent les affaires de responsabilité délictuelle, le critère du lien réel et substantiel s’applique également aux affaires qui mettent en cause une rupture de contrat (et il en tire en fait son origine) : Morguard Investments Ltd c De Savoye, [1990] 3 RCS 1077 aux p 1106‑1108; J Blom & E Edinger, « The Chimera of the Real and Substantial Connection Test » (2005) 38:2 UBC L Rev 373 aux p 374‑375. Il s’applique également aux affaires comportant de multiples recours et l’évaluation du caractère territorial de droits de propriété intellectuelle : Van Breda, au para 99; Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique c Assoc. canadienne des fournisseurs Internet, 2004 CSC 45 au para 60. Comme l’a déclaré mon collègue le juge Denis Gascon, siégeant à titre de membre judiciaire et de président du Tribunal de la concurrence : « le critère du ‘lien réel et substantiel’ est souple et doit être adapté aux circonstances. […] Les facteurs à prendre en compte seront déterminés en fonction des faits et des questions en litige dans une affaire. […] » [renvois omis] : HarperCollins – Ordonnance et motifs de l’ordonnance rejetant une requête en révocation sommaire, 2017 CACT 10 au para 147.

C. L’application des principes à la situation actuelle

1) Aurait‑il fallu donner avis à M. Forootan?

[39] Avant d’examiner les exigences relatives à une injonction anti‑poursuites qui sont énoncées dans l’arrêt Amchem, je traiterai brièvement du fait que Seismotech a déposé la présente requête ex parte en vertu de l’article 361 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, et ce, sans préavis ou sans signification à M. Forootan.

[40] Seismotech fait valoir qu’elle n’était pas tenue de signifier la requête à M. Forootan parce que l’avis de demande lui a été signifié et qu’il n’a pas déposé un avis de comparution, comme l’exige l’article 305 des Règles. Une partie qui n’a pas déposé d’avis de comparution dans le délai que prescrivent les Règles n’a pas à recevoir d’autres documents dans le cadre de l’instance avant le jugement final : alinéa 145a) des Règles. Seismotech souligne la demande de réparation qui figure dans son avis de demande, laquelle indique qu’elle sollicitera une [TRADUCTION] « injonction intérimaire, interlocutoire ou permanente interdisant au défendeur Forootan d’engager une instance quelconque en lien avec les brevets canadiens sans l’autorisation de la Cour ». Elle ajoute que M. Forootan était donc au fait de son intention de solliciter le recours recherché dans le cadre de la présente requête et qu’il n’a rien fait pour y répondre.

[41] Parallèlement, Seismotech est consciente des problèmes que soulève une requête en injonction anti‑poursuites ex parte. Elle laisse entendre que la Cour pourrait inclure dans son ordonnance un moyen qui permettrait à M. Forootan de s’adresser de nouveau à elle pour obtenir une modification, faisant ainsi référence à la démarche suivie par la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique dans l’affaire Equustek : Equustek Solutions Inc c Google Inc, 2015 BCCA 265 aux para 110‑112.

[42] À mon avis, plutôt que de recourir au processus à deux volets que propose Seismotech – un processus dans le cadre duquel la Cour rend une ordonnance ex parte et permet ensuite à M. Forootan de présenter ses arguments – il aurait été plus commode et approprié que M. Forootan puisse présenter ses arguments avant que la Cour rende une ordonnance quelconque. Il semble y avoir peu de raisons pour lesquelles M. Forootan ou son avocat n’auraient pas être précisément avisés de la présente requête et bénéficier de la possibilité de présenter des arguments contraires. Même si l’avocat de Seismotech a fait référence à des inquiétudes quant au fait que M. Forootan, en réponse, [TRADUCTION] « se précipite pour obtenir un jugement » en Californie, on ne sait trop comment il pourrait le faire, ni en quoi cette inquiétude coïncide avec la position de Seismotech selon laquelle M. Forootan a tardé à signifier l’action californienne de 2021 et n’a pas procédé, même maintenant, à une signification en bonne et due forme.

[43] Le principe exposé à l’alinéa 145a) des Règles, à savoir qu’il n’y a pas lieu de donner avis des étapes ultérieures de l’instance à une partie qui n’a pas comparu, est important pour la conduite ordonnée du litige au sein de notre Cour. Cependant, je suis quelque peu préoccupé par le fait que la demande de recours qui figure dans l’avis de demande de Seismotech a trait seulement au fait d’intenter une poursuite, tandis que la présente requête vise également à obtenir une ordonnance interdisant à M. Forootan de poursuivre l’action californienne de 2021. Je ne crois pas que l’on puisse considérer que l’alinéa 145a) des Règles autorise un demandeur à solliciter, à l’encontre d’un défendeur, des ordonnances ex parte substantielles qui vont au‑delà de ce qu’englobe le document introductif d’instance, même si ce défendeur n’a pas comparu.

[44] Compte tenu de mes conclusions au sujet du bien‑fondé de la requête, il n’est nul besoin que je traite de la lacune qu’est susceptible de présenter le fait d’avoir déposé la requête ex parte. Cependant, je fais remarquer qu’étant donné que Seismotech a suggéré que l’injonction anti‑poursuites demandée prévoie que M. Forootan puisse s’adresser de nouveau à la Cour pour faire modifier l’ordonnance, il aurait peut‑être été plus efficace de prévoir une forme quelconque d’avis préalable à M. Forootan, indépendamment de l’alinéa 145a) des Règles.

2) Les exigences relatives à une injonction anti‑poursuites ne sont pas remplies

a) Notre Cour a compétence personnelle à l’égard de M. Forootan

[45] Pour rendre l’injonction demandée, la Cour doit avoir compétence sur M. Forootan, parce que cette compétence repose sur la présence en un lieu, qu’elle repose sur un consentement ou qu’elle est présumée d’après le critère du « lien réel et substantiel » : Veritas, aux para 43‑44; Chevron, au para 82.

