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Date : 2005 0601

Dossier : T-713-04

Référence : 2005 CF 785

Ottawa (Ontario), le 1er juin 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O'KEEFE

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

requérant

et

HOYEE FLORA LEE

intimée

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE O'KEEFE

[1]         Il s'agit d'un appel interjeté par le ministre en application de l'article 21 de la Loi sur les cours fédérales, L. R. 1985, ch. F-7, et du paragraphe 14 (5) de la Loi sur la citoyenneté, L. R.C. 1985, ch. C-29 (la Loi), à l'encontre d'une décision datée du 2 février 2004 d'un juge de la citoyenneté qui accueillait la demande de citoyenneté canadienne de l'intimée.

[2]        Le requérant demande une ordonnance annulant la décision du juge de citoyenneté datée du 2 février 2004 ainsi qu'une ordonnance rendant la décision qui aurait dû être prise par le juge de citoyenneté, c'est-à-dire rejetant la demande de citoyennetécanadienne de l'intimée.


Historique

[3]         Mme Hoyee Flora Lee (l'intimée) est une ressortissante de la République populaire de Chine. Entre 1982 et 1985, elle a étudié à l'universitéde Windsor. Puis, elle est retournée à

Hong Kong pour étudier et elle a obtenu une maîtrise. Elle est rentrée au Canada en juillet 1991 et, en août 1991, elle a épousé son mari. Elle a obtenu le statut de résidente permanente au Canada le 11 octobre 1993. De septembre 1994 à décembre 2002, l'intimée a suivi des études de doctorat au séminaire de théologie Fuller, en Californie. Pendant qu'elle suivait ses cours en Californie, l'intimée disposait d'un permis de retour pour résident permanent. Le 12 février 2003, l'intimée a demandé la citoyenneté canadienne, tout en indiquant qu'au cours des quatre années précédant la date de la demande, elle avait été au Canada pendant 45 jours et absente du Canada pendant 1 415 jours. La demande de citoyenneté de l'intimée a été approuvée le 2 février 2004.

[4]         Le présent appel a été interjetécontre cette décision.

Les motifs de la décision du juge de la citoyenneté

[5]         Pour décider si l'intimée satisfaisait aux critères de résidence, y compris la centralisation du mode d'existence, le juge de la citoyenneté s'est servi du critère à six volets de l'arrêt Koo (Re), [1993] 1 C.F. 286 [1re inst.]. Voici son analyse :

La personne était-elle physiquement présente au Canada durant une période prolongée avant de s'absenter juste avant la date de sa demande de citoyenneté? Les absences sont-elles pour la plupart récentes et se sont-elles produites immédiatement avant la demande de citoyenneté ?

Elle a été au Canada pendant deux ans avant de partir étudier aux États-Unis, les études pour lesquelles elle partait ne pouvaient être effectuées au Canada.

Où résident la famille proche et les personnes à charge (ainsi que la famille étendue) du requérant?


Le mari se trouve au Canada. Ses parents : père décédé, mère vit à Hong Kong. Soeur et frère sont à Hong Kong.

La forme de présence physique de la personne au Canada dénote-t-elle que cette dernière revient dans son pays ou, alors, qu'elle n'est qu'en visite?

Elle est au Canada depuis qu'elle a terminé ses études, c'est-à -dire en décembre 2002.

Quelle est l'étendue des absences physiques (nombre de jours en dehors du Canada par rapport au nombre de jours au Canada)?

46 jours au Canada et 1414 jours en dehors du Canada.

L'absence physique est-elle imputable à une situation manifestement temporaire (par exemple, avoir quitté le Canada pour travailler comme missionnaire, suivre des études, exécuter un emploi temporaire ou accompagner son conjoint, qui a accepté un emploi temporaire à l'étranger)?

Elle était absente pendant qu'elle étudiait. Elle a terminé. Elle veut établir sa propre clinique de psychologie à Van.

Quelle est la qualité des attaches du requérant avec le Canada: sont-elles plus importantes que celles qui existent avec un autre pays?

Elle adore le Canada, elle a épousé un Canadien.

