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Date : 20210819


Dossier : T‑784‑20

Référence : 2021 CF 851

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 19 août 2021

En présence de madame la juge Walker

ENTRE :

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

demandeur

et

DAVID RANDALL MILLER

défendeur

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1] La présente ordonnance et les présents motifs ont trait à une demande sommaire présentée par le ministre du Revenu national en vertu du paragraphe 231.7(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (5e supp) (la LIR). Le ministre demande une ordonnance obligeant le défendeur, M. David Miller, à fournir certains documents, registres et renseignements (les éléments contestés) à un agent autorisé de l’Agence du revenu du Canada (l’ARC) dans le contexte d’une vérification en cours des années d’imposition allant de 2007 à 2016 de M. Miller. Les éléments contestés sont un sous‑ensemble de documents et de renseignements (les éléments) demandés par l’ARC dans une série de lettres de mise en demeure et de lettres de suivi de l’ARC et du ministère de la Justice adressées à M. Miller en vertu du paragraphe 231.1(1) de la LIR.

[2] Comme je l’explique en détail ci‑après, j’accueillerai en partie la demande d’ordonnance du ministre.

I. Contexte

[3] M. Miller est un homme d’affaires qui, depuis de nombreuses années, travaille comme consultant pour des clients et des sociétés qui cherchent à recueillir des fonds pour avoir accès aux marchés publics canadiens. Un client important était une société établie et exploitée en Europe, sous le nom de Casala Limited (Casala). M. Miller a reçu de Casala des paiements pour ses services dans des comptes détenus dans une banque luxembourgeoise. D’autres clients ont payé les honoraires professionnels de M. Miller en déposant les fonds dus en fiducie auprès de deux cabinets d’avocats canadiens, pour paiement ultérieur.

[4] En 2016, l’ARC a entrepris une vérification des déclarations de revenus des particuliers de M. Miller pour les années d’imposition allant de 2007 à 2015, puis a étendu la vérification à l’année d’imposition 2016 (la vérification).

[5] En 2017 et au début de 2018, le vérificateur de l’ARC chargé de la vérification, M. James Green, a soumis à M. Miller une série de demandes de documents et de renseignements. MM. Green et Miller se sont également rencontrés en personne en janvier 2018. Après la réunion, M. Green a résumé les demandes en suspens dans une lettre datée de février 2018 et adressée à M. Miller. En avril 2018, M. Green a envoyé une seconde lettre à M. Miller au sujet des autres renseignements requis et a fixé au 15 mai 2018 la date limite pour la réponse de M. Miller. Dans son affidavit daté du 16 septembre 2020 (le premier affidavit), M. Green affirme qu’il a reçu des documents et des renseignements de la part de M. Miller, mais qu’une grande partie des éléments demandés n’ont pas été fournis.

[6] En décembre 2018, l’ARC, le ministère de la Justice et M. Miller ont entamé un échange de lettres de mise en demeure et de réponses partielles qui sont le point central de la présente demande (collectivement, la correspondance de mise en demeure) :

Lettre de mise en demeure : Une lettre de mise en demeure initiale de l’ARC datée du13 décembre 2018, qui faisait mention de la réception par M. Green d’un certain nombre de documents et d’observations de la part de M. Miller, mais précisait a) les éléments manquants de leur correspondance antérieure et b) les demandes supplémentaires concernant des documents et des renseignements relatifs aux années visées par la vérification. La lettre de mise en demeure mentionnait 22 éléments distincts, dont certains comportaient une liste de sous‑éléments. La lettre de mise en demeure, délivrée conformément au paragraphe 231.1(1) de la LIR, exigeait une réponse au plus tard le 21 janvier 2019.

Lettre de suivi : Une lettre de suivi de l’ARC datée du 1er mai 2019, qui accusait réception d’un élément visé par la lettre de mise en demeure, indiquait que les 21 autres éléments de la lettre de mise en demeure étaient toujours manquants et demandait des renseignements supplémentaires sur le revenu professionnel brut de M. Miller pour 2016. La lettre de suivi exigeait de M. Miller qu’il fournisse les documents et renseignements manquants au plus tard le 31 mai 2019 et l’informait que, s’il ne le faisait pas, l’ARC pourrait demander une ordonnance de production en vertu de l’article 231.7 de la LIR.

Lettre du ministère de la Justice : Une lettre du ministère de la Justice, envoyée au nom du ministre, datée du 26 février 2020 et informant M. Miller de la participation du ministère de la Justice à la vérification et énumérant les demandes en suspens figurant dans les lettres de mise en demeure et de suivi. On demandait à M. Miller d’envoyer les documents et les renseignements manquants au ministère de la Justice au plus tard le 30 mars 2020. La lettre informait également M. Miller que le ministère de la Justice avait reçu pour instruction de demander à la Cour une ordonnance de production en vertu de l’article 231.7 s’il ne se conformait pas aux lettres de mises en demeure de l’ARC.

Réponse de la firme KPMG : À la suite d’un échange de courriels entre l’avocat du ministère de la Justice et le représentant de M. Miller chez KPMG au sujet du report du délai en raison de la COVID‑19, KPMG a envoyé au ministère de la Justice un rapport provisoire daté du 12 mai 2020. KPMG a déclaré que M. Miller n’avait pas accès à certains des documents demandés, mais que KPMG et M. Miller avaient tenté de fournir une réponse complète concernant chaque élément demandé dans une pièce jointe à la réponse de KPMG. Celle‑ci a indiqué qu’elle fournirait des renseignements supplémentaires une fois que la situation liée à la COVID‑19 serait plus stable.

Seconde lettre du ministère de la Justice : Une seconde lettre du ministère de la Justice, datée du 8 juin 2020, pour préciser la liste des éléments manquants et proposer que KPMG et M. Miller concentrent leurs efforts sur les éléments 15, 16, 17 et 18 de la lettre de mise en demeure. Le ministère de la Justice a fourni un contexte supplémentaire concernant les documents et les renseignements requis par l’ARC et a demandé à KPMG d’envoyer les éléments manquants au plus tard le 8 juillet 2020. Encore une fois, l’avocat du ministère de la Justice a précisé que l’ARC avait donné pour instruction de demander une ordonnance de production au cas où les éléments manquants ne seraient pas fournis.

Seconde réponse de la firme KPMG : Une seconde réponse de KPMG, datée du 8 juillet 2020, revenant sur l’incidence de la pandémie du COVID‑19 sur la capacité de M. Miller d’obtenir la plupart des éléments manquants. La seconde réponse de KPMG comprenait plus de précisions sur les éléments 15 à 18 et les efforts continus déployés par M. Miller pour obtenir les éléments contestés.

[7] Je présenterai, dans la section analyse de l’ordonnance et des motifs qui suivent, les documents, registres et renseignements décrits dans les éléments contestés, tels qu’ils ont été précisés par les parties dans la correspondance de mise en demeure.

[8] Bien que KPMG ait indiqué dans sa seconde réponse que M. Miller s’occupait d’obtenir des documents et des renseignements (éléments 1, 9, 10, 13, 14, 16 à 19 et 21), M. Green déclare dans son premier affidavit que l’ARC n’avait pas reçu de documents supplémentaires en date du 16 septembre 2020 et que la seconde réponse de KPMG ne comprenait pas les explications demandées dans la seconde lettre du ministère de la Justice. De l’avis de l’ARC, M. Miller a continué de ne pas répondre à ses mises en demeure et, par conséquent, l’ARC a demandé au ministère de la Justice d’aller de l’avant avec la présente demande.

