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Date : 20011018

Dossier : T-942-00

Référence neutre : 2001 CFPI 1132

ENTRE :

                                               L'HONORABLE ROBERT H. NELSON

                                 PRÉSIDENT FONDATEUR DE PUBLIC DEFENDERS

                               EN SON NOM ET EN TANT QUE REPRÉSENTANT DE

                                TOUS CEUX INJUSTEMENT PRIVÉS D'AVANTAGES

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                                   et

                                                            SA MAJESTÉ LA REINE

                         REPRÉSENTÉE PAR L'HONORABLE MARTIN CAUCHON

            MINISTRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

                                                                                                                                               défenderesse

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

Le juge Rouleau

[1]         Il s'agit d'une requête en radiation de la déclaration modifiée du demandeur. La demande est présentée en vertu de la règle 221 des Règles de la Cour fédérale (1998).


[2]                 L'affaire devait être instruite à Vancouver pendant trois jours, à partir du 16 octobre 2001. Après mon arrivée à Vancouver et après avoir examiné soigneusement la déclaration modifiée et le dossier, et après que l'on m'ait informé que l'affaire n'était pas suffisamment en état pour procéder comme prévu, j'ai rendu, le 3 octobre 2001, la directive suivante qui a été signifiée aux parties; cette directive mentionnait les éléments suivants:

(1)                 Le dossier d'instruction du demandeur est incomplet.

(2)                 Le demandeur n'a pas encore versé à la défenderesse les dépens impayés qui s'élèvent à 7 000 $.

(3)                 Les allégations de fraude et de faux documents aux termes du Code criminel canadien ainsi que de certains articles de la Loi de l'impôt sur le revenu ne relèvent peut-être pas de notre tribunal.

(4)                 Il y a huit appels en instance, dont quatre doivent faire l'objet d'une audition mais qui n'ont pas encore été entendus par la Cour d'appel fédérale. J'ai ensuite suggéré que la défenderesse dépose une requête en vertu de la règle 221 ainsi que toute autre demande lui paraissant appropriée qui seront entendues le 16 octobre.


[3]                 Le 11 octobre 2001, la défenderesse, Sa Majesté la Reine, a déposé et signifié un dossier de requête, la requête ayant pour but d'obtenir une ordonnance radiant la déclaration modifiée du 24 novembre 2000 pour le motif qu'elle ne révèle aucune cause d'action valable, qu'elle est scandaleuse, frivole et vexatoire et qu'elle constitue autrement un abus de procédure; subsidiairement, une ordonnance radiant certains paragraphes de la déclaration modifiée parce qu'ils ne révèlent aucune cause d'action valable, ne sont pas pertinents ou sont redondants, sont scandaleux, frivoles ou vexatoires, risquent de nuire à l'instruction équitable de l'action ou de la retarder ou constituent autrement un abus de procédure. Cette réparation est demandée aux termes des alinéas 221(1)a), c) et f) des Règles de la Cour fédérale.

[4]                 Cette action a été introduite au moyen d'une déclaration datée du 29 mai 2000. Dans cette déclaration, le demandeur, un plaideur non juriste qui se représente lui-même, se décrit comme étant : « l'honorable Robert H. Nelson, président fondateur de public defenders en son nom et en tant que représentant de toutes les personnes injustement privées d'avantages » . Dès le départ, il s'attribue un titre qu'il est incapable de justifier.

[5]                 Après avoir soigneusement examiné la déclaration modifiée, ce qui n'est guère facile étant donné la façon plutôt vague dont elle est rédigée, il semble que l'affaire découle des nouvelles cotisations à l'impôt établies par l'Agence des douanes et du revenu du Canada à l'égard des années d'imposition 1985, 1986 et 1987. Les nouvelles cotisations ont été établies en juin 1989 et indiquent que le demandeur, et peut-être également son épouse, doivent plus de 90 000 $ à Revenu Canada. Ce n'est qu'en juillet 1996 que la défenderesse a véritablement pris des mesures pour recouvrer cette somme. Les nouvelles cotisations n'ont pas été contestées devant la Cour canadienne de l'impôt.


[6]                 Après une description des parties, on trouve aux paragraphes 7 à 14 des allégations de vol, de faux qui auraient été commis par des fonctionnaires de Revenu Canada. Les derniers paragraphes font brièvement référence à des décisions de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, à tous les employeurs antérieurs du demandeur et contiennent des allégations d'après lesquelles son droit à un procès et à un traitement équitables a été violé. Il soutient enfin que, d'une façon générale, il a été traité de façon inéquitable par les fonctionnaires représentant l'Agence des douanes et du revenu du Canada. Les réparations demandées figurent aux paragraphes a) à w) (pages 9 et 10) du document introductif d'instance. Le demandeur demande un jugement déclaratoire et des dommages et intérêts.

[7]                 L'affidavit présenté à l'appui de la requête en radiation contient un bref rappel des actes de procédure déposés par le demandeur et j'ai pris la liberté de reproduire ici les passages qui se rapportent aux allégations concernant le caractère scandaleux et frivole des actes de procédure:

[TRADUCTION]

2.          Par voie de déclaration datée du 1er février 2000, le demandeur a introduit l'action numéro T-174-00 devant la Cour fédérale en vue d'obtenir des dommages et intérêts et un jugement déclaratoire portant sur diverses mesures prises par l'Agence des douanes et du revenu du Canada.

3.          Par requête du 2 mars 2000 et antérieure au dépôt de la défense, le demandeur a sollicité dans l'action T-174-00 la tenue d'une conférence préparatoire au procès et l'inscription de l'affaire pour un procès de deux semaines à Kelowna en C.-B., à partir du 7 août 2000. La requête du demandeur a été rejetée par une ordonnance du 3 mai 2000.