[6]         Le juge de la citoyenneté a ensuite pris la décision suivante :

Décision

Elle a été au Canada pendant 730 jours avant de partir dans une école spécialisée étudier les blessures à la tête. Lorsqu'elle a terminé sa scolarité, elle est rentrée au Canada. Elle est ici depuis plus d'une année. Elle veut établir un commerce au Canada, ce qu'elle est incapable de faire si elle n'est pas citoyenne canadienne. J'approuve sa demande de citoyenneté canadienne en application du paragraphe 5(4). Elle serait très utile au Canada en raison de sa connaissance des blessures à la tête.

Les questions en litige telles que formulées par le requérant

[7]         1.          Le juge de la citoyenneté a-t-il commis une erreur de droit en approuvant la demande de Mme Lee en application du paragraphe 5(4) de la Loi alors qu'il n'était pas habilité à le faire ?

2.        Le juge de la citoyenneté a-t-il commis une erreur en décidant que Mme Lee avait satisfait aux critères de résidence pour obtenir la citoyenneté canadienne?


Les observations du requérant

[8]         La norme de contrôle

Le requérant a prétendu que la question de l'habilitation en application du paragraphe 5(4) de la Loi en est une de droit et, par conséquent, que la norme de contrôle est la décision correcte (voir Wang c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration), [2000] A.C.F. n0 1030 (1er inst.) (QL).

[9]        Le requérant a également prétendu qu'en ce qui concerne l'exigence de résidence, la Cour a jugé récemment que la norme de contrôle de la décision d'un juge de la citoyenneté est celle de la décision raisonnable simpliciter (voir Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration) c. Fu, [2004] A.C.F. n0 88 (1re inst.) (QL)).

[10]       La première question en litige

            Le requérant a prétendu qu'en tentant d'accueillir la demande en application du

paragraphe 5(4) de la Loi, le juge de la citoyenneté a outrepassé sa compétence. En vertu de l'article 15 de la Loi, un juge de la citoyenneté est habilité à recommander au ministre d'exercer son pouvoir discrétionnaire en application du paragraphe 5(4) de la Loi pour approuver une demande de citoyenneté. Seul le gouverneur en conseil est habilité à ordonner l'attribution de la citoyenneté en application du paragraphe 5(4) de la Loi.


[11]       La seconde question en litige

Le requérant a prétendu que celui ou celle qui demande la citoyenneté doit satisfaire à deux critères pour répondre aux exigences de résidence prévues à l'alinéa 5 (1) c) de la Loi; i) le demandeur doit prouver la centralisation au Canada de son mode de vie avant de quitter le Canada et ii) le demandeur doit conserver la centralisation au Canada de son mode de vie durant son absence du Canada (Koo (Re), précité; Wu c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration), 2003 CFPI 435).

[12]       Le requérant a prétendu que le juge de la citoyenneté avait commis une erreur en appliquant erronément le critère de l'arrêt Koo (Re), précité, et en n'étudiant pas correctement les six volets énoncés dans cet arrêt. Le juge de la citoyenneté n'a pas analysé correctement la qualitédes relations entre l'intimée et le Canada, ni la centralisation au Canada du mode de vie de l'intimée.

[13]       Le requérant a prétendu qu'en ce qui concerne le troisième volet de l'arrêt Koo (Re), précité, le juge de la citoyenneté s'est contentéde déclarer que l'intimée avait été au Canada depuis la fin de ses études en décembre 2002. Il n'a pas étudié, notamment, des variables comme les retours de l'intimée au Canada après son départ en septembre 1994, les raisons pour lesquelles elle n'était pas retournée, ses efforts pour retourner et enfin si la tendance de ces retours indiquait une simple visite ou bien un retour au domicile.


[14]       En ce qui concerne le quatrième volet de l'arrêt Koo (Re), précité, le juge de la citoyenneté a reconnu que l'intimée n'avait été au Canada que pendant 46 jours, mais il n'a pas pondéré la quantité des absences de l'intimée au regard des autres facteurs.