II. Historique procédural de la présente demande

[9] Le 17 juillet 2020, le ministre a déposé un avis de demande sommaire demandant à la Cour de rendre une ordonnance en vertu du paragraphe 231.7(1) de la LIR. À la fin de septembre 2020, le ministre a déposé un avis de demande sommaire modifié apportant des modifications mineures à sa demande, avec le consentement de M. Miller.

[10] Le 15 décembre 2020, le ministre a déposé une demande informelle en vue de modifier davantage son avis de demande sommaire afin de circonscrire les questions pour la Cour et de préciser la réparation demandée. Le ministre a joint à sa demande un dossier de demande modifié et un affidavit supplémentaire de M. Green daté du 20 novembre 2020. Encore une fois, la demande a été faite avec le consentement de M. Miller. La Cour a accueilli la demande du ministre par voie d’ordonnance datée du 18 décembre 2020. Le nouvel avis de demande sommaire modifié et le dossier de demande modifié du ministre ont été déposés le même jour. Le projet d’ordonnance modifié du ministre renvoyait aux éléments 15 à 18 de la lettre de mise en demeure et à la demande formulée par l’ARC dans la lettre de suivi en vue d’obtenir des précisions sur le revenu professionnel brut de M. Miller de 2016.

[11] Enfin, le 2 février 2021, le ministre a déposé auprès de la Cour une lettre rectifiant sa position concernant les années d’imposition à l’égard desquelles des renseignements sur les documents bancaires luxembourgeois étaient demandés et expliquant son analyse relative à la période de conservation de six ans pour de tels documents prévue à l’alinéa 230(4)b) de la LIR.

III. Positions des parties

[12] Le ministre soutient que M. Miller a omis de produire les documents, registres et renseignements qui constituent les éléments contestés, en contravention du paragraphe 231.1(1) de la LIR, et qu’il a droit à une ordonnance de production en vertu du paragraphe 231.7(1). Le ministre affirme qu’il a demandé chacun des éléments en vertu du pouvoir que lui confère le paragraphe 231(1) et que M. Miller n’a à ce jour produit aucun document concernant les éléments contestés ou n’a fourni que des réponses incomplètes ou vagues aux demandes de renseignements de l’ARC.

[13] M. Miller ne souscrit pas à l’avis du ministre et conteste la portée des demandes formulées par ce dernier. Il soutient que le ministre a fait fi de l’arrêt Canada (Revenu national) c Cameco Corporation, 2019 CAF 67 (Cameco) rendu par la Cour d’appel fédérale (CAF). M. Miller affirme également qu’il a fait de son mieux pour se conformer aux demandes du ministre et qu’il a informé l’ARC que certains documents ne peuvent pas être obtenus en raison de leur âge ou de problèmes d’accès. M. Miller souligne les conséquences graves qui découlent du défaut d’un contribuable de se conformer à une ordonnance rendue en vertu de l’article 231.7 et soutient qu’il ne s’agit pas d’un cas où la Cour devrait exercer son pouvoir discrétionnaire d’accueillir la demande du ministre et délivrer l’ordonnance demandée.

IV. Paragraphe 231.7(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu.

[14] La question dont la Cour est saisie est de savoir si le ministre a satisfait aux conditions nécessaires à la délivrance d’une ordonnance obligeant M. Miller à produire les éléments contestés. Les parties ne s’entendent pas quant à savoir : (a) si le paragraphe 231.1(1) de la LIR confère au ministre le pouvoir de demander les éléments contestés, et (b) dans l’affirmative, si M. Miller s’est conformé aux demandes du ministre en fournissant les éléments contestés.

[15] Le paragraphe 231.7(1) de la LIR est ainsi libellé :

231.7 (1) Sur demande sommaire du ministre, un juge peut, malgré le paragraphe 238(2), ordonner à une personne de fournir l’accès, l’aide, les renseignements ou les documents que le ministre cherche à obtenir en vertu des articles 231.1 ou 231.2 s’il est convaincu de ce qui suit :

231.7 (1) On summary application by the Minister, a judge may, notwithstanding subsection 238(2), order a person to provide any access, assistance, information or document sought by the Minister under section 231.1 or 231.2 if the judge is satisfied that

a) la personne n’a pas fourni l’accès, l’aide, les renseignements ou les documents bien qu’elle en soit tenue par les articles 231.1 ou 231.2;

(a) the person was required under section 231.1 or 231.2 to provide the access, assistance, information or document and did not do so; and

b) s’agissant de renseignements ou de documents, le privilège des communications entre client et avocat, au sens du paragraphe 232(1), ne peut être invoqué à leur égard.

(b) in the case of information or a document, the information or document is not protected from disclosure by solicitor‑client privilege (within the meaning of subsection 232(1)).

[16] Pour obtenir une ordonnance, le ministre doit convaincre la Cour de ce qui suit :

  1. M. Miller, la personne visée par l’ordonnance de production demandée, est tenu, en vertu de l’article 231.1 de la LIR, de fournir les éléments contestés. En d’autres termes, les éléments contestés doivent relever du champ d’application de cette disposition;

  2. Bien que M. Miller soit tenu de fournir les éléments contestés, il ne l’a pas fait dans un délai raisonnable;

  3. Les éléments contestés ne sont pas protégés par le privilège des communications entre client et avocat.

[17] Les parties reconnaissent qu’il incombe au ministre d’établir qu’il a respecté les conditions préalables à la délivrance d’une ordonnance de production. Elles ne s’entendent pas sur la nature et le caractère suffisant de la preuve requise pour satisfaire à ces conditions, et je reviendrai sur cette question dans mon analyse de chacun des éléments contestés.

[18] À mon avis, M. Miller a bénéficié d’un délai raisonnable pour produire les éléments contestés. Les lettres de mise en demeure et de suivi remontent à 2018 et 2019, et le dernier élément de la correspondance de mise en demeure, à savoir la seconde réponse de KPMG, est daté du 8 juillet 2020. L’ARC et le ministère de la Justice ont également reconnu que les ajournements liés à la COVID‑19 demandés par M. Miller étaient compréhensibles. Dans la seconde lettre du ministère de la Justice, l’avocat du ministère a demandé à KPMG des précisions sur les problèmes d’accès liés à la COVID‑19, mais il n’a reçu aucune réponse.

[19] M. Miller ne présente aucun argument au sujet de la troisième condition énoncée au paragraphe 231.7(1), et je ne vois aucun élément de preuve permettant de croire que les éléments contestés, y compris les comptes en fiducie (grands livres) de Fogler, Rubinoff LLP et de Blaney McMurtry LLP, sont protégés par le secret professionnel de l’avocat.

V. Paragraphe 231.1(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu et l’arrêt Cameco

[20] Pour déterminer si la demande du ministre devrait être accueillie, il faut d’abord établir les paramètres de son pouvoir de demander des documents et renseignements à M. Miller en se fondant sur le paragraphe 231.1(1) de la LIR.

