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Date: 19991213


Dossier: T-2491-93

MONTRÉAL (QUÉBEC), CE 13e JOUR DE DECEMBRE 1999

Présent:      ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE



Entre:

     NORMAND THIFFEAULT

     Demandeur

     ET

     SA MAJESTÉ LA REINE

     Défenderesse





     JUGEMENT


     L'action du demandeur est rejetée avec dépens à être calculés selon le bas de la colonne II du Tarif.



Richard Morneau

     protonotaire






     Date: 19991213

     Dossier: T-2491-93


Entre:

     NORMAND THIFFEAULT

     Demandeur

     ET

     SA MAJESTÉ LA REINE

     Défenderesse


     MOTIFS DU JUGEMENT


ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE:



Introduction

[1]      Il s'agit d'une action en dommages et intérêts contre Sa Majesté la Reine résultant, suivant le demandeur, des agissements de Douanes Canada (ainsi connu à l'époque) qui auraient bafoué les droits du demandeur de pouvoir se porter acquéreur de son ancienne automobile ce qui aurait occasionné par le fait même au demandeur un préjudice de 4 725 $, soit la somme représentant la différence entre la valeur réelle de l'automobile, soit 7 225 $, et le prix pour lequel le demandeur aurait dû se porter acquéreur adjudicataire dudit véhicule (2 500 $).

Les faits

[2]      Les parties se sont entendues sur les faits à soumettre en preuve. Cette entente révèle, entre autres, ce qui suit.

[3]      Le 12 juin 1992, l'automobile du demandeur de marque Cadillac Fleetwood 1985, portant le numéro de série 1G6DW6980F975477, était saisie par les représentants de la défenderesse.

[4]      Le 22 juillet 1992, les représentants de la défenderesse offrent le véhicule en vente par voie d'adjudication en annonçant publiquement cette vente à l'aide d'un formulaire E-34 dûment complété.

[5]      Le demandeur était avisé, aux termes du paragraphe 7 du formulaire E-34 que seul l'adjudicataire élu allait être avisé et que la vente devait être complétée dans les sept jours de l'envoi de l'avis. De façon plus précise, la clause 7 dudit formulaire se lit comme suit:

7.      Seul l'adjudicataire élu sera avisé aussitôt que possible après la date limite fixée pour la réception des offres et la vente doit être complétée dans les 7 jours qui suivent la date d'un tel avis.

[6]      Le 13 août 1992, les représentants de la défenderesse retiennent l'offre d'achat du demandeur et lui envoient, le même jour, une lettre par poste recommandée dont le contenu essentiellement se lit comme suit:

Votre offre pour l'achat du lot numéro 3 qui consiste en une Cadillac Fleetwood 1985 avec numéro de série 1G6DW6980F975477 a été retenue.
Vous devez apporter votre chèque certifié au montant de $2,889.00 payable au Receveur Général au bureau des douanes situé au 25 des Forges, suite 612, Trois-Rivières. Ce montant comprend $2,500.00 plus $175.00 TPS et $214.00 taxes provinciales.
Vous avez sept jours de la présente date pour prendre possession du véhicule.

[7]      Le 21 août 1992, les représentants de la défenderesse ont annulé la vente au demandeur, compte tenu que ce dernier ne s'était pas manifesté, et ont alors vendu le véhicule susmentionné à un tiers.

[8]      Il appert que ce n'est que le ou vers le 19 août 1992 que le demandeur a pris connaissance de l'avis à l'effet qu'il devait se présenter au comptoir postal pour récupérer ladite lettre recommandée.

[9]      Le mercredi 26 août 1992, le demandeur prenait possession de la lettre du 13 août.

[10]      Le demandeur s'est présenté au bureau de Revenu Canada, Douanes et Accises, dans les sept (7) jours de la prise de connaissance de l'avis, soit le 1er septembre 1992.

Analyse

[11]      Suivant le procureur du demandeur, il est clair à la lecture du paragraphe 7 du formulaire et de la lettre du 13 août 1992 que le délai de sept (7) jours pour le paiement et la prise de possession du véhicule ne constituait que des simples modalités subséquentes à la vente et que cette dernière devait être vue comme complète et finale dès l'acceptation de l'offre du demandeur. Partant, même si le demandeur ne s'est pas exécuté dans les sept (7) jours de cette acceptation, la défenderesse ne pouvait annuler la vente avant de s'assurer que le demandeur avait bel et bien reçu un avis d'annulation pour retard à prendre possession.

[12]      Je ne puis à la lumière des faits accepter cette approche.

[13]      C'est le formulaire qui à mon sens établit l'essence de toute entente à être conclue entre la défenderesse et tout adjudicataire. À cet égard, la clause 7 dudit formulaire fait en sorte que l'acceptation dans un premier temps de l'offre d'un adjudicataire ne complète pas la vente mais cette dernière sera parachevée, deviendra donc parfaite, que si les obligations du demandeur - tel que précisé dans la lettre du 13 août 1992 - sont complétées dans les sept (7) jours.