[46] Seismotech ne se fonde pas sur la compétence qui repose sur la présence en un lieu. M. Forootan réside en Californie et la seule preuve qu’il soit venu au Canada est liée à une visite à caractère social qu’il a faite à M. Baraty en Colombie‑Britannique il y a un certain temps (M. Forootan est marié à la cousine de M. Baraty). M. Forootan n’a pas non plus consenti ou acquiescé à la compétence de notre Cour au sujet de l’injonction demandée ou de son objet. La CAV, que j’analyserai plus loin, comporte une clause concernant la désignation du droit applicable et celle‑ci indique que cet instrument doit être interprété selon les lois du Canada, mais elle ne contient pas une clause attributive de compétence (également connue sous le nom de clause d’élection de for). Les deux sont de nature et d’effet différents, y compris dans le contexte des injonctions anti‑poursuites : voir, par exemple, Li, aux para 49‑60; ZI Pompey Industrie c ECU‑Line N.V., 2003 CSC 27 aux para 20‑21; 687725 BC Ltd c Rakov, 2021 ABQB 462 aux para 77‑78; Entreprise Publique Économique Air Algérie, Montréal, Québec c Hamamouche, 2019 CF 272 aux para 49‑50.

[47] Seismotech fait valoir que la Cour est compétente en raison de sa compétence légale en matière de brevets canadiens, ce qui inclut la compétence en matière d’interprétation contractuelle qui a été confirmée dans l’arrêt SALT, ainsi que le lien réel et substantiel qui existe entre l’objet de l’affaire et notre Cour. Elle souligne la CAV, qu’elle a signée et mise à exécution en Colombie‑Britannique et qui choisit les lois canadiennes, ainsi que le situs des brevets canadiens au Canada : J Walker, Castel & Walker : Canadian Conflict of Laws, 6e éd. (LexisNexis Canada : en ligne) feuillets mobiles, à l’al. 24.1d).

[48] L’injonction anti‑poursuites demandée vise l’action californienne de 2021, dans la mesure où elle concerne les brevets canadiens. Il s’agit donc là de l’action qui devrait constituer le fondement de l’analyse relative à l’existence d’un lien réel et substantiel qui doit être effectuée dans le but d’examiner la compétence, plutôt que de la présente demande. Comme il a été signalé plus tôt, l’action californienne de 2021 vise à obtenir des dommages‑intérêts et un jugement déclaratoire pour cause de présumés manquements à l’accord de règlement. Le jugement déclaratoire demandé comporte des déclarations [TRADUCTION] « conférant la totalité des droits et des titres afférents aux brevets » et [TRADUCTION] « transférant les brevets » à M. Forootan.

[49] L’accord de règlement a été conclu pour régler l’action californienne de 2015 devant la Cour de l’État de la Californie. Elle était l’aboutissement d’une médiation menée en Californie. Il contient les articles 8 et 12 qui sont reproduits au paragraphe [16] des présentes et qui font référence à la Cour de l’État de la Californie ainsi qu’au Code de procédure civile de cet État. Il s’est soldé par le jugement californien de 2019 qu’a rendu la Cour de l’État de la Californie. Aucun de ces facteurs ne fait ressortir l’existence d’un lien avec notre Cour.

[50] Par ailleurs, l’action californienne de 2015 a été fondée sur la CAV ainsi que sur la conduite de M. Baraty et de SDRT aux termes de cette dernière. La CAV, même si elle ne comporte aucune clause d’élection de for, est soumise aux lois du Canada, et les mesures que M. Baraty a prises aux termes de la CAV l’ont été au Canada. Bien que l’accord de règlement confère à la Cour de l’État de la Californie la compétence requise pour le faire appliquer, il ne semble pas exclure expressément la compétence d’un autre tribunal. L’action californienne de 2021 allègue également que M. Forootan a financé les brevets, dont les brevets canadiens, et elle conteste les mesures que M. Baraty aurait prises au Canada avant et après la conclusion de l’accord de règlement.

[51] Les déclarations que M. Forootan souhaite obtenir comportent des déclarations conférant la propriété des brevets canadiens sur la base d’ententes contractuelles. Il s’agit de questions qui sont liées de près à la compétence qu’a notre Cour de rendre des ordonnances modifiant les inscriptions faites dans les dossiers de l’OPIC au sujet du titre de propriété de brevets canadiens en vertu de l’article 52 de la Loi sur les brevets : SALT, aux para 8‑10. Autrement dit, si une partie à l’accord de règlement en venait à s’adresser à notre Cour en vue d’obtenir des déclarations concernant la propriété des brevets canadiens en se fondant sur l’accord de règlement, comme c’est le cas dans l’action californienne de 2021, je suis convaincu, sur le fondement de l’article 52 et de l’arrêt SALT, que notre Cour serait compétente pour entendre l’affaire. Tout compte fait, je suis persuadé qu’il existe un « lien réel et substantiel » suffisant entre les questions relatives aux brevets canadiens qui ont été soulevées dans l’action californienne de 2021 et la compétence territoriale et fondamentale de notre Cour pour établir la simple compétence de cette dernière à l’égard des demandes qui lui sont soumises.

[52] Cela ne veut pas dire que notre Cour est forcément le seul tribunal qui peut être saisi de telles questions ou le tribunal commode ou approprié. Cette question sera analysée ci‑après. Cela veut simplement dire que j’ai conclu que la Cour jouit d’une compétence suffisante à l’égard des allégations formulées dans l’action californienne de 2021 pour jouir de la compétence personnelle requise pour rendre une injonction anti‑poursuites s’il y a lieu de le faire. Je vais donc examiner maintenant cette question.

b) La Cour de l’État de la Californie aurait pu raisonnablement, et conformément aux principes du forum non conveniens, conclure qu’elle devrait conserver sa compétence

[53] Comme il a été indiqué plus tôt, la première étape de l’analyse décrite dans l’arrêt Amchem exige que la Cour décide si le tribunal étranger a présumé qu’il était compétent pour un motif incompatible avec les principes relatifs au forum non conveniens. Je signale que l’analyse ne consiste pas à savoir si le tribunal étranger est nettement plus approprié. Il n’est pas question non plus de savoir si le tribunal canadien est approprié. Le critère est plutôt le suivant, comme l’a formulé le juge Sopinka :

Si, en appliquant les principes relatifs au forum non conveniens, le tribunal étranger a pu raisonnablement conclure qu’aucun autre tribunal n’était nettement plus approprié, le tribunal interne devrait respecter cette décision et rejeter la demande.