4.          Par requête du 15 mai 2000, le demandeur a demandé, dans l'action T-174-00, diverses mesures de réparation, notamment la gestion de l'instance à titre d'instance à gestion spéciale et la tenue d'une conférence de règlement des litiges. La requête du demandeur a été rejetée par une ordonnance du 26 juillet 2000, qui le condamnait à verser immédiatement des dépens de 300 $ à la défenderesse.

5.          Le demandeur a déposé le 29 mai 2000 sa déclaration dans l'action T-942-00 (la présente action). Certaines des allégations et des réparations demandées dans cette action recoupent celles de l'action T-174-00.


6.          Le même jour où le défendeur a déposé sa déclaration dans l'action T-942-00, il a présenté une requête en vue d'obtenir diverses mesures, notamment la gestion de l'instance à titre d'instance à gestion spéciale et la tenue d'une conférence de règlement des litiges. La requête du demandeur a été rejetée par une ordonnance du 26 juillet 2000, qui le condamnait à payer immédiatement des dépens de 300 $ à la défenderesse.

7.          Conformément à une ordonnance rendue au cours de la conférence préparatoire concernant l'action T-942-00 le 28 septembre 2000, le demandeur a obtenu l'autorisation de déposer une requête modifiée en vue d'obtenir une ordonnance pour modifier la déclaration dans l'action T-942-00 de façon à ce qu'elle porte sur les questions en litige dans l'action T-174-00, pourvu qu'il se désiste de l'instance numéro T-174-00.

8.          Par une ordonnance du 16 novembre 2000, en réponse à une requête datée du 10 octobre 2000, le demandeur a obtenu l'autorisation de modifier sa déclaration dans l'action T-942-00, sous réserve d'un désistement dans l'action T-174-00. Les requêtes présentées par le demandeur pour terminer les interrogatoires préalables dans un délai de quatre semaines et pour obtenir des injonctions interlocutoires ont été rejetées. La Cour a ordonné que le demandeur dépose au greffe un avis de désistement dans le dossier T-174-00.

9.          Par requête du 17 octobre 2000, le demandeur a sollicité une nouvelle fois la tenue d'une conférence de règlement des litiges dans l'action T-942-00. La requête du demandeur a été rejetée par une ordonnance datée du 16 novembre 2000.

10.         Le demandeur a déposé une déclaration modifiée datée du 24 novembre 2000 dans l'action T-942-00 dans laquelle il sollicitait toutes les réparations décrites dans l'action T-174-00 et dans la déclaration originale dans l'action T-942-00 et qui contenait plusieurs autres demandes de réparation.

11.         La Cour a émis une directive datée du 15 décembre 2000 ordonnant au service du greffe de n'accepter des documents émanant du demandeur que s'ils étaient conformes aux Règles de la Cour fédérale.

12.         Par requête du 24 novembre 2000, le demandeur a demandé diverses mesures, notamment une ordonnance déclarant que la défenderesse était coupable d'outrage au tribunal à l'égard de l'ordonnance prononcée par notre cour le 28 septembre 2000 et une ordonnance obligeant l'honorable Martin Cauchon, ministre du Revenu national, à assister à une conférence préparatoire de conciliation. La requête du demandeur concernant ces demandes a été rejetée par une ordonnance datée du 3 janvier 2001 qui le condamnait à payer à la défenderesse les dépens taxables.

13.         Par requête du 14 décembre 2000, le demandeur a sollicité une ordonnance déclarant que la défenderesse a commis un faux et violé les Règles de la Cour fédérale (1998). La requête du demandeur a été rejetée par une ordonnance du 26 avril 2001.


14.         Par requête du 4 janvier 2001, le demandeur a interjeté appel de l'ordonnance du 3 janvier 2001 et sollicité diverses autres mesures, notamment une ordonnance déclarant que la défenderesse est coupable d'outrage à l'égard de l'ordonnance du 28 septembre 2000 et une ordonnance obligeant l'honorable Martin Cauchon, le ministre du Revenu national, à assister à une conférence préparatoire de conciliation. À part la fixation de la date de la conférence préparatoire au 15 mai 2001, la requête du demandeur a été rejetée par une ordonnance datée du 26 avril 2001.

15.         Par requête du 15 mars 2001, le demandeur a sollicité une ordonnance fixant au 16 avril 2001 la tenue de la conférence préparatoire et obligeant l'honorable Martin Cauchon à assister à une conférence de règlement des litiges le 16 avril 2001. La requête du demandeur a été rejetée par une ordonnance datée du 26 avril 2001.

16.         La conférence préparatoire dans la présente action a été reportée du 15 au 17 mai 2001. Par ordonnance datée du 17 mai 2001, découlant de la conférence préparatoire, la présente action a été inscrite au rôle pour trois jours à partir du 16 octobre 2001 et des dates ont été fixées pour le dépôt des affidavits de documents, les interrogatoires préalables, et les engagements pris en vertu de ces interrogatoires.

17.         Par requête datée du 17 mai 2001, le demandeur a interjeté appel de l'ordonnance du 17 mai 2001 rejetant la demande présentée par le demandeur concernant la tenue d'une conférence de règlement des litiges le 15 juin 2001, découlant de la conférence préparatoire, et il a sollicité également la tenue d'une conférence de règlement des litiges le 15 juin, l'audition de la cause le 17 juillet à Ottawa et une ordonnance accordant un subpoena obligeant Martin Cauchon à assister à l'instruction à titre de témoin. Par ordonnance datée du 14 juin 2001, la requête du demandeur a été rejetée dans sa totalité et celui-ci a été condamné à payer immédiatement des dépens d'un montant de 300 $.