[14]      Or, ici, ce ne fut pas le cas et je ne considère pas que la défenderesse se devait de donner au demandeur un deuxième avis ou que la défenderesse a abusé de sa discrétion en annulant la vente le 21 août 1992.

[15]      On doit par ailleurs considérer que pour les fins de la clause 7 du formulaire, la date d'envoi de l'avis se doit de demeurer le 13 août 1992 et ce, malgré le fait que la défenderesse ait utilisé en les circonstances la poste recommandée et non la poste ordinaire.

[16]      À cet égard, l'article 149 de la Loi sur les douanes est applicable en l'espèce. Cet article stipule que:

Pour l'application de la présente loi, la date des avis ou préavis prévus par cette loi ou ses règlements est, en cas d'envoi par la poste, réputée celle de leur mise à la poste, cette dernière date étant, sauf preuve contraire, celle qu'ils semblent indiquer comme telle, à moins de contestation par le ministre, son délégué ou celui de Sa Majesté.

[17]      Le demandeur ne m'a pas convaincu que la poste à laquelle fait référence l'article 149 exclut la poste recommandée. De fait, dans l'arrêt 928412 Ontario Ltd. v. Minister of National Revenue (1997), 130 F.T.R. 168, la Cour a implicitement admis que la poste recommandée se retrouvait comme véhicule d'envoi visé par l'article 149. La Cour s'exprime ainsi en page 173:

[22]      Where, as in the present case, a person requests a decision of the Minister pursuant to s. 131 of the Act, and notice of that decision is sent to that person by registered mail to their latest known address, notice is effective, on the date of mailing, in accord with ss. 137 and 149 of the Act which provide as follows:
137. The service of the Deputy Minister's notice under section 130 or the notice of the Minister's decision under section 131 is sufficient if it is sent by registered mail addressed to the person on whom it is to be served at his latest known address.
149. For the purposes of this Act, the date on which a notice is given pursuant to this Act or the regulations shall, where it is given by mail, be deemed to be the date of mailing of the notice, and the date of mailing shall, in the absence of any evidence to the contrary, be deemed to be the day appearing from such notice to be the date thereof unless called into question by the Minister or by some person acting for him or Her Majesty.
[23]      In the present circumstances, pursuant to s. 149 of the Act, notice of the Minister's decision was given to the plaintiff on October 30, 1996, the date it was sent by registered mail, and not on the date on which it was received.
(mes soulignés)

[18]      De plus, le demandeur n'a pu référer cette Cour à aucun argument de fait ou de droit pour écarter une telle conclusion. Partant, la date de réception de la lettre du 13 août 1992 ne peut ici recevoir aucun impact.

[19]      D'autre part, même si la poste recommandée écartait l'application de l'article 149, - ce que je nie en l'espèce - il ne m'apparaît pas que l'action du demandeur pourrait être accueillie pour autant.

[20]      Premièrement, il n'a pas été démontré que le demandeur a fait preuve d'une diligence raisonnable pour prendre connaissance de l'envoi recommandé. Il n'est en effet pas expliqué en preuve pourquoi ce n'est que le 19 août 1992 et non pas plus tôt que le demandeur a réalisé qu'il avait reçu une lettre par poste recommandée.

[21]      Même en acceptant le 19 août 1992 en faveur du demandeur, ce dernier aurait pu malgré son horaire se rendre au bureau de poste pour prendre connaissance à temps du contenu même de la lettre du 13 août 1992.

[22]      Enfin, le quantum des dommages du demandeur n'a pas été établi en preuve puisqu'il ne fait pas partie de l'entente sur les faits mise en preuve. Ce quantum n'est demeuré qu'un allégué dans la déclaration d'action.

[23]      Pour ces motifs, l'action du demandeur sera rejetée avec dépens à être calculés selon le bas de la colonne II du Tarif.


Richard Morneau

     protonotaire

MONTRÉAL (QUÉBEC)

le 13 décembre 1999






















     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     NOMS DES AVOCATS ET DES PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER


NO DU DOSSIER DE LA COUR:

INTITULÉ DE LA CAUSE:

T-2491-93

NORMAND THIFFEAULT

     Demandeur

ET

SA MAJESTÉ LA REINE

     Défenderesse


LIEU DE L'AUDIENCE:Québec (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE:le 2 décembre 1999

MOTIFS DU JUGEMENT DE ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE

DATE DES MOTIFS DU JUGEMENT:le 13 décembre 1999


COMPARUTIONS:

Me Steve Baribeau pour le demandeur

Me Veronica Romagnino pour la défenderesse


PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:

Lacoursière Lebrun Vézina pour le demandeur

Me Steve Baribeau

Trois-Rivières (Québec)

Me Morris Rosenberg pour la défenderesse

Sous-procureur général du Canada




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