[Non souligné dans l’original; Amchem, à la p 932.]

[54] La question est donc de savoir si la Cour de l’État de la Californie aurait pu raisonnablement conclure qu’il n’existait pas d’autre tribunal (en l’occurrence, la Cour fédérale) nettement plus approprié : Li, au para 47. L’arrêt Amchem envisage que c’est le tribunal étranger qui tire initialement cette conclusion. En l’espèce, la Cour de l’État de la Californie n’a pas tiré de conclusion quant à sa compétence à l’égard de l’action californienne de 2021, relativement aux brevets canadiens, ou quant à savoir si la Cour fédérale est un tribunal nettement plus approprié, car Seismotech ne lui a pas demandé de le faire. J’analyserai ce fait plus en détail ci‑après. La Cour examinera donc si la Cour de l’État de la Californie [TRADUCTION] « pourrait raisonnablement » tirer cette conclusion, même sans bénéficier des indications de cette Cour sur la question : Veritas Investment, au para 49.

[55] Les principes relatifs au forum non conveniens entrent en jeu quand au moins deux tribunaux potentiels sont compétents : Van Breda, aux para 101‑103. Il va sans dire que la Cour de l’État de la Californie vérifiera elle‑même en fin de compte si elle a compétence sur l’action qui lui est soumise, conformément aux règles de droit et aux principes qui s’appliquent à son ressort. Néanmoins, l’analyse du forum non conveniens qu’exige la démarche suivie dans l’arrêt Amchem au sujet des injonctions anti‑poursuites est entreprise en fonction du droit canadien, sans tenir pour acquis que le droit étranger appliquera nécessairement ces principes sous ce nom ou sur le même fondement : Amchem, aux p 934, 935, 937, 938 et 939.

[56] Comme il a été signalé, l’action californienne de 2021 vise principalement à obtenir des réparations liées à des manquements à l’accord de règlement ainsi que des déclarations au sujet des obligations dont les parties doivent s’acquitter aux termes de cet accord. L’accord de règlement découlait de l’action californienne de 2015, et il l’a réglée. Les parties à l’accord de règlement ont convenu que la Cour de l’État de la Californie [TRADUCTION] « demeurera compétente à l’égard de l’action à toutes fins utiles en vue de faire respecter les conditions [de cet] accord ». La modification apportée à l’accord de règlement n’a pas changé cela, mais a plutôt confirmé l’intention qu’avaient les parties de déposer des documents, y compris le jugement prescrit, devant la Cour de l’État de la Californie. Comme nous l’avons vu plus tôt, M. Forootan est un résident de la Californie, et SDRT, la propriétaire inscrite de la majorité des brevets, est une entreprise californienne (mise en suspens).

[57] Au vu de ces facteurs, je suis d’avis que la Cour de l’État de la Californie pouvait raisonnablement conclure que la Cour fédérale n’était pas un tribunal nettement plus approprié pour instruire l’action californienne de 2021, y compris en lien avec les brevets canadiens.

[58] Je tire cette conclusion indépendamment du fait que certains des éléments d’actif à l’égard desquels M. Forootan cherche à faire appliquer les accords sont des brevets canadiens. Il ne fait aucun doute que des droits de brevet sont territoriaux. Se fondant sur ce principe, Seismotech cite le commentaire du professeur Walker selon lequel [TRADUCTION] « aucune cession ou aucun transfert [de droits de brevet] ne peut avoir lieu, sauf d’une manière conforme aux lois de ce territoire » : Castel & Walker, à l’al. 24.1d). Bien que la cession d’un brevet canadien doive se dérouler [TRADUCTION] « d’une manière conforme » aux lois du Canada, cela ne veut pas dire que tout différend relatif à la propriété d’un brevet canadien doit être tranché devant un tribunal canadien.

[59] Les ententes contractuelles concernant des éléments de propriété intellectuelle visent souvent des droits qui s’appliquent dans de multiples territoires, voire à l’échelle mondiale. Contrairement à l’argument de Seismotech, rien n’exige que les mêmes dispositions d’un même contrat soient débattues séparément dans chacun des territoires du globe dans lequel ces droits de propriété intellectuelle ont pris naissance. Je signale qu’au Canada les tribunaux se sont montrés disposés à interpréter des contrats portant sur des droits intellectuels internationaux, et ce, même si ces contrats avaient été établis sous le régime d’une loi étrangère : Verdellen c Monaghan Mushrooms Ltd, 2011 ONSC 5820 aux para 1, 9‑15, 48; Quantum Leap Research Inc. c Kay, 2010 QCCS 1449 aux para 2, 11‑18, 38‑60, 85, et 106‑109. Un tribunal canadien peut aussi être considéré comme un forum conveniens à l’égard d’un différend transfrontalier en matière de propriété intellectuelle, même si l’on souhaite obtenir réparation sous le régime des lois des États‑Unis : Research in Motion Limited c Atari Inc, 2007 CanLII 33987 (C.S. Ont.) aux para 1‑3, 32‑37. Comme le résume le professeur Vaver : [TRADUCTION] « Une activité liée à la PI qui a un lien réel et substantiel avec un pays, une province ou un État peut être réglée par un tribunal qui constitue un forum approprié, que le défendeur l’accepte ou non ou qu’il soit présent dans le territoire ou non » : D. Vaver, Intellectual Property Law, 2e éd. (Toronto : Irwin Law, 2011) à la p 30.