[15]       En ce qui concerne le sixième cinquième volet de l'arrêt Koo (Re), précité, le juge de la citoyenneté a notésimplement qu'elle aime le Canada et qu'elle a épousé un Canadien. Le juge de la citoyenneté n'a pas étudié la qualité des rapports entre l'intimée et le Canada, ni si ces rapports étaient plus importants avec le Canada qu'avec n'importe quel autre pays.

[16]       Le requérant a prétendu que le permis de retour pour résident permanent décerné en application des dispositions provisoires de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés confirme que l'intimée était une résidente permanente lorsqu'elle a demandé la citoyenneté canadienne. Cependant, cela ne démontre pas que l'intimée avait centralisé au Canada son mode de vie ni conservé ses rapports avec le Canada de manière telle qu'elle serait devenue

« canadianisée » ( voir Wan c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration), 2004 CF 65. La Cour a décidé que les permis de retour pour résident permanent ne sont pas pertinents dans la décision d'un juge de la citoyenneté (Sharma c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration), 2003 CF 1384).

Les observations de l'intimée


[17]       L'intimée a prétendu qu'en vertu des paragraphes 382(2) et (3) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement), elle a satisfait aux exigences en matière de résidence dans la mesure où elle disposait d'un permis de retour pour résident permanent au cours de son absence du Canada pour étudier aux États-Unis. Une résidente permanente ne devrait pas être pénalisée en raison du fait qu'elle poursuit une formation professionnelle de longue durée en dehors du Canada.

[18]       L'intimée a prétendu qu'en ce qui concerne la décision du juge de la citoyenneté d'accueillir sa demande de citoyenneté en application du paragraphe 5(4) de la Loi, la décision était correcte, bien que les motifs de celle-ci puissent avoir été erronés.

[19]       L'intimée a prétendu qu'elle avait conservé ses rapports avec le Canada tout en suivant une formation professionnelle aux États-Unis i) en conservant au Canada des comptes bancaires sur lesquels elle transigeait activement, ii) en demandant le permis de retour pour résident permanent depuis qu'elle a repris les études supérieures aux États-Unis, iii) en rendant des visites au Canada, comme l'indiquent les dates timbrées sur son ancien certificat d'identité délivré par le gouvernement de Hong Kong en 1990 et iv) en demandant à son mari d'ouvrir un local d'entreposage de leurs meubles en 1998, de manière à être en mesure de meubler leur domicile lors de son retour à Vancouver.

[20]       L'intimée a prétendu que ce que l'on qualifie de « canadianisation » dépend des expériences d'un individu au Canada et des rapports de celui-ci avec le Canada. L'intimée a prétendu qu'elle est réellement « canadianisée » en raison de sa formation de premier cycle au Canada durant sa vingtaine, de sa vie au Canada et de son expérience et de sa formation en Amérique du Nord pendant une longue période.


[21]       L'intimée a prétendu que les motifs de sa longue absence du Canada étaient valables. Elle a effectué ses études doctorales dans une école de cycle supérieur de son choix aux États-Unis (la Fuller Theological Seminary Graduate School of Psychology). En outre, en 1993 elle a été blessée dans un accident d'automobile, ce qui a ralenti ses études et, en 2001, son directeur d'études a démissionné, ce qui l'a obligée à abandonner son projet et à attendre le retour de congé sabbatique d'un nouveau directeur d'études. Elle a essayéen 1993 d'obtenir un transfert dans une université canadienne, mais on lui a dit qu'elle serait obligée de reprendre à zéro sa formation clinique.

[22]       L'intimée a prétendu que son adresse à Scarborough, en Ontario, n'est pas une simple adresse postale.

Les dispositions législatives pertinentes

[23]       Voici les libellés respectifs des paragraphes 5(1), 5(4) et 15(1) de la Loi sur la citoyenneté, de l'article 28 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, 2001, ch. 27 (la Loi sur l'immigration), et de l'article 328 du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés :


5. (1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois:

a) en fait la demande;

b) est âgée d'au moins dix-huit ans;

c) est un résident permanent au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante:

. . .