[21] Le paragraphe 231.1(1) est ainsi rédigé :

231.1 (1) Une personne autorisée peut, à tout moment raisonnable, pour l’application et l’exécution de la présente loi, à la fois :

231.1 (1) An authorized person may, at all reasonable times, for any purpose related to the administration or enforcement of this Act,

a) inspecter, vérifier ou examiner les livres et registres d’un contribuable ainsi que tous documents du contribuable ou d’une autre personne qui se rapportent ou peuvent se rapporter soit aux renseignements qui figurent dans les livres ou registres du contribuable ou qui devraient y figurer, soit à tout montant payable par le contribuable en vertu de la présente loi;

(a) inspect, audit or examine the books and records of a taxpayer and any document of the taxpayer or of any other person that relates or may relate to the information that is or should be in the books or records of the taxpayer or to any amount payable by the taxpayer under this Act, and

b) examiner les biens à porter à l’inventaire d’un contribuable, ainsi que tout bien ou tout procédé du contribuable ou d’une autre personne ou toute matière concernant l’un ou l’autre dont l’examen peut aider la personne autorisée à établir l’exactitude de l’inventaire du contribuable ou à contrôler soit les renseignements qui figurent dans les livres ou registres du contribuable ou qui devraient y figurer, soit tout montant payable par le contribuable en vertu de la présente loi;

(b) examine property in an inventory of a taxpayer and any property or process of, or matter relating to, the taxpayer or any other person, an examination of which may assist the authorized person in determining the accuracy of the inventory of the taxpayer or in ascertaining the information that is or should be in the books or records of the taxpayer or any amount payable by the taxpayer under this Act,

à ces fins, la personne autorisée peut :

and for those purposes the authorized person may

c) sous réserve du paragraphe (2), pénétrer dans un lieu où est exploitée une entreprise, est gardé un bien, est faite une chose en rapport avec une entreprise ou sont tenus ou devraient l’être des livres ou registres;

(c) subject to subsection 231.1(2), enter into any premises or place where any business is carried on, any property is kept, anything is done in connection with any business or any books or records are or should be kept, and

d) requérir le propriétaire, ou la personne ayant la gestion, du bien ou de l’entreprise ainsi que toute autre personne présente sur les lieux de lui fournir toute l’aide raisonnable et de répondre à toutes les questions pertinentes à l’application et l’exécution de la présente loi et, à cette fin, requérir le propriétaire, ou la personne ayant la gestion, de l’accompagner sur les lieux.

(d) require the owner or manager of the property or business and any other person on the premises or place to give the authorized person all reasonable assistance and to answer all proper questions relating to the administration or enforcement of this Act and, for that purpose, require the owner or manager to attend at the premises or place with the authorized person

[22] Comme le précise le préambule du paragraphe, la demande présentée par le ministre en vertu du paragraphe 231.1(1) doit porter sur l’application et l’exécution de la LIR, une exigence sur laquelle les parties s’entendent. Les parties font plutôt reposer leurs observations sur la portée de la documentation et des renseignements que le ministre a demandés dans les éléments contestés.

[23] L’alinéa 231.1(1)a) énonce les documents et renseignements que le ministre peut inspecter, vérifier ou examiner :

  1. Les livres et registres d’un contribuable;

  2. Tous documents du contribuable ou d’une autre personne qui se rapportent ou peuvent se rapporter :

    • a) soit aux renseignements qui figurent dans les livres ou registres du contribuable ou qui devraient y figurer;

b) soit à tout montant payable par le contribuable en vertu de la LIR.

[24] Le ministre soutient que l’alinéa 231.1(1)a) lui permet non seulement d’avoir accès aux livres et registres d’un contribuable, mais aussi de demander des renseignements écrits concernant ces livres et registres. Le ministre affirme que les pouvoirs que lui confère cette disposition sont très vastes et que sa capacité de demander des renseignements englobe les renseignements qui relèvent de la connaissance objective et subjective du contribuable (BP Canada Energy Company c Canada (Revenu national), 2017 CAF 61 au para 64 (BP Canada)).

[25] Les observations de M. Miller s’appuient sur l’arrêt Cameco rendu par la CAF en 2019 qui, selon lui, témoigne d’une interprétation plus étroite du paragraphe 231.1(1). Il soutient que le ministre a abusé en l’espèce du pouvoir que lui confère le paragraphe 231.1(1). Le fait qu’il invoque cette disposition sans recourir aux articles 231.2, 231.4 et 231.6 permet d’élargir indûment le pouvoir prévu au paragraphe 231.1(1) et de ne pas tenir compte des garanties procédurales qu’énoncent ces autres dispositions. M. Miller affirme que le ministre cherche à faire infirmer l’arrêt Cameco sans le dire.

Orientations de la Cour d’appel fédérale énoncées dans l’arrêt Cameco

[26] La question examinée par la CAF dans l’arrêt Cameco était de savoir si le pouvoir conféré au ministre en vertu de l’alinéa 231.1(1)a) de la LIR lui permettait d’exiger que les employés d’une société assistent à des entrevues et répondent aux questions posées par les vérificateurs de l’ARC. La CAF a répondu à la question par un « non » catégorique, concluant que le pouvoir du ministre d’inspecter, de vérifier ou d’examiner les livres et registres d’un contribuable ne permet pas au ministre d’obliger le contribuable ou ses employés à répondre à des questions orales relativement à son obligation fiscale (Cameco, au para 12).

[27] Le ministre n’a pas demandé d’entrevue orale avec M. Miller en l’espèce, mais il lui a demandé des renseignements ou des renseignements supplémentaires au sujet de certains éléments contestés. L’arrêt Cameco de la CAF énonce un certain nombre de principes généraux qui sont pertinents à mon examen de ces demandes particulières.

[28] Le juge Rennie, s’exprimant au nom des juges majoritaires dans l’arrêt Cameco, a analysé le texte, le contexte, l’objet et l’historique législatif du paragraphe 231.1(1). Il a conclu que l’objet des pouvoirs prévus aux alinéas 231.1(1)a) et b) est de donner au ministre accès à des « renseignements écrits qui apparaissent ou devraient apparaître dans les registres du contribuable » (Cameco, au para 15). La disposition assure au ministre un accès à ces renseignements (Cameco, au para 27). À cette fin, les alinéas c) et d) du paragraphe permettent l’exercice des pouvoirs conférés aux alinéas a) et b) en donnant accès aux biens ou aux entreprises du contribuable où sont tenus ou devraient l’être des livres ou registres et en exigeant que le contribuable ou toute autre personne se trouvant sur les lieux fournisse une aide raisonnable et réponde à toutes les questions pertinentes à l’application ou à l’exécution de la LIR (Cameco, aux para 20 et 21).

[29] La décision concernant l’appel interjeté par Cameco avait trait à la portée du pouvoir du ministre prévu à l’alinéa 231.1(1)a). La question de savoir si l’alinéa 231.1(1)d) confère un pouvoir indépendant d’obliger à comparaître et à répondre à des questions n’a pas été débattue (Cameco, au para 21). Toutefois, la description par la CAF de l’aide et des renseignements que le ministre peut demander dans le contexte d’une exigence découlant de l’alinéa 231.1(1)a) figure dans les observations de M. Miller. La CAF a tempéré l’accent mis sur l’accès du ministre aux livres et registres d’un contribuable en application de l’alinéa 231.1(1)d) (Cameco, au para 13) :

[13] […] Si le vérificateur souhaite consulter des documents, le législateur a clairement établi qu’il peut poser des questions et demander l’aide de la Cour afin que le contribuable en divulgue la provenance et l’emplacement.

[30] Le juge Rennie a établi une distinction entre l’obligation d’un contribuable d’aider un vérificateur de l’ARC à avoir accès aux documents et renseignements qui expliquent ce que le contribuable a fait et les questions visant à aider le vérificateur à comprendre les faits, les hypothèses et les facteurs que le contribuable a pris en compte au moment de préparer ses déclarations de revenus (Cameco, au para 22). La CAF a fait observer que : « [i]l existe une différence entre mener un examen indépendant au moyen d’une vérification et contraindre à répondre à des questions » (Cameco, au para 24).

