Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20021004

Dossier : DES-2-02

Référence neutre : 2002 CFPI 1044

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

- et -

NICHOLAS RIBIC

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DE L'ONTARIO

défendeurs

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

(Prononcés à l'audience le 4 octobre 2002 à Ottawa (Ontario))

LE JUGE HUGESSEN

[1]                Le procureur général du Canada a demandé à la Cour d'empêcher la communication d'un unique document qui est en la possession des Forces canadiennes. Le contexte de la présente demande et des accusations qui pèsent à l'heure actuelle contre l'accusé, M. Ribic, a déjà été exposé dans les deux jugements qui ont été rendus par la Cour, et je n'y reviendrai pas.

[2]                La présente demande met en jeu un document unique comprenant deux pages seulement. La première page a été presque complètement communiquée au défendeur, M. Ribic, et les renseignements qui ne lui ont pas été communiqués et que j'ai vus ne présentent aucun intérêt pour lui : il s'agit d'éléments d'information banals qu'ils ne tient absolument pas à examiner, comme il l'a précisément signalé.

[3]                La deuxième page a beaucoup plus d'importance. Il s'agit d'une feuille de transmission accompagnant une photographie aérienne. Elle ne fait pas partie des documents et il n'est pas question de la produire puisqu'elle est absente du dossier. L'objection est fondée sur le fait que cette feuille de transmission émane d'un pays tiers avec lequel le Canada maintient des relations amicales et coopère étroitement en matière de sécurité et de renseignement.

[4]                L'objection est fondée sur le fait que ce document a été obtenu par les Forces canadiennes sous le sceau du secret et que le Canada a promis au gouvernement de ce pays tiers que ces documents resteraient secrets. On me dit que, si le Canada révélait ce document aujourd'hui, cela mettrait en péril l'avenir des relations et le maintien de la coopération et de la collaboration entre les services de sécurité des deux gouvernements.

[5]                Je suis d'avis que ce document pourra être pertinent quant aux moyens de défense que pourra faire valoir l'accusé relativement aux accusations qui pèsent contre lui. Il se rapporte de près aux questions qui seront en jeu au procès, en ce qui concerne le moment de la journée, de la date et du lieu géographique où se seraient produits les faits. Je ne peux pas dire exactement de quelle manière l'accusé pourra l'utiliser pour assurer sa défense, mais je ne peux pas dire non plus qu'il ne lui sera pas utile.

[6]                Je dois donc en l'occurrence concilier les deux intérêts publics en jeu.

[7]                Je n'ai nul besoin de m'étendre sur le fait qu'il y va de l'intérêt public d'assurer à la personne accusée d'un crime très grave une défense pleine et entière. Ni non plus sur le fait qu'il y va de l'intérêt public que le Canada maintienne des rapports étroits, confidentiels et amicaux avec des États tiers amis. Cependant, il y a en l'espèce un autre facteur, que j'estime être déterminant. Comme je l'ai dit, les Forces canadiennes ont obtenu le document en question en s'engageant à en conserver la confidentialité. Cela s'est passé il y a environ 7 ans. Lorsqu'il est devenu manifeste que ce document pût être nécessaire et que l'on voulût le produire dans le cadre de l'instance pendante visant M. Ribic, on a contacté les autorités en question afin de leur demander si elles conviendraient de le rendre disponible, ou au moins une version expurgée de celui-ci. On me dit n'avoir reçu aucune réponse et que l'on a bien contacté les autorités concernées à plusieurs reprises, la dernière fois ce matin même. On me dit qu'on leur a alors signalé que le procès pénal devait commencer devant la Cour supérieure le 30 septembre de cette année.

[8]                Je suis d'avis que je suis en droit de tirer les conséquences du mutisme de l'État étranger face à ces demandes. Je n'irais sans doute pas jusqu'à dire que ce gouvernement a perdu tout intérêt pour le caractère secret et confidentiel de ces communications; cependant, je peux dire avec assurance que cela n'a manifestement plus une grande importance à ses yeux aujourd'hui. Si c'était le cas, il se serait déjà manifesté.

[9]                En résumé, je suis d'avis que l'intérêt public dans la communication des parties pertinentes du document en question l'emporte sur l'intérêt public à en préserver la confidentialité. Au regard de cette conclusion, j'ai examiné le document et j'ordonnerai la communication d'une partie de celui-ci, mais pas de la totalité. Rien de ce qui figure dans le document au-dessus de l'intitulé ne sera communiqué; en effet, il s'agit du genre de renseignements qui ne doivent pas l'être, comme je l'ai déjà conclu et, comme je l'ai signalé il y a quelques minutes, les défendeurs ont dit que ceux-ci ne présentent aucun intérêt pour eux.

[10]            Le titre de ce document, qui a 3 lignes, sera communiqué ainsi que le premier passage formant un paragraphe complet qui est très court et qui est intitulé [TRADUCTION] « Sommaire » , et le deuxième paragraphe qui est plus long et qui est intitulé [TRADUCTION] « Analyse » . La confidentialité de tout ce qui suit le paragraphe consacré à l' « Analyse » sera maintenue.

[11]            Je rendrai donc une ordonnance en ce sens.

« James K. Hugessen »

Juge

Ottawa (Ontario)

Le 4 octobre 2002

Traduction certifiée conforme

François Brunet, LL.B., B.C.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     DES-2-02

INTITULÉ :                                                    LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                        c.

                                                                        NICHOLAS RIBIC ET AL.

LIEU DE L'AUDIENCE :                              OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE 4 OCTOBRE 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE RENDUE PAR LE JUGE HUGESSEN

DATE DES MOTIFS :                                   LE 4 OCTOBRE 2002

COMPARUTIONS:

Alain Préfontaine                                               POUR LE DEMANDEUR

Heather Perkins-McVey                                    POUR LE DÉFENDEUR

                                                                        NICHOLAS RIBIC

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Morris Rosenberg                                              POUR LE DEMANDEUR

Sous-procureur général du Canada

Heather Perkins-McVey                                    POUR LE DÉFENDEUR

Ottawa (Ontario)                                               NICHOLAS RIBIC

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.