[60] Les réparations que M. Forootan souhaite obtenir dans le cadre de l’action californienne de 2021 sont pertinentes elles aussi. L’article 52 de la Loi sur les brevets confère censément à notre Cour la compétence exclusive de rendre des ordonnances qui modifient ou radient des inscriptions faites dans les registres du Bureau des brevets : voir, par exemple, CAE Inc. c Canada (Commissaire aux brevets), 2021 CF 307 au para 17; Micromass UK Ltd c Canada (Commissaire aux brevets), 2006 CF 117 au para 12. Seismotech soutient que cela veut dire qu’un tribunal non canadien n’est pas compétent pour faire modifier les registres du Bureau des brevets. Je conviens qu’un tribunal non canadien ne peut pas ordonner que l’on apporte un changement au registre du Bureau des brevets canadien, mais cela ne veut pas dire que la Cour fédérale est le seul tribunal qui peut s’occuper des questions contractuelles qui se rapportent au titre d’un brevet.

[61] En fait, la propre demande que Seismotech a engagée devant la Cour suprême de la Colombie‑Britannique le confirme. L’action de la C.‑B. de 2020 vise à obtenir une déclaration portant que Seismotech est la propriétaire des SUMS Technologies, qui englobent les brevets canadiens et américains, et que les transferts ou les cessions des SUMS Technologies en faveur de SDRT sont nulles. Elle plaide expressément que la Cour suprême de la Colombie‑Britannique a compétence sur l’action en partie parce que celle‑ci porte sur les droits de propriété des brevets canadiens. Les propres mesures que Seismotech a prises confirment donc son idée que la compétence que l’article 52 confère à la Cour fédérale n’a pas d’incidence sur la capacité d’un autre tribunal d’examiner des contrats qui se rapportent à un titre de brevet.

[62] Les déclarations que souhaite obtenir Seismotech dans le cadre de l’action de la C.‑B. de 2020 sont semblables à celles que M. Forootan souhaite obtenir dans le cadre de l’action californienne de 2021 : une déclaration conférant la totalité des droits et des titres de propriété afférents aux brevets et transférant ces derniers à M. Forootan. Même si ces déclarations concernent la propriété des brevets entre les parties à ce litige, elles ne portent pas sur la propriété inscrite de brevets. Elles ne vont donc pas à l’encontre de l’article 52 de la Loi sur les brevets, et aucune injonction anti‑poursuites n’est nécessaire pour « protéger » la compétence que la Loi sur les brevets confère à notre Cour.

[63] Il vaut la peine de signaler à ce stade‑ci que l’une des ordonnances que l’on tente d’obtenir dans le cadre de l’action californienne de 2021 est [TRADUCTION] « une déclaration et une ordonnance rendues à l’[USPTO] pour faire transférer la propriété des brevets au demandeur ». Comme il a été signalé, les « brevets » sont définis dans la plainte et ils englobent à la fois les brevets canadiens et les brevets américains. Il semble peu probable que la Cour de l’État de la Californie ordonne à l’USPTO d’enregistrer la propriété d’un brevet canadien, ou que l’USPTO sache quoi faire d’une telle ordonnance, si tant est qu’elle est rendue. Cependant, je ne puis conclure que cette seule référence faite dans la demande de réparation présentée dans l’action californienne de 2021 a une incidence sur l’évaluation générale.

[64] Cela ne veut pas dire que la Cour de l’État de la Californie conclura qu’elle est compétente à l’égard des brevets canadiens, qu’elle devrait exercer cette compétence, ou qu’elle devrait rendre les ordonnances demandées. Cela veut simplement dire que, d’après la démarche canadienne exposée dans l’arrêt Amchem, notre Cour conclut que la Cour de l’État de la Californie [TRADUCTION] « pourrait raisonnablement » conclure qu’il n’existe aucun tribunal nettement plus approprié pour régler le litige.

[65] Seismotech a orienté la Cour vers un certain nombre d’aspects de l’accord de règlement en vue de faire ressortir la nature fallacieuse de l’action californienne de 2021. En particulier, elle allègue que le paragraphe 10 de l’accord de règlement, lequel est reproduit au paragraphe [16] des présentes, ne confère aucun droit ou titre de propriété relatif aux brevets canadiens (ou américains); il permet simplement à M. Forootan d’empêcher la vente des brevets, sauf si le produit couvre le solde qui lui est dû. Il s’agit là, selon moi, d’un moyen de défense de fond contre l’action californienne de 2021. Cela ne traite pas de la question de savoir si la Cour de l’État de la Californie pouvait raisonnablement revendiquer sa compétence. En faisant abstraction de la question de savoir si la nature frivole ou vexatoire d’une instance étrangère pourrait être prise en compte dans certains cas afin d’évaluer s’il y a lieu de rendre une injonction anti‑poursuites, je conclus que les arguments que Seismotech a invoqués concernent davantage des questions de bien‑fondé. Compte tenu des conclusions que j’ai tirées au sujet de l’injonction anti‑poursuites demandée, je ne ferai pas de commentaires sur ce bien‑fondé.

[66] L’analyse qui précède repose sur l’action californienne de 2021, telle qu’elle est plaidée, c’est‑à‑dire une action sollicitant une réparation par suite d’un manquement à l’accord de règlement, et non en tant que mesure visant à faire appliquer le jugement californien de 2019. Comme il a été mentionné plus tôt, M. Forootan semble déjà avoir exercé la disposition de l’accord de règlement selon laquelle, en cas de défaut de paiement, un jugement peut être rendu et inscrit. La question de savoir si cela empêche M. Forootan de demander un autre jugement pour cause de défaut ou de manquement à l’accord de règlement est une autre question de fond qui relève de la Cour de l’État de la Californie. Cependant, pour les besoins de la présente requête, cela veut dire que l’objet de l’action californienne de 2021 – qui est la cible de l’injonction anti‑poursuites – est une allégation qui se rapporte principalement à un manquement à l’accord de règlement et à son application, et non à l’exécution du jugement californien de 2019.