18.         Par requête datée du 24 mai 2001, le demandeur a sollicité une ordonnance accordant un subpoena obligeant Martin Cauchon à assister en qualité de témoin à l'instruction de la présente action et ordonnant que soit versée à M. Cauchon une somme de 20 $ par jour pour l'indemnité de témoin et les frais de déplacement, et une ordonnance déclarant que l'action sera instruite à Ottawa et non à Vancouver. Par ordonnance datée du 14 juin 2001, la requête du demandeur a été rejetée dans sa totalité et celui-ci a été condamné à payer immédiatement des dépens d'un montant de 300 $.

19.         Par requête datée du 21 juin 2001, le demandeur a sollicité une ordonnance pour que soient émis des subpoenas visant Robert Carvalho, Martin Cauchon, J. McKenzie, J. McNally, Michael Zuber, Selinder Pandher, Jane Stewart, directrice des appels, Herb Dhaliwal, Morris A. Rosenberg, Paul Martin, Anne McLellan et Jean Chrétien. Le protonotaire Hargrave a rejeté la requête du demandeur dans une ordonnance datée du 30 juillet 2001 et l'a condamné à payer immédiatement des dépens d'un montant de 900 $, après avoir fait l'historique des requêtes présentées antérieurement par le demandeur en vue d'obliger le ministre du Revenu national à assister à l'instruction ou à un interrogatoire préalable et il a déclaré :

[9] Compte tenu de l'historique du présent dossier et, plus particulièrement, de son historique récent, je suis d'accord avec la prétention de la défenderesse selon laquelle la présente requête vise à harceler l'honorable Martin Cauchon. Elle constitue donc un abus.


[10] Le demandeur s'est comporté de façon abusive en l'espèce. Il a harcelé la Couronne en tentant d'assigner à comparaître des témoins qui non seulement n'avaient aucun lien avec la cause d'action, mais dont on ne paraît pas demander la présence pour prouver l'existence de documents, pour en produire ou pour répondre à des réponses pertinentes, ce qui constitue une conduite scandaleuse, voire même outrageante, particulièrement lorsque la délivrance d'au moins un subpoena a été refusée par le passé.

(Voir annexe A)

20.         Le protonotaire Hargrave a le 6 juillet 2001 émis une directive qui rejetait la demande présentée par le demandeur en vue d'obtenir la délivrance d'un subpoena en blanc. Le protonotaire Hargrave a rejeté la demande du demandeur en déclarant dans sa directive « Les différences signalées par M. Nelson pour ce qui est des résidences de quelques-uns des 32 témoins mentionnés dans ce document constituent un abus de procédure » . Le protonotaire Hargrave a obligé le demandeur à donner avis à la défenderesse de toute requête présentée en vue d'obtenir un subpoena et il a déclaré à ce sujet que « ... M. Nelson a dissimulé certaines choses dans sa demande de subpoena... »

21.         Le protonotaire Hargrave a entendu l'appel de la directive datée du 6 juillet 2001 mais a refusé, après nouvel examen de l'affaire, de la modifier et a rejeté la demande de réexamen de cette mesure par une ordonnance datée du 30 juillet 2001, dans laquelle il condamnait le demandeur à payer immédiatement des dépens de 700 $.

22.         Par requête datée du 6 juillet 2001 et présentée ex parte, le demandeur a sollicité une ordonnance ex parte concernant la délivrance d'un subpoena à l'égard de l'honorable Martin Cauchon pour qu'il assiste à l'instruction de la présente affaire. Le protonotaire Hargrave a rejeté la requête du demandeur dans une ordonnance du 26 juillet 2001 et a noté que « cette requête est visée par le principe de la chose jugée » , étant donné que l'ordonnance du 24 juin 2001 rejetait une demande identique. Le protonotaire Hargrave a en outre noté que sa directive datée du 6 juillet 2001 obligeait le demandeur à aviser la défenderesse de toute demande de subpoena présentée en vue d'assigner un témoin résidant à plus de 800 kilomètres de Vancouver.

23.         Par requête datée du 17 juillet 2001, le demandeur a sollicité les diverses réparations suivantes :

a)          une ordonnance déclarant que la défenderesse a commis un outrage au tribunal étant donné que M. Cauchon n'a pas comparu à un interrogatoire préalable;

b)          une ordonnance obligeant M. Cauchon à participer à un interrogatoire préalable;

c)          une ordonnance autorisant les caméras des services publics de télévision à filmer l'interrogatoire préalable et l'instruction;


d)          une ordonnance condamnant la défenderesse à verser immédiatement des dépens d'un montant de 1 000 $ au demandeur;

e)          une ordonnance interdisant à un juge nommé par l'honorable Martin Cauchon d'instruire la présente espèce, notamment les honorables juges Douglas R. Campbell, Pierre Blais, Francois Lemieux, J.D. Denis Pellier, John O'Keefe, Elizabeth Heneghan, Delores Hansen, Elenor R. Dawson et Edmond F. Blanchard.