(4) Afin de remédier à une situation particulière et inhabituelle de détresse ou de récompenser des services exceptionnels rendus au Canada, le gouverneur en conseil a le pouvoir discrétionnaire, malgré les autres dispositions de la présente loi, d'ordonner au ministre d'attribuer la citoyenneté à toute personne qu'il désigne; le ministre procède alors sans délai à l'attribution.

15. (1) Avant de rendre une décision de rejet, le juge de la citoyenneté examine s'il y a lieu de recommander l'exercice du pouvoir discrétionnaire prévu aux paragraphes 5(3) ou (4) ou 9(2), selon le cas.

5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who

(a) makes application for citizenship;

(b) is eighteen years of age or over;

(c) is a permanent resident within the meaning of subsection 2(1) of the Immigration and Refugee Protection Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his or her application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:

. . .

(4) In order to alleviate cases of special and unusual hardship or to reward services of an exceptional value to Canada, and notwithstanding any other provision of this Act, the Governor in Council may, in his discretion, direct the Minister to grant citizenship to any person and, where such a direction is made, the Minister shall forthwith grant citizenship to the person named in the direction.

15. (1) Where a citizenship judge is unable to approve an application under subsection 14(2), the judge shall, before deciding not to approve it, consider whether or not to recommend an exercise of discretion under subsection 5(3) or (4) or subsection 9(2) as the circumstances may require.


28. (1) L'obligation de résidence est applicable à chaque période quinquennale.

(2) Les dispositions suivantes régissent l'obligation de résidence:

a) le résident permanent se conforme à l'obligation dès lors que, pour au moins 730 jours pendant une période quinquennale, selon le cas:

(i) il est effectivement présent au Canada,

(ii) il accompagne, hors du Canada, un citoyen canadien qui est son époux ou conjoint de fait ou, dans le cas d'un enfant, l'un de ses parents,

(iii) il travaille, hors du Canada, à temps plein pour une entreprise canadienne ou pour l'administration publique fédérale ou provinciale,

(iv) il accompagne, hors du Canada, un résident permanent qui est son époux ou conjoint de fait ou, dans le cas d'un enfant, l'un de ses parents, et qui travaille à temps plein pour une entreprise canadienne ou pour l'administration publique fédérale ou provinciale,

(v) il se conforme au mode d'exécution prévu par règlement;

b) il suffit au résident permanent de prouver, lors du contrôle, qu'il se conformera à l'obligation pour la période quinquennale suivant l'acquisition de son statut, s'il est résident permanent depuis moins de cinq ans, et, dans le cas contraire, qu'il s'y est conformé pour la période quinquennale précédant le contrôle;

28. (1) A permanent resident must comply with a residency obligation with respect to every five-year period.

(2) The following provisions govern the residency obligation under subsection (1):

(a) a permanent resident complies with the residency obligation with respect to a five-year period if, on each of a total of at least 730 days in that five-year period, they are

(i) physically present in Canada,

(ii) outside Canada accompanying a Canadian citizen who is their spouse or common-law partner or, in the case of a child, their parent,

(iii) outside Canada employed on a full-time basis by a Canadian business or in the public service of Canada or of a province,

(iv) outside Canada accompanying a permanent resident who is their spouse or common-law partner or, in the case of a child, their parent and who is employed on a full-time basis by a Canadian business or in the public service of Canada or of a province, or

(v) referred to in regulations providing for other means of compliance;

(b) it is sufficient for a permanent resident to demonstrate at examination

(i) if they have been a permanent resident for less than five years, that they will be able to meet the residency obligation in respect of the five-year period immediately after they became a permanent resident;


c) le constat par l'agent que des circonstances d'ordre humanitaire relatives au résident permanent - compte tenu de l'intérêt supérieur de l'enfant directement touché - justifient le maintien du statut rend inopposable l'inobservation de l'obligation précédant le contrôle.

(ii) if they have been a permanent resident for five years or more, that they have met the residency obligation in respect of the five-year period immediately before the examination; and

(c) a determination by an officer that humanitarian and compassionate considerations relating to a permanent resident, taking into account the best interests of a child directly affected by the determination, justify the retention of permanent resident status overcomes any breach of the residency obligation prior to the determination.

