Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20010117

Dossier : T-964-97

ENTRE :

                                       BUDD CANADA INC. et PHILLIPS &

                                               TEMRO INDUSTRIES LTD.,

                                                                                                                     demanderesses,

                                                                    - et -

                                                             NOMA INC.,

                                                                                                                         défenderesse.

                                            MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                                       

LE JUGE EN CHEF ADJOINT

[1]                La défenderesse Noma Inc. demande, par voie de requête en jugement sommaire partiel, le rejet de l'action en contrefaçon de brevet entamée par les demanderesses relativement au nouvel ensemble cordon de la défenderesse.

[2]                Au vu du dossier, il existe à mon sens de véritables questions litigieuses et la requête doit être rejetée.


[3]                La défenderesse appuie sa requête sur deux éléments : a) son interrogatoire préalable de Gary Edwards, vice-président au développement de l'entreprise et ex-directeur du développement de produit en ingénierie de la demanderesse Phillips and Temro Industries Ltd.; b) son contre-interrogatoire relatif au témoignage d'opinion des deux souscripteurs d'affidavit des demanderesses, Peter M. Wild et A. Leonard Grove. Comme elle en avait le droit, la défenderesse a choisi de ne pas déposer sa propre preuve par affidavit.

[4]                Pour les besoins de la présente requête seulement, la défenderesse reconnaît que son nouvel ensemble cordon Noma est identique à tous les éléments sauf un de la revendication 1 du brevet des demanderesses. La seule partie de la revendication 1 qui est litigieuse dans la présente requête est soulignée ci-après :

[traduction] Un cordon d'alimentation pour utilisation avec un accessoire d'automobile fonctionnant en c.a., soit un cordon d'alimentation à plusieurs conducteurs ayant une extrémité accessoire attachée à une pièce de dimension nettement supérieure à celle du cordon, une extrémité fiche attachée à une fiche à plusieurs contacts et également de dimension nettement supérieure à celle du cordon et un connecteur entre les extrémités accessoire et fiche du cordon, ayant des éléments homologues connectés aux parties respectives du cordon, au moins un desdits éléments ayant un profil mince dont au moins une des dimensions transversales est nettement inférieure à la section minimale de la pièce et de la fiche.

[5]                Le problème résolu par l'invention du demandeur, c'est l'impossibilité de passer la fiche d'un ensemble cordon à travers les ouvertures étroites d'une calandre d'automobile. La solution est un connecteur ayant deux éléments homologues, dont au moins un a un profil mince tel que décrit dans la dernière partie de la revendication 1.


[6]                Nous reconnaissons qu'une des dimensions transversales (0,79 pouce) d'un des deux éléments homologues du nouvel ensemble cordon Noma n'est pas nettement inférieure à la section minimale (0,78 pouce) de sa fiche (contre-interrogatoire du professeur Wild, questions 49 à 62).

[7]                Compte tenu de cette dimension transversale (0,79 pouce), la défenderesse fait valoir que son nouvel ensemble cordon Noma ne comporte pas l'élément essentiel de la revendication en litige et ne contrefait donc pas le brevet en cause.

[8]                Il est également entendu, pour les besoins de la présente requête, qu'une autre dimension transversale (0,328 pouce) du même élément homologue est, elle, nettement inférieure à la section minimale (0,78 pouce) de la fiche du nouvel ensemble cordon Noma (affidavit du professeur Wild, paragraphes 29 et 30). La différence est de près de ½ pouce.

[9]                Compte tenu de cette deuxième dimension transversale (0,328 pouce), les demanderesses font valoir que le nouvel ensemble cordon Noma est conforme à l'élément essentiel de la revendication 1 en litige et contrefait donc leur brevet.

[10]            À mon avis, une preuve substantielle, établie par les témoignages mêmes sur lesquels s'appuie la défenderesse, met en doute le fondement juridique et factuel de la présente requête en jugement sommaire partiel.


[11]            Primo, la défenderesse fait valoir que l'épaisseur maximale de l'élément homologue (en l'occurrence, 0,79 pouce) doit être inférieure à l'ouverture de la calandre d'automobile pour que l'invention fonctionne de façon appropriée. Pour la défenderesse, c'est cette épaisseur maximale de l'élément qui est la dimension transversale pertinente visée par la dernière partie de la revendication 1 (contre-interrogatoire de M. Grove, question 178; contre-interrogatoire du professeur Wild, question 81).

[12]            Toutefois, la preuve versée au dossier est insuffisante pour m'autoriser à conclure que l'épaisseur maximale de l'élément homologue est la dimension transversale pertinente ou importante. En invoquant certaines des réponses données par les souscripteurs d'affidavit des demanderesses, la défenderesse ne tient pas compte de l'ensemble de leur témoignage. D'après la revendication 1, l'élément au profil mince doit comporter « au moins une dimension transversale » nettement inférieure à la section minimale de la fiche. La preuve établit que la dimension de 0,328 pouce qui, elle, est inférieure et dont il est question supra, au paragraphe 8, correspond à cet élément de la revendication (affidavit du professeur Wild, paragraphes 29 à 31). Le professeur Wild invoque la dimension transversale de 0,328 pouce pour conclure à la contrefaçon. À supposer qu'il soit pertinent en l'espèce de décider quelle dimension transversale est importante, il s'agit là d'une véritable question litigieuse.