[67] Je signale ce fait pour deux raisons. Premièrement, je ne suis pas d’avis que l’action californienne de 2021 constitue une mesure qui vise à faire exécuter le jugement californien de 2019 par la saisie de biens canadiens. Comme le soutient Seismotech, sous réserve des dispositions législatives régissant l’enregistrement, pour qu’un jugement étranger puisse être exécuté au Canada par voie de saisie de biens canadiens, il faut tout d’abord qu’il soit reconnu au moyen d’un jugement canadien : Lax c Lax, 2004 CanLII 15466 (C.A. Ont.) au para 29. Le jugement étranger est considéré comme la preuve d’une créance ou d’une obligation, sur le fondement de laquelle l’action canadienne est engagée : Chevron, aux para 42‑44; Pro Swing Inc. c Elta Golf Inc., 2006 CSC 52 au para 11. Le jugement canadien peut alors être exécuté à l’encontre de biens canadiens, comme tout autre jugement canadien : Pro Swing, au para 11, citant V Black, « L’exécution d’un jugement non pécuniaire étranger : Pro Swing c Elta » (2006), 42 CanBusLJ 81 à la p 89.

[68] Deuxièmement, même si l’exécution d’un jugement étranger soulève également des questions de courtoisie judiciaire, de compétence et de forum non conveniens, elle suscite en droit international privé des questions différentes de celles qui découlent d’une action pour rupture de contrat ou d’une injonction anti‑poursuites, ce qui, fait plus important, inclut la nature des moyens de défense disponibles : Beals c Saldanha, 2003 CSC 72 aux paras 39‑41; Pro Swing, aux para 10‑15.

[69] Seismotech fait valoir que la nécessité d’obtenir une reconnaissance et une exécution au Canada milite en défaveur de la Cour de l’État de la Californie et en faveur de la Cour fédérale en tant que tribunal approprié. Elle ajoute que la démarche de M. Forootan donne lieu à de multiples instances, que son injonction anti‑poursuites, de portée étroite, vise à refreiner. Je ne puis souscrire à cet argument. Certes, à un certain stade, il pourrait être nécessaire d’engager une instance au Canada pour faire exécuter un jugement de la Cour de l’État de la Californie qui découle de l’action californienne de 2021, mais il s’agit là de la conséquence nécessaire d’un litige transfrontalier. Le fait de scinder l’action californienne de 2021 de manière à ce que la totalité de cette dernière suive simultanément deux voies ne règle pas une préoccupation concernant une multiplicité d’actions. Au contraire, cela l’exacerbe.

[70] Même si l’on rendait l’injonction demandée, l’action californienne de 2021 se poursuivrait, relativement aux demandes de réparation pécuniaire et aux brevets américains. M. Baraty n’a fourni aucune preuve qu’il ne défendrait pas l’action californienne de 2021 à l’égard de ces questions. Les questions relatives aux brevets canadiens ne seraient pas nécessairement intégrées à la demande que Seismotech a présentée à la Cour fédérale et qui sous‑tend la présente requête. La demande présentée à la Cour fédérale met en cause des parties différentes et, pour l’essentiel, un accord différent. L’argument de Seismotech est que si l’injonction anti‑poursuites demandée était rendue, M. Forootan serait obligé de venir au Canada pour engager une nouvelle instance afin de solliciter la même réparation que celle qu’il cherche à obtenir dans le cadre de l’action californienne de 2021 en lien avec les brevets canadiens. Cela ne ferait que s’ajouter aux quatre instances en cours qui opposent les parties (la présente demande, l’action californienne de 2021, l’action de la C.‑B. de 2020, et la requête en annulation déposée dans le cadre de l’action californienne de 2015).

[71] Je conclus donc que Seismotech n’a pas satisfait au premier volet de l’analyse décrite dans l’arrêt Amchem.

c) Il n’y a aucun avantage juridique dont il serait injuste de priver M. Forootan

[72] La seconde étape de l’analyse effectuée dans Amchem consiste à évaluer si l’injonction demandée priverait le demandeur étranger de « quelque avantage personnel ou juridique dont [il] peut profiter » devant le tribunal étranger : Amchem, aux p 932‑933. Seismotech fait valoir que M. Forootan n’a aucun avantage juridique à poursuivre sa demande au Canada. En fait, ajoute‑t‑il, il y aurait un avantage juridique à le faire, car cela éviterait que M. Forootan doive plus tard engager une action au Canada pour faire appliquer un jugement californien, et cela éviterait toute préoccupation quant à la reconnaissance d’un tel jugement au Canada.

[73] À mon avis, le fait qu’un litige contractuel puisse être tranché devant un seul tribunal plutôt que devant plusieurs simultanément peut être considéré comme un avantage juridique. Le fait que M. Forootan pourrait engager une action distincte devant notre Cour (ou un autre tribunal canadien) à l’égard de l’accord de règlement et des brevets canadiens ne veut pas dire qu’il ne serait pas privé de l’avantage juridique que représente le fait d’engager une seule action plutôt que deux à propos du même contrat.

[74] Cela dit, je ne puis conclure que le fait de priver M. Forootan de cet avantage juridique irait jusqu’à constituer une « injustice » dans les circonstances, ainsi que l’exige l’analyse effectuée dans Amchem. Il se peut fort bien que les parties finissent par plaider leur cause dans plusieurs pays, étant donné qu’ils ont signé des accords dans plusieurs pays et qu’ils possèdent des éléments de propriété intellectuelle dans plusieurs pays. La conduite ordonnée du litige donne à penser que chaque question litigieuse ne devrait être tranchée qu’une seule fois. Cependant, l’ajout d’une instance de plus dans un contexte litigieux déjà encombré ne devrait pas, en soi, aller jusqu’à constituer une injustice.