[24]       Et voici le libellé de l'article 328 du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés :

328. (1) La personne qui était un résident permanent avant l'entrée en vigueur du présent article conserve ce statut sous le régime de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.

(2) Toute période passée hors du Canada au cours des cinq années précédant l'entrée en vigueur du présent article par la personne titulaire d'un permis de retour pour résident permanent est réputée passée au Canada pour l'application de l'exigence relative à l'obligation de résidence prévue à l'article 28 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés pourvu qu'elle se trouve comprise dans la période quinquennale visée à cet article.

328. (1) A person who was a permanent resident immediately before the coming into force of this section is a permanent resident under the Immigration and Refugee Protection Act.

(2) Any period spent outside Canada within the five years preceding the coming into force of this section by a permanent resident holding a returning resident permit is considered to be a period spent in Canada for the purpose of satisfying the residency obligation under section 28 of the Immigration and Refugee Protection Act if that period is included in the five-year period referred to in that section.


(3) Toute période passée hors du Canada au cours des deux années suivant l'entrée en vigueur du présent article par la personne titulaire d'un permis de retour pour résident permanent est réputée passée au Canada pour l'application de l'exigence relative à l'obligation de résidence prévue à l'article 28 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés pourvu qu'elle se trouve comprise dans la période quinquennale visée à cet article.

(3) Any period spent outside Canada within the two years immediately following the coming into force of this section by a permanent resident holding a returning resident permit is considered to be a period spent in Canada for the purpose of satisfying the residency obligation under section 28 of the Immigration and Refugee Protection Act if that period is included in the five-year period referred to in that section.

Analyse et décision

[25]       La norme de contrôle

La norme de contrôle qui doit être appliquée à la question de compétence est la décision correcte, et la norme de contrôle qui doit être appliquée à la décision du juge de la citoyenneté en ce qui concerne les exigences de résidence est celle de la décision raisonnable simpliciter (voir Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan, [2003] 1 R.C.S. 247, et Dr Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226).

[26]       Je me pencherai en premier lieu sur la seconde question en litige.

Le juge de la citoyennetéa-t-il commis une erreur en décidant que Mme Lee avait     satisfait aux critères de résidence pour obtenir la citoyennetécanadienne?

Au cours des quatre années précédant immédiatement sa demande de citoyenneté, l'intimée n'avait résidé au Canada que 45 (ou 46) jours. L'alinéa 56(1)c) de la Loi exige que le demandeur soit un résident permanent et qu'il ait accumulé au moins trois années (1 095 jours) de résidence au Canada dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande.


[27]       L'intimée a prétendu qu'en raison de sa possession d'un permis de retour pour résident permanent, l'article 328 du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés présume effectivement qu'elle était résidente du Canada au cours de son absence et que, en conséquence, elle satisfait aux exigences de résidence pour les fins de la citoyenneté. Je ne suis pas d'accord avec l'intimée. L'article 328 du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés est provisoire et vise uniquement le respect des obligations en matière de résidence prévues à

l'article 28 de la Loi sur l'immigration pour permettre aux détenteurs de permis de retour pour résident permanent de conserver le statut de résident permanent. Cette disposition n'a rien à voir avec les exigences de résidence aux fins de l'obtention de la citoyenneté.

[28]       La Loi sur la citoyenneté, précitée, exige, pour l'attribution de la citoyenneté, la résidence permanente au Canada ainsi que l'accumulation de 1 095 jours de résidence au Canada dans les quatre années précédant la demande de citoyenneté. L'intimée devait donc prouver qu'elle satisfaisait aux conditions de résidence en ayant résidé effectivement 40 jours au Canada au cours des quatre années précédant immédiatement sa demande.

[29]       Au cours de la période pertinente, du 12 février 1999 au 12 février 2003, l'intimée n'a résidé que 46 jours au Canada. Pour être en mesure d'accorder la citoyenneté à l'intimée, le juge de la citoyenneté aurait été obligé de conclure que celle-ci avait centralisé son mode de vie au Canada avant de rentrer aux États-Unis pour ces études, et qu'elle avait poursuivi cette centralisation de son mode de vie au cours de son absence.