[31] M. Miller insiste sur les renvois de la CAF à la provenance, à l’emplacement et à la tenue des livres et registres et soutient que l’arrêt Cameco limite aux renseignements relatifs à ces concepts la capacité du ministre de poser des questions en s’appuyant sur le paragraphe 231.1(1). Je ne suis pas de cet avis. La position de M. Miller ne tient pas compte de deux éléments de la décision du juge Rennie. Premièrement, le juge Rennie souligne l’importance des mots utilisés par le législateur dans le paragraphe en question. Le paragraphe 231.1(1) protège la capacité du ministre d’effectuer une vérification en lui garantissant l’accès à la fois (1) aux livres et registres du contribuable et (2) aux renseignements qui devraient être consignés dans les livres et registres du contribuable. M. Miller soutient que l’arrêt Cameco établit que le paragraphe porte en fait sur ce qu’un contribuable a dans ses livres et registres et non sur ce qui devrait s’y trouver, mais cet argument n’est pas, à mon avis, convaincant. Je suis d’accord avec le ministre pour dire qu’il ne peut être fait abstraction des mots « ou qui devraient » figurant au paragraphe 231.1(1). Si les renseignements devaient se trouver dans les livres et registres de M. Miller, le ministre doit pouvoir y avoir accès en invoquant ce paragraphe.

[32] Deuxièmement, la mention par le juge Rennie de la provenance et de l’emplacement des livres et registres d’un contribuable témoigne, du moins en partie, de sa préoccupation concernant la portée des questions orales prévues par le ministre (Cameco, au para 14) :

[14] Ce que le ministre cherchait à obtenir de Cameco, comme l’indiquent les lettres reçues des vérificateurs de l’ARC, était des réponses orales à des questions orales concernant [traduction] « les faits qui existaient au cours de la période de 2008 à 2010 » et [traduction] « l’élaboration d’une analyse fonctionnelle » d’une opération effectuée avec un lien de dépendance entre Cameco et sa filiale étrangère. Il s’ensuit que la demande du ministre pour obtenir une ordonnance en vertu de l’article 231.7 ne portait pas sur des documents ou sur des renseignements concernant l’emplacement de ces documents et la façon dont ils ont été tenus à jour; le ministre cherchait plutôt à mieux comprendre la dette fiscale éventuelle de Cameco.

[33] En l’espèce, la demande d’ordonnance présentée par le ministre pour obtenir les éléments contestés repose sur l’argument selon lequel M. Miller a omis de fournir des renseignements et des documents qui devraient figurer dans ses livres et registres. En revanche, rien dans la décision du juge Rennie ne permet d’affirmer que les renseignements demandés par le ministre au moyen d’une entrevue orale auraient dû figurer dans les livres et registres de Cameco.

VI. Analyse des éléments contestés

1. Élément 15(1) : Copies du contrat conclu entre M. Miller et Casala pour la période visée par la vérification.

2. Élément 15(2) : Factures soumises à Casala décrivant les services fournis pendant la période visée par la vérification.

[34] Le ministre a demandé les éléments 15(1) et (2) dans la lettre de mise en demeure. En réponse, M. Miller a d’abord déclaré qu’il n’avait pas conclu de contrat avec Casala, mais, dans la réponse de KPMG, il a déclaré que le travail qu’il avait entrepris pour Casala avait été fourni [traduction] « dans le cadre de contrats ».

[35] Dans la seconde lettre du ministère de la Justice, le ministre a réaffirmé et clarifié sa demande concernant le contrat et les factures décrivant les relations entre M. Miller et Casala :

[traduction]
Ce dont nous avons besoin : Tous les renseignements et documents relatifs à vos relations avec Casala Limited, notamment tous les points identifiés à l’élément 15 (y compris les contrats). […] Veuillez indiquer où les montants reçus ont été inclus dans le revenu aux fins d’imposition.

Si l’un des documents demandés n’existe pas, veuillez inclure une déclaration claire à cet effet. Nous sommes d’avis qu’il s’agit de documents qui auraient dû être produits dans le cours normal des affaires et nous exigerons une explication complète et détaillée si tel n’est pas le cas.

[Souligné dans l’original.]

[36] M. Miller a réaffirmé dans la seconde réponse de KPMG qu’il n’y avait pas de contrat de service écrit entre lui‑même (ou sa société, Adrea) et Casala. Il a déclaré qu’il y avait une entente, mais qu’aucun contrat officiel ne pouvait être transmis au ministre. Dans ses observations de vive voix, M. Miller a informé la Cour qu’il n’y avait pas de factures écrites pour les montants qu’il avait reçus de Casala et que, si je délivrais l’ordonnance demandée, la réponse serait la même.

[37] À mon avis, les demandes du ministre concernant les contrats et factures qui décrivent les services que M. Miller a fournis à Casala s’inscrivent dans la portée de l’alinéa 231.1(1)a). Il peut être attendu d’un contribuable qu’il conserve les contrats et les factures concernant la source, les modalités et le montant du revenu tiré de son entreprise. Ces renseignements sont ou devraient être consignés dans les livres ou registres du contribuable.

[38] M. Miller a répondu à la demande du ministre concernant tous les contrats conclus avec Casala en déclarant qu’il n’existait aucun contrat écrit officiel. Il soutient qu’il s’est conformé à la demande du ministre concernant des « copies » des contrats, et je suis d’accord avec lui.

[39] La réponse de M. Miller concernant l’existence de factures décrivant son travail pour Casala n’est pas aussi claire. Il semble, selon le dossier, que M. Miller lui‑même n’a pas fourni au ministre une déclaration selon laquelle il n’existait aucune facture écrite, sous quelque forme que ce soit. La déclaration de son avocat formulée à cet effet dans ses observations de vive voix ne constitue pas une preuve sur laquelle la Cour peut se fonder. Par conséquent, la demande en suspens du ministre concernant toutes les factures de M. Miller ou d’Adrea relatives aux travaux effectués pour Casala peut à juste titre faire l’objet d’une ordonnance.

[40] Il reste à trancher la question de savoir si le ministre peut demander à M. Miller de fournir des renseignements sur les modalités de ses relations d’affaires avec Casala en l’absence d’un contrat écrit et de factures.

[41] Le ministre soutient que, s’il n’existe pas de factures ou de contrat écrit concluentre M. Miller et Casala établissant les modalités de la relation d’affaires, les services rendus et les montants facturés, M. Miller est tenu de fournir des renseignements sur ces aspects de la relation. Il se fonde sur le paragraphe 231.1(1) et les demandes faites dans les lettres de mise en demeure et de suivi, telles qu’elles ont été modifiées à la suite des échanges entre M. Miller, KPMG et le ministère de la Justice dans la correspondance de mise en demeure subséquente. Le ministre soutient que les renseignements en question auraient dû être consignés dans les livres et registres de M. Miller.

[42] M. Miller soutient qu’il a fait de son mieux pour se conformer aux demandes du ministre énoncées aux éléments 15(1) et 15(2). Il affirme qu’il n’existe aucun document écrit qui répond aux demandes et que le ministre n’a pas demandé et ne peut pas demander une description des renseignements qui auraient été inclus dans ces documents s’ils avaient été sous forme écrite.