[75] Seismotech souligne également que le moment où l’action californienne de 2021 a été engagée dénote à quel point la conduite de M. Forootan, en engageant un litige à l’étranger, est inappropriée. Elle allègue que l’on créerait un [TRADUCTION] « cauchemar procédural interterritorial » si M. Forootan pouvait poursuivre ses demandes visant les brevets canadiens devant la Cour de l’État de la Californie, alors que la présente instance est déjà en cours à l’égard des mêmes brevets canadiens.

[76] Je ne puis admettre qu’il s’agit d’un facteur important dans les circonstances. M. Forootan a engagé l’action californienne de 2021 quelques semaines seulement après que Seismotech a engagé le présent litige, mais le contexte de l’affaire ne se limite pas à ces deux instances. M. Forootan a tenté tout d’abord d’obtenir la même réparation auprès de la Cour de district de la Californie. Cette action‑là a été engagée devant le mauvais tribunal, mais elle fait partie du contexte de l’action californienne de 2021, laquelle a été engagée après que la Cour de district de Californie eut rejeté l’action devant la Cour de district de 2020, sous réserve du droit de présenter une nouvelle demande devant un tribunal étatique. Seismotech a engagé sa propre action au Canada (l’action de la C.‑B. de 2020) après que M. Forootan a engagé l’action devant la Cour de district de 2020. Elle a ensuite déposé la présente demande, souhaitant obtenir un chevauchement de réparations à la suite de l’action de la C.‑B. de 2020, au cours de la période comprise entre les deux instances qu’il a engagées en Californie. Dans ce contexte plus large, il y a peu de conclusions que je puis tirer du moment où l’action californienne de 2021 a été engagée ou du fait qu’il existe plusieurs instances qui revendiquent toutes les brevets canadiens et quelques‑unes qui revendiquent aussi les brevets américains.

[77] Habituellement, une partie visée par une requête en injonction anti‑poursuites, comme l’est M. Forootan, mettrait de l’avant d’autres désavantages juridiques possibles. Dans la présente affaire, il ne l’a pas fait et il ne pouvait pas le faire, vu qu’il n’a pas comparu dans le cadre de l’instance et que, de ce fait, la présente requête ne lui a pas été signifiée.

[78] Tout bien considéré, au vu du dossier qui m’a été soumis, je ne puis conclure que M. Forootan aurait été injustement privé d’un avantage juridique si l’on avait satisfait au premier volet du critère énoncé dans l’arrêt Amchem et si l’injonction anti‑poursuites demandée était rendue.

d) L’absence d’une requête en suspension devant la Cour de l’État de la Californie milite contre le fait de rendre une injonction anti‑poursuites

[79] Bien que ce ne soit pas déterminant compte tenu des conclusions que j’ai tirées plus tôt, je suis d’avis que le défaut de Seismotech de solliciter la suspension de l’action californienne de 2021 auprès de la Cour de l’État de la Californie milite contre le fait de rendre l’injonction demandée. Vu l’importance de cette question, je vais motiver ce point de vue, indépendamment des conclusions que j’ai tirées sur le bien‑fondé.

[80] Il est conforme aux principes de la courtoisie judiciaire qu’un justiciable demande à un tribunal étranger de mettre fin à ses propres procédures plutôt que de se faire dire par un tribunal canadien, par la voie d’une ordonnance à un justiciable, qu’il faut mettre fin à ses procédures. Il est donc préférable de demander une suspension devant le tribunal étranger avant de solliciter une injonction anti‑poursuites devant le tribunal canadien : Amchem, aux p 930‑931; Li, aux para 42‑43, 46. Il est possible que la conclusion que tire le tribunal étranger fournisse une réponse complète ou donne des indications pertinentes au tribunal canadien : Veritas Investment, au para 49.

[81] Seismotech n’a pas demandé à la Cour de l’État de la Californie de suspendre l’action californienne de 2021. M. Baraty non plus. Seismotech fait valoir que cela ne devrait pas empêcher d’obtenir une injonction anti‑poursuites.

[82] Seismotech souligne que, selon le juge Sopinka, il est « préférable » de demander d’abord une suspension au tribunal canadien. Elle signale que la Cour supérieure de justice de l’Ontario a reconnu à un certain nombre de reprises qu’il n’était pas nécessaire de demander une suspension dans le cadre de l’instance étrangère : Hudon c Geos Language Corp, 1997 CanLII 16250 (C. div. Ont.) aux para 22‑23; Dent Wizard International Corp c Brazeau, [1998] OJ no 5336, 31 CPC (4th) 174 (Div. gén.) aux para 16‑19; Bell’O, aux para 11‑14; Precious Metal, aux para 18, 23‑34. Je suis d’accord pour dire, sur la foi de l’arrêt Amchem et des décisions susmentionnées, qu’il n’est pas systématiquement exigé qu’une demande de suspension présentée dans le territoire étranger soit rejetée avant qu’il soit possible d’obtenir une injonction anti‑poursuites. Mais il ne s’agit pas là, pour autant, d’une mesure simplement facultative : UD Trading Group Holding PTE Limited et al c TAP Private Capital Limited, 2021 ONSC 1957 au para 59. Comme l’indique clairement l’arrêt Amchem, la « préférence » repose sur des principes de courtoisie judiciaire importants, qui dictent qu’un tribunal canadien ne doit empêcher que dans de rares cas un tribunal étranger d’examiner si une action engagée devant lui l’a été en bonne et due forme : Amchem, aux p 930‑931. De deux choses l’une : il aurait fallu qu’on dépose, sans succès toutefois, une demande de suspension dans le ressort étranger, ou il devrait y avoir des raisons convaincantes pour ne pas l’avoir fait.

