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                                                                                                                                  Date : 19990105

                                                                                                                       Dossier : IMM-1330-98

ENTRE :

                                                               QIONG TAO WU,

                                                                                                                                      demanderesse,

                                                                          - et -

                    LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                                                                                                                                            défendeur.

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                    (Version révisée des motifs prononcés à l'audience

                                          le mardi 5 janvier 1999 à Toronto (Ontario))

LE JUGE REED

[1]         On ne m'a pas persuadée qu'il existe un motif justifiant l'annulation de la décision de l'agent des visas. Je conviens avec Me Rosenblatt que sa cliente n'est pas une commis de bureau. Elle exerce des fonctions qui ressemblent plutôt à celles qu'exerce ce que nous appellerions une adjointe administrative au Canada. En Chine, elle porte le titre de secrétaire de direction. Elle seconde le président de la Banque agricole de Chine. Dans de nombreux pays, le mot « secrétaire » est employé pour désigner un poste assez important au sein d'une organisation. L'agent des visas a eu raison de s'attarder à l'expérience professionnelle et à la formation de la demanderesse plutôt qu'au titre du poste qu'elle occupe actuellement.

[2]         Je conviens avec Me Rosenblatt que l'agent des visas a considéré la connaissance de la dactylographie et de la sténographie (ou d'une autre méthode de transcription des propos échangés au cours de réunions) comme une condition préalable à l'obtention d'un emploi au Canada à titre de secrétaire de direction. Cette décision ne me semble pas aller à l'encontre de l'affaire Muntean c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (1995), 31 Imm. L.R. (2d) 18 (C.F. 1re inst.), dans laquelle le juge Cullen a déclaré, à la p. 22, que les descriptions de travail contenues dans la CCDP devraient faire l'objet d'une interprétation large et qu'il n'est pas nécessaire d'être en mesure d'exécuter toutes les tâches qui y sont mentionnées :

[...] il faut interpréter littéralement les descriptions CCDP et [...] il n'est pas nécessaire d'être en mesure de s'acquitter des tâches énumérées dans telle ou telle description pour réunir les conditions requises pour une profession donnée. Si l'agent des visas applique de façon mécanique les descriptions CCDP et exige que le requérant ait fait chacune des tâches énumérées, on pourrait dire qu'il a limité de son propre chef l'exercice de son pouvoir discrétionnaire en la matière.

[3]         Le fait qu'il n'est pas nécessaire d'être en mesure d'exécuter toutes les tâches énumérées dans une description de la CCDP ne signifie pas que l'aptitude à exécuter certaines tâches n'est pas un élément essentiel d'un poste. Le chapitre de la CCDP (4111), dans lequel figure le poste de secrétaire de direction en tant que sous-groupe, s'intitule « Secrétaires et sténographes » . Le « travail accompli » par les titulaires des postes mentionnés dans ce chapitre est défini dans le paragraphe liminaire. Les postes en question sont occupés par des « employés qui écrivent sous la dictée, enregistrent, transcrivent et dactylographient les textes dictés ou rédigés et s'acquittent de tâches connexes » . La décision de l'agent des visas, savoir que la demanderesse ne possédait pas [traduction] « les compétences les plus fondamentales se rapportant au poste » de secrétaire de direction parce qu'elle ne tape pas à la machine (le résultat du test qu'elle a passé était de 18 mots à la minute) et ne sait pas prendre des notes en sténo ou n'a pas de compétences en sténographie, n'a pas entravé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire ni constitué une appréciation erronée de la preuve. La CCDP appuie la conclusion qu'il s'agit de compétences fondamentales nécessaires pour travailler comme secrétaire au Canada. L'agent des visas ne s'est pas contenté d'apprécier la preuve en fonction de ses opinions personnelles.