[43] Je suis d’accord avec M. Miller pour dire que le ministre peut seulement demander une ordonnance à l’égard des renseignements et/ou documents qu’il lui a demandés. En l’espèce, en ce qui concerne les modalités relatives aux relations d’affaires existant entre M. Miller et Casala et les montants qu’il a tirés de cette relation d’affaires, je conclus que le ministre a présenté une telle demande. En lisant la demande du ministre concernant l’élément 15 dans son ensemble plutôt qu’en s’arrêtant à un sous‑élément à la fois, on constate que le ministre a demandé des documents et renseignements concernant la relation d’affaires, y compris des copies de contrats écrits, des factures décrivant les services fournis, un tableau détaillé décrivant le lieu de fourniture des services et la [traduction] « rémunération reçue de » Casala, le mode de paiement et d’autres aspects descriptifs de la relation. M. Miller soutient que le ministre aurait dû demander des éclaircissements sur les éléments manquants avant d’aller de l’avant avec la présente demande, mais c’est ce qu’il a fait par l’entremise de l’avocat du ministère de la Justice dans l’extrait précité de la seconde lettre du ministère de la Justice.

[44] Les demandes présentées par le ministre aux éléments 15(1) et (2), telles qu’elles ont été précisées et expliquées dans la seconde lettre du ministère de la Justice, portent sur des renseignements que M. Miller aurait dû consigner dans ses registres. Les demandes n’ont pas trait au type de questions problématiques cernées dans les arrêts Cameco et BP Canada (Cameco, au para 22). Le ministre ne tente pas de contraindre M. Miller à révéler ses « points faibles » (BP Canada, au para 82). Il a demandé des renseignements pour établir les paramètres de la relation d’affaires. Je ne considère pas comme convaincante l’insistance de M. Miller au sujet du libellé de la lettre de mise en demeure initiale concernant les contrats écrits et toutes les factures, à l’exclusion des autres demandes et de la correspondance de mise en demeure. Il n’a pas du tout mal compris les renseignements que le ministre a demandés. C’est au moyen d’une demande des renseignements qui auraient été inclus dans tout contrat écrit et toute facture établie que le ministre s’assure d’avoir accès aux renseignements de base nécessaires à la vérification. Mis à part le retard, il n’y a aucune raison d’exiger du ministre qu’il envoie une autre lettre de mise en demeure ou qu’il recoure à l’article 232.2 de la LIR pour obtenir les renseignements demandés.

[45] En résumé, je conclus qu’il a été demandé à M. Miller de fournir des renseignements sur les modalités de son contrat oral avec Casala et sur les factures soumises à Casala pour la période visée par la vérification, et qu’il ne les a pas fournis. Par ailleurs, il semble qu’il n’existe aucune facture écrite décrivant les services qu’il a rendus, mais M. Miller n’a pas encore confirmé ce fait. Ces renseignements manquants sont, à juste titre, l’objet de l’ordonnance de production.

3. Élément 15(3) : Tableau détaillé indiquant l’endroit où les services ont été fournis et la rémunération reçue de Casala pendant la période visée par la vérification.

[46] Mes conclusions concernant l’élément 15(3) sont en grande partie semblables à celles que j’ai tirées dans la section précédente. Il y a chevauchement entre la demande de renseignements présentée par le ministre aux éléments 15(1) et 15(2) au sujet de la relation contractuelle de M. Miller avec Casala et sa demande d’un tableau détaillé des montants reçus de Casala.

[47] La réponse de M. Miller concernant l’élément 15(3), dans la réponse de KPMG, était qu’il croyait avoir été payé par Casala au moyen de deux virements télégraphiques d’un montant d’environ 20 000 euros chacun en plus des montants mentionnés à l’élément 18, qui ont été versés à son avocat et qui lui ont été par la suite transmis. Il parle des revenus d’entreprise d’Adrea pour les années allant de 2014 à 2016 dans la seconde réponse de KPMG, mais il n’inclut pas de renseignements propres à Casala. M. Miller soutient qu’il a suffisamment répondu à la demande concernant l’élément 15(3) et s’oppose à la présentation d’un tableau de tous les montants reçus.

[48] Je conclus que la demande du ministre s’inscrit dans le champ d’application de l’alinéa 231.1(1)a), car elle vise des renseignements qui figurent ou devraient figurer dans les livres ou registres de M. Miller et concerne un montant payable par lui en vertu de la LIR. Ces renseignements constituent un élément essentiel de la capacité du ministre de mener efficacement la vérification. Je considère que les réponses que M. Miller a données jusqu’à ce jour sont incomplètes et équivoques et je conclus que la demande du ministre visant à obtenir un tableau détaillé de la rémunération versée par Casala sera incluse dans l’ordonnance.

[49] En tirant ma conclusion, je n’affirme pas que M. Miller était tenu de répondre au ministre au moyen d’un affidavit. Je suis d’accord avec lui qu’une telle exigence serait incompatible avec l’élimination, en 1986, de l’obligation de fournir des réponses sous serment ou par déclaration qui figurait au paragraphe 231.1(1) et l’introduction des pouvoirs d’enquête du ministre à l’article 231.4 de la LIR (Cameco, aux para 32 et 33). Néanmoins, M. Miller était tenu et est tenu de répondre à la demande du ministre concernant les renseignements qu’il aurait dû inclure dans ses livres et registres. S’il est incapable d’indiquer avec précision tous les montants dans un tableau détaillé, il lui est loisible d’indiquer là où les montants sont inconnus et de justifier toute ambiguïté ou toute absence de précisions. Il appartiendra ensuite au ministre de déterminer s’il est convaincu que M. Miller a déployé des efforts raisonnables pour répondre à la demande.

[50] Je remarque que la question des efforts que M. Miller doit déployer ou de la diligence dont il doit faire preuve pour répondre aux demandes du ministre est exprimée différemment par les parties. Le ministre parle de la diligence requise, tandis que M. Miller parle d’efforts raisonnables. Peu importe les mots utilisés, un contribuable doit faire des efforts raisonnables pour répondre avec exactitude aux demandes de documents et de renseignements qui entrent dans le champ d’application du paragraphe 231.1(1). L’ampleur des efforts requis variera dans chaque cas, mais la réponse d’un contribuable doit tenir compte du libellé du paragraphe, qui s’étend aux renseignements qui auraient dû être consignés dans ses livres et registres.

4. Élément 15(4) : Mode de paiement des services rendus pour Casala.

[51] Le ministre a demandé des renseignements sur le mode de paiement des services rendus à Casala. M. Miller a répondu ainsi :

[traduction]
Il croit avoir été payé deux fois, par virements télégraphiques d’environ 20 000 euros dans l’un de ses comptes en euros, en plus des montants mentionnés à l’élément 18 ci‑après, qui ont été versés à son avocat et qui lui ont par la suite été transmis.

[52] L’élément 18 renvoie à trois télévirements de Casala à Fogler, Rubinoff LLP en fiducie pour M. Miller.

[53] Je conclus que la demande du ministre s’inscrit dans le champ d’application de l’alinéa 231.1(1)a), car elle vise des renseignements qui figurent ou devraient figurer dans les livres ou registres de M. Miller et concerne un montant payable par lui en vertu de la LIR. Bien que je sois d’accord avec le ministre pour dire que la réponse de M. Miller n’est pas catégorique, les renseignements que le ministre cherche à obtenir au sujet de cet élément seront constatés ou pourront être déterminés à partir de la description des factures (élément 15(2)) ou du tableau détaillé de la rémunération reçue (élément 15(3)) que M. Miller doit fournir. Le ministre sera en mesure de déterminer si la réponse de M. Miller au sujet de cet élément 15(4) de la réponse de KPMG est conforme à ses renseignements relatifs aux éléments 15(2) et (3). Par conséquent, je conclus qu’une exigence distincte pour cet élément 15(4) ne sera pas incluse dans l’ordonnance de production demandée par le ministre.