[83] Les circonstances factuelles et les raisons pour ne pas solliciter une suspension sont donc d’une importance cruciale pour évaluer si ce défaut porte un coup fatal à une requête en injonction anti‑poursuites. Les affaires ontariennes que Seismotech a citées sont instructives. Dans la décision Hudon, une résidente de l’Ontario poursuivait son ancien employeur, une entreprise japonaise, en Ontario, en lien avec un accident survenu en Chine et à cause duquel elle souffrait d’une invalidité permanente. L’entreprise avait sollicité une suspension en Ontario, pour cause de forum non conveniens, mais sa demande avait été rejetée. Elle avait ensuite engagé une instance au Japon, sollicitant une déclaration relative à l’interprétation du contrat. Les lésions que la demanderesse avait subies l’empêchaient de se rendre au Japon pour défendre cette poursuite : Hudon, aux para 3‑11. La Cour divisionnaire a conclu que le défaut de solliciter une suspension au Japon avant de solliciter une injonction anti‑poursuites n’était pas en soi un motif pour faire annuler cette injonction : Hudon, aux para 22‑23.

[84] La décision Hudon a été appliquée dans la décision Dent Wizard. Dans cette affaire, un employeur avait tout d’abord engagé une instance en Ontario au sujet d’actes commis en Ontario. Après que l’employeur défendeur, un résident de l’Ontario, avait défendu l’action et que le processus d’interrogatoire préalable était en cours, l’employeur avait lancé un arbitrage au Missouri, soulevant les mêmes allégations et sollicitant la même réparation : Dent Wizard, aux para 2‑6, 11. Le juge Webber a conclu que, dans ces circonstances, le défaut de solliciter la suspension de l’arbitrage au Missouri n’était pas fatal : Dent Wizard, aux para 17‑19. La Cour a signalé, notamment, que dans une action semblable engagée contre une autre partie, une demande de suspension d’un résident de l’Ontario avait été rejetée : Dent Wizard, au para 17.

[85] La décision Hudon a aussi été appliquée dans la décision Bell’O. Là encore, les demandeurs avaient d’abord engagé une instance en Ontario. N’ayant pas réussi à obtenir une injonction des tribunaux ontariens, les demandeurs avaient lancé une autre action au New Jersey : les demandes découlaient de la même matrice factuelle et il y avait une demande d’injonction semblable : Bell’O, aux para 3‑6. Le juge Nordheimer a admis, même si elle était vague, la preuve non contredite des défendeurs qu’il serait [TRADUCTION] « excessivement coûteux » de retenir les services d’un avocat américain et de lui donner instruction d’introduire une action en suspension au New Jersey : Bell’O, aux para 12‑14. Il a donc conclu que le défaut de solliciter une suspension au New Jersey ne portait pas un coup fatal à la demande d’injonction anti‑poursuites.

[86] Enfin, dans la décision Precious Metal, les défendeurs avaient sollicité, sans succès toutefois, la suspension de l’action ontarienne en faveur de tribunaux du Royaume‑Uni pour cause de forum non conveniens. Les défendeurs avaient néanmoins poursuivi leur action au Royaume‑Uni : Precious Metal, aux para 5‑12. Le juge Campbell a conclu qu’il convenait de rendre une injonction anti‑poursuites à l’égard de l’action menée au Royaume‑Uni, même si le demandeur ontarien n’avait pas sollicité une suspension au Royaume‑Uni pour un certain nombre de raisons, dont son impécuniosité établie, le fait que l’Ontario avait déjà décidé qu’elle était un forum conveniens, et l’absence de tout désavantage juridique apparent pour les défendeurs : Precious Metal, aux para 23‑27, 32‑33.

[87] Comme on peut le constater, aucune de ces situations ne ressemble de près à celle dont il est question en l’espèce. Dans l’affaire Hudon, tant les dépenses que l’état de santé de la demanderesse militaient en faveur du fait d’exiger la suspension des procédures à l’étranger. Dans les affaires Dent Wizard et Bell’O, les demandeurs avaient eux‑mêmes engagé les instances en Ontario avant d’en entreprendre à l’étranger. Dans les affaires Hudon et Precious Metal, les défendeurs avaient déjà plaidé, sans succès toutefois, la question du forum conveniens en Ontario. Dans d’autres décisions, la Cour supérieure de l’Ontario a souligné l’importance de poursuivre une demande de suspension. Dans l’affaire UD Trading, par exemple, le juge Gilmore a signalé que les parties étaient d’une taille considérable et qu’elles jouissaient d’une vaste expérience, et il a conclu qu’étant donné qu’il n’y avait pas eu de demande de suspension ailleurs, la Cour se trouvait dans l’impossibilité d’appliquer l’évaluation faite dans l’arrêt Amchem pour cause de forum non conveniens : UD Trading, aux para 56‑61.

[88] La Cour suprême de la Colombie‑Britannique a exprimé cette thèse en des termes plus énergiques, disant que dans cette province [TRADUCTION] « l’état du droit » est qu’une injonction anti‑poursuites ne peut pas être engagée avant que le tribunal étranger ait eu la possibilité de se prononcer sur une demande fondée sur le principe du forum non conveniens : McMillan c McMillan, 2012 BCSC 32 au para 17; Quigg c Quigg, 2018 BCSC 853 au para 55.

[89] Seismotech explique de trois façons pourquoi elle n’est pas tenue de solliciter en premier une suspension en Californie. Premièrement, dit‑elle, elle n’est pas une partie nommément désignée dans l’action californienne de 2021, de sorte qu’elle n’a peut‑être pas la qualité requise pour solliciter une suspension. Le fait de ne pas être partie au litige étranger ne porte pas un coup fatal à une requête en injonction anti‑poursuites, même si cela signifie qu’elle n’est pas conventionnelle : Shaw c Shaw, 2007 CanLII 27337 (C.S. Ont.) aux para 19‑23. Cependant, selon moi, ce fait ne milite pas fortement en faveur de Seismotech dans les présentes circonstances. Si Seismotech a un intérêt suffisant dans l’action californienne de 2021 pour demander à notre Cour une injonction anti‑poursuites, cet intérêt devrait être suffisant pour qu’elle demande la reconnaissance de sa qualité pour agir ou une réparation auprès de cette cour.