[30]       Le juge de la citoyenneté a appliqué les volets de l'arrêt Koo (Re) pour décider si le Canada était le pays dans lequel l'intimée avait centralisé son mode de vie et poursuivi cette centralisation. Je suis d'avis que le juge de la citoyenneté doit effectuer une analyse complète de tous les volets de l'arrêt Koo (Re), notamment parce que l'intimée n'a résidé effectivement Canada que 46 jours au cours des quatre années précédant sa demande.

[31]       En ce qui concerne le troisième volet de l'analyse établie dans l'arrêt Koo (Re), en l'occurrence « La forme de présence physique de la personne au Canada dénote-t-elle que cette dernière revient dans son pays ou, alors, qu'elle n'est qu'en visite? » , le juge de la citoyenneté a écrit : [Traduction] « Elle est au Canada depuis qu'elle a terminéses études, c'est-à -dire en décembre 2002 » .

[32]       Le juge de la citoyenneté s'est abstenu de fournir quelque analyse que ce soit de la période au cours de laquelle intimée se trouvait en dehors du pays depuis 1994 (ou à tout le moins au cours de l'ensemble des quatre années précédant sa demande de citoyenneté). La seule période qu'il a étudiée était la courte période qui a précédé immédiatement sa demande. Sa présence physique au Canada au moment de la demande ne constitue pas une réponse à la question concernant la forme de présence physique au cours de la période de quatre années en question. Le juge de la citoyenneté s'est abstenu de se pencher sur les questions concernant l'existence et la fréquence des retours de l'intimée au Canada au cours des quatre années précédentes.

[33]       En ce qui concerne le sixième volet, en l'occurrence « Quelle est la qualité des attaches du requérant avec le Canada : sont-elles plus importantes que celles qui existent avec un autre


pays? » , le juge de la citoyenneté a écrit : [Traduction] « Elle adore le Canada, elle a épousé un Canadien. »

[34]       Le fait que l'intimée « adore le Canada » et qu' « elle a épousé un Canadien » ne répond pas àla question concernant la qualité de ses attaches envers le Canada, ni à la question concernant l'importance de ses attaches au Canada par rapport aux siennes avec d'autres pays. Par exemple, le mariage avec un citoyen canadien ne constitue pas, en soi, une preuve prima facie de l'existence d'attaches entre une personne et le Canada qui sont plus importantes que ses attaches avec tout autre pays. Le juge de la citoyennetés'est abstenu de faire l'analyse nécessaire.

[35]       À mon avis, le juge de la citoyenneté ne s'est pas livré à l'analyse complète de la totalité des volets qu'il était obligé de faire. J'estime que le juge de la citoyenneté a commis une erreur en ne se livrant à une analyse correcte de tous les volets de l'arrêt Koo (Re).

[36]       Compte tenu de mes conclusions relatives à la seconde question en litige, il ne m'est pas nécessaire de traiter la première.

[37]       Par conséquent, l'appel interjeté par le requérant est accueilli et l'affaire est renvoyée à un autre juge de la citoyenneté pour nouvelle décision.


ORDONNANCE

[38]       LA COUR ORDONNE QUE l'appel du requérant soit accueilli, que la décision du juge de la citoyenneté soit annulée et que l'affaire soit renvoyée pour nouvelle décision à un autre juge de la citoyenneté.

« John A. O'Keefe »

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Juge           

Ottawa (Ontario)

Le 1er juin 2005

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                       IMM-713-04

INTITULÉ:                                        LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

c.

HOYEE FLORA LEE

LIEU DE L'AUDITION :                  Vancouver (Colombie-britannique)

DATE DE L'AUDITION :                LE 10 MARS 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE O'KEEFE

DATE DES MOTIFS :                      LE 1ER JUIN 2005

COMPARUTIONS :

Caroline Christiaens                          POUR LE REQUÉRANT

Hoyee Flora Lee                                INTIMÉE (pour son propre compte)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

John Sims, c.r.                                    POUR LE REQUÉRANT

Sous-procureur général du Canada

Hoyee Flora Lee                                INTIMÉE (pour son propre compte)

Vancouver (Colombie-britannique)

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