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Date : 20020417

Dossier : T-705-97

Référence neutre : 2002 CFPI 434

ENTRE :

                                              LE CHEF LIZA WOLF en son propre nom

                                                          et au nom des membres de la

                                                  PREMIÈRE NATION DENE TSAA,

                                                    également connue sous le nom de

                                            BANDE INDIENNE DE PROPHET RIVER

                                                                                                                                                   demandeurs

                                                                              - et -

                                                            SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                               défenderesse

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                    (Rendus à l'audience à Vancouver, Colombie-Britannique,

                                                                 le jeudi 11 avril 2002)

LE JUGE HUGESSEN :

[1]                 Il s'agit d'une requête présentée par les demandeurs en vertu de l'article 220 des Règles afin de formuler une question portant sur un point de droit devant être déterminée par la Cour ou, subsidiairement, de diviser la question proposée de sorte que les différentes parties soient décidées séparément. J'aborderai ensemble les questions principales et subsidiaires puisque, à mon avis, il n'y a pas de différence considérable en ce qui concerne le critère que la Cour applique lorsqu'elle décide d'accorder ou non la mesure de redressement demandée.


[2]                 Les requérants ont le fardeau de convaincre la Cour qu'elle devrait s'éloigner de la règle générale qui, bien entendu, veut que normalement l'ensemble de l'affaire soit entendu et tranché par la Cour en un seul moment. La Cour possède un pouvoir discrétionnaire à exercer lorsqu'elle décide si elle accordera la mesure de redressement demandée. En exerçant ce pouvoir discrétionnaire, la Cour examinera un certain nombre de facteurs, en particulier, la possibilité que la requête proposée respecte les critères de l'article 3 des Règles en épargnant du temps et de l'argent, en accélérant la procédure vers une conclusion plus juste ainsi que la possibilité que la procédure, même si elle progresse, soit simplifiée.

[3]                 L'action elle-même en l'espèce concerne la fusion de la bande de Prophet River à la bande de Fort Nelson ainsi que leur séparation subséquente dans une région couverte par le Traité no 8. Bien que les demandeurs ne contestent pas la légalité de la séparation ou de la rupture en soi, ils prétendent que la défenderesse a agi frauduleusement, qu'elle a fait preuve de négligence ou qu'elle a violé son obligation fiduciaire en approuvant la rupture malgré le fait qu'elle était au courant des faiblesses du processus référendaire et des conditions inéquitables de la rupture. En conséquence, les demandeurs invoquent un droit non éteint dans leur part per capita de la forêt, du pétrole et des activités gazéifères de la réserve de Fort Nelson et réclament des dommages-intérêts de la défenderesse à titre de compensation de ce droit.

[4]                 La question qui est proposée devrait être énoncée comme une question devant être déterminée par la Cour ou, comme je l'ai dit, subsidiairement comme une question devant être séparée du procès principal et il s'agit de la suivante :

[traduction]

Le bulletin référendaire qui aurait été utilisé lors du référendum sur la fusion avec la bande indienne de Fort Nelson, laquelle serait survenue entre la réserve indienne no 2 de Fort Nelson et la réserve indienne no 4 de Prophet River le 29 novembre 1973 a-t-il pour effet d'éteindre tout droit juridique de la bande indienne de Prophet River dans les terres de réserve de la bande indienne de Fort Nelson?

  

[5]                 Dans les documents accompagnant la requête se trouve une copie de ce qui aurait été le bulletin utilisé lors du référendum et qui est ainsi rédigée :

[traduction]

Que la bande indienne de Fort Nelson soit divisée en deux bandes afin de former une autre bande distincte qui sera connue sous le nom de la bande de Prophet River. La bande de Fort Nelson conservera les réserves composées de 23 523,2 acres, et la bande de Prophet River Band recevra la réserve no 4 composée d'environ 924 acres. Les fonds de la bande de Fort Nelson seront divisés entre les deux bandes en fonction du nombre d'habitants.

  

[6]                 Les demandeurs déclarent qu'il s'agit d'une pure question de droit qui revient à se demander si la question référendaire suffisait à éteindre leurs droits dans la réserve de Fort Nelson. Ils affirment qu'il s'agit d'une simple question, laquelle peut recevoir une simple réponse affirmative ou négative, sans restrictions, et qu'au moins une réponse possible entraînera vraisemblablement une économie considérable de temps et d'argent et qu'elle mènera vraisemblablement à un règlement.


[7]                 Je ne suis pas d'accord. En toute déférence, l'approche des demandeurs est beaucoup trop simpliste. La détermination de la question de savoir si les droits des demandeurs dans la réserve de Fort Nelson ont été éteints lors de la rupture de 1973 dépendra, du moins en partie, d'un certain nombre de questions autres que celle du référendum. En particulier, la Cour devra décider d'abord quels étaient les droits des demandeurs et elle devra examiner l'ensemble des circonstances entourant la rupture. Les cours, de la Cour suprême du Canada aux instances inférieures, ont toujours insisté sur la nécessité d'avoir un cadre factuel avant de décider de toute question se rapportant à l'existence ou à l'étendue des droits ancestraux, et l'on peut indubitablement dire la même chose de leur extinction. En outre, même si la question proposée recevait une réponse ainsi que le souhaiteraient les demandeurs, soit une réponse négative, cela ne serait pas déterminant relativement à la question de savoir s'ils avaient des droits et si ces droits ont été éteints par la rupture.

[8]                 Même si la question référendaire s'avérait, comme le souhaiteraient clairement les demandeurs, inadéquate, la Cour pourrait néanmoins la considérer pertinente à la question ultime de savoir si des droits ont été éteints.

[9]                 En conséquence, à mon avis, la question proposée n'aura aucun effet avantageux sur l'affaire en instance et je suis d'avis de rejeter la requête.


[10]            Les dépens en l'instance sont adjugés à la défenderesse.

  

                                                                                                                                  « James K. Hugessen »    

                                                                                                                                                                 Juge                       

Ottawa, Ontario

Le 17 avril 2002

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                               SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                                 AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                                                   

  

DOSSIER :                                            T-705-97

INTITULÉ :                                           LE CHEF LIZA WOLF ET AL. c.

SA MAJESTÉ LA REINE

  

LIEU DE L'AUDIENCE :                   VANCOUVER

DATE DE L'AUDIENCE :                 LE 11 AVRIL 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : MONSIEUR LE JUGE HUGESSEN

DATE DES MOTIFS :                        LE 17 AVRIL 2002

   

COMPARUTIONS :

JEFFREY RATH                                                        POUR LES DEMANDEURS

ALLISUN RANA                                                    

JANE LUKE                                                              POUR LA DÉFENDERESSE

PATRICK WALKER                                               

   

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

RATH & CO.

Priddis (Alberta)                                                          POUR LES DEMANDEURS

MORRIS ROSENBERG

Sous-procureur général du Canada                           POUR LA DÉFENDERESSE

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