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Date : 20050307

Dossier : T-1183-04

Référence : 2005 CF 327

Ottawa (Ontario), le 7 mars 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'REILLY

ENTRE :

                                                             MARGARET KIDD

                                                                                                                                    demanderesse

                                                                             et

                                        LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                           défendeur

                                         MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]                Mme Kidd a perdu son emploi au ministère de la Défense nationale (MDN) en 2001 après avoir appris qu'elle souffrait du cancer. Elle a été en congé pendant plusieurs mois alors qu'elle recevait différents traitements, dont de la chimiothérapie. Sa période d'emploi de six mois a été prolongée pendant qu'elle était en congé de maladie, mais MDN a mis fin à son emploi lorsqu'il est devenu évident qu'elle ne pourrait pas revenir au travail. Le MDN a évalué la condition physique de Mme Kidd à deux reprises pour voir si elle pourrait reprendre son ancien poste de nettoyeuse ou en occuper un autre moins exigeant. Les deux fois, un médecin a conclu que Mme Kidd serait incapable de retourner au travail.


[2]                Mme Kidd a porté plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne, alléguant qu'elle avait été victime de discrimination en raison d'une déficience physique. Après enquête, la Commission a décidé de ne pas renvoyer la plainte de Mme Kidd à un tribunal parce que le MDN avait agi de façon appropriée dans les circonstances en essayant de répondre aux besoins de Mme Kidd dans son milieu de travail.

[3]                Mme Kidd soutient que la Commission l'a traitée injustement et qu'elle s'est fondée sur des renseignements erronés lorsqu'elle a refusé de renvoyer sa plainte. Je ne pense pas toutefois que la Commission ait commis une erreur et je dois, en conséquence, rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

I. Les questions en litige

1. La Commission a-t-elle traité injustement Mme Kidd?

2. La Commission s'est-elle fondée sur de faux renseignements?


II. Analyse

1. La Commission a-t-elle traité injustement Mme Kidd?

[4]                Mme Kidd prétend qu'elle a été traitée injustement par la Commission parce que celle-ci a) n'a pas communiqué avec elle en temps voulu et b) a eu tort de rejeter sa demande d'être représentée par un avocat?

(a) La communication inadéquate

[5]                Après avoir décidé de ne pas renvoyer la plainte à un tribunal, la Commission n'a pas fait parvenir sa décision à l'adresse de Mme Kidd. Cette dernière laisse entendre que cette négligence était symptomatique du défaut de la Commission de la traiter avec dignité et respect et d'analyser sa plainte de façon sérieuse.

[6]                Il est vrai que la conduite de la Commission peut indiquer qu'elle n'a pas porté au dossier de Mme Kidd toute l'attention qu'elle aurait dû. La Commission a omis de mettre à jour les coordonnées de Mme Kidd et a notifié sa décision à une mauvaise adresse. Le dossier révèle cependant que la Commission a essayé de joindre Mme Kidd par téléphone à maintes reprises, mais sans succès. Mme Kidd n'est pas de cet avis.

[7]                Comme la Commission n'est pas une partie en l'espèce, je dispose de trop peu d'information pour décider si elle a fait preuve d'une diligence raisonnable lorsqu'elle a essayé de communiquer avec Mme Kidd.

[8]                L'avocat du défendeur a laissé entendre que je devrais peut-être ordonner à la Commission de comparaître de sorte que sa position puisse être vérifiée et que tout élément de preuve pertinent au sujet de sa conduite puisse être déposé devant la Cour. Je refuse cependant de le faire dans les circonstances. À mon avis, aucun élément de preuve additionnel ne pourrait avoir une incidence sur l'issue de la présente instance. Mon examen du dossier et des prétentions des parties n'a révélé aucun préjudice causé à Mme Kidd, même si, comme cette dernière l'allègue, la Commission a manqué d'égards envers elle et n'a pas accordé à sa situation toute l'attention qu'elle aurait dû. Aucune des allégations de Mme Kidd, même si elles étaient vraies, ne constitue un manquement à la justice naturelle ou une injustice.