[4]         En ce qui concerne l'argument fondé sur la décision rendue dans l'affaire Lee c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1995), 29 Imm. L.R. (2d) 222 (C.F. 1re inst.), je ne suis pas convaincue que l'agent des visas s'est appuyé uniquement sur la formation de la demanderesse pour prendre sa décision. Il précise dans sa lettre de refus en date du 12 février 1998 qu'il a apprécié la demanderesse comme secrétaire de direction, mais, compte tenu de son [traduction] « expérience et [de sa] formation » , il a conclu qu'elle ne possédait pas les compétences requises. Il a ensuite apprécié la demanderesse comme commis de bureau, poste qui était visiblement mal choisi vu l'expérience et la formation scolaire de la demanderesse, quoiqu'il n'ait probablement fait que son travail en tentant de trouver une autre catégorie de la CCDP à laquelle la demanderesse pourrait appartenir. Dans l'affaire Lee, l'agent des visas a estimé que le manque de formation officielle de l'intéressée la rendait inapte à occuper un poste donné en dépit du fait qu'elle avait exercé les fonctions de ce poste pendant de nombreuses années. Ainsi qu'il a été mentionné, l'agent des visas n'a pas suivi la même démarche en l'espèce.

[5]         La demanderesse a soumis des éléments de preuve selon lesquels elle avait achevé un cours de formation (qu'elle a suivi de juillet 1996 à janvier 1997) dans le cadre duquel elle a étudié l'informatique (120 heures), l'anglais (150 heures) et la rédaction (50 heures). L'agent des visas a examiné ce certificat et déclaré que la majeure partie de la formation avait consisté en l'acquisition de connaissances en anglais et de compétences de base en informatique : [traduction] « cette formation ne satisfait pas aux exigences minimales de la CCDP » . La demanderesse prétend qu'elle a également soumis un autre certificat, qui n'apparaît pas au dossier. Ce certificat atteste la réussite d'un cours de formation qu'elle a suivi du 10 mars 1997 au 7 avril 1997; il s'agissait d'une formation en informatique se rapportant aux logiciels Windows '95, Word 6.0, Excel et Dvter Net [sic]. L'agent des visas affirme qu'il n'a jamais vu ce certificat. La demanderesse affirme qu'elle le lui a remis. L'agent des visas affirme que même s'il l'avait vu, il n'aurait pas modifié son appréciation. Quoi qu'il en soit, l'agent des visas a été saisi d'éléments de preuve indiquant que la demanderesse avait achevé ce programme (dans son dossier personnel et dans la lettre de référence de son employeur).

[6]         Je ne saurais conclure, même si le deuxième certificat a disparu du dossier officiel, qu'il s'agit d'une erreur justifiant l'annulation de la décision de l'agent des visas. Le deuxième certificat ne se rapporte pas aux lacunes relevées dans la formation et l'expérience de la demanderesse en ce qui a trait aux compétences fondamentales requises pour exercer les fonctions de secrétaire de direction, et il ne comble pas ces lacunes.


[7]         La demande est donc rejetée.

                                                                                                               « B. Reed »               

                                                                                                                        Juge

TORONTO (ONTARIO)

Le 5 janvier 1999

Traduction certifiée conforme

Marie Descombes, LL.L.


                                                 COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                       Noms des avocats et avocats inscrits au dossier

NUMÉRO DU GREFFE :                                             IMM-1330-98

INTITULÉ :                                                      QIONG TAO WU

                                                                                   

                                                                                    - et -

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

DATE DE L'AUDIENCE :                                            LE MARDI 5 JANVIER 1999

LIEU DE L'AUDIENCE :                                 TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE REED

en date du mardi 5 janvier 1999

COMPARUTIONS :                                      Mark Rosenblatt

                                                                                                pour la demanderesse

                                                                                    Bridget O'Leary

                                    pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :                   Rosenblatt Associates

                                                                                    Avocats

                                                                                    10e étage, 1000-335, rue Bay

                                                                                    Toronto (Ontario)

                                                                                    M5H 2R3

                                                                                                pour la demanderesse

                                                                                    Morris Rosenberg

                                                                                    Sous-procureur général

                                                                                    du Canada

                                                                                                pour le défendeur


                   COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                                                      Date : 19990105

                                                           Dossier : IMM-1330-98

Entre :

QIONG TAO WU,

                                                                          demanderesse,

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                                                                                défendeur.

                                                                       

                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                                       

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