[90] Deuxièmement, Seismotech fait valoir qu’elle n’a pas les ressources voulues pour plaider dans de multiples territoires, et que M. Baraty n’a pas mon plus les ressources nécessaires pour financer personnellement d’autres litiges pour Seismotech en Californie. Je suis conscient que les contraintes financières peuvent être un facteur important lors de l’évaluation du besoin de solliciter une suspension à l’étranger : Bell’O, aux para 12‑14. Cependant, l’argument sonne un peu creux si l’on tient compte du fait que Seismotech a engagé deux instances différentes au Canada, et que M. Baraty a déposé récemment des requêtes tant dans l’action devant la Cour de district de 2020 que dans l’action californienne de 2015.

[91] À part le fait que M. Baraty a déclaré que son avocat (qui est également membre du Barreau de la Californie et qui le représente dans l’instance californienne) l’a informé qu’il serait [TRADUCTION] « très coûteux » pour Seismotech de présenter une demande de suspension devant la Cour de l’État de la Californie, je dispose de peu d’informations sur le coût relatif d’une demande de suspension devant cette cour et d’une demande d’injonction anti‑poursuites ici au pays. Dans le même ordre d’idées, Seismotech soutient que les tribunaux aux États‑Unis ne sont pas soumis à un système de « perdant payeur », mais je signale que Seismotech n’a pas non plus demandé ses dépens afférents à la présente requête. De plus, les dépens restreints que la Cour de district de Californie a récemment adjugés à M. Baraty étaient fondés sur le fait qu’elle n’avait pas compétence sur l’accord qu’invoquait M. Baraty à l’appui de sa demande de dépens.

[92] Il est également pertinent que, comme nous l’avons vu plus tôt, l’injonction anti‑poursuites que sollicite Seismotech n’a pas pour effet de mettre fin à l’action californienne de 2021, mais de la diviser en deux : faire en sorte que le caractère exécutoire de l’accord de règlement et du jugement californien de 2019 à l’encontre des brevets canadiens puisse être plaidé au Canada, et que le caractère exécutoire du même accord et du même jugement à l’encontre des brevets américains et d’autres biens soit plaidé en Californie. L’argument selon lequel il est trop coûteux de solliciter une ordonnance dans le territoire étranger est moins convaincant dans ce contexte.

[93] Troisièmement, Seismotech signale que le brevet 189 est expiré, et que quatre des brevets canadiens restants viendront à expiration à la fin de la présente année. Elle allègue qu’en raison de la valeur décroissante des brevets au fil du temps, elle subirait un préjudice considérable si on l’obligeait à solliciter une suspension en Californie. Ces arguments de délai et de préjudice sont minés par le fait que Seismotech n’a rien fait pour faire annuler les cessions prévues par la CAV avant le début de l’action de la C.‑B. de 2020, plusieurs années après que M. Forootan eut censément omis d’honorer la promesse de capitaux. Elle a aussi attendu jusqu’à quatre mois environ après le début de l’action californienne de 2021 pour déposer la présente requête en injonction anti‑poursuites. Notre Cour est consciente qu’il est nécessaire d’agir rapidement dans les cas où des droits venant à expiration sont en jeu. Mais elle ne devrait pas faire abstraction d’importantes questions de courtoisie judiciaire pour des raisons d’urgence si une partie a elle‑même laissé du temps s’écouler avant d’agir.

[94] Je conclus que Seismotech n’a pas établi qu’il était nécessaire en l’espèce de rendre une injonction anti‑poursuites, même sans avoir demandé au préalable une suspension auprès de la Cour de l’État de la Californie. Bien que cela puisse suffire pour rejeter la requête de Seismotech, il n’est pas nécessaire que je tranche la question vu les conclusions que j’ai tirées au sujet des principaux éléments de l’analyse effectuée dans l’arrêt Amchem.

IV. Conclusion

[95] Je conclus que Seismotech n’a pas établi qu’il est question en l’espèce de l’une des rares circonstances dans lesquelles la Cour devrait intervenir dans un litige mené devant un tribunal étranger en rendant une injonction anti‑poursuites. Même si notre Cour a compétence pour trancher des questions contractuelles relatives à la propriété de brevets canadiens, d’autres tribunaux peuvent être compétents eux aussi pour traiter de telles questions contractuelles dans les cas où il existe un lien réel et substantiel entre le litige et le tribunal. La Cour supérieure de l’État de la Californie (comté d’Orange) pourrait décider en fin de compte qu’elle n’est pas compétente ou qu’elle n’est pas le tribunal approprié pour trancher ces questions. Cependant, pour les besoins de l’injonction anti‑poursuites demandée, je suis d’avis que la Cour pourrait raisonnablement conclure qu’elle a la compétence requise pour les trancher et qu’elle est le tribunal approprié pour le faire.

[96] La requête est donc rejetée. Aucuns dépens n’ont été demandés ou ne sont appropriés dans les circonstances.


ORDONNANCE dans le dossier T‑276‑21

LA COUR ORDONNE :

  1. La requête est rejetée.

  2. Aucune ordonnance n’est rendue quant aux dépens.

« Nicholas McHaffie »

Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑276‑21

 

INTITULÉ :

SEISMOTECH SAFETY SYSTEMS INC. c IRADJ FOROOTAN ET AL

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE tenue PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 14 JUILLET 2021

 

OrdONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE MCHAFFIE

 

DATE DES MOTIFS :

LE 21 JUILLET 2021

 

COMPARUTIONS :

Simon Lin

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Evolink Law Group

Burnaby (Colombie‑Britannique)

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

 

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