24.         Le protonotaire Hargrave a rejeté la requête dans une ordonnance du 7 août 2001 et condamné le demandeur à payer immédiatement à la défenderesse des dépens d'un montant de 900 $, et il a déclaré dans cette ordonnance « ... il semble que le demandeur en s'efforçant d'obtenir une directive obligeant l'honorable Martin Cauchon à subir un interrogatoire préalable tente de contourner les ordonnances antérieures de la Cour qui refusaient de délivrer un subpoena visant l'honorable Martin Cauchon. Cet aspect contribue en partie à donner à la présente requête une nature vexatoire, frivole et abusive... » . Le protonotaire Hargrave poursuit en déclarant: « la présente requête, examinée dans son ensemble, est vexatoire, frivole et abusive » . Le protonotaire Hargrave a également ordonné que l'on empêche le demandeur de déposer tout autre document au greffe de la Cour, si ce n'est un appel visant la présente ordonnance ou un document concernant d'autres appels non réglés, tant que les dépens de la présente requête n'auront pas été acquittés.

25.         Par requête datée du 19 juillet 2001, le demandeur a sollicité une ordonnance condamnant la défenderesse à verser au demandeur des dommages-intérêts exemplaires parce qu'elle a refusé de communiquer les 74 documents prétendument visés par diverses demandes présentées aux termes de la Loi sur la protection des renseignements personnels et de la Loi sur l'accès à l'information. Le protonotaire Hargrave a rejeté la requête du demandeur dans une ordonnance datée du 7 août 2001 en le condamnant à payer immédiatement des dépens de 700 $ et il a déclaré : « Le demandeur a présenté un nombre important de requêtes dans ce dossier qui ont toutes été rejetées. Une partie de ces requêtes étaient frivoles, vexatoires ou abusives. Certaines parties de la présente requête sont également frivoles, vexatoires et abusives » . Le protonotaire Hargrave a également interdit que le demandeur dépose d'autres documents au greffe du tribunal, si ce n'est des documents concernant l'appel de la présente ordonnance ou des documents concernant d'autres appels non réglés, tant que les dépens relatifs à la présente requête n'auraient pas été acquittés.

26.         Par requête datée du 25 juillet 2001, le demandeur a sollicité une ordonnance condamnant la défenderesse à verser au demandeur des dommages exemplaires de 50 000 $, en se fondant sur divers motifs et dans laquelle il demandait également d'autres mesures de réparation. Le protonotaire Hargrave a rejeté la requête dans sa totalité par une ordonnance datée du 16 août 2001, en condamnant le demandeur à verser immédiatement des dépens de 800 $, et il a noté que la plupart des réparations demandées n'auraient aucun effet concret et que la requête était « abusive et vexatoire » .


27.         Par requête datée du 30 juillet 2001, le demandeur a interjeté appel de l'ordonnance du protonotaire Hargrave datée du 26 juillet 2001 et demandé diverses autres réparations, notamment une ordonnance prévoyant la délivrance d'un subpoena pour que Martin Cauchon comparaisse à l'instruction de la présente action, pour que la défenderesse ou le ministre assiste à un interrogatoire préalable et pour qu'elle soit condamnée, pour divers motifs, à des dommages exemplaires de 50 000 $. La requête du demandeur a été rejetée, dans sa totalité, par ordonnance datée du 27 août 2001, et le demandeur a été condamné à payer immédiatement des dépens d'un montant de 700 $.

28.         Par requête datée du 1er août 2001, le demandeur a interjeté appel de l'ordonnance du protonotaire Hargrave datée du 30 juillet 2001, qui refusait au demandeur le droit d'obtenir un subpoena concernant Martin Cauchon et il a demandé la tenue d'une conférence de règlement des litiges, d'une médiation et d'un mini-procès dans la présente action. La requête du demandeur a été rejetée dans sa totalité par une ordonnance datée du 27 août 2001.

29.         Par requête datée du 1er août 2001, le demandeur a interjeté appel de l'ordonnance du protonotaire Hargrave datée du 30 juillet 2001, qui refusait au demandeur le droit d'assigner à comparaître 32 témoins et demandé la tenue d'une conférence de règlement des litiges, une médiation et un mini-procès dans la présente action. La requête du demandeur a été rejetée dans sa totalité par une ordonnance du 27 août 2001 et celui-ci a été condamné à payer immédiatement des dépens d'un montant de 700 $.

30.         Par requête datée du 13 août 2001, le demandeur a interjeté appel de l'ordonnance du protonotaire Hargrave datée du 7 août 2001 qui refusait au demandeur le droit d'assigner et d'interroger au préalable Martin Cauchon et demandé la tenue d'une conférence de règlement des litiges, d'une médiation et d'un mini-procès dans la présente affaire. La requête du demandeur a été rejetée dans sa totalité par une ordonnance datée du 27 août 2001, qui le condamnait à payer immédiatement des dépens de 700 $.

31.         Par requête datée du 13 août 2001, le demandeur conteste l'ordonnance du protonotaire Hargrave datée du 7 août 2001, qui rejetait la demande présentée par le demandeur pour obtenir la communication par la défenderesse de 74 documents et la tenue d'une conférence de règlement des litiges, d'une médiation et d'un mini-procès dans la présente affaire. La requête du demandeur a été rejetée dans sa totalité par l'ordonnance datée du 27 août 2001, et celui-ci a été condamné à verser immédiatement des dépens de 700 $.

32.         Par requête datée du 27 août 2001, le demandeur conteste l'ordonnance du protonotaire Hargrave datée du 16 août 2001. La requête du demandeur a été rejetée dans sa totalité par une ordonnance datée du 25 septembre 2001, qui lui ordonne de verser immédiatement des dépens de 300 $.