[13]            Secundo, la défenderesse fait également valoir que le brevet envisage un connecteur qui passe entièrement à travers une ouverture de la calandre (contre-interrogatoire du professeur Wild, question 180). Cependant, il faut tenir compte du contexte des réponses de l'auteur de l'affidavit. Selon le professeur Wild, bien que le brevet puisse envisager que l'élément ayant un profil réduit passe entièrement à travers la calandre, la partie de la revendication 1 en litige n'exclut pas la possibilité qu'un élément puisse passer partiellement à travers la calandre tout en permettant sa connexion à l'élément homologue au niveau de la calandre ou à proximité (contre-interrogatoire du professeur Wild, questions 184 à 186 et 201). Le professeur Wild était également d'avis qu'un des éléments homologues du nouvel ensemble cordon Noma pourrait passer partiellement à travers l'ouverture pour permettre sa connexion à l'autre élément du côté moteur de la calandre (affidavit du professeur Wild, paragraphes 16 et 30 et question 178).

[14]            À l'appui de ce deuxième argument, la défenderesse invoque le libellé du résumé du brevet : [traduction] « L'élément mince du connecteur du cordon est conçu pour passer à travers les ouvertures étroites de la calandre d'un véhicule ... » . Cependant, il faut prendre connaissance du contexte de la phrase complète qui continue comme suit : « ... la partie mince du connecteur étant enfilée à travers la calandre pour être connectée à l'autre élément du connecteur » [non souligné dans l'original]. Ces extraits ne sont pas assez clairs, aux fins de la présente requête, pour fournir suffisamment de soutien à l'interprétation que donne la défenderesse de la revendication 1.


[15]            De véritables questions litigieuses de fait et de droit sont soulevées par la question de savoir, d'une part, si l'élément au profil mince du nouvel ensemble cordon Noma peut ou non passer partiellement à travers la calandre d'une automobile pour être connecté à l'autre élément et, d'autre part, si ce mode de connexion dépasse la portée de la revendication 1.

[16]            En résumé, la défenderesse a prié la Cour de rejeter les allégations de la déclaration selon lesquelles son nouvel ensemble cordon Noma viole le brevet des demanderesses. Elle invoque certaines réponses du représentant des demanderesses et de ses deux souscripteurs d'affidavit, en particulier du dernier. Toutefois, les affidavits et le contre-interrogatoire de ces deux mêmes souscripteurs renferment d'autres témoignages qui contredisent les réponses sur lesquelles elle s'appuie.

[17]            Dans une requête en jugement sommaire, en particulier lorsque le requérant choisit de ne pas déposer sa propre preuve par affidavit, il est presque inévitable que de véritables questions de fait litigieuses se fassent jour quand certaines réponses sont invoquées sans égard à d'autres déclarations apparemment contradictoires qu'ont faites les mêmes témoins et que renferme le dossier. Seule l'instruction de l'affaire peut permettre d'élucider la question : NDT Corp. c. Abtox Inc. (1996), 71 C.P.R. (3d) 11 (C.F. 1re inst.), à la p. 13.


[18]            Pour ces motifs, la requête en jugement sommaire partiel présentée par la défenderesse sera rejetée. Les dépens seront adjugés aux demanderesses.

                                                                                                                          « Allan Lutfy »              

                                                                                                                  Juge en chef adjoint

Ottawa (Ontario)

Le 17 janvier 2001

Traduction certifiée conforme

                                            

Richard Jacques, LL. L.


Date : 20010117

Dossier : T-964-97

OTTAWA (ONTARIO), LE 17 JANVIER 2001

EN PRÉSENCE DU JUGE EN CHEF ADJOINT

ENTRE :

                                       BUDD CANADA INC. et PHILLIPS &

                                               TEMRO INDUSTRIES LTD.,

                                                                                                                     demanderesses,

                                                                    - et -

                                                             NOMA INC.,

                                                                                                                         défenderesse.

                                                          ORDONNANCE

VU la requête en jugement sommaire partiel de la défenderesse,

APRÈS avoir examiné les arguments écrits des parties et tenu une audience le 20 décembre 2000 à Toronto, en Ontario;


LA COUR ORDONNE :

1.                    La requête de la défenderesse en jugement sommaire partiel est rejetée.

2.                    Les dépens sont adjugés aux demanderesses.

                                                                                                                          « Allan Lutfy »                

                                                                                                                  Juge en chef adjoint

Traduction certifiée conforme

                                            

Richard Jacques, LL. L.


                                            COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                         SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                             AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DE DOSSIER :                        T-964-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :         BUDD CANADA INC. et PHILLIPS & TEMRO INDUSTRIES et NOMA INC.

LIEU DE L'AUDIENCE :             TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :            20 DÉCEMBRE 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE EN CHEF ADJOINT

EN DATE DU :                             17 JANVIER 2001

ONT COMPARU :

Terence J. O'Sullivan                            POUR LES DEMANDERESSES

Ronald E. Dimock                                POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lax O'Sullivan Cronk                       POUR LES DEMANDERESSES

Toronto (Ontario)

Dimock Stratton Clarizio                  POUR LA DÉFENDERESSE

Toronto (Ontario)

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.