5. Élément 15(5) : Description de la façon dont M. Miller est entré en relation avec Casala (p. ex., comment M. Miller a rencontré la personne‑ressource et comment la relation d’affaires a évolué).

[54] Le ministre a demandé un compte rendu de l’évolution de la relation de M. Miller avec Casala. Je suis d’accord avec M. Miller qu’il a décrit son travail réalisé avec Casala dans la réponse de KPMG et que, de toute façon, il n’est pas tenu de fournir ce compte rendu selon le paragraphe 231.1(1). Une description de l’évolution de la relation d’affaires de M. Miller n’est pas un renseignement qui figure ou devrait figurer dans ses livres et registres, et il n’est pas non plus évident qu’une telle description peut se rapporter à tout montant payable par lui en vertu de la LIR. Je conclus que cet élément ne sera pas inclus dans l’ordonnance de production demandée par le ministre.

6. Élément 16 : Documents relatifs aux comptes bancaires luxembourgeois.

[55] À l’élément 16, le ministre a relevé deux comptes détenus dans une banque luxembourgeoise au nom de M. Miller. Il a demandé des documents concernant les comptes, y compris les documents d’ouverture, la date d’ouverture de chaque compte, les revenus dans les comptes, la source des montants dans les comptes, les relevés bancaires de 2012 à 2016 et les documents de fermeture si les comptes avaient été fermés. La demande a été confirmée dans la seconde lettre du ministère de la Justice, et était accompagnée d’une demande de comptabilité de tous les fonds déposés dans les comptes et de toutes les dépenses effectuées à partir de ce compte.

[56] M. Miller a expliqué dans la réponse de KPMG que les comptes bancaires luxembourgeois ont été ouverts pour recevoir des fonds de Casala, puisque cette dernière préférait effectuer les paiements en euros dans un compte bancaire européen. Les comptes ont été fermés en 2016. Dans la seconde réponse de KPMG, M. Miller a reconnu que la banque fournirait probablement une copie des renseignements demandés. Le problème, en date du 8 juillet 2020, était qu’il croyait devoir se rendre au Luxembourg pour obtenir les documents et qu’il n’a pas été en mesure de le faire en raison de la pandémie de COVID‑19. M. Miller a déclaré qu’il a tenté de communiquer avec quelqu’un à la banque pour obtenir les renseignements, mais qu’il n’a pas réussi à ce jour.

[57] Je conclus que la demande du ministre s’inscrit dans la portée de l’alinéa 231.1(1)a). Il s’agit d’une demande de renseignements qui figurent ou devraient figurer dans les livres ou registres de M. Miller et qui se rapportent au montant payable par lui en vertu de la LIR. La demande est de nature factuelle et vise à déterminer le revenu d’entreprise de M. Miller provenant de Casala. Elle ne vise pas à connaître les points faibles de M. Miller ni à comprendre les hypothèses et les facteurs qu’il a pris en compte au moment de préparation ses déclarations de revenus (Cameco, au para 22).

[58] M. Miller soutient qu’il a répondu au ministre en déclarant qu’il n’a pas les documents requis, et qu’il a donc respecté l’obligation de répondre que lui impose le paragraphe 231.1(1) et les limites établies par l’arrêt Cameco. M. Miller n’a pas fourni cette réponse. Dans la seconde réponse de KPMG, il a déclaré ce qui suit :

[traduction]
Comme vous l’avez mentionné, les banques luxembourgeoises sont susceptibles de fournir des copies des renseignements bancaires requis, mais M. Miller croit qu’il devra aller personnellement [à] la banque pour obtenir ces renseignements et il ne peut pas se rendre à l’étranger en ce moment en raison de la COVID. M. Miller est en train d’essayer de communiquer avec quelqu’un à la banque pour obtenir ces renseignements, mais il n’a pas réussi jusqu’à présent.

[59] Le ministre s’attendait raisonnablement à une réponse une fois que M. Miller aurait communiqué avec un représentant de la banque. M. Miller n’a pas répondu et il soutient, en s’appuyant sur l’arrêt Cameco, qu’il n’est pas tenu de chercher des documents qu’il n’a pas en sa possession. Je ne suis pas d’avis que l’arrêt Cameco établit qu’un contribuable s’acquitte de son obligation de répondre à une demande qui est par ailleurs visée au paragraphe 231.1(1) en précisant qu’il n’a tout simplement pas ces documents en sa possession. Comme il en a été fait mention précédemment, un contribuable est tenu de déployer des efforts raisonnables pour obtenir des renseignements et des documents qui devraient figurer dans ses livres et registres et les fournir au ministre.

[60] M. Miller soutient qu’il ne peut être tenu de se rendre au Luxembourg pour obtenir les documents relatifs à l’élément 16, et je suis d’accord avec lui. Il ne s’ensuit pas que le ministre ne peut pas exiger que M. Miller poursuive ses démarches auprès de la banque luxembourgeoise et tente d’avoir accès aux documents par voie électronique à partir du Canada (eBay Canada Ltd. c MRN, 2008 CAF 348 au para 48).

[61] M. Miller semble soutenir que le ministre cherche à obtenir des documents pour lesquels la période de conservation prévue au paragraphe 230(4) de la LIR est passée. Toutefois, M. Miller n’a pas précisé les registres qui, selon lui, datent d’avant la période de conservation. Il n’a pas déclaré avoir déjà eu en sa possession les documents demandés et les avoir détruits, ni indiqué que la banque luxembourgeoise avait détruit les registres en question.

[62] La demande initiale concernant les documents relatifs aux comptes luxembourgeois a été faite en décembre 2018, et des parties importantes des documents bancaires demandés tombent dans la période prévue au paragraphe 230(4), y compris ceux créés en 2012. À mon avis, M. Miller n’a pas présenté d’argument convaincant fondé sur le paragraphe 230(4) et il n’a pas tenu compte de l’argument du ministre qui repose sur l’arrêt Tower c MRN, 2003 CAF 307, [2004] 1 RCF 183 (au para 32).

[63] M. Miller avait précisé au ministre qu’il déploierait des efforts raisonnables par l’intermédiaire de la banque luxembourgeoise pour obtenir les renseignements demandés. Il ne l’a pas fait. Je conclus que le ministre a satisfait aux conditions nécessaires pour demander une ordonnance exigeant que M. Miller obtienne et fournisse les renseignements et documents énumérés à l’élément 16 de la lettre de mise en demeure, à moins qu’il n’obtienne de la banque luxembourgeoise une déclaration selon laquelle la totalité ou une partie des documents demandés ne sont pas accessibles ou ne le seront que si M. Miller se rend personnellement à la banque luxembourgeoise. Dans ce cas, M. Miller devra fournir une explication et des documents à l’appui concernant la réponse de la banque. En outre, et peu importe que les documents luxembourgeois soient accessibles ou non, je conclus que M. Miller est tenu de rendre compte de tous les montants déposés dans les comptes luxembourgeois et de la source de ces montants, en tant que renseignements qui auraient dû être consignés dans ses propres livres et registres.

7. Élément 17 : Description détaillée de l’objet de chaque montant énuméré à l’élément 17 (une série de paiements de Fogler, Rubinoff LLP et Blaney McMurtry LLP), y compris les documents à l’appui.