33.         Jusqu'ici, le demandeur ne s'est pas acquitté des dépens auxquels il a été condamné.


34.         Le demandeur a porté en appel devant la Cour d'appel fédérale les huit ordonnances interlocutoires suivantes : 26 avril 2001 (requête du défendeur datée du 14 décembre 2000), 26 avril 2001 (requête du demandeur datée du 15 mars 2001), 14 juin 2001 (requête du demandeur datée du 17 mai 2001), 14 juin 2001 (requête du demandeur datée du 24 mai 2001), 27 août 2001 (requête du demandeur datée du 30 juillet 2001), 27 août 2001 (requête du demandeur datée du 13 août 2001), 27 août 2001 (requête du demandeur datée du 13 août 2001) et 25 septembre 2001 (requête du demandeur datée du 27 août 2001). Aucun de ces appels n'a été inscrit pour audience et aucune requête visant à accélérer l'audition des appels n'a été présentée.

[8]                 Les paragraphes qui précèdent décrivent la série de requêtes que le demandeur a présentées à la Cour; elles ont été déposées par télécopie; le représentant de Sa Majesté a dû répondre à près de 20 actes de procédure. Le protonotaire Hargrave a dû se consacrer entièrement à ces requêtes et il a également dû rédiger les décisions les concernant; il est évident que le protonotaire Hargrave s'est acquitté d'une tâche ingrate, compte tenu du nombre des demandes présentées par le demandeur et de leur caractère répétitif. En fait, le protonotaire Hargrave a résumé son point de vue, de façon très concise, dans les motifs de l'ordonnance du 30 juillet 2001 au sujet de la requête décrite au par. 19; j'ai joint ces motifs à la présente ordonnance qui en constituent l'annexe « A » .

[9]                 Comme cela est indiqué ci-dessus, le demandeur a présenté 20 requêtes dans lesquelles il demandait diverses réparations et qui ont toutes été rejetées, sur tous les points, par le protonotaire Hargrave. Le demandeur a également déposé par télécopie des avis d'appel concernant dix décisions rendues par le protonotaire. Tous ces appels ont été rejetés par les juges siégeant à Vancouver; huit font actuellement l'objet d'un appel devant la Cour d'appel fédérale.


[10]            Il ressort d'un examen des requêtes nos 9, 15, 17, 19, 20, 22, 24 et 26 que la réparation demandée était pratiquement identique dans toutes ces requêtes. Le demandeur demandait la tenue de conférences de règlement des litiges et de conférences préparatoires, requêtes qui ont toutes été rejetées. En outre, le demandeur sollicitait dans la plupart de ces requêtes l'assignation, par subpoena, de l'honorable Martin Cauchon, le ministre. Dans un bon nombre des requêtes rejetées par le protonotaire Hargrave, les motifs fournis faisaient référence à un abus de procédure.

[11]            Il convient également de noter que les 11 requêtes présentées au protonotaire Hargrave et les appels interjetés devant les juges des requêtes à Vancouver ont débouché sur la condamnation du demandeur à payer immédiatement des dépens s'élevant à 7 000 $; le demandeur ne s'est pas acquitté de ces obligations.

[12]            Le paragraphe 221(1) des Règles de la Cour fédérale dispose :




RADIATION D'ACTES DE PROCÉDURE

Requête en radiation

221. (1) À tout moment, la Cour peut, sur requête, ordonner la radiation de tout ou partie d'un acte de procédure, avec ou sans autorisation de le modifier, au motif, selon le cas :

a) qu'il ne révèle aucune cause d'action ou de défense valable;

b) qu'il n'est pas pertinent ou qu'il est redondant;

c) qu'il est scandaleux, frivole ou vexatoire;

d) qu'il risque de nuire À l'instruction équitable de l'action ou de la retarder;

e) qu'il diverge d'un acte de procédure antérieur;

f) qu'il constitue autrement un abus de procédure.

Elle peut aussi ordonner que l'action soit rejetée ou qu'un jugement soit enregistré en conséquence.Preuve

(2) Aucune preuve n'est admissible dans le cadre d'une requête invoquant le motif visé À l'alinéa (1)a).

STRIKING OUT PLEADINGS

Motion to strike

221. (1) On motion, the Court may, at any time, order that a pleading, or anything contained therein, be struck out, with or without leave to amend, on the ground that it

(a) discloses no reasonable cause of action or defence, as the case may be,

(b) is immaterial or redundant,

(c) is scandalous, frivolous or vexatious,

(d) may prejudice or delay the fair trial of the action,

(e) constitutes a departure from a previous pleading, or

(f) is otherwise an abuse of the process of the Court,

and may order the action be dismissed or judgment entered accordingly.Evidence

(2) No evidence shall be heard on a motion for an order under paragraph (1)(a).

[13]            Pour que la Cour accorde la réparation sollicitée par la défenderesse, à savoir la radiation d'un acte de procédure, elle doit être convaincue que la demande ne révèle manifestement aucune cause d'action valable de procédure; il faut que la demande n'ait pas la moindre chance de succès.

[14]            L'allégation du demandeur selon laquelle ses droits ont été violés à la suite de ce qu'il qualifie des faux et des vols commis par des représentants du ministère défendeur doit être fondée sur des faits réels et non pas des hypothèses. Les allégations figurant aux paragraphes 7 à 14 ne s'appuient sur aucun fait démontrant la véracité de ces allégations. Dans Vojic c. Le ministre du Revenu national, [1987] 2 C.T.C. 203, la Cour d'appel fédérale a écrit :

[traduction] L'appelant se contente de faire de simples affirmations; il n'a pas établi les faits matériels qu'il doit plaider pour que l'intimé réponde à ses allégations. Par conséquent, sa déclaration ne révèle aucune cause d'action valable. C'est à bon droit qu'elle a été radiée...