(b) L'absence d'avocat


[9]                De même, rien n'indique que Mme Kidd a subi un préjudice parce qu'elle n'était pas représentée par un avocat. Mme Kidd prétend que, si elle avait été représentée, elle aurait peut-être été mieux en mesure de répondre au rapport de l'enquêteuse et de convaincre la Commission de ne pas suivre ses recommandations. Elle dit que la Commission lui a parlé de la possibilité de faire des observations après que l'enquêteuse eut terminé son rapport. La Commission aurait toutefois ajouté qu'elle ne devait pas simplement répéter ses allégations précédentes, mais soulever de nouveaux arguments. Mme Kidd constate cependant que le MDN a répondu au rapport de l'enquêteuse en répétant les arguments qu'il avait déjà fait valoir.

[10]            Rien dans le dossier ne permet de croire que les observations finales du MDN ont convaincu la Commission ou qu'elle n'a pas tenu compte de la position de Mme Kidd. Mme Kidd a été traitée équitablement : elle a eu la possibilité d'expliquer son point de vue à l'enquêteuse et de faire valoir qu'elle avait commis une erreur. En résumé, je ne vois aucune raison d'annuler la décision de la Commission pour des motifs d'équité.

2. La Commission s'est-elle fondée sur de faux renseignements?


[11]            L'enquêteuse écrit dans son rapport qu'à un certain moment Mme Kidd a cessé de prendre ses médicaments et de suivre ses traitements contre le cancer. Mme Kidd dit que cela est faux. Elle a produit une lettre d'une psychiatre, le docteur Anna Woods, dans laquelle celle-ci déclare que, à sa connaissance, Mme Kidd n'a jamais omis de suivre les instructions médicales, sauf quand elle n'avait pas les moyens d'acheter ses médicaments. Mme Kidd a reconnu qu'elle a dit à l'enquêteuse qu'elle avait interrompu ses traitements à un certain moment à cause du coût des médicaments. Elle a fait cette déclaration pour montrer à l'enquêteuse à quel point elle était affectée par la décision du MDN de mettre fin à son emploi. En d'autres termes, la déclaration de l'enquêteuse était basée sur des faits, bien qu'elle ne donnât pas tout le contexte. En fin de compte, cette déclaration n'était pas réellement erronée et n'a pas été déterminante dans la conclusion de l'enquêteuse selon laquelle le MDN avait raisonnablement tenu compte des besoins médicaux et de la situation de Mme Kidd en prolongeant la durée de son emploi et en prenant des mesures pour la réintégrer dans son milieu de travail.

II. Décision

[12]            Il est regrettable que Mme Kidd ait perdu son emploi juste au moment où elle était sur le point d'obtenir un poste pour une durée indéterminée au sein du MDN. De son côté, le MDN regrette d'avoir perdu une employée qu'il appréciait. J'aurais pensé qu'il existait une solution avantageuse pour les deux parties. Je ne peux cependant rien faire de plus que regretter le différend qui oppose Mme Kidd à son ancien employeur : aucun motif juridique ne justifie l'intervention de la Cour.

                                                                   JUGEMENT

LA COUR STATUE :

1.          La demande de contrôle judiciaire est rejetée sans dépens.

2.          La mention « Le ministère de la Défense nationale » comme défendeur dans l'intitulé est remplacée par la mention « Le procureur général du Canada » .

                                                                                                                          « James W. O'Reilly »          

                                                                                                                                                     Juge                        

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                             T-1183-04

INTITULÉ :                                                            MARGARET KIDD

c.

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :                                      WINNIPEG (MANITOBA)

DATE DE L'AUDIENCE :                                    LE 21 FÉVRIER 2005

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                                   LE JUGE O'REILLY

DATE DES MOTIFS :                                           LE 7 MARS 2005

COMPARUTIONS :

Margaret Kidd                                                  LA DEMANDERESSE, POUR SON PROPRE COMPTE

Kevin Staska                                                             POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Margaret Kidd                                                  LA DEMANDERESSE, POUR SON PROPRE

Winnipeg (Manitoba)                                        COMPTE

John H. Sims, c.r.                                                      POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)


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