[64] Dans la lettre de mise en demeure, le ministre a relevé un certain nombre de dépôts effectués dans les comptes bancaires canadiens de M. Miller par Fogler, Rubinoff LLP et Blaney McMurtry LLP, et a demandé [TRADUCTION] « une description détaillée de l’objet de chacun de ces montants, y compris les documents à l’appui ». M. Miller a expliqué dans la réponse de KPMG que la rémunération de ses services était souvent versée à un cabinet d’avocats et qu’elle lui était ensuite transmise. Il a déclaré qu’un paiement pouvait découler d’une opération réussie de financement ou de placement d’actions sur les marchés publics, ou de la prestation d’autres services consultatifs. M. Miller a déterminé la source la plus probable des paiements énumérés.

[65] Dans la seconde lettre du ministère de la Justice, le ministre a qualifié la réponse de M. Miller comme étant vague et possiblement contradictoire avec les réponses qu’il a données à d’autres éléments. Le ministre a demandé à M. Miller d’obtenir une copie des comptes en fiducie auprès de chacun des cabinets d’avocats. Il lui a également demandé de préciser où les montants énumérés ont été inclus dans son revenu aux fins d’imposition.

[66] Dans la seconde réponse de KPMG, M. Miller a expliqué que les montants en question découlaient de la prestation de services de consultation et qu’il croyait que tous les dépôts avaient été inclus dans ses déclarations de revenus personnelles ou dans celles d’Adrea. La réponse indiquait ensuite :

[traduction]
M. Miller n’est toujours pas en mesure de fournir la source exacte de chaque dépôt à partir des grands livres de fiducie que vous avez mentionné dans la correspondance antérieure et il est en train d’essayer d’obtenir les détails des grands livres de fiducie auprès de Fogler Rubinoff et de Blaney McMurtry.

[67] Selon le ministre, les réponses de M. Miller concernant cet élément sont évasives et il n’a reçu aucun document à l’appui. De l’avis du ministre, les renseignements demandés sont de nature courante et auraient dû être inclus dans les livres et registres de M. Miller. Le ministre souligne qu’il n’a reçu aucun suivi depuis la seconde réponse de KPMG.

[68] M. Miller soutient qu’il s’est conformé à la demande du ministre relative à l’élément 17 et qu’il ne devrait pas être tenu d’apporter plus de certitude. Il est d’avis que le ministre n’a pas le droit de le forcer à obtenir et/ou à fournir les documents demandés une fois qu’il a dit ne pas les avoir. Si le ministre veut l’obliger à fournir de meilleures réponses, il peut recourir au processus prévu à l’article 231.4 de la LIR.

[69] Je conclus que la demande du ministre s’inscrit dans le champ d’application de l’alinéa 231.1(1)a), puisqu’elle vise des renseignements qui figurent ou devraient figurer dans ses livres ou registres de M. Miller. Les montants en question ont trait au revenu d’entreprise et à l’obligation fiscale de M. Miller. La question que je dois trancher est de savoir si M. Miller a répondu à l’élément 17.

[70] M. Miller s’est engagé auprès du ministre à tenter d’obtenir des cabinets d’avocats des documents justificatifs des montants énumérés à l’élément 17. Il a cessé ses démarches, invoquant l’arrêt Cameco. Je conclus que le ministre ne commet pas d’erreur en affirmant que M. Miller n’a pas donné suite à sa demande de documents justificatifs.

[71] En ce qui concerne la description détaillée demandée concernant l’objet de chacun des montants, M. Miller a déclaré dans la réponse de KPMG que les montants correspondaient à la rémunération pour des services rendus relativement à une opération réussie de financement ou de placement d’actions ou d’autres services consultatifs. Je ne constate aucune lacune importante dans cette réponse.

[72] La demande figurant dans la seconde lettre du ministère de la Justice visant à obtenir des précisions sur l’endroit où les montants énumérés ont été inclus dans le revenu de M. Miller aux fins d’imposition est problématique. Premièrement, la demande n’a pas été faite par le ministre dans la lettre de mise en demeure ou de suivi. Deuxièmement, une liste des endroits où des montants précis ont été inclus dans le revenu par un contribuable n’est pas un renseignement qui devrait nécessairement être consigné dans ses livres et registres. Je conclus que M. Miller n’est pas tenu de se conformer à cette demande supplémentaire.

[73] M. Miller n’était pas en mesure de dire avec certitude l’entité qui effectuait les paiements au cabinet d’avocats et a seulement déclaré que les paiements provenaient [traduction] « fort probablement » d’un client identifié. M. Miller soutient qu’il ne peut pas être contraint par voie d’ordonnance de fournir une réponse qu’il ne peut pas donner avec certitude. Le ministre est de cet avis, mais soutient que M. Miller est tenu de respecter un niveau de base en ce qui a trait à la diligence dans ses démarches visant à répondre à sa demande.

[74] Le ministre est en droit de s’attendre à ce qu’un contribuable fasse preuve de diligence ou déploie des efforts raisonnables pour tenter de se conformer à une demande présentée en vertu du paragraphe 231.1(1) de la LIR. À mon avis, le degré de diligence requis s’entend des tentatives raisonnables effectuées pour obtenir des renseignements manquants de la part de tierces parties, en gardant à l’esprit que les documents à l’appui demandés contiennent des renseignements qui devraient normalement se trouver dans les livres et registres d’un contribuable.

[75] Dans la présente affaire, M. Miller a déclaré en juillet 2020 qu’il ferait des efforts pour obtenir des précisions sur les grands livres de fiducie auprès de Fogler, Rubinoff et de Blaney McMurtry. Les documents demandés par le ministre permettraient d’établir l’identité du ou des clients qui ont effectué les paiements, renseignements que M. Miller est incapable de fournir sans documents à l’appui. Si les tentatives de M. Miller pour obtenir les renseignements s’avèrent infructueuses, il sera alors en mesure de répondre au ministre, de fournir les renseignements dont il dispose effectivement et de démontrer pourquoi il est incapable de se conformer pleinement à la demande.

[76] Par conséquent, j’inclurai dans l’ordonnance de production une exigence selon laquelle M. Miller doit demander et obtenir des copies des grands livres de fiducie de Fogler, Rubinoff et de Blaney McMurtry contenant les renseignements visés à l’élément 17 et, en cas d’échec, informer le ministre des résultats de ses demandes concernant les grands livres.

8. Élément 18 : Une description détaillée des trois montants énumérés à l’élément 18, la raison pour laquelle les montants ont été déposés en fiducie pour M. Miller et la disposition des trois montants.

[77] Le ministre a demandé une description de trois montants déposés en fiducie pour M. Miller auprès de Fogler, Rubinoff LLP et, dans la seconde lettre du ministère de la Justice, il a ajouté une demande de copie des comptes en fiducie de Fogler, Rubinoff LLP (en s’appuyant sur la demande concernant l’élément 17). Il soutient que M. Miller n’a pas fourni de réponse raisonnable, parce que son explication au sujet de ces montants est fondée uniquement sur sa croyance et qu’il n’a pas fourni de copies des comptes en fiducie.

[78] Dans la réponse de KPMG, M. Miller a expliqué que chacun des montants représentait des revenus décrits à l’élément 15 (par exemple les montants payés par Casala). Dans la seconde réponse de KPMG, il a déclaré qu’il espérait [TRADUCTION] « obtenir des renseignements pour répondre à votre demande dans un avenir assez rapproché ». En l’espèce, M. Miller soutient qu’il s’est conformé à la demande du ministre en fournissant une description de chacun des trois montants, y compris leur source, leur nature et la raison pour laquelle ils ont été reçus. M. Miller soutient également que la demande n’a pas été présentée correctement, parce qu’il s’agit en réalité d’une demande au sujet de son obligation fiscale et qu’une demande de documents n’a jamais été faite.