[15]            Si les faits mentionnés dans la déclaration ne sont pas susceptibles d'être établis, il est incontestable que la déclaration modifiée du demandeur ne révèle aucune cause d'action valable. En général, il faut tenir pour vrais les faits énoncés dans la déclaration, mais pour déterminer si celle-ci révèle une cause d'action valable, on ne peut se fonder sur des hypothèses et sur des spéculations et on ne peut considérer ces faits comme vrais pour la seule raison que le demandeur les mentionne, vu l'absence de faits susceptibles d'appuyer les allégations en question. Une lecture attentive des actes de procédure n'a pas permis de découvrir de tels faits.

[16]            La défenderesse soutient que la déclaration modifiée du demandeur contient un si grand nombre d'allégations scandaleuses, frivoles, vexatoires, non pertinentes et redondantes qu'il y a lieu de radier la déclaration modifiée dans sa totalité.

[17]            Dans l'arrêt Sweet et al. c. Canada (2000), 249 N.R. 17, la Cour d'appel fédérale a déclaré à la page 26, paragraphe 21 :

Un juge n'a pas pour fonction de remanier les actes de procédure. Toutefois, il lui incombe de procéder à un examen approfondi d'un acte de procédure avant de déterminer qu'il ne peut être sauvegardé par des modifications appropriées

...

[un juge saisi d'une requête] doit décider si un document est si vicié qu'il défie toute correction par simple modification...

Je suis convaincu que le document en question ne peut être corrigé par simple modification. Les allégations sont tout à fait inacceptables et ne reposent sur aucun fait.

[2]         Pour ce qui est de l'alinéa 221c), et de la question de savoir si l'action est scandaleuse, frivole ou vexatoire, et constitue, aux termes de l'alinéa f), un abus de procédure, il ne fait absolument aucun doute que le demandeur a dans cette instance constamment harcelé le personnel du greffe de Vancouver. Depuis le 4 octobre de cette année, il a, par exemple, envoyé au greffe de Vancouver huit notes par télécopie. De la même façon, il en a envoyé huit au bureau de l'administrateur à Ottawa, à l'attention de Pat Levac; aucune de ces notes ne visait à corriger des actes de procédure.


[18]            Pour ce qui est des réparations demandées aux alinéas a) et b), qui font référence à l'alinéa 366(1)a), faux, et à l'article 342, vol, du Code criminel du Canada, il demande à la Cour de maintenir ces dispositions ou de les appliquer. Je ne comprends pas du tout la nature de ces demandes à moins que le demandeur ne souhaite que la Cour déclare coupables de vol ou de faux les représentants du ministère; il n'existe aucun élément de preuve sur cet aspect et les actes de procédure ne mentionnent aucun fait qui permettrait à la Cour de rendre une telle décision; je doute fort que la Cour ait le pouvoir d'accorder ce genre de réparation; les alinéas d) à n) font référence à des ordonnances que le demandeur qualifie ensuite d'accords de fiducie devant être reconnus et appliqués. La déclaration modifiée ne fait aucunement état d'ententes précises et rien ne permet à notre cour de reconnaître ce type d'allégation ou d'y donner effet. Aux alinéas o) et p), il demande une injonction interlocutoire interdisant au ministre d'effectuer une saisie-arrêt contre sa femme et lui-même. Les éléments de preuve soumis à la Cour ou invoqués dans la déclaration modifiée n'autorisent pas celle-ci à accorder une injonction de ce genre. Aux paragraphes q) et r), il demande des mesures de réparation contre des tiers, les anciens employeurs de sa femme et les siens.


[19]            La déclaration modifiée ne contient aucune allégation de fait concernant ces tiers; ces derniers ne peuvent être visés par une réparation ou se voir imposer une obligation quelconque; ces personnes n'ont en effet pas été avisées de l'instance et n'y sont pas parties. À l'alinéa s), il demande qu'on lui rende son logement familial ainsi que les sommes provenant de sa pension de sécurité de la vieillesse ainsi que du Régime de pensions du Canada qui font l'objet d'une saisie-arrêt. Le tribunal n'a pas le pouvoir d'accorder la réparation demandée et la déclaration modifiée ne contient aucune allégation de fait susceptible de justifier une telle demande.

[20]            Aux alinéas t) et u), il demande des dommages-intérêts. Des dommages-intérêts exemplaires de 50 000 000 000 $ contre l'Agence des douanes et du revenu du Canada ainsi que des dommages généraux. Les actes de procédure ne font état d'aucun préjudice susceptible de justifier ces demandes irréalistes. Les mesures de réparation demandées sont manifestement frivoles et vexatoires.

[21]            Dans cette action, le demandeur a présenté près de 20 requêtes en vertu de la règle 369 qui ont chaque fois obligé la défenderesse à présenter une réponse et le protonotaire à examiner ces requêtes et à préparer des motifs écrits; dix requêtes ont fait l'objet d'un appel devant la Section de première instance de la Cour, appels qui ont été rejetés immédiatement; huit de ces décisions de rejet ont été portées devant la Cour d'appel fédérale; le demandeur a été condamné à des dépens s'élevant au total à 7 000 $; il a continué à harceler le personnel du greffe de la Cour fédérale à Vancouver ainsi que l'administrateur à Ottawa depuis mon arrivée le 3 octobre.


[22]            Il est évident qu'un acte de procédure peut être qualifié de frivole et de vexatoire lorsqu'il est manifestement tellement futile que son auteur n'a pas la moindre chance de succès. D'après la jurisprudence, un acte de procédure qui ne repose sur aucune base rationnelle et qui ne contient aucun élément de preuve est frivole; le harcèlement constant du personnel du greffe, le fait d'avoir imposé un lourd fardeau aux avocats de la défenderesse et le rejet de toutes les demandes du demandeur par M. Hargrave ainsi que par les autres juges, tous ces éléments m'ont convaincu que cet acte de procédure est manifestement vexatoire.

[23]            La déclaration modifiée est dépourvue de toute justification, elle ne révèle aucune cause d'action valable; elle n'offre pas la moindre chance de succès; elle est manifestement frivole et vexatoire et la requête en radiation est par conséquent accueillie.

[24]            Au début de l'audience, j'ai invité l'avocat de la défenderesse à prendre certaines mesures. Il m'est clairement apparu que la défenderesse aurait dû présenter il y a plusieurs mois une demande de radiation. Son avocat a laissé le demandeur harceler le personnel du greffe de Vancouver et le bureau de l'administrateur à Ottawa par le dépôt d'innombrables actes de procédure et plaintes; il s'est placé dans une situation où il a dû répondre à 20 requêtes présentées aux termes de la règle 369 ainsi qu'à 10 appels interjetés devant des juges de notre cour; il a obligé le protonotaire Hargrave à répondre par écrit à au moins 20 requêtes de nature répétitive et frivole et dépourvues de fondement.


[25]            L'avocat de la défenderesse a, notamment, soutenu que toute cette affaire était frivole et vexatoire; si c'est bien là ce qu'il prétend, je ne vois pas pourquoi il n'a pas demandé l'autorisation du procureur général du Canada, conformément à l'article 40 de la Loi sur la Cour fédérale, en vue de demander une ordonnance déclarant que le demandeur agit de façon vexatoire et futile. Je lui ai accordé 60 jours pour examiner cette directive et cette recommandation. J'ai également indiqué à M. Nelson qu'il devait s'abstenir pendant 60 jours de déposer tout acte de procédure, à l'exception d'un appel visant la présente ordonnance ou d'une défense dans le cas où une demande serait présentée conformément au paragraphe 40(2) de la Loi sur la Cour fédérale.

                                                                                                                                             « P. Rouleau »             

                                                                                                                                                                Juge                     

Vancouver (Colombie-Britannique)

Le 18 octobre 2001

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                                                        Annexe « A »

Date : 20010730

Dossier : T-942-00

Référence neutre : 2001 CFPI 843

ENTRE :

                                     L'HONORABLE ROBERT H. NELSON

                         PRÉSIDENT FONDATEUR DE PUBLIC DEFENDERS

                   EN SON NOM ET EN TANT QUE REPRÉSENTANT DE TOUS

                              CEUX INJUSTEMENT PRIVÉS D'AVANTAGES

                                                                                                            demandeur

                                                               - et -

SA MAJESTÉLA REINE

REPRÉSENTÉE PAR L'HONORABLE MARTIN CAUCHON

MINISTRE DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

                                                                                                                   défenderesse

                                                       MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE HARGRAVE


[26]            Les présents motifs font suite à la requête du 21 juin 2001 par laquelle le demandeur a sollicité l'assignation à comparaître d'un certain nombre de témoins, des personnes bien connues, qu'il s'agisse de l'avocat de la défenderesse, de l'honorable Martin Cauchon, ministre du Revenu national, ou du premier ministre du Canada, soit, plus particulièrement, des personnes suivantes :

Robert Carvalho

Honorable Martin Cauchon, ministre du Revenu national

J. McKenzie

J. McNally

Michael Zuber

Selinder Pandher

Jane Stewart, Chef des appels

Herb Dhaliwal

Morris A. Rosenberg

Paul Martin

Anne McLellan

Jean Chrétien

Les subpoenas sollicités à l'égard de ces douze témoins sont apparemment liés au procès tenu le 16 octobre 2001 dans cette action, laquelle porte sur des affaires d'ordre fiscal pouvant remonter à 1984.


[27]            J'ai examiné le dossier de requête de 94 pages du demandeur, sa réponse contenant des affidavits, ses documents et ses arguments. De nombreux documents sont reconnaissables car ils ont été déposés à l'appui des requêtes antérieures du demandeur, tandis que d'autres documents sont nouveaux. Toutefois, peu de ces documents, s'il en est, sont même vaguement pertinents. En effet, alors que, dans ses observations écrites, M. Nelson fait des déclarations audacieuses non appuyées quant à la nécessité de faire comparaître les douze témoins, aucun des faits qu'il a invoqués ne soutient l'octroi des subpoenas sollicités.

[28]            Pour plus d'information, je signale que, par requête datée du 15 mars 2001, le demandeur a sollicité la tenue d'une conférence préparatoire le 16 avril 2000 ainsi qu'une ordonnance enjoignant au ministre du Revenu national, l'honorable Martin Cauchon, d'être présent. Le juge Campbell a rejeté cette requête par ordonnance datée du 26 avril 2001. Le demandeur a interjeté appel contre cette ordonnance, demandant à la Cour d'appel fédérale d'exiger que M. Cauchon assiste à une conférence de règlement des différends le 15 mai 2001. L'appel n'a pas encore fait l'objet d'une décision.

[29]            Par ordonnance du 17 mai 2001 faisant suite à la conférence préparatoire tenue ce jour-là, j'ai fixé le procès dans la présente affaire au 16 octobre 2001 et j'ai établi diverses exigences d'avis que le demandeur doit respecter s'il désire obtenir l'autorisation de délivrer un subpoena à l'honorable Martin Cauchon pour que celui-ci témoigne au procès. Le demandeur a interjeté appel contre cette ordonnance auprès du juge MacKay, qui a rejeté l'appel avec dépens contre lui le 14 juin 2001.