[79] Je ne suis pas convaincue par la deuxième observation formulée par M. Miller et je conclus que la demande du ministre tombe sous le coup de l’alinéa 231.1(1)a), car elle vise des renseignements qui figurent ou devraient figurer dans les livres ou registres de M. Miller. Je ne suis pas d’accord pour dire qu’il s’agit d’une demande de renseignements visant à permettre au ministre de mieux comprendre la dette fiscale éventuelle de M. Miller (Cameco, au para 14). La description demandée à M. Miller est qualitativement différente des questions à l’égard desquelles la CAF a exprimé des réserves.

[80] Toutefois, je tiens à souligner que M. Miller a répondu à la demande du ministre de décrire les trois montants reçus en fiducie par Fogler, Rubinoff. La réponse de KPMG contient un tableau qui indique la date, la source, le bénéficiaire, le montant, l’objet et l’explication de chacun des trois montants. La question qui demeure irrésolue est de savoir si M. Miller devrait être tenu, aux termes d’une ordonnance de production, de poursuivre ses démarches auprès du cabinet d’avocats pour obtenir des copies de ses comptes en fiducie. Je conclus que le ministre n’a pas établi que sa demande de documents à l’appui révélerait des renseignements que M. Miller n’a pas déjà fournis. Contrairement à l’élément 17, la réponse de M. Miller à l’élément 18 comprend l’identité de la source des trois paiements, soit Casala. Bien qu’il puisse être généralement utile pour le ministre d’obtenir une copie des comptes en fiducie de Fogler, Rubinoff pour confirmer que les montants ont été versés à M. Miller, il n’a relevé aucune lacune importante dans la réponse de M. Miller à l’élément 18. M. Miller s’est acquitté de son obligation de répondre avec diligence à la demande du ministre, et je ne vois aucune raison de le contraindre au moyen d’une ordonnance de production, à respecter son engagement d’obtenir les grands livres de fiducie de Fogler, Rubinoff.

9. Élément de la lettre de suivi de l’Agence du revenu du Canada : Détails du revenu professionnel brut de M. Miller (ligne 164) pour l’année d’imposition 2016.

[81] Le ministre a présenté cette demande dans la lettre de suivi du 1er mai 2019, après avoir reçu la déclaration de revenus de M. Miller pour l’année d’imposition 2016. M. Miller a informé le ministère de la Justice dans la seconde réponse de KPMG qu’il avait communiqué avec le cabinet comptable qui a préparé sa déclaration de revenus des particuliers pour 2016 afin d’obtenir une ventilation de son revenu professionnel brut pour l’année, mais que l’obtention de la réponse avait été ralentie en raison de la COVID‑19.

[82] La demande du ministre s’inscrit à mon avis dans la portée de l’alinéa 231.1(1)a). Il s’agit d’une demande concernant des renseignements qui figurent ou devraient figurer dans les livres ou registres de M. Miller. Je suis d’accord avec le ministre pour dire que la ventilation demandée concerne des renseignements qui devraient être contenus dans les registres de M. Miller, car ils étaient nécessaires à la préparation de sa déclaration de revenus. M. Miller n’a pas contesté l’existence des renseignements, il a plutôt affirmé qu’il n’a pas reçu de réponse de son comptable. Je ne suis pas convaincue par l’argument de M. Miller selon lequel le ministre est tenu d’exercer un recours en vertu de l’article 231.2 pour obtenir ces renseignements.

[83] Je conclus que le ministre a le droit d’exiger que M. Miller poursuive ses démarches auprès de son comptable. Les renseignements demandés relèvent du contrôle de M. Miller. Ils ne sont pas la propriété d’un cabinet d’avocats ou de son comptable, car il aurait fourni les renseignements à son comptable pour permettre la préparation de la déclaration de revenus pour 2016.

VII. Conclusion

[84] La demande du ministre est accueillie en partie, et une ordonnance de production sera rendue relativement à certains éléments contestés de la correspondance de mise en demeure, modifiée conformément aux présents motifs.

[85] Le ministre a demandé 1 750 $ à titre de dépens, tout compris, à l’égard de la présente demande. Après examen de la demande du ministre et ayant considéré les facteurs énoncés au paragraphe 400(3) des Règles à la lumière du succès mitigé de l’instance, j’adjugerai des dépens au ministre pour cette somme.

 


ORDONNANCE dans le dossier T‑784‑20

LA COUR ORDONNE :

  1. Le défendeur, M. David Randall Miller (M. Miller), doit fournir à M. James Green, vérificateur à l’Agence du revenu du Canada (ARC) et personne autorisée aux fins de l’application de l’article 231.1 de la Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (5e supp) (ou à toute autre personne autorisée qui pourrait être affectée à cette affaire), les renseignements et documents manquants suivants figurant dans la lettre de mise en demeure de l’ARC datée du 13 décembre 2018 (lettre de mise en demeure) et la lettre de suivi concernant la mise en demeure de l’ARC datée du 1er mai 2019 (lettre de suivi) dans les 45 jours suivant la date de la présente ordonnance :

    • a) Éléments 15(1), 15(2) et 15(3) de la lettre de mise en demeure :

      • i) une réponse à la demande visant à obtenir des factures présentées à Casala Limited (Casala) et décrivant les services fournis pour la période visée par la vérification;

      • ii) des renseignements concernant les modalités du ou des contrats oraux conclus entre M. Miller et Casala et les factures présentées à Casala pour la période visée par la vérification;

      • iii) un tableau détaillé de la rémunération reçue de Casala pour la période visée par la vérification.

    • b) Élément 16 de la lettre de mise en demeure et clarification de la seconde lettre du ministère de la Justice :

      • i) les renseignements et documents énumérés à l’élément 16, sous réserve de l’obtention auprès de la banque luxembourgeoise d’une déclaration selon laquelle la totalité ou une partie des documents demandés n’est pas accessible ou ne le sera que si M. Miller se rend personnellement à la banque au Luxembourg. Dans un tel cas, il est ordonné à M. Miller de fournir une explication et des documents à l’appui concernant la réponse de la banque;

      • ii) une comptabilité de tous les fonds déposés dans les comptes luxembourgeois et la ou les sources des fonds déposés.

    • c) Élément 17 de la lettre de mise en demeure : une copie des grands livres de fiducie de Fogler, Rubinoff LLP et de Blaney McMurtry LLP attestant les renseignements visés à l’élément 17, à la condition que, si les deux entreprises, ou l’une d’entre elles, refusent la demande de M. Miller, celui‑ci soit tenu d’en informer le ministre et de fournir une lettre écrite à cet égard provenant du ou des cabinets d’avocats.

    • d) Lettre de suivi : détails du revenu professionnel brut, tel qu’il est inscrit à la ligne 164 de la déclaration de revenus pour 2016 de M. Miller.

  2. Le demandeur, le ministre du Revenu national (le ministre), est autorisé à signifier la présente ordonnance à M. Miller conformément à l’article 139 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106.

  3. Les dépens, au montant de 1 250 $, sont adjugés au ministre.

« Elizabeth Walker »

Juge

Traduction certifiée conforme

Espérance Mabushi, M.A., Trad. Jur.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑784‑20

 

INTITULÉ :

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL c DAVID RANDALL MILLER

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 9 FÉVRIER 2021

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LA JUGE WALKER

 

DATE DE L’ORDONNANCE ET DES MOTIFS :

LE 19 août 2021

 

COMPARUTIONS :

Montano Cabezas

POUR LE DEMANDEUR

 

Thang Trieu

Daniel Hickey

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

KPMG Law LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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