[30]            Au moyen d'un autre avis de requête, daté du 24 mai 2001, le demandeur a de nouveau sollicité l'autorisation d'assigner à comparaître au procès l'honorable Martin Cauchon, requête que le juge MacKay a rejetée également par ordonnance du 14 juin 2001 en condamnant une fois de plus le demandeur aux dépens.

[31]            Les deux ordonnances que le juge MacKay a rendues le 14 juin 2001 font l'objet d'un appel.

[32]            Une partie sollicitant l'autorisation de délivrer un subpoena visant un témoin doit établir que ce témoin est nécessaire pour prouver l'existence d'un document, pour le produire ou pour répondre à des questions pertinentes. En effet, un subpoena doit être délivré de bonne foi en vue de l'obtention d'éléments de preuve pertinents : voir par exemple Le Roi c. Baines [1909] 1 K.B. 258, aux pages 261 et 262. Un subpoena ne doit pas être délivré lorsqu'il donne lieu à de l'oppression et, comme il a d'ailleurs été dit dans l'arrêt Senior c. Holdsworth, Ex parte Independent Television News Ltd. [1976] 1 Q.B. 23, rendu par la Cour d'appel, un subpoena sera écarté s'il est oppressif ou s'il constitue un abus du processus judiciaire : voir Senior c. Holdsworth, à la page 40, où le lord juge Scarman se penche sur l'irrégularité d'un subpoena délivré dans un but autre que celui d'obtenir des éléments de preuve pertinents, par exemple dans le but de causer un scandale politique, ou visant un témoin n'ayant aucune déposition pertinente à faire.

[33]            Les documents de M. Nelson ne font ressortir aucun élément de preuve indiquant que les personnes qu'il désire assigner à comparaître ont participé aux événements qui ont donné lieu à l'action. Rien dans les affidavits de M. Nelson ne permet à celui-ci de s'acquitter de la charge d'établir que les témoins étaient nécessaires pour prouver l'existence d'un document, pour le produire ou pour répondre à des questions pertinentes. De plus, le demandeur a déjà présenté en vain des requêtes sollicitant l'autorisation de délivrer des subpoenas, notamment des requêtes pour autorisation d'assigner à comparaître l'honorable Martin Cauchon.

[34]            Compte tenu de l'historique du présent dossier et, plus particulièrement, de son historique récent, je suis d'accord avec la prétention de la défenderesse selon laquelle la présente requête vise à harceler l'honorable Martin Cauchon. Elle constitue donc un abus.

[35]            Le demandeur s'est comporté de façon abusive en l'espèce. Il a harcelé la Couronne en tentant d'assigner à comparaître des témoins qui non seulement n'avaient aucun lien avec la cause d'action, mais dont on ne paraît pas demander la présence pour prouver l'existence de documents, pour en produire ou pour répondre à des questions pertinentes, ce qui constitue une conduite scandaleuse, voire même outrageante, particulièrement lorsque la délivrance d'au moins un subpoena a été refusée par le passé.


[36]            L'octroi des dépens contre une partie dont la requête a fait l'objet d'un jugement défavorable constitue non seulement un moyen d'indemniser dans une certaine mesure la partie qui a gain de cause, mais également un moyen de dissuasion contre les procédures frivoles ou outrageantes. Je dois toutefois me rappeler que, même dans les cas spéciaux justifiant l'octroi de dépens élevés, je dois circonscrire ceux-ci de manière à ne pas dissuader une partie de présenter des demandes incertaines mais valables. Madame le juge McLaughlin de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique (maintenant Juge en chef du Canada) l'a bien expliqué dans l'arrêt Houweling Nurseries c. Fisons Western Corporation (1989) 37 B.C.L.R. (2d) 2, à la page 25 :

[Traduction] [...] Dans notre système de règlement des litiges, les dépens ont non seulement pour but d'indemniser dans une certaine mesure la partie qui a gain de cause, mais ils visent aussi à dissuader l'autre partie de présenter une action ou une défense frivole. Lorsqu'elles évaluent le risque de déposer une action ou une défense particulière, les parties devraient être en mesure de prévoir avec une certaine précision la sanction qui les attend si elles n'ont pas gain de cause. De plus, il existe une bonne raison de restreindre les dépens à des frais relativement bas. La possibilité de dépens élevés est susceptible de dissuader indûment une partie de présenter une action ou une défense incertaine mais valable.

[37]            À la lumière de l'ensemble des circonstances, et particulièrement de l'acharnement avec lequel le demandeur a tenté d'obtenir gain de cause sur la question du subpoena malgré les ordonnances et directives défavorables qu'il s'est vu imposer par le passé, il convient d'ordonner au demandeur de verser à la défenderesse à titre de dépens le montant forfaitaire prévu à la colonne quatre du tarif B, soit 900 $.

             « John A. Hargrave »           

Protonotaire

Vancouver (Colombie-Britannique)

Le 30 juillet 2001

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                   COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                        T-942-00

INTITULÉ :                       Nelson c. SMLR et al.

LIEU DE L'AUDIENCE :                                                         Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :                                                        Le 16 octobre 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :              Le juge Rouleau

DATE DES MOTIFS :                                                  Le 18 octobre 2001

ONT COMPARU :

Robert H. Nelson                                                              POUR LE DEMANDEUR

Robert Carvalho                                                   POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AUX DOSSIERS :

-                                                                             POUR LE DEMANDEUR

Sous-procureur général du Canada                                  POUR LA DÉFENDERESSE

Vancouver (Colombie-